CONFÉRENCE DE PRESSE DE MARTIN SCHEININ, RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LA PROMOTION ET LA PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES DANS LE CADRE DE LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME
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CONFÉRENCE DE PRESSE DE MARTIN SCHEININ, RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LA PROMOTION ET LA PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES DANS LE CADRE DE LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME
Les demandeurs d’asile, les réfugiés et les migrants constituent le groupe le plus largement affecté par les mesures antiterroristes, a estimé cet après midi M. Martin Scheinin, Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, lors d’une conférence de presse au Siège des Nations Unies à New York. Professeur de droit international, Directeur de l’Institut des droits de l’homme de l’Université Abo Akademi de Turku, en Finlande, M. Scheinen occupe cette fonction depuis la création de la procédure spéciale thématique sur cette question par la Commission des droits de l’homme, en 2005.
Les procédures spéciales thématiques étaient, en juin 2006, au nombre de 28. Selon le manuel éponyme publié par les Nations Unies, elles ont pour mandat d’enquêter sur la situation des droits de l’homme dans toutes les régions du monde, indépendamment de la question de savoir si tel ou tel État est partie à l’un ou l’autre des traités de droits de l’homme pertinents. Les mandats de Rapporteur spécial sont attribués à des personnalités qualifiées qui exercent leurs fonctions à titre personnel, ne sont pas membres du personnel de l’ONU, et ne reçoivent aucune rémunération en contrepartie de leur travail, bien que leurs dépenses soient remboursées par l’Organisation. Elles ne peuvent effectuer de visites de terrain qu’à l’invitation d’un pays.
M. Scheinin, qui a présenté ce matin son rapport annuel devant la Troisième Commission de l’Assemblée générale, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a expliqué qu’il avait axé son travail cette année sur les effets des mesures antiterroristes sur le droit des réfugiés. Les mesures de lutte contre le terrorisme ont de nombreuses autres implications, tels que le ciblage systématique de certains groupes ethniques ou religieux, ou encore la torture, les traitements dégradants, la détention arbitraire pour les personnes suspectées de terrorisme. Les demandeurs d’asile, a-t-il cependant rappelé, méritent une attention particulière parce qu’ils sont les plus négativement affectés.
Il s’est dit particulièrement préoccupé par les détentions automatiques et illimitées pour les demandeurs d’asile et a rappelé que le droit à un contrôle judiciaire pour toute détention était un pilier de la protection des droits de l’homme. Il a également recommandé que toute détention dans un cas d’immigration fasse obligatoirement l’objet d’une décision en référé après 48 heures. Il a par ailleurs déploré que de nombreux gouvernements contestent désormais le principe de non-refoulement en cas de risque de torture, de traitements cruels et inhumains, de condamnation à mort, sous prétexte d’« assurances diplomatiques » données par le pays de départ, lors du renvoi d’une personne suspectée de terrorisme.
Cette notion nouvelle est largement contestée par les défenseurs des droits de l’homme, a-t-il dit. Il a estimé que les assurances diplomatiques ne pourraient jamais remplacer l’évaluation, par les autorités judiciaires du pays qui veut expulser, des risques encourus par la personne à expulser.
M. Scheinin a rendu compte des missions qu’il a effectuées cette année, en Afrique du Sud en avril, aux États-Unis en mai et en Israël et dans les territoires palestiniens occupés en juillet. Concernant les États-Unis, il a salué l’engagement des autorités américaines à travailler pour parvenir à la fermeture du camp de détention militaire de Guantanamo Bay. Dans la perspective de la libération, du rapatriement et de la réinstallation des prisonniers, il a proposé que d’autres pays se portent volontaires pour accueillir les anciens détenus de Guantanamo qui ne feraient pas l’objet de poursuites pénales et ne peuvent pas être renvoyés dans leur pays.
Concernant Israël et les territoires palestiniens, le Rapporteur spécial a fait part de sa préoccupation quant à la construction de ce qu’il a appelé la « barrière-clôture-mur », présentée par Israël comme un instrument de lutte contre le terrorisme, mais dont il a dit avoir constaté l’impact négatif sur les droits et libertés fondamentales des Palestiniens. Il a invité Israël à remplacer la barrière ou au moins à en atténuer les effets les plus criants sur les droits de l’homme. La barrière atteste du fait que les mesures antiterroristes peuvent affecter, non seulement les droits civils et politiques, mais aussi les droits économiques, sociaux et culturels, a-t-il ajouté, en citant la santé, l’alimentation et l’éduction. Il s’est également inquiété de la pratique des attentats ciblés.
Interrogé sur ses liens avec le Comité contre le terrorisme (CCT) du Conseil de sécurité, créé par la résolution 1373 du 28 septembre 2001, le Rapporteur spécial a expliqué que son propre mandat avait été établi par la Commission des droits de l’homme parce qu’elle estimait que le CCT ne prenait pas suffisamment en compte la dimension des droits de l’homme. Il s’est dit cependant encouragé par l’évolution du CCT, qui souhaite désormais instaurer un dialogue avec les défenseurs des droits de l’homme et inclure cette dimension dans ses rapports. Il a noté que le CCT avait dit s’être appuyé sur son propre rapport lors de sa récente visite en Turquie. Il a à son tour promis de s’appuyer sur le rapport du CCT pour sa visite aux Philippines, prévue prochainement.
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