ASSEMBLÉE GÉNÉRALE: LES PAYS EUROPÉENS ET MUSULMANS PRÉSENTENT LES INITIATIVES PRISES AUX NIVEAUX NATIONAL ET RÉGIONAL POUR RÉCONCILIER LES GRANDES RELIGIONS
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Assemblée générale
Soixante-deuxième session
18e et 19e séances plénières
Matin et après-midi
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE: LES PAYS EUROPÉENS ET MUSULMANS PRÉSENTENT LES INITIATIVES PRISES AUX NIVEAUX NATIONAL ET RÉGIONAL POUR RÉCONCILIER LES GRANDES RELIGIONS
L’Assemblée générale a poursuivi le Dialogue de haut niveau qu’elle a entamé hier sur la compréhension entre les religions et les cultures. Les 51 délégations qui se sont exprimées aujourd’hui ont présenté plus précisément les initiatives qu’elles ont prises au niveau régional.
Aussi, les délégations européennes se sont-elles félicitées du fait que 2008 ait été décrétée « Année européenne du dialogue interculturel ». Dans ce cadre, une série de projets concrets seront mis en œuvre, par le biais de programmes et d’actions communautaires, axés sur les domaines de l’éducation, de la culture, de la jeunesse, du sport et de la citoyenneté, conformément à la Stratégie de moyen terme de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).
L’Année représente ainsi, pour mon pays, une occasion unique de mieux comprendre notre unité dans la diversité et de démontrer que les cultures, les religions et les croyances enrichissent nos vies et sont liées par des valeurs universelles, a déclaré le Ministre des affaires étrangères de la Roumanie, rejoint par celui de la Croatie.
Le représentant du Liechtenstein a fait observer que depuis les événements du 11 septembre 2001, l’inquiétude s’est accrue concernant d’éventuelles tensions interculturelles et religieuses. De l’avis de certains, le monde s’achemine inexorablement vers un « choc des civilisations ».
Du fait de la mondialisation, a poursuivi le représentant, les différences entre les cultures et les religions sont devenues chaque fois plus saisissantes, à mesure que les technologies modernes de communication, ainsi que les moyens de transport plus rapides et plus abordables, ont redéfini les contours d’un monde où, chaque jour, des personnes de toutes origines sont confrontées à la possibilité et à la nécessité d’avoir des échanges.
Dans ces conditions, si nous aspirons à jeter les bases de la coopération pour la paix par le biais de la compréhension entre les cultures et les religions, il faudra nous employer à répondre aux craintes et aux inquiétudes relatives à la diversité culturelle et religieuse, a préconisé le représentant, pour qui l’éducation devra jouer un rôle vital. L’importance de l’éducation a été soulignée par toutes les délégations, en particulier les États musulmans.
Leurs délégations ont exprimé leurs préoccupations devant les amalgames dont serait l’objet à leurs yeux l’Islam. Le représentant de l’Algérie a regretté que beaucoup de préjugés aient assombri la compréhension de l’islam en suggérant que cette religion de paix est synonyme d’oppression, d’intolérance, d’extrémisme et de terrorisme. Son homologue jordanien a imputé cette situation « au déclin des gauches du monde entier et à la montée simultanée de formations politiques hostiles à l’islam. » Le représentant de l’Égypte a tout de même condamné les tentatives de certains d’exploiter les religions et les cultures pour justifier la violence.
Au nombre des mesures prises pour remédier à l’incompréhension entre les religions, un groupe de travail a été créé à Amman pour identifier des moyens pratiques de rapprocher les mondes occidental et musulman. Le représentant du Maroc a fait valoir qu’au cours du dernier Sommet de la Ligue arabe qui s’est tenu à Khartoum, son gouvernement a suggéré la rédaction d’une charte internationale dans laquelle l’appui aux lieux saints et aux convictions religieuses serait considéré comme une question prioritaire, tout comme la promotion de la tolérance et le respect mutuel entre l’islam et les autres religions. Le représentant de l’Organisation de la Conférence islamique a quant à lui rappelé la proposition d’élaborer un instrument juridique pour interdire la diffamation des religions et de leurs symboles sacrés.
Toutes les délégations se sont accordées cependant sur le rôle de chef de file que doivent jouer l’ONU et l’Alliance des civilisations dans la coordination des efforts déployés aux niveaux national, régional et international.
Le Dialogue de haut niveau se poursuivra lundi, dans la salle de l’Assemblée générale, à partir de 10 heures.
DIALOGUE DE HAUT NIVEAU SUR LA COMPRÉHENSION ENTRE LES RELIGIONS ET LES CULTURES ET LA COOPÉRATION POUR LA PAIX
Suite des déclarations
M. SEIF ALI IDDI, Vice-Ministre des affaires étrangères de la République-Unie de Tanzanie, a salué le rôle des Nations Unies dans la promotion d’un dialogue interculturel et religieux, et rendu hommage aux Gouvernements de Turquie et d’Espagne pour avoir pris l’initiative de la création de l’Alliance des civilisations. Nous attendons d’ailleurs le rapport de l’Alliance avec impatience, ainsi que son premier forum, qui se tiendra en janvier 2008 à Madrid. Évoquant ensuite la situation dans son pays, M. Iddi a indiqué que la Tanzanie comptait plus d’une centaine de groupes ethniques différents, tous libres d’exercer leurs religions. Au nombre des efforts déployés pour promouvoir l’unité dans la diversité, le Gouvernement a mis l’accent sur l’atout important que constitue une langue commune. Mais la mesure la plus efficace prise par la Tanzanie a été de veiller à ce que les identités religieuses ne soient pas politisées. Des dispositions législatives ont été adoptées en vue d’empêcher l’organisation de formations, telles que des partis politiques, qui fomentent une subversion de l’ordre public en essayant de manipuler des sentiments religieux ou culturels. La Constitution garantit cependant la liberté de religion, a insisté le Ministre. Il convient aussi de souligner l’importance que mon gouvernement attache à la liberté d’expression, dans la limite du respect des autres religions et cultures. La Tanzanie a également encouragé les organisations religieuses à dialoguer entre elles, notamment au travers d’une Commission mixte qui a contribué à renforcer l’entente, a conclu M. Iddi.
M. ANTON NICULESCU, Ministre des affaires étrangères de la Roumanie, a indiqué que son pays considérait le dialogue entre les cultures comme un dialogue entre êtres humains et qu’à ce titre il se félicitait de l’organisation hier d’une audience interactive avec les membres de la société civile. Il a ensuite rappelé que la ville de Sibiu, en Roumanie, avait été désignée, avec Luxembourg, « Capitale européenne de la culture » en 2007, et que la Roumanie était le lieu d’une coexistence pacifique entre les religions et se trouvait située au carrefour de plusieurs grandes cultures européennes. En septembre 2007, la Roumanie a d’ailleurs accueilli pour la première fois de son histoire, la troisième Assemblée œcuménique européenne, qui a non seulement réuni les représentants d’églises européennes, mais aussi de congrégations africaines, américaines et asiatiques, a indiqué le Ministre. M. Niculescu s’est dit convaincu que l’Union européenne pouvait jouer un rôle clef dans la recherche de l’atteinte des objectifs de l’Alliance des civilisations. L’histoire ayant fait de l’Europe un espace multiculturel, le dialogue interculturel est dès lors l’une des priorités du continent, a estimé le Ministre roumain. « L’Année européenne du dialogue interculturel représente ainsi, pour mon pays, une grande opportunité pour mieux comprendre notre unité dans la diversité et démontrer que les cultures, les religions et les croyances enrichissent nos vies et sont liées par des valeurs universelles », a-t-il déclaré. Ce dialogue pourrait en outre contribuer à promouvoir la coopération régionale. Nous avons l’intention de proposer un projet de partenariat avec l’Alliance des civilisations pour promouvoir ce dialogue dans la région de la mer Noire, a ajouté M. Niculescu, en concluant son intervention.
M. HANS ZINKLER, Secrétaire d’État pour les affaires européennes et internationales de l’Autriche, a constaté l’existence de l’intolérance, du racisme et d’autres formes de discrimination qui se manifestent dans tous les pays et même de manière croissante. Selon lui, les nouvelles sont alarmantes: les immigrants et les demandeurs d’asile sont de plus en plus souvent soumis à des brimades et attaqués. Nous ne devons pas laisser le champ libre a ceux qui sèment la discorde et prêchent la haine et l’intolérance, a-t-il poursuivi. Le dialogue est l’élément indispensable pour le maintien de toute démocratie et constitue le préalable pour la coexistence pacifique entre différentes cultures et religions. Nous ne devons pas céder au découragement. Seulement le dialogue peut nous révéler tant ce qui nous unit que ce qui nous irrite.
L’Autriche est résolue à protéger et à promouvoir la diversité culturelle dans une atmosphère de mutuelle tolérance. Nous avons une longue tradition de tribune d’un dialogue constructif entre religions et civilisations. Pendant des années, Vienne a été le centre du dialogue interconfessionnel, particulièrement entre chrétiens et musulmans. L’Autriche continuera sur cette voie car nous savons que nul n’est à l’abri des défis que beaucoup de pays en Europe et ailleurs affrontent. Le Secrétaire d’État a estimé que les Nations Unies restent le seul cadre pour promouvoir un dialogue à une échelle mondiale en mettant en place des normes, y compris des normes juridiques et en restant en première ligne de la protection des droits de l’homme. Les États partagent la responsabilité de lutter contre l’intolérance et la discrimination. Ils doivent créer des cadres juridiques et institutionnels permettant de prévenir la discrimination et dans lesquels, si nécessaire, les transgressions seront en dernier ressort jugées et punies par des tribunaux indépendants. Parallèlement, il faut un leadership politique pour garantir un environnement économique, social et politique, dans le cadre duquel des citoyens libres peuvent exercer leurs droits et sont protégés contre la violence et les agressions. Toutefois, les États ne peuvent assumer seuls cette responsabilité, la société civile et les leaders religieux doivent jouer un rôle important, a ajouté l’intervenant. Selon lui, le dialogue doit être structuré et continu. Il a fait valoir que le Gouvernement autrichien a ainsi récemment lancé, conjointement avec la communauté islamique du pays, une conférence des imams européens à Vienne. La déclaration adoptée à cette occasion souligne clairement la nécessité de développer une identité musulmane européenne et ne laisse aucun doute sur le fait que l’islam, la démocratie, l’état de droit et les libertés fondamentales sont compatibles.
M. ALY MAHER ELSAYED, Représentant spécial du Ministre des affaires étrangères de la République arabe d’Égypte, a déclaré que bien que les religions diffèrent sous certains aspects, elles tendent à partager certaines valeurs et principes tels que le respect des êtres humains et de leur dignité, et dans leur essence rejettent la violence. Rappelant que tant dans l’islam que dans le judaïsme, la formule de salutation contient le mot « paix », et que le christianisme la prône dans ses écrits, il a déploré que certains tentent d’exploiter les religions et les cultures afin de justifier la violence. Seul le dialogue, a-t-il poursuivi, est en mesure de construire des ponts entre les peuples. Le dialogue est la démarche appropriée permettant d’apprendre, de comprendre et de réaliser des buts communs en particulier en cette ère de globalisation.
La paix, a-t-il continué, n’est pas simplement une philosophie ou un principe élevé noble et lointain, c’est un style de vie et le signe d’un comportement civilisé pour le bien de l’humanité. Il est donc impératif, a-t-il déclaré, de nous engager dans l’édification de la paix, inséparable des libertés fondamentales, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion. Le respect des identités culturelles est le point de départ pour que le dialogue soit un succès, a-t-il affirmé. Le représentant a ensuite rappelé que le patrimoine et l’héritage de son pays sont fondés sur les contributions de toutes les civilisations et cultures, tout en regrettant que certains font l’amalgame entre islam, extrémisme et terrorisme.
Le représentant a déploré l’incapacité de la communauté internationale à régler les problèmes chroniques de nature économique et politique, tout en ajoutant que cette situation génère des sentiments d’injustice, d’oppression et de doubles standards qui servent de catalyseurs aux conflits. Il a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts et à aider les pays en développement à réaliser leurs aspirations légitimes de prospérité en dehors de toute conditionnalité. Ce n’est que par le biais de l’action collective que nous parviendrons à ces résultats, a-t-il déclaré, tout en appelant les diverses initiatives de paix et de dialogue interculturel à se coordonner afin de se compléter plutôt que d’être en compétition. Il a finalement exprimé le souhait que les diverses initiatives de promotion de la diversité culturelle soient traduites dans des plans d’actions et des programmes concrets.
M. FEDJA STARCEVIC, Chargé des affaires multilatérales au Ministère des affaires étrangères de la Serbie, a déclaré que dans un monde où aucun pays n’est tout à fait homogène, il faut reconnaître que la valeur et l’importance des différents groupes religieux et linguistiques se sont accrues. Il n’y a pas d’agent de tolérance plus efficace que la religion, a-t-il estimé. Pourtant les grandes religions ont souvent été utilisées à mauvais escient et sont devenues des moyens de coercition. Ce ne sont pourtant pas les religions qui sont en cause, a-t-il estimé. Chaque religion ouvrant la voie vers les mêmes objectifs, elles doivent donc apprendre à se respecter et à coexister. La diversité du patrimoine culturel et religieux est aussi un moyen de réconciliation, a poursuivi le Ministre. C’est particulièrement vrai pour les pays des Balkans, qui ont été déchirés par tant de conflits de civilisations. En République de Serbie, la Constitution assure l’équité religieuse, l’affiliation religieuse étant une question purement individuelle. Par ailleurs, le Gouvernement serbe ne ménage pas sa peine pour promouvoir le dialogue interculturel et religieux dans la région, conjointement avec les agences des Nations Unies et la société civile. Toutefois, l’évolution de la situation dans la province du Kosovo contraste avec ces efforts. Il s’agit en effet de la seule région d’Europe où il n’a pas été possible pour les Serbes de jouir pleinement de leurs libertés individuelles, en raison d’une insécurité persistante, et ce malgré la présence des Nations Unies, a-t-il ajouté.
M. PJER SIMUNOVIC, Vice-Ministre des affaires étrangères et de l’intégration européenne de Croatie, a d’abord rappelé que depuis des siècles, son pays est à la croisée de différentes cultures et religions. Et aujourd’hui encore, c’est là que l’Europe centrale et orientale rencontre la Méditerranée où chrétiens et musulmans se croisent, offrant une riche diversité culturelle et religieuse. La Croatie est pleinement engagée à combattre l’intolérance et la discrimination et à assurer la promotion d’un respect mutuel et la compréhension. Au niveau national, la Croatie reconnaît et protège la liberté de religion et la croyance comme un droit fondamental de l’homme comme stipulé dans la Constitution. La Croatie a 42 religions enregistrées sur lesquelles 14 bénéficient directement d’un appui financier pour leur travail de la part du Gouvernement.
L’intervenant, tout en insistant sur l’obligation qui incombe aux États de protéger la liberté de religion et de croyance, a souligné que les leaders religieux ont eux aussi la responsabilité de promouvoir le dialogue interculturel et interconfessionnel. La Croatie soutient et suit avec grand intérêt l’attention croissante apportée au thème de la compréhension interconfessionnelle et interculturelle par les gouvernements, les agences des Nations Unies, les fonds et programmes, les communautés religieuses et la société civile. La Croatie, pays candidat à l’adhésion à l’Union européenne, soutient la récente décision de celle-ci de faire de 2008 l’Année du dialogue interculturel.
M. FAHD BIN ABDULRAHMAN ALRAJEH, Ministre des affaires étrangères de l’Arabie saoudite, a déclaré que le dialogue n’avait jamais été un objectif en tant que tel mais plutôt une valeur de fait à travers l’histoire. L’humanité, a-t-il rappelé, a des valeurs communes de paix, de résolution des conflits, d’harmonie et de tolérance. L’humanité a atteint un degré de civilisation où les intérêts se mêlent, ce qui rend le dialogue indispensable. Le Ministre a mis en garde contre ceux qui parlent de choc des civilisations et de cultures, car ils font le jeu du terrorisme et contribuent à le générer. Le terrorisme de son côté sape le dialogue, a ajouté le Ministre qui a appelé la communauté internationale à faire respecter les religions et à criminaliser ceux qui portent atteinte à leurs symboles sacrés.
Le Ministre a critiqué le rôle des médias et a souligné leurs responsabilités dans la propagation d’idées fausses, de clichés et de stéréotypes. Pour y faire face et assurer le succès du dialogue entre civilisations, a-t-il suggéré, il faudrait passer un contrat avec les médias, qui garantisse le respect des principes de tolérance et de compréhension qui servent de base à la communauté internationale.
Le Ministre a souligné que les peuples du Moyen-Orient, et son pays notamment, avaient toujours appelé à la coopération et à la tolérance entre les civilisations, à travers leur histoire jusqu’à nos jours. Il a signalé que le Roi et gardien des lieux saints, encourage la coexistence pacifique et tient à montrer une image éclairée et tolérante de l’islam. Plus de 30 millions d’étrangers de 70 États vivent en Arabie saoudite, et bien que la diversité des opinions soit naturelle, elle ne doit pas mener à une confrontation.
M. AART JACOBI, Directeur chargé des droits de l’homme et de la bonne gouvernance au Ministère des affaires étrangères des Pays-Bas, a affirmé que son pays avait une longue expérience dans le domaine de la protection internationale de la liberté de religion et de la foi. Ainsi, a-t-il rappelé, les Pays-Bas ont joué un rôle important dans les négociations qui ont eu lieu en 1981 sur la Déclaration des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction. Un des articles de la Déclaration contient la « clause néerlandaise » selon laquelle « rien dans la présente Déclaration ne doit être interprété comme restriction ou déni d’aucun des droits définis par la Déclaration universelle des droits de l’homme et par la Convention Internationale des droits de l’homme », a dit M. Jacobi.
Aart Jacobi a par ailleurs souligné que le Gouvernement des Pays-Bas avait contribué en 2006 à la célébration, à Prague, du vingt-cinquième anniversaire de la Déclaration adoptée par les Nations Unies en 1981. À cette occasion, a-t-il poursuivi, tous les participants ont souligné l’importance de cet instrument comme la base de la poursuite d’un dialogue interreligieux et interculturel. Le représentant a en outre déclaré que le dialogue interconfessionnel de la Réunion Europe-Asie (ASEM) aura lieu à Amsterdam en 2008. Il a également rappelé qu’Amsterdam, principale ville des Pays-Bas, accueillait des êtres humains de 177 nationalités différentes et de divers horizons ethniques et religieux. M. Jacobi a indiqué que son gouvernement était prêt à soutenir l’idée du Haut Représentant pour l’Alliance des civilisations, M. Jorge Sampaio, consistant à mettre en place un bureau central « afin que nous puissions apprendre à la fois des succès et des oppositions ayant trait au déroulement des activités de promotion du dialogue aux niveaux local, régional et international ».
Il a déclaré que les leaders religieux portaient une lourde responsabilité dans ce dialogue interculturel. « Ils doivent servir d’exemple, et sans renier leur propre foi, ils doivent clairement indiquer que leurs propres ouailles devraient respecter les autres religions ainsi que le choix de ceux qui préfèrent n’adhérer à aucune église, ou encore celui de ceux qui se convertissent à une foi au sein de laquelle ils ne sont pas nés ». M. Jacobi a conclu en rappelant, qu’à l’occasion du soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui sera célébrée le 10 décembre 2008, la ville de La Haye, en coopération avec le Ministère des affaires étrangères, organisera une conférence avec de nombreux responsables religieux du monde entier. Il a, à cet effet, émis l’espoir que ces derniers réaffirmeront leur engagement envers le respect et la promotion des droits de l’homme, et de la compréhension et du respect mutuels entre peuples et groupes humains.
M. VICTOR VORONIN (Ukraine) a indiqué que la Constitution de son pays garantissait la liberté de religions, précisant que la représentation des minorités religieuses s’y faisait au plus niveau, celui de l’État. Un sommet de la tolérance a d’ailleurs été organisé cette année à Kiev, où étaient représentées les plus grandes autorités religieuses, ainsi que les organisations de la société civile. Cet évènement a contribué à la mise en place d’un environnement de tolérance et de respect. Dans ce contexte, l’Ukraine s’efforcera avec le nouveau Président de l’Assemblée générale de relancer le dialogue interreligieux et culturel. Nous sommes prêts à redoubler d’efforts pour soutenir l’action des Nations Unies aux niveaux régional et sous-régional, a annoncé M. Voronin, qui a souligné que l’Ukraine faisait partie des anciennes républiques soviétiques qui ont réussi à pleinement intégrer leurs diverses communautés ethniques et religieuses.
Mme BYRGANYM AITIMOVA (Kazakhstan) a déclaré que les nouveaux défis et menaces pour l’humanité, en particulier le terrorisme international et l’extrémisme religieux, souvent nourris par des tensions interconfessionnelles, rendent l’éducation religieuse, la tolérance, la compréhension mutuelle, le respect des cultures et des civilisations de plus en plus urgents. Ainsi, la recherche d’un accord entre religions et groupes ethniques est un élément fondamental pour le maintien de la sécurité internationale. Il nous revient, a-t-elle déclaré, de porter plus loin les conclusions des grandes conférences et initiatives internationales.
Nous croyons fermement que la culture de la paix commence à l’intérieur de chacun d’entre nous, lorsque nous apprenons à respecter les valeurs et la dignité des autres religions et cultures, et leur permettons de vivre selon leurs traditions, a-t-elle affirmé. Le niveau de moralité de chaque société peut être jugé selon la manière dont elle traite les autres nations et cultures, a-t-elle poursuivi. L’intolérance et les conflits peuvent être évités par d’inlassables efforts quotidiens et en prenant des initiatives concrètes aux niveaux local, national, régional et international.
Le Kazakhstan, a-t-elle souligné, qui accueille 130 groupes ethniques et 45 confessions, est un exemple de tolérance laquelle a été un facteur décisif dans nos efforts pour assurer la paix, la stabilité et le progrès économique. Le pays n’a connu aucun conflit interethnique ou religieux depuis son indépendance. Il se trouve au carrefour entre les cultures de l’islam, du christianisme et du bouddhisme, et la route de la soie nous a apporté la diversité religieuse, a-t-elle poursuivi. La liberté de religion et d’expression est garantie dans la Constitution.
Consciente de l’importance du dialogue interconfessionnel, la représentante a réaffirmé l’engagement de son pays aux initiatives internationales allant dans ce sens et a appelé la communauté internationale à suivre les recommandations émises dans le cadre de la Déclaration du deuxième Congrès des dirigeants des religions du monde, qui portent sur la perception positive des relations interconfessionnelles, la promotion de la tolérance dans les programmes scolaires et la promotion du dialogue entre les civilisations et les religions parmi les jeunes.
M. HERALDO MUÑOZ (Chili) a déclaré que le dialogue interculturel était un défi exigeant une coopération internationale, comme en témoigne l’Alliance des civilisations ou la stratégie à moyen terme de l’UNESCO. La problématique de la coexistence pacifique des cultures n’est pas étrangère au Chili, une terre d’asile pour les individus persécutés en raison de leurs convictions politiques ou de leur religion. Nous accueillons par exemple la plus grande communauté palestinienne au monde en dehors du Moyen-Orient, a précisé M. Muñoz. Les grandes religions coexistent harmonieusement au Chili, un pays dont la Constitution établit clairement la séparation de l’Église et de l’État, a poursuivi le représentant. Les institutions de l’État veillent à ce que les moyens de communication et les programmes d’enseignement ne véhiculent pas de préjugés. Une politique de « convivialité scolaire » a été appliquée dans les écoles pour encourager les enfants à vivre ensemble. Le Chili est favorable à une vision du monde où la diffusion des valeurs de tolérance est considérée comme garante de la paix et de la sécurité internationales. En tant qu’État membre de l’Organisation des États américains, le Chili œuvre à la préservation de la mémoire collective du patrimoine historique. Il a également voté en faveur de la récente Déclaration sur les droits des peuples autochtones, a fait valoir la délégation.
M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a déclaré que depuis les événements du 11 septembre 2001, l’inquiétude s’est accrue concernant d’éventuelles tensions entre les cultures et entre les religions. De l’avis de certains, le monde s’acheminerait inexorablement vers un « choc des civilisations », a noté le représentant. Du fait de la mondialisation, a-t-il poursuivi, les différences entre les cultures et les religions sont devenues chaque fois plus saisissantes, à mesure que les technologies modernes de communication, ainsi que les moyens de transport plus rapides et plus abordables ont conduit à un monde où, chaque jour, des personnes d’origine diverses sont confrontées à l’opportunité et à la nécessité d’avoir des échanges. Dans ces conditions, si nous aspirons à jeter les bases de la coopération pour la paix par le biais de la compréhension entre les cultures et les religions, il nous faudra nous employer à répondre aux craintes et aux inquiétudes relatives à la diversité culturelle et religieuse, a préconisé le représentant du Liechtenstein, avant d’ajouter que l’éducation devra jouer un rôle vital à cet égard. D’autre part, l’accès aux moyens de communication et à la technologie de l’information est crucial en vue d’une meilleure connaissance mutuelle et de la lutte contre les préjugés, a encore indiqué M. Wenaweser.
Bien souvent, la migration conduit à une transformation de communautés relativement uniformes en sociétés pluriculturelles et, par là même, à des défis nouveaux pour rétablir une cohérence et une paix sociale, a-t-il souligné, en rappelant que le Liechtenstein a connu un important flux migratoire depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Avec 33,9% d’étrangers, le Gouvernement et les habitants du Liechtenstein sont régulièrement confrontés aux défis de l’interreligieux et de l’interculturel, a-t-il précisé.
M. Wenaweser a enfin indiqué que le Gouvernement du Liechtenstein avait pris des mesures en vue de promouvoir l’intégration des immigrés, de lutter contre la xénophobie et le racisme, et d’améliorer la compréhension entre les divers groupes culturels et religieux. L’un des axes de sa politique en la matière consiste à fournir des services ciblant les immigrés de sorte qu’ils puissent apprendre la langue nationale et remplir ainsi l’une des conditions préalables au dialogue et à l’intégration socioéconomique. Le second souci du Gouvernement réside dans l’institutionnalisation du dialogue entre les groupes culturels et religieux dans le pays, et le Premier Ministre du Liechtenstein a, à cet égard, tenu une série de tables rondes avec des associations d’immigrés. À l’issue de ces réunions, une plate-forme d’échanges a été mise sur pied entre ces associations et les organisations actives dans le domaine de l’intégration et du dialogue interculturel, a conclu le représentant du Liechtenstein.
M. GIANCARLO SOLER (Panama) a fait remarquer que les nombreuses conférences internationales qui ont été organisées sur l’importance de la compréhension entre les cultures et les religions, pour la paix notamment, ont contribué à renforcer le consensus qui existait déjà sur ces principes. Les concrétiser requiert des efforts à plusieurs niveaux et dépasse la capacité des seuls gouvernements, a-t-il ajouté. Promouvoir la tolérance et la compréhension entre les cultures et les religions est indispensable, mais insuffisant. Les échanges entre cultures et croyances ne se voient renforcés que si les peuples partagent les mêmes objectifs et les mêmes projets et que s’ils sont convaincus de ne pouvoir les atteindre qu’à travers un effort commun, a-t-il souligné. Il a également attiré l’attention sur la complexité des problèmes en soulignant que la rivalité des intérêts économiques, environnementaux et territoriaux peut générer des tensions qui sont, ensuite, reprises, instrumentalisées et interprétées à la lumière de l’ethnie, la culture ou la religion. Ce problème est d’autant plus complexe lorsque des intérêts étrangers s’en mêlent, a-t-il précisé.
Le représentant panaméen a estimé que la Déclaration universelle sur les droits des peuples autochtones constitue une avancée notable en la matière. En effet, une coexistence plus équilibrée entre les différentes entités ethnico-culturelles d’un pays passe par la reconnaissance des droits culturels et religieux de chacune d’elles, et en particulier des peuples autochtones, a-t-il précisé. Il a à cet égard regretté que les revendications de ces droits aient parfois servi à encourager les ressentiments et la confrontation. Pour l’éviter, il faut faire en sorte que la reconnaissance de ces droits soit pleinement assumée par tous, a-t-il préconisé. En outre, M. Soler s’est dit d’avis que mettre l’accent sur les points communs entre les différentes cultures et religions constitue un bon moyen de soutenir les aspirations morales et humanitaires communes à tous les peuples.
M. STEVE MATENJE (Malawi) a déclaré que la diversité culturelle et religieuse revêtait une grande importance pour le Malawi, en particulier en raison de la mondialisation croissante du monde dans lequel nous vivons. Le respect pour la diversité religieuse culturelle peut contribuer à la coopération internationale, à la paix, la sécurité, et à la promotion d’un dialogue plus nourri entre nations. Il a appelé la communauté internationale à créer un environnement favorable aux échanges d’expériences humaines avec l’objectif de combattre la violence, l’intimidation, la haine et l’intolérance basées sur les différences culturelles et religieuses.
Au niveau national, a-t-il expliqué, le Malawi continue de rester engagé en faveur des buts et principes stipulés dans la Charte des Nations Unies et la Déclaration universelle des droits de l’homme. Sur la base des dispositions constitutionnelles, le Malawi a formulé des politiques coulées en lois dont l’objectif est de créer un environnement pour la promotion de la compréhension, de la tolérance et de l’amitié entre les peuples du Malawi compte tenu de la diversité religieuse, culturelle ou linguistique du pays. C’est pourquoi le Malawi vit relativement paisiblement depuis son indépendance en 1964. Le pays soutien également le projet d’établir un point focal au sein du Secrétariat pour le suivi des questions interconfessionnelles et culturelles, a ajouté le représentant. Celui-ci a dit soutenir la recommandation du Secrétaire général de déclarer une année pour le dialogue entre les religions et les cultures.
M. BASILIO ANTONIO GUTIERREZ GARCIA (Cuba) a dénoncé les guerres génocidaires menées par les puissances du Nord dans leur tentative hégémonique de domination. Son pays, a-t-il dit, observe avec grande inquiétude l’escalade des violations des droits de l’homme, la haine, la xénophobie, l’intolérance religieuse et la discrimination contre les minorités commises au nom d’une soi-disante « guerre contre la terreur ». Des violations sont très souvent commises contre les populations d’origine arabe ou de confession musulmane, a-t-il ajouté. Les médias de l’Ouest, a-t-il déclaré, diffusent une image négative de l’islam. En assimilant certaines cultures au terrorisme et à la violence, ils renforcent la menace permanente qui plane sur ces populations, les empêchant de jouir pleinement de leurs droits et libertés fondamentales.
Considérant qu’il fallait empêcher que ne se répètent des conflits basés sur la supériorité des races, des cultures et des nations, le représentant de Cuba a mentionné l’entrée en vigueur le 18 mars 2007 de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles adoptée par 148 États, comme un pas important dans la préservation de la diversité. Il a également exprimé l’espoir de son pays de voir cette question abordée lors des discussions de la Conférence d’examen de la Déclaration de Durban et du Programme d’action. M. Garcia a appelé à la création d’un ordre international démocratique et juste, basé sur le dialogue, la coopération et l’échange culturel, plutôt que sur l’homogénéisation culturelle et la domination de certains peuples.
M. MAKSOM DATO KAMILAN (Malaisie) a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur de la compréhension entre les cultures, les civilisations et les religions, et a rappelé son rôle dans l’organisation d’initiatives de promotion du dialogue interconfessionnel. Les différences religieuses et culturelles ont tendance à être considérées comme la cause des conflits d’aujourd’hui, a-t-il poursuivi, alors que nous savons très bien que ceux-ci sont le résultat de nos divergences politiques. Certains s’emploient à transformer ces différences en divisions, a-t-il regretté, alors que nous devrions au contraire célébrer la beauté de ces différences. Il a accusé les sociétés « égoïstes » de vouloir imposer leurs valeurs sur d’autres sociétés, ce qui contribue à une atmosphère d’acrimonie et de méfiance entre les peuples. L’oppression et le mauvais traitement de certains groupes par certains États comme c’est le cas du peuple palestinien et des minorités musulmanes à travers le monde contribuent également, a-t-il tenu à souligner, à la scission croissante entre les cultures et les religions, particulièrement entre le monde occidental et l’islam.
En tant que pays multiethnique, multiculturel et multiconfessionnel, la Malaisie comprend les défis auxquels le monde fait face, a-t-il précisé, tout en réaffirmant la volonté de son pays de multiplier les passerelles et de se concentrer sur les valeurs communes. Les différences ne doivent pas porter ombrage à nos valeurs communes, a-t-il dit, en ajoutant qu’il est nécessaire de recentrer le dialogue sur les personnes plutôt que sur les États, et de concrétiser les idées du dialogue par des mesures pratiques et compréhensibles pour tous, tout en promouvant l’éducation des jeunes, l’enseignement de la tolérance, et de l’acceptation de l’autre. La Malaisie reconnaît l’importance des médias dans la promotion du dialogue interconfessionnel, a-t-il continué. Le représentant a tout de même déploré que les médias tendent à insister sur les différences plutôt que sur les points communs entre cultures et religions, ce qui contribue à créer la confusion plutôt que la compréhension. Il a également souhaité que les médias donnent la voix à ceux qui prônent l’harmonie, la tolérance et la modération.
Mme ROSEMARY BANKS (Nouvelle-Zélande) a rappelé que son Premier Ministre a personnellement accueilli les 23 et 24 mai, en collaboration avec le Gouvernement norvégien, un colloque de haut niveau sur le rapport du Groupe de haut niveau de l’Alliance des civilisations. Les participants ont abordé la question de l’éducation transculturelle et le développement des programmes d’études. Ils ont opté pour la mise en place de réseaux et d’échanges accrus de jeunes, de contacts approfondis entre centres islamiques, d’un programme d’échange interculturel dans la région, de programmes transculturels de formation pour les journalistes, du développement du système des migrations humaines, et d’une meilleure intégration des immigrés dans les communautés locales. La représentante a en outre déclaré que son pays avait contribué à hauteur de 50 000 dollars néo-zélandais au fonds de l’Alliance, destiné au financement de projets en Asie du sud-est.
La Nouvelle-Zélande a également accueilli, à Waitangi, entre le 29 et le 31 mai 2007, le troisième dialogue interreligieux d’Asie-Pacifique, qui a été coparrainé par l’Indonésie, l’Australie et les Philippines. Le Colloque a réuni des représentants des principaux groupes communautaires et religieux de 15 pays du sud-est asiatique et de la région pacifique adjacente, lesquels ont exploré les formes de coopération et de communication à mettre en œuvre pour promouvoir la compréhension et le respect mutuel entre les adhérents de confessions religieuses différentes. L’adoption du plan d’action a débouché sur une série de propositions et d’actions pratiques, telles que l’amélioration des réseaux et des connections entre communautés religieuses.
M. PARK HEE-KWON (République de Corée) a déclaré que d’un côté la mondialisation, soutenue par la technologie moderne, changeait la nature des relations humaines en permettant de franchir les barrières de la communication et la distance. De l’autre cependant, cette tendance dominante n’ouvre pas nécessairement la voie à un monde de paix et de sécurité. En effet, la mondialisation est assimilée par beaucoup à un moyen pour l’Occident d’imposer ses valeurs au reste du monde tandis que la montée de l’extrémisme encourage les divisions et l’intolérance. Le représentant a tenu à rappeler que le dénominateur commun de toutes les cultures et religions était un message d’amour et de fraternité. Selon lui, les causes des malentendus culturels sont à chercher du côté de la pauvreté, des violations des droits de l’homme, des conflits armés et du poids des questions ethniques, religieuses et culturelles.
M. Choi a estimé que la relance du multilatéralisme était déterminante dans les efforts déployés par les Nations Unies pour relever tous ces défis. Il a cependant regretté la lenteur des progrès vers un réel dialogue entre les cultures et les civilisations. Des partenariats sont indispensables avec toutes les parties prenantes, qu’il s’agisse des gouvernements, des organisations internationales et des institutions de la société civile. L’Alliance des civilisations constitue un premier pas appréciable vers une action conjointe. Le rapport du Groupe de haut niveau souligne d’ailleurs la nécessité de mettre l’accent sur les domaines de l’immigration, de la jeunesse, de la politique et de l’éducation. Pour sa part, la République de Corée envisage d’organiser un « forum des jeunes » et une « deuxième conférence des ministres responsables de la jeunesse en 2009 ».
M. GILLES NOGHES (Monaco) a proposé que le dialogue entre civilisations soit reconnu comme un principe fondamental pour l’établissement et le maintien des relations tolérantes et pacifiques entre les peuples de différentes traditions, cultures et religions. Il a invité à reconnaître les différences et à les respecter. Nous devons apprendre à condamner les actes de violence en évitant les amalgames. Le terrorisme ne doit en aucune manière conduire à l’interruption du dialogue et à l’intolérance.
Le représentant a réitéré que la position de son pays est conforme à la déclaration du Secrétaire d’État aux affaires étrangères et de la coopération internationale du Portugal qui, parlant au nom de l’Union européenne, avait mentionné la résolution unanimement adoptée l’année dernière par l’Assemblée générale, sur l’élimination sous toutes ses formes de l’intolérance et de la discrimination fondées sur les religions et les croyances comme exemple d’engagement visant la garantie des libertés fondamentales. Son pays soutient également l’initiative de l’Espagne et de la Turquie en faveur d’une Alliance des civilisations.
M. JOE R. PEMAGBI (Sierra Leone) a rappelé que la tolérance était l’une des sept valeurs de son pays, l’un des pays au monde où la tolérance religieuse atteint, selon lui, son niveau le plus élevé. Donnant l’exemple de l’Aïd El Fitr, la fête marquant la fin du ramadan qui sera célébrée dans quelques jours en Sierra Leone à la fois par les chrétiens, les musulmans et les animistes, il a expliqué qu’il n’était pas rare que des mariages mixtes y soient célébrés. Le représentant a défendu l’idée selon laquelle la religion devait être, autant que possible, utilisée comme un instrument du développement national. Dans le passé, a-t-il dit, la religion a servi à la paix, à la guérison, à la réconciliation et à la cohérence nationale, cela était d’autant plus nécessaire après 11 années de guerre civile, a-t-il expliqué. Dans ce cadre, le Conseil interreligieux de Sierra Leone a apporté une contribution significative au processus de paix.
Comme la religion, l’éducation peut être un instrument formidable de promotion de la paix et de la coopération, a poursuivi le représentant. C’est pourquoi, la Sierra Leone a jugé utile de mettre en place un certain nombre de programmes d’éducation à la paix. Il a donné l’exemple d’un cours sur la paix et l’étude des conflits, dispensé à l’Université de Sierra Leone, en partenariat avec l’Université de Bradford au Royaume-Uni. Une Commission nationale pour la démocratie participe également à la promotion de la paix et de la réconciliation. Le représentant a appelé les médias à soutenir, aux niveaux national et international, une campagne mondiale globale pour la culture de paix, ainsi que le dialogue entre les cultures et les peuples.
M. ANWAR OTHMAN BAROUT SALEEM AL BAROUT (Émirats arabes unis) a déclaré que l’histoire a prouvé que la poursuite des agressions, l’occupation et la violence, de même que les déséquilibres et la domination culturelle et économique des pays développés sur les pays en développement ont exacerbé les sentiments d’injustice, d’inégalité et de marginalisation parmi les peuples. Il est donc nécessaire, a-t-il ajouté, de travailler ensemble à endiguer les causes fondamentales de ces phénomènes, de renverser les disparités croissantes entre les communautés et d’initier entre elles un rapprochement. Il a ensuite rappelé que son pays soutient toutes les initiatives des Nations Unies, avant de rappeler qu’il a versé une contribution de un million de dollars à l’Alliance des civilisations. Les Émirats arabes unis, a-t-il poursuivi, ont mis en œuvre les législations et régulations nécessaires pour protéger les droits de tous ses habitants y compris de ses résidents étrangers, quelles que soient leur nationalité, leur religion ou leur origine.
Convaincu que la science, la culture et le savoir sont les fondations du progrès, il a ensuite fait état des nombreux efforts et initiatives de son pays aux niveaux bilatéral, régional et international pour renforcer la communication culturelle dans le monde, en valorisant la culture arabe et humaine, en faisant notamment venir à Abou Dhabi certaines des institutions les plus prestigieuses telles que l’Université de la Sorbonne et les musées du Louvre et Guggenheim, sans compter l’organisation de nombreuses réunions, conférences et séminaires visant à promouvoir l’échange des connaissances et le dialogue des cultures.
Il a également rappelé les actions que son pays a entreprises pour protéger les biens communs de l’humanité, comme l’initiative visant à éduquer un million d’enfants démunis à travers le monde. Il a finalement rappelé la nature urgente de la question palestinienne, qui demeure selon lui, le facteur de divergence principal entre les communautés musulmanes et occidentales, et a appelé l’Assemblée générale à respecter les recommandations du Groupe de haut niveau demandant à Israël d’accepter et de faciliter la fondation d’un État palestinien, et de l’obliger à arrêter de détruire l’identité culturelle arabe et palestinienne dans les territoires occupés, en particulier les sites culturels et religieux de l’islam.
M. PRASAD KIRIYAWASAM (Sri Lanka) a indiqué que son pays était depuis 2 500 ans un pays multiculturel et multireligieux et que le credo du bouddhisme avait imprégné la société sri-lankaise depuis que cette religion y avait été introduite par l’Empereur indien Asoka. La tolérance et la compassion envers l’autre sont pour nous des valeurs fondamentales, a-t-il ajouté. Indiquant que les grandes religions s’étaient épanouies sur l’île de manière harmonieuse, le représentant a rappelé qu’elles se rejoignaient toutes dans leur quête d’unité et leur recherche de la vérité. À cette époque de renouvellement technologique incessant et d’interconnexion, les puissances économiques et politiques dominantes ont tendance à imposer leur modèle culturel et à affaiblir les sociétés vulnérables, a-t-il fait observer. Une telle tendance peut aller à l’encontre de la compréhension et la coopération des peuples. Il faut donc rester vigilant face à un tel phénomène, a prévenu la délégation, avant de saluer la tenue de ce Dialogue interculturel et religieux, qui participe des efforts des peuples à se rapprocher et à se comprendre.
M. YOUCEF YOUSFI (Algérie) a voulu que l’on ne prenne pas, pour référence, la conjoncture du moment pour conclure à l’impossible dialogue entre religions et convictions. Il a regretté que beaucoup de préjugés aient assombri la compréhension de l’islam en suggérant que cette religion de paix est synonyme d’oppression, d’intolérance, d’extrémisme et de terrorisme. L’affaire des caricatures blessantes du prophète Mohammed et les nombreuses atteintes à la foi des musulmans sont là pour rappeler que l’éducation et la connaissance sont les meilleures armes contre toutes les ignorances, toutes les manipulations et toutes les instrumentalisations, a estimé le représentant. Il a voulu que le dialogue entre les civilisations contribue à modeler les forces de la mondialisation de façon à ce qu’elle préserve la richesse de la diversité. Toute idée de dialogue serait vidée de son sens, a-t-il prévenu, si la communauté internationale ne prenait pas en charge dans le même temps l’impératif du développement socioéconomique. Le représentant a aussi voulu que le dialogue ne soit pas réduit à une sorte de réponse au phénomène du terrorisme et ne mène pas à une bipolarité entre le monde judéo-chrétien et le monde musulman. Toute idée de dialogue doit s’inscrire dans la durée et s’affirmer comme un moyen de rapprocher les peuples et les communautés, a-t-il conclu.
M. NEBOJSA KALUDJEROVIC (Monténégro) a déclaré que les idées ne suffisent pas et qu’à ce titre les Nations Unies constituent un excellent cadre pour la recherche de solutions pratiques et créatives en matière de coopération interculturelle et interconfessionnelle entre les nations et pour traiter des différences spirituelles et religieuses.
La culture millénaire du Monténégro en tant que pays de la Méditerranée a bénéficié du dynamisme de cette partie du monde, a affirmé le représentant. Il existe une véritable compréhension multiethnique et multiconfessionnelle au Monténégro, ce qui lui a permis de rester un havre de tolérance au cours des dernières décennies du XXe siècle alors que la région subissait des atrocités commises au nom de la religion. Nous tenons à préserver et à cultiver cet héritage au Monténégro, a-t-il observé, mais aussi en travaillant avec nos voisins dans la région des Balkans qui doit maintenant adopter une perspective européenne.
Il a conclu en réaffirmant que fort de son expérience millénaire d’interconfessionnalisme, son pays peut contribuer au développement de ce processus, arguant que la compréhension entre les cultures et le dialogue constitue le fondement de la coopération à différents niveaux tels que l’économie, l’industrie, le tourisme, et la vie politique. Il convient, a-t-il ajouté, de trouver des modalités concrètes pour que les idées qui émanent de ce dialogue se concrétisent.
Prenant l’exemple de son pays, Mme ADIYATWIDI ADIWOSO ASMADY (Indonésie) a considéré la diversité comme une bénédiction plutôt que comme un inconvénient. Même si cette diversité peut conduire à l’incompréhension et aux tensions, nous devons être capables de tirer parti tant des instruments traditionnels que modernes. L’un des instruments modernes est l’éducation qui est essentielle à la promotion de l’harmonie dans la diversité. Une bonne éducation apprend aux enfants l’unité et les liens communs. L’éducation souligne que les différences théologiques ou culturelles ne rendent personne inférieur et n’empêchent personne de vivre et de travailler ensemble dans la paix, a insisté la représentante. C’est pourquoi le Ministre indonésien du culte organise actuellement des cours pour les enseignants des écoles islamiques sur le thème de la diversité religieuse et culturelle. L’objectif est de leur apprendre la manière d’élargir la vision du pluralisme dans le pays. Le dialogue en Indonésie sur cette question se reflète aussi dans les engagements régionaux et interrégionaux du pays, a poursuivi la représentante. Elle a souligné que son pays appuie aussi les efforts des ONG et considère les médias comme de véritables partenaires. Au niveau national, la représentante a reconnu la nécessité de promouvoir une « action consciente » pour faire barrage aux organisations extrémistes, y compris pour prévenir une utilisation biaisée des lieux de culte. Il faut entreprendre la réforme de l’éducation, a-t-elle aussi reconnu. Elle a conclu en espérant que sur le plan international, les Nations Unies institutionnaliseront les initiatives interconfessionnelles et interculturelles par le biais de politique et de mécanismes de mise en œuvre. Elle a dit attendre avec intérêt l’adoption d’un plan d’action commun et la proclamation d’une année internationale du dialogue, de la religion et de la culture.
M. ABDULLAH AHMED MOHAMED AL-MURAD (Koweït) a déclaré que depuis de nombreuses années, des conflits confessionnels et culturels faisaient rage et menaçaient la paix et la sécurité internationales. Ils portent en eux des germes destructeurs, alors que les religions invitent pourtant toutes aux mêmes principes de paix et d’harmonie. Nous estimons donc que nous devons œuvrer à transformer la culture de guerre en culture de paix. Le représentant a ajouté que le dialogue et la coopération entre les religions devaient devenir un élément déterminant des relations multilatérales. Il faut donc consacrer toutes les ressources nécessaires à lutter contre l’émergence d’une discrimination fondée sur l’appartenance ethnique ou les convictions religieuses ou politiques. Le Conseil des relations extérieures des pays du Golfe a insisté hier, dans un message, sur l’impérieuse nécessité de lutter contre l’intolérance religieuse, condamnant tout extrémisme. Le détournement de la religion à des fins terroristes est inacceptable, comme l’est tout autant l’amalgame de plus en plus fréquent entre religion et terrorisme. Il a conclu en affirmant que les atteintes aux convictions d’un groupe religieux et culturel donné ne pouvaient se réfugier derrière la liberté d’expression.
M. NASSIR ABDULAZIZ AL-NASSER (Qatar) a rappelé les propositions faites par le Qatar en 2000 sur la manière de renforcer les relations entre les groupes humains. Ces propositions portent sur trois niveaux, a-t-il expliqué, en confiant que le premier serait une activité purement scientifique qui réunirait les historiens, les politologues et les sociologues pour identifier les causes sous-jacentes du conflit entre les peuples et les cultures. Le deuxième niveau viserait principalement les leaders d’opinion dans différents domaines des médias pour trouver les meilleurs moyens de mettre en lumière l’impact des malentendus véhiculés par les médias sur les différents groupes culturels. Le troisième niveau inclurait les leaders politiques et les autorités gouvernementales qui appartiennent à différents groupes culturels, parce qu’ils sont les plus capables d’atténuer les tensions et de réduire les risques de chocs. Fermement convaincu de l’importance qu’il y a à promouvoir le dialogue entre les trois religions révélées, le Qatar, a dit le représentant, organise des réunions annuelles depuis 2003 dont un des résultats a été la création à Doha d’un centre international du dialogue interreligieux. Le Qatar a aussi participé au Groupe de haut niveau sur l’Alliance des civilisations, a ajouté le représentant, avant de paraphraser son Émir qui avait déclaré, lors de la troisième Conférence sur le dialogue interconfessionnel en 2005, que la poursuite du dialogue convaincra davantage de gens que le dialogue est plus efficace que les querelles, et que la communication est plus utile que l’éloignement. Le dialogue, avait encore dit l’Émir, est devenue une nécessité urgente pour se débarrasser du passé et reconnaître les erreurs du présent.
Mme MONA JUUL (Norvège) a constaté que les questions d’identité religieuse et culturelle ont pris une place centrale dans les relations mondiales et qu’elles influencent les interactions. La coexistence entre diverses religions et cultures représente un défi, a-t-elle ajouté. L’identité religieuse et culturelle a toujours été utilisée pour définir les différentes parties à un conflit. Nous avons vu, a-t-elle dit, comment la religion peut être utilisée pour promouvoir ou aggraver les conflits alors que dans la plupart des cas, ces conflits sont en réalité des luttes de pouvoir sur des questions politiques plutôt que des chocs de religion. La représentante a appelé les leaders culturels et religieux à se lever contre les guerres et le recours à la violence. Ces leaders et les ONG peuvent jouer un rôle important dans le renforcement de la tolérance et promouvoir le respect de la diversité religieuse et culturelle. Ils peuvent faire des contributions importantes à la paix et à la sécurité, et il faut regretter, a estimé la représentante, que dans les sociétés laïques, on voit une tendance à sous-estimer ce potentiel. Elle a donc salué le rôle des gouvernements et des Nations Unies, qui cherchent à impliquer ces communautés religieuses dans l’émergence d’une meilleure compréhension, et à traiter du rôle de la religion et de la culture dans les politiques nationales et internationales.
La Norvège, a-t-elle tenu à réaffirmer, encourage et croit au dialogue interreligieux et interculturel parce qu’il permet de trouver le juste milieu et de faire obstacle à la domination des extrêmes. Elle a donc indiqué que son pays a créé au sein du Ministère des affaires étrangères un forum dans lequel les leaders religieux, les universitaires et les diplomates peuvent discuter des questions liées à la religion et à la politique internationale. Mais, a-t-elle prévenu, le respect, l’acceptation et l’appréciation des cultures, traditions et religions doivent être mutuels pour qu’un véritable dialogue ait lieu. Il ne peut y avoir de dialogue réel sans un respect fondamental pour les différences et la reconnaissance de la dignité humaine de l’autre. Nous devons donc être prêts à parler mais aussi à écouter, a-t-elle précisé, et accepter que notre partenaire a des convictions, des valeurs et des capacités qui peuvent nous faire revoir nos positions.
Cependant, a-t-elle mis en garde, le respect de la diversité culturelle et religieuse ne doit pas devenir une acceptation inconditionnelle de toutes les facettes d’une religion et d’une culture. Les religions et les cultures peuvent être mal utilisées et servir de bons ou mauvais objectifs. Il est donc nécessaire dans un dialogue, a-t-elle poursuivi, d’identifier les éléments qui pourraient faire obstacle à la promotion de la tolérance, de la compréhension et du respect universel. Concernant le soi-disant conflit entre les « musulmans » et « l’Occident », elle a déclaré que son pays ne croit ni à l’existence d’un tel conflit, ni en la justesse de ces termes, tout en regrettant la polarisation du discours et sa domination par des éléments extrémistes qui empêchent des discussions constructives et la recherche du juste milieu. Le dialogue, a encore ajouté la représentante, prend du temps. La patience et l’engagement en faveur du dialogue sont donc nécessaires, a-t-elle souligné, en jugeant important que les Nations Unies continuent à promouvoir le dialogue interreligieux et interculturel en tant que mécanisme politique pour favoriser la compréhension mutuelle.
M. JORGE SKINNER-KLEE (Guatemala) a affirmé que la tolérance était une vertu cardinale dans son pays, dont la guerre fratricide, qui aura duré 40 ans, s’est conclue par la signature d’un document intitulé « Identité et droits des populations autochtones ». Il a ensuite déclaré que son gouvernement avait pleinement pris part aux activités lancées par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) dans le cadre de son programme pour la culture de paix et soutenait des initiatives telles que l’Alliance des civilisations. Reconnaissant qu’il était impossible en quelques minutes de trouver des solutions aux problèmes historiques de la pauvreté, de l’exclusion, du préjugé, du racisme, du fanatisme et de l’intolérance, il a cependant déclaré que sa délégation plaçait de grands espoirs dans la communauté internationale, dans le cadre des mécanismes existants qui définissent les normes de base de la convivialité humaine. L’heure de passer à l’action est venue, a-t-il ajouté, affirmant qu’il fallait réduire l’ignorance et les tensions sociales pour renforcer au contraire la cohésion et la solidarité humaines.
M. EL MOSTAFA SAHEL (Maroc) a affirmé que son pays appréciait les efforts de l’ONU et de l’Alliance des civilisations pour consolider le dialogue interculturel. Il a rappelé que les valeurs qu’il promeut constituent une réponse au besoin urgent de parvenir à la paix et la stabilité entre les États. C’est sur la base de ce dialogue, a-t-il appelé, que le Roi Mohammed VI a lancé des initiatives telles que les première et deuxième conférences universelles des iman et caram en 2005 et 2006. Il a affirmé que le Maroc a, au cours du dernier sommet arabe de Khartoum, suggéré de rédiger une charte internationale dans laquelle l’appui aux lieux saints et aux convictions religieuses serait prioritairement traité, tout comme la promotion de la tolérance et le respect mutuel entre l’islam et les autres religions.
Ce dialogue, a-t-il soutenu, doit toutefois aller au-delà des besoins de l’heure, il doit être fondé sur le respect des droits de l’homme sans discrimination fondée sur la race, la religion ou la culture. Pour y parvenir, a-t-il ajouté, il nous faut déployer des efforts constants pour enrichir notre expérience commune car la connaissance d’autrui nous permettra de surmonter la haine et de vivre en paix, et dans la dignité. Il a indiqué que la sensibilisation internationale à différentes cultures, rendue possible par la promotion du dialogue et l’enseignement a beaucoup contribué à l’atténuation de la diffusion d’images négatives et au renforcement de la paix. Il a conclu en soulignant la nécessité de coordonner les initiatives de l’ONU dans ce domaine en créant une unité spéciale au sein du Secrétariat.
M. ALISHER VOHIDOV (Ouzbékistan) a appelé à l’intensification des efforts internationaux pour renforcer le dialogue entre les cultures et les religions. Les Nations Unies sont plus importantes que jamais pour renforcer la tolérance. Il a indiqué que 136 groupes ethniques coexistent dans son pays. Ceci constitue une richesse nationale et une source d’enrichissement. Depuis plusieurs siècles, l’Ouzbékistan a été un pont qui relie l’Occident à l’Orient, la route de la soie. L’Ouzbékistan se situe à la croisée des chemins où se sont rencontrées plusieurs civilisations. Notre terre, a-t-il dit, constitue un sanctuaire de l’islam, abrite des monuments historiques de Bouddha et de la culture zoroastre. Elle a une tradition de tolérance et de bonté qui est à la base de la paix depuis l’indépendance.
L’intervenant a fait valoir la création dans son pays, d’un centre qui appuie 140 bureaux culturels aidant à préserver les différentes langues. Dès les premiers jours de l’indépendance, il a voulu protéger le riche patrimoine de son peuple.
La religion joue un rôle important dans le rapprochement des peuples, a encore affirmé l’intervenant, ajoutant que son gouvernement entretient des relations avec les organisations religieuses. Pour renforcer l’entente, il a mis en place un conseil composé de plusieurs églises. Depuis l’indépendance, on a traduit en Ouzbek le coran, le kaddish, la bible, l’histoire d’apôtres et d’autres livres religieux. L’Ouzbékistan est le troisième État à traduire le coran en braille. Tachkent a été nommée cette année capitale de culture islamique. L’Ouzbékistan qui condamne les manifestations d’intolérance religieuse, n’épargnera aucun effort pour renforcer la compréhension entre les cultures et les religions.
M. LIU ZHENMIN (Chine) a déclaré que la diversité culturelle était une valeur inestimable, renforcée par le phénomène de la mondialisation. Le Gouvernement chinois a toujours promu le concept d’« harmonieux mais différent », s’opposant à l’extrémisme, à l’imposition des valeurs des uns au détriment de celles des autres, ainsi qu’à la discrimination, aux préjugés et à la xénophobie. L’évolution de la civilisation chinoise au cours des 5 000 dernières années a prouvé par exemple que la religion pouvait jouer un rôle positif dans un développement harmonieux, a souligné le représentant. La perméabilité de la culture chinoise a également permis à différentes religions de s’y épanouir librement, qu’il s’agisse du taoïsme, du bouddhisme, de l’islam ou du christianisme. Le Gouvernement chinois respecte quant à lui la liberté de religion, encourageant la participation des personnels religieux chinois aux programmes de coopération internationale. M. Liu a estimé que cette coopération pouvait prendre trois formes: faire sienne l’approche « harmonieux mais différent » prônée par la Chine; renforcer l’éducation et la sensibilisation de l’opinion publique et faciliter le rôle des médias dans la promotion d’une culture de paix.
Mme KIRSTI LINTONEN (Finlande) a noté que l’identité religieuse sert de plus en plus de base à l’action politique, les enceintes religieuses devenant des lieux de négociations pour tout type de questions sociales. Toutefois, a-t-elle tenu à préciser, bien qu’utile, le dialogue interreligieux n’est pas en mesure de soigner les maladies sociales que sont le chômage, les sentiments d’inutilité et de marginalisation. Les problèmes sociaux ne peuvent pas être réglés par des paroles mais par des actions, a-t-elle ajouté. Nous constaterons que les défis que nous rencontrons dans la construction des sociétés multiculturelles et multireligieuses ne sont pas dus à des différences entre les religions, a souligné Mme Lintonen, mais sont plutôt le reflet de problèmes sociaux qui amènent de petits groupes à rechercher une base idéologique pour défendre leur cause politique. Nous ne devons pas laisser ces opinions extrêmes dominer celles de la majorité, a voulu la représentante.
Elle a appelé chacun à dépasser le seuil de la suspicion et de la défiance par le respect mutuel et la reconnaissance des valeurs de sacralité, d’humanité et de paix communes à toutes les traditions culturelles et religieuses. Quant à la situation actuelle en Europe, elle a déclaré que l’Europe fait face au défi du développement et du renforcement du dialogue entre les communautés issues de l’immigration, les minorités ethniques et les diverses communautés religieuses, en particulier les musulmans. S’exprimant sur la création d’un islam européen, Mme Lintonen a déclaré qu’il n’était pas du devoir des gouvernements, ou même de l’Union européenne, de chercher à « gérer » l’islam en Europe. Il revient cependant aux gouvernements la tâche de créer les conditions favorables à « l’émergence d’une pensée musulmane qui serait en adéquation avec les réalités des sociétés occidentales démocratiques et égalitaires », a-t-elle poursuivi, tout en exhortant les gouvernements à donner les moyens aux musulmans de représenter leurs intérêts de manière démocratique et efficace dans la société civile et à encourager les courants musulmans majoritaires à se faire démocratiquement élire dans des organes représentatifs.
La représentante a rappelé que les musulmans de son pays étaient représentés par le Conseil islamique finlandais et que le Gouvernement étudiait actuellement la législation, ainsi que son application, pour s’assurer que toutes les personnes vivant en Finlande aient le droit aux mêmes chances quelles que soient leur origine ethnique ou leurs croyances religieuses. Elle a précisé que les nouveaux venus n’étaient pas les seuls à devoir s’adapter à leur pays d’adoption, mais que la société elle-même devait changer et assumer ses responsabilités quant au processus d’intégration. Elle a conclu en réaffirmant l’engagement et les initiatives de son pays en faveur du dialogue et de la coopération interculturels, dimensions par ailleurs inscrites dans la culture et l’identité finlandaise.
M. MOHAMMED AL-ALLAF (Jordanie) a déclaré qu’il fallait faire désormais appel à la raison et au bon sens et jeter les bases d’un dialogue constructif entre les peuples. Les dernières années ont vu le déclin des gauches du monde entier et la montée simultanée de formations politiques qui considèrent l’islam comme un ennemi. C’est pourquoi nous aspirons à ce que ce dialogue soit une occasion historique d’éviter le piège des malentendus. En Jordanie, le message que le Gouvernement s’efforce de disséminer est que le dialogue reste le seul moyen de parvenir à faire régner l’harmonie entre les peuples et les cultures. Ce message vise à réhabiliter l’islam et à l’affranchir des soupçons d’intolérance qui pèsent à tort contre lui pour faire de cette religion un partenaire et non un adversaire. Un groupe de travail basé à Amman est d’ailleurs chargé d’identifier des moyens pratiques de favoriser la compréhension entre les mondes occidental et musulman. Les Nations Unies restent toutefois l’enceinte la plus indiquée pour traiter de ces questions, a estimé le représentant, qui s’est félicité à cet égard de la tenue du premier forum de l’Alliance des civilisations en janvier à Madrid. Les civilisations modernes ne sont parvenues à cette situation de défiance et de rejet qu’en raison de leur isolement vis-à-vis des cultures et des religions qu’elles ne connaissent pas, a-t-il conclu.
M. EWALD WENSLEY LIMON (Suriname) a rappelé que son pays était un pays multiethnique, multiculturel, multilingue et multiconfessionnel, qui abrite environ 10 groupes ethniques et au moins autant de types mixés d’origine coloniale. La composition ethnique du pays, a-t-il ajouté, est constituée de descendants de tous les coins du monde: Amérindiens, Européens, Africains, Asiatiques, Arabes, Juifs et autres groupes. Plusieurs religions coexistent également et de nombreuses langues sont parlées, contribuant ainsi à la richesse culturelle du pays. Le représentant a en outre déclaré que la Constitution de son pays garantit la non-discrimination et les libertés fondamentales. Mon gouvernement respecte pleinement ces principes et cherche à les protéger à tous les niveaux, en ne tolérant aucune violation, a affirmé le représentant, avant de rappeler que depuis 1989 le Conseil interreligieux du Suriname est un lieu de consultation et de dialogue entre les principales religions du pays et qu’il coopère sur le plan régional avec les autres pays des Caraïbes en vue de renforcer le dialogue sur les questions culturelles, aux niveaux régional et mondial. Il a conclu en affirmant son appui à la promotion du dialogue entre les civilisations, pour renforcer le respect, la tolérance et la compréhension entre les religions.
M. TAKAHIRO SHINYO (Japon) a appelé la communauté internationale à garder à l’esprit ses résolutions précédentes concernant la nécessité de respecter la diversité culturelle et religieuse comme moyen de mettre fin à la discrimination et à la violence fondées sur les différences religieuses et autres. Il a rappelé à ce titre l’importance de l’éducation, du secteur privé et des autorités locales pour améliorer la compréhension mutuelle aux niveaux local, national, régional et international, tout en faisant état des initiatives prises par son pays. Reconnaissant l’importance de tels efforts dans la lutte contre le terrorisme, le représentant a conclu en abordant la question de la sécurité humanitaire dont le but est de protéger et d’émanciper chaque citoyen. Le Japon est convaincu que la sécurité humaine a beaucoup en commun avec les buts du dialogue interreligieux et interculturel, qui sont l’exercice des droits humains et des libertés fondamentales. Le représentant s’est donc dit convaincu qu’un tel dialogue peut et doit être avancé par la réalisation des objectifs de la sécurité humaine.
Mme CLAUDIA BLUM (Colombie) a appelé les États à promouvoir et à protéger, au niveau national, l’identité et la diversité culturelles, tout en encourageant la protection de la diversité culturelle au niveau international. Elle a recommandé l’adoption de mesures législatives et politiques, de manière à garantir et promouvoir le respect des droits culturels et à promouvoir et préserver l’héritage mondial et local. Une grande importance doit être accordée aux mesures politiques de protection et de promotion des droits des autochtones. Il est tout aussi important de garantir les droits des migrants qui sont souvent l’objet de xénophobie et d’autres pratiques discriminatoires. Les médias, a-t-elle encore dit, peuvent aussi contribuer à la promotion de la compréhension et de la coexistence pacifique. Il est utile que les médias de toutes les régions du monde établissent sur une base volontaire et autonome des espaces permanents pour analyser et approfondir leurs fonctions dans l’interaction pacifique des civilisations, en considérant le contexte politique, social et économique. Les enfants et la jeunesse constituent un autre aspect essentiel, a-t-elle encore dit, en jugeant important de renforcer leurs capacités d’analyse et leur compréhension des valeurs du pluralisme culturel et du respect de la différence. Au niveau multilatéral, la Colombie considère que la coopération au sein des Nations Unies est essentielle. Elle doit être basée sur le respect de l’identité des nations. La représentante a conclu, en reconnaissant le rôle de l’Alliance des civilisations qui peut permettre de contenir les positions extrémistes.
M. SIRODJIDIN ASLOV (Tadjikistan) a déclaré que la diversité culturelle et religieuse constituait un atout plutôt qu’un handicap. Dans son pays, la culture de tolérance et le respect ont été forgés pendant des milliers d’années, marquées par l’interaction de diverses cultures et religions. Ces valeurs ont été consacrées par la Constitution tadjike, dont l’article 26 garantit la liberté de culte, une mesure qui prend tout son sens quand on sait que 66 religions différentes coexistent dans le pays. Outre le fait qu’il a été coauteur de la résolution 61/221 de l’Assemblée générale, le Tadjikistan est également un des pays partenaires du Dialogue interconfessionnel et de la coopération pour la paix, qui s’est tenu à New York tout récemment. Le représentant a souligné la nécessité de rechercher de nouveaux moyens de renforcer la coopération et l’intégration. Rappelant que le Tadjikistan accueille actuellement la réunion des dirigeants de la Communauté des États indépendants, de la Communauté économique eurasiatique et du Traité de sécurité collective, le représentant a précisé que cette réunion visait à hâter la mise en œuvre d’un certain nombre d’accords et d’instruments dans les domaines de la culture, de la science, de l’éducation et de la sécurité. Seule une coopération renforcée entre ces organisations régionales permettra de créer un espace socioculturel harmonieux et respectueux des cultures et religions de chacun, a ajouté le représentant.
M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a affirmé que la création de passerelles entre religions contribuera à former une culture de paix. La méconnaissance des autres est un facteur de troubles, a-t-il poursuivi, et permet de cacher les erreurs répandues par l’extrémisme intellectuel dans le monde. Il a ainsi prôné le renforcement du dialogue interculturel et a plaidé en faveur du rapprochement intellectuel, du respect de la diversité, avant de souligner qu’il était impératif de faire la distinction entre religion et politique. « Tout dialogue visant à consolider la coopération entre religions et visant à instaurer une culture de paix ne peut se limiter au renforcement de liens sélectifs au détriment de la compréhension et de l’inclusion de toutes les cultures et religions », a-t-il dit. Il a en outre souligné que ce dialogue doit être accompagné d’une évolution intellectuelle pour lutter contre toutes formes de préjugés. Il a conclu en appuyant la proposition faite par le Pakistan et les Philippines de créer au sein du Secrétariat une nouvelle unité pour le dialogue entre les cultures et les peuples. Le représentant a, pour finir, appuyé les recommandations de l’Alliance des civilisations, en particulier celle qui concerne la fin de l’occupation israélienne.
M. HABIB MANCHOUR (Tunisie) a déclaré que son pays attache une grande importance aux valeurs de tolérance. La Tunisie promeut l’identité nationale et l’entente entre les peuples sur une base égalitaire. Elle fait de son mieux pour renforcer les valeurs de tolérance et sur le plan culturel, elle a pris de nombreuses mesures pour renforcer le dialogue entre les peuples et les civilisations. Elle a créé, par exemple, le prix mondial des études islamiques et une chaire pour le dialogue entre civilisations afin de renforcer les bases la paix et des droits de l’homme. Après l’appel de l’ONU en 2005, encourageant le dialogue des civilisations, la Tunisie a abrité un séminaire sur les civilisations. Elle a aussi été l’hôte de plusieurs autres séminaires du même type dont l’objectif était de promouvoir la paix et le dialogue.
M. JEAN DANIEL VIGNY (Suisse) a affirmé que les tensions entre religions ont pris fin dans son pays il y a un siècle et demi et que cette leçon de l’histoire a été intégrée dans la politique suisse de promotion de la paix. Il s’est félicité de l’Alliance des civilisations qui, selon lui, est une initiative qui prend en compte la dimension politique des tensions interreligieuses ou interculturelles. M. Vigny a rappelé que le respect de la diversité religieuse ou culturelle n’est pas seulement une question de volonté politique. Elle s’inscrit dans le contexte plus large du bon fonctionnement de l’état de droit et des principes qui le régissent à savoir, la non-discrimination, la liberté d’expression, la liberté de pensée et la liberté de religion ou de conviction. Il a regretté que les pratiques des adeptes d’une religion ou d’une conviction se heurtent souvent à l’incompréhension et s’est alarmé de la montée de l’intolérance religieuse et de la discrimination fondée sur la religion et les convictions. Il a rappelé que la liberté de religion et de conviction est un droit aux formes multiples et que différents instruments juridiques internationaux en garantissent les nombreux aspects. Le représentant a conclu en affirmant que la Suisse a la ferme conviction que c’est l’exercice indiscriminée des droits de l’homme et non la religion en tant que telle, qu’il faut protéger, avant de souligner que seul un dialogue constructif et respectueux peut permettre de surmonter les différences d’opinions pour promouvoir une compréhension mutuelle et dépasser ces défis.
M. IVAN ROMERO MARTINEZ (Honduras) a déclaré que le respect universel de la liberté de pensée était sacré comme la liberté d’action, la liberté de religion et la liberté politique. C’est pourquoi la Constitution hondurienne garantissait l’égalité de tous ces citoyens devant la loi et pénalisait les discriminations fondées sur l’appartenance sexuelle, ethnique ou de classe. Dans ce cadre, la liberté religieuse et de culte est pleinement protégée par la loi, comme l’un des moyens de parvenir à une démocratie vraiment représentative. Nous voyons avec satisfaction le fait que le rapport du Secrétaire général en la matière établi que le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) a créé au Honduras un Comité interecclésiastique de prévention de VIH/sida, auquel participent des représentants des Églises catholique, épiscopale, évangélique et adventiste. Le représentant l’a cité comme un exemple vivant de coopération interreligieuse.
M. NGUYEN TAT THANH (Viet Nam) a rappelé que son pays avait été victime de nombreuses guerres destructives, et qu’en conséquence, il chérissait la paix, la stabilité et le développement. « Nous soutenons pleinement les efforts déployés par les pays, les communautés et les peuples du monde entier, qui poursuivent ces objectifs en promouvant le dialogue et la coopération », a-t-il souligné. La mondialisation favorisant les interactions entre religions et cultures, le temps est venu d’apprendre davantage sur autrui, que ce soit les valeurs partagées ou sur les différences, en vue d’accroître l’unité et de bénéficier de cette source de diversité, mais aussi pour vivre dans un environnement culturel pacifique, non violent, basé sur le respect, la compréhension et la tolérance. Dans cette optique, a poursuivi le représentant, il convient de mettre l’accent sur l’éducation, qui revêt une importance fondamentale, et particulièrement celle des jeunes et des medias. Des efforts concertés doivent être mis en place aux niveaux global, régional, national et local.
Le représentant a en outre réitéré son soutien à l’Alliance des civilisations, au Forum tripartite sur la coopération interconfessionnelle pour la paix et au système de l’ONU. Il a déclaré qu’au niveau régional, les représentants de son pays dont les religions et confessions diffèrent, participent activement au dialogue interculturel. Il a par ailleurs affirmé que le Viet Nam était un pays multiethnique et multiculturel composé de 54 nationalités d’origine différentes et de nombreuses communautés religieuses vivant côte à côte, en harmonie et dans le respect de l’identité de chacun. Il a conclu en mettant en exergue le fait que le peuple vietnamien a, dans le passé, uni ses forces pour défendre l’indépendance de son pays et qu’il entreprend aujourd’hui de le reconstruire ensemble.
M. SAMUEL OUTLULE (Botswana) a déclaré que ce qui compte ce n’est pas ce que nous sommes capables de dire sur la nature pacifique de nos religions et cultures respectives mais plutôt ce que nous sommes prêts à faire pour que nos croyances soient des instruments de paix au service de l’humanité. Il a remarqué que le Dialogue de haut niveau vient quelque peu tardivement si l’on considère la progression alarmante de l’intolérance, de la haine pour des motifs religieux et de la confrontation des cultures. Il a appelé la communauté internationale à agir de manière constructive en évitant les réponses réactionnaires. Nous pourrons ainsi éviter la politisation des religions et des cultures qui mène souvent à l’extrémisme et à l’intolérance, a-t-il affirmé.
Nous pourrons faire du monde un lieu meilleur, a-t-il poursuivi, si nous agissons ensemble pour améliorer la condition humaine ici sur terre et non en vue de notre prochaine existence. Le renforcement des politiques d’intégration et de participation de tous les citoyens sur les bases de l’égalité et du respect constitue l’un de nos défis, raison pour laquelle a-t-il ajouté, il vaudrait mieux que la religion ne porte pas de nom. Ainsi, a poursuivi le représentant du Botswana, les parents et les sociétés pourraient élever les enfants sans exprimer de jugements de valeur sur d’autres croyances ou de descriptions déshumanisantes sur les disciples d’autres religions semant les germes de l’intolérance future et du sentiment de supériorité. Il a à ce titre souligné l’importance de l’éducation pour aider à une meilleure connaissance des autres cultures et religions, tout en rappelant que le dialogue interconfessionnel et interculturel constitue un défi pour tous et qu’il n’est pas le monopole des croyants. Il a ensuite rappelé que le Botswana est une société multiculturelle, multilinguistique et multiconfessionnelle, tout en ajoutant que la Constitution de son pays garantit la liberté religieuse. Il a salué le rôle des organisations basées sur la foi comme partenaires du Gouvernement dans ses efforts de développement.
Il a finalement exprimé le souhait que l’Alliance des civilisations fournisse le cadre propice aux discussions futures sur des questions religieuses et culturelles de même que sur des questions qui touchent à l’extrémisme et à la violence.
Mme SANJA STIGLIC (Slovénie) a proposé comme partie du dialogue interculturel, la promotion de la mobilité, particulièrement celle des jeunes, car il y a là une excellente façon d’apprendre le monde. Elle a aussi rappelé la proposition de son pays de créer une université européenne et a exprimé l’espoir que cette institution sera capable de contribuer au dialogue entre les jeunes méditerranéens de diverses religions et cultures. En 2006, la Slovénie avait pris l’initiative d’établir un centre de perspective européenne pour développer une nouvelle manière de s’attaquer aux questions en Europe. Le Ministère des affaires étrangères, en coopération avec le centre, a organisé plusieurs réunions et tables rondes avec des dirigeants politiques et religieux de la région des Balkans. L’année prochaine, le centre lancera deux projets qui viseront l’amélioration du dialogue entre les cultures en Europe.
M. JUAN ANTONIO YANEZ-BARNUEVO (Espagne) a affirmé que son pays se réjouissait des progrès réalisés par les diverses initiatives mises en place, notamment l’Alliance des civilisations que l’Espagne coparraine avec la Turquie. Il a rappelé, à cet effet, que le plan de l’Alliance sur les deux prochaines années a pour objectif de faciliter la compréhension mutuelle, mais aussi de mettre un terme aux préjugés et notions préconçues sur autrui et d’encourager, par l’échange et la coexistence, le respect, la tolérance et le dialogue tout en condamnant l’amalgame entre religions ou croyances et extrémisme et violence. Le plan axe son action sur trois domaines spécifiques: les jeunes, l’éducation, la migration et les médias.
Nous devons combattre l’absence de dialogue et le manque de compréhension entre les peuples par l’éducation et avec la coopération des médias, et nous pencher tout spécialement sur les groupes sensibles que sont les jeunes et les migrants, a poursuivi l’intervenant. Il a par ailleurs plaidé pour que les décisions dans ces domaines soient adoptées dans une démarche globale, en rappelant toutefois qu’il est également indispensable de compter sur le développement d’actions au niveau local pour garantir leur mise en application. M. Barnuevo a ainsi indiqué que son pays travaillait à la définition de son propre plan pour l’Alliance des civilisations, dont le but sera, entre autres, de régler les aspects internationaux et nationaux du dialogue interculturel et religieux.
Il a conclu en affirmant souhaiter que l’Alliance des civilisations devienne un cadre de référence pour les États, organisations internationales, représentants de la société civile et de tous les acteurs en matière de dialogue interculturel, pour favoriser ce dialogue. Il a soutenu que l’Alliance devait accorder une attention spéciale, mais non exclusive, sur la relation entre l’Occident et le monde islamique: l’Alliance doit constituer un instrument utile dans le domaine de la gestion et de la prévention des conflits, a-t-il conclu.
Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI (Brésil) a affirmé que le dialogue organisé aujourd’hui et hier démontrerait sans doute que les conflits habituellement perçus comme étant motivés par des considérations d’ordre ethnique ou religieux sont en en fait le plus souvent alimentés par les inégalités et l’exclusion. Dans certains cas, la réalité de l’exclusion sociale et des inégalités est aggravée par la persistance de situations de domination et d’injustice, qui empêchent les peuples de réaliser l’avenir auxquels ils aspirent. Pays multiculturel par excellence, le Brésil valorise pour sa part la diversité des expériences humaines, a poursuivi son représentant, qui a expliqué que la diversité était même revendiquée par son Gouvernement comme un élément fondamental de sa culture. Celui-ci s’est lancé dans la lutte contre les graves inégalités sociales. Des politiques publiques ont ainsi été lancées ces dernières années pour réduire la pauvreté et éradiquer la famine et se sont traduites par des progrès encourageants. Les Nations Unies, pour leur part, doivent concentrer leurs efforts sur la compréhension des raisons de l’extrémisme et promouvoir des dialogues interconfessionnels et interculturels de ce type, a préconisé le représentant. Dans ce contexte, le Brésil soutient pleinement l’Alliance des civilisations, l’initiative des Premiers Ministres espagnol et turc.
M. ADRIAN NERITANI (Albanie) a déclaré que les Albanais sont par nature tolérants et ont une aversion pour toute forme d’extrémisme. Qu’ils soient musulmans, orthodoxes ou catholiques ne définit pas une ligne de démarcation entre eux. Cette tolérance religieuse est le produit d’une longue tradition historique, a-t-il expliqué. La coexistence des trois grandes religions en Albanie est considérée comme une situation unique dans une région où la religion a souvent été mêlée au nationalisme et où des crimes fratricides ont été commis en son nom. Au cours de la dernière décennie, les Balkans ont été confrontés à une série de politiques nationalistes qui ont débouché sur des tragédies humaines. La volonté d’user de la rhétorique pourrait être bien mieux employée, a ajouté le représentant. Reconnaissant le cas unique que représente son pays dans le domaine de l’harmonie religieuse, et sous l’auspice du Directeur général de l’UNESCO et du Gouvernement d’Albanie, un sommet régional sur le dialogue interethnique et interreligieux fut tenu à Tirana il y a quelques années.
Lors de ce sommet, les leaders et responsables politiques des pays du sud est de l’Europe se sont engagés à promouvoir la tolérance, la compréhension et la coexistence des cultures et religions, mais aussi à définir la diversité culturelle comme un vecteur d’identité et un outil de réconciliation, et à capitaliser sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication pour favoriser la liberté d’expression, pierre angulaire des sociétés démocratiques. Le représentant a conclu en rappelant que la déclaration de Tirana mettait l’accent sur le fait que tous les leaders religieux ont le potentiel naturel d’exercer une influence morale positive pour que les peuples se comprennent et interagissent entre eux.
M. AKEC KHOC (Soudan) a déclaré que dans son pays, l’islam et le christianisme avaient toujours coexisté et interagi. Toutefois, plus que l’extrémisme, le conflit provoqué par le contrôle des ressources économiques a toujours perturbé cette harmonie. Rappelant qu’il existait une centaine de groupes culturels au Soudan, il a déclaré que le dialogue interculturel et la coopération avaient toujours caractérisé leurs relations. La Constitution nationale intérimaire et d’autres lois défendent pleinement et promeuvent le dialogue interculturel et le respect de la diversité religieuse et culturelle, a poursuivi le représentant. Elle stipule que la citoyenneté s’appuie sur un certain nombre de droits, qui sont parfois contradictoires. C’est pourquoi le dialogue demeure le meilleur moyen de résoudre les tensions qui peuvent résulter de la coexistence de différents groupes. La finalisation de l’Accord global de paix entre le nord et le sud du pays en janvier 2005 et des accords qui ont suivi ont renforcé cette dimension pluraliste. À l’heure de la mondialisation, nous ne pouvons pas nous contenter d’actions au niveau national, mais nous devons coopérer à l’échelle régionale et internationale en mobilisant toutes les parties prenantes, a conclu le représentant soudanais.
M. ALEXEI TULBURE (Moldova) a fait part de l’expérience de son pays situé sur le passage historique entre l’Asie et l’Europe et qui a longtemps été le carrefour de différents peuples et civilisations. La population moldave a développé le sens de la tolérance qui est devenue une caractéristique de la mentalité nationale moldave. Les minorités nationales jouissent d’une participation et d’un développement social, ce qui contribue grandement à l’amélioration du processus de la démocratisation dans le pays. Le Gouvernement moldave a créé, parmi ses institutions, un département des relations interethniques. En 2004 a été adoptée une loi sur le concept de la politique nationale moldave. Récemment, le Parlement moldave a adopté une loi sur les cultes afin de moderniser sa législation et la rendre conforme aux normes européennes. Il y a 20 cultes et associations religieuses enregistrées en République de Moldova avec environ 2 400 congrégations. Elle a insisté sur l’importance de l’éducation dans la construction de sociétés pluralistes et inclusives. Dans ce cadre, son pays a sollicité les activités et programmes de l’UNESCO, de l’UNICEF et d’autres organisations régionales et internationales qui cherchent à promouvoir la paix et la tolérance, la diversité des cultures à travers le dialogue et l’éducation.
Mgr DOMINIQUE MAMBERTI, Observateur permanent du Saint-Siège, a déclaré que la religion est en fait essentiellement un havre de paix et que l’utilisation de la violence ne peut lui être attribuée en tant que telle mais plutôt aux limites culturelles dans lesquelles les religions ont évolué. Comme l’a montré l’histoire récente, les dirigeants politiques, a-t-il poursuivi, ont parfois manipulé l’identité religieuse de même que les mouvements nationalistes et les manifestants dans certains États incapables de fournir le développement et la justice à leurs peuples. Les traditions historiques du discernement spirituel ont contribué à éloigner la ferveur religieuse de la violence. Le questionnement philosophique et la recherche historique ont permis à la religion d’approfondir sa quête de vérité, facilitant ainsi le dialogue et consolidant son impact sur le maintien de la paix et sur la société dans son ensemble. Il ne peut y avoir de paix sans compréhension et coopération entre les religions, de même que celles-ci ne peuvent exister sans la liberté religieuse. La promotion de la liberté religieuse pour tous exige des actions publiques et la responsabilité religieuse, a prévenu l’orateur.
En ce qui concerne le rôle des autorités politiques, Mgr Mamberti a appelé les gouvernements à soutenir les programmes des groupes interreligieux qui visent à éradiquer la violence sectaire. Il a ensuite affirmé que les minorités religieuses ne prétendent pas à une protection ou à un statut spécial du moment que leurs droits à la liberté religieuse sont pleinement garantis et qu’elles ne font pas l’objet de discriminations fondées sur la religion. Il a aussi voulu que ces minorités jouissent des mêmes droits civils que l’ensemble de la population et les membres de la majorité religieuse.
Les réunions internationales dédiées à la prière et à la promotion de la paix devraient servir d’exemple aux niveaux national et local, a-t-il poursuivi, tout en rappelant que la prière et les bonnes intentions ne sont authentiques que si elles se trouvent concrétisées dans des gestes pratiques à tous les niveaux. Alors que le concept de soi-disant conflit des civilisations gagne en importance, a-t-il conclu, il revient aux religions de jouer un rôle spécial dans l’ouverture de nouvelles voies vers la paix, vers l’union et la coopération entre États et organisations internationales. Il a finalement appelé la communauté internationale à reconnaître et à protéger la liberté religieuse dans le monde entier afin de permettre aux religions de pleinement assumer leur rôle.
M. EKMELEDDIN IHSANOGLU, Organisation de la Conférence islamique (OCI) s’est félicité du succès de l’Alliance des civilisations et de voir que ce dialogue interconfessionnel s’enrichit. Il a rappelé que l’OIC a été l’initiatrice de ce dialogue depuis 1998. Il a toutefois indiqué qu’il restait beaucoup à faire, comme le règlement des conflits religieux. Il faut des mesures concrètes, a-t-il dit, car la sécurité du monde en dépend. C’est dans ce contexte qu’il a salué le nouvel ordre du jour de l’Alliance des civilisations, lequel se focalise sur la résolution pratique des questions liées à la jeunesse, à l’éducation, aux médias, et à l’immigration, aux sujets desquels émanent de graves sources de friction dans les relations internationales.
Il n’y a pas d’autres alternatives que le dialogue, a-t-il poursuivi, avant de souligner néanmoins qu’il subsiste des faiblesses dans la tenue de ces dialogues. Il a fait référence à certains groupes qui ne voient pas la nécessité de ces dialogues, à ceux qui ont l’impression d’être supérieurs aux autres ou à ceux qui parlent sans la volonté politique de réaliser un objectif donné. M. Ihsanoglu a indiqué que, pour remédier à ces lacunes, le dialogue doit donner plus d’importance à l’appréciation de l’autre, chaque civilisation devant en effet contribuer au respect de toutes les croyances. Dans cette optique et pour réduire les tensions, l’OIC a proposé qu’un instrument juridique soit discuté et adopté pour interdire la diffamation des religions et leurs symboles sacrés.
Il a en outre tenu à s’insurger contre la discrimination fondée sur la haine dont l’islam est la victime, et notamment en Occident où, a-t-il estimé, une certaine « islamophobie s’est installée ». Il a donc conclu en militant pour une réconciliation historique entre l’islam et le christianisme afin de promouvoir un mode plus sûr, plus pacifique et plus prospère.
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