SG/SM/10516

TRANSCRIPTION DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE PAR LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL, KOFI ANNAN, AU SIÈGE DES NATIONS, LE 15 JUIN 2006

15 juin 2006
Secrétaire généralSG/SM/10516
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

TRANSCRIPTION DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE PAR LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL, KOFI ANNAN, AU SIÈGE DES NATIONS, LE 15 JUIN 2006



Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Bonjour Mesdames et Messieurs.


Je suis sûr que vous avez tous entendu que le Gouvernement britannique est disposé à ce que Charles Taylor purge la peine que lui imposera le Tribunal spécial pour la Sierra Leone au Royaume-Uni.  Ceci devrait permettre au procès d’être transféré à La Haye.  Je suis très reconnaissant au Premier Ministre Tony Blair et à Margaret Beckett, Ministre des affaires étrangères, de cette décision digne d’un chef d’État et qui marque un nouveau pas en avant dans notre lutte contre l’impunité pour les crimes les plus atroces. 


Sur une note plus triste, j’ai été très déçu d’entendre que plus de 60 personnes ont été tuées et plus de 40 blessées au Sri Lanka, lorsqu’un bus a explosé sur une mine.  Il est totalement irresponsable et injustifiable de la part de combattants, quelle que soit leur cause, de poser des mines qui peuvent causer ce genre de tragédie.  Cela montre également à quel point il est important pour toutes les parties au Sri Lanka de renouveler le cessez-le-feu et d’empêcher que le pays ne retombe dans une guerre civile généralisée. 


Comme vous le voyez, il y a beaucoup d’événements qui sont en train de se produire dans le monde et il est clair que ce bâtiment est directement concerné.  Nous sommes en train de travailler à l’heure actuelle sur la question de l’Iran, de l’Iraq, de la crise palestinienne, sur les enquêtes concernant le meurtre de l’ancien Premier Ministre Hariri, les relations entre la Syrie et le Liban, et il ne s’agit là que du Moyen-Orient.  Nous sommes également en train de travailler sur le VIH/sida et les migrations.  Nous travaillons également sur le Timor-Leste.  Nous travaillons aussi sur la Somalie, la République démocratique du Congo et sur un grand nombre d’autres problèmes en Afrique, en particulier, bien sûr, le Darfour. 


Ne serait-ce que cette semaine, nous avons été en mesure de régler pacifiquement un différend frontalier entre le Nigéria et le Cameroun, deux pays africains qui ont connu des conflits dans le passé, épargnant ainsi probablement des milliers de vies et des millions de dollars.  C’est précisément pourquoi l’ONU a été créée, pour prévenir les guerres. 


En fait, tout ce que je viens d’énumérer sont des choses dont le monde attend de l’ONU qu’elle les règle.  Il s’agit juste de quelques-unes parmi les nombreuses raisons qui font que nous devons veiller à ce que l’ONU continue de fonctionner même lorsque nous procédons à sa réforme.  Mais c’est aussi pourquoi nous devons la réformer, afin qu’elle puisse mieux fonctionner. 


De fait, nous faisons des progrès en ce qui concerne la réforme.  Le Conseil des droits de l’homme et la Commission de consolidation de la paix tiendront tous deux leurs premières séances la semaine prochaine.  Nous disposons désormais d’un Bureau de la déontologie, qui offre une meilleure protection pour les personnes qui dénoncent des abus au sein du Secrétariat.  Les États Membres travaillent en ce moment à la réforme du Conseil économique et social, à une résolution sur le développement, ainsi qu’à l’examen des mandats.  La semaine prochaine, je vais transmettre à l’Assemblée l’examen d’ensemble sur la responsabilité et le contrôle, qui a été réalisé par un groupe d’experts indépendant.  Et très

prochainement, je vais soumettre mes propositions sur la réforme des achats, ainsi que les modalités du mandat du nouveau Comité consultatif indépendant pour les questions d’audit, et les informations supplémentaires concernant mon rapport sur la réforme de la gestion qui ont été demandées par l’Assemblée. 


À l’évidence un grand nombre d’États Membres rechigne à négocier sous la pression d’un plafond des dépenses, mais j’espère que nous allons bientôt voir un accord en vue de sa levée.  Je sens clairement un vif désir au sein de l’ensemble des Membres d’avancer sur la voie des réformes, qui vont indubitablement dans l’intérêt général, car elles permettront à l’Organisation d’être plus efficace et plus utile à tous les États Membres. 


Je vais maintenant prendre vos questions.


Question (interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, bienvenue à cette conférence de presse.  Ma première question concerne l’article du Financial Times, paru il y a quelques jours, dans lequel vous avez reproché aux États-Unis d’utiliser le pouvoir de l’argent pour forcer l’Organisation à se réformer.  Vous avez également lancé un appel aux pays en développement et à d’autres nations pour qu’ils abandonnent ce que vous avez appelé « la rhétorique », car sinon ils risquent d’engager une bataille entre pays riches et pays pauvres, ce qui pourrait saper une fois pour toutes l’ONU.  Pouvez-vous commenter ce point.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Mon message est très simple.  La réforme des Nations Unies va dans l’intérêt général de tous les États Membres.  Il ne peut y avoir de divergence sur la question de disposer d’une meilleure gestion.  Tout le monde veut une meilleure gestion, une gestion plus efficace des Nations Unies et il est important que les États Membres trouvent un moyen de travailler ensemble.  Nous devons dissiper cette atmosphère de méfiance et nous unir dans l’intérêt commun pour renforcer l’Organisation.  J’ai le sentiment, depuis ces dernières semaines, que c’est ce qui commence à se produire et j’en suis encouragé.  J’ai l’impression que les tensions et l’atmosphère empoisonnée que nous avons constatées au début de l’année semblent se dissiper et je suis persuadé que les États Membres pourront travailler de concert pour réformer cette Organisation.  Je vous ai donné à l’instant une indication de toutes les questions sur lesquelles ils sont en train de plancher.


Question (interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, aujourd’hui à Genève, le Conseil des droits de l’homme a entre autres choses entamé un débat sur un point de l’ordre du jour visant Israël pour en faire un point consacré spécifiquement à un État.  Pensez-vous qu’en n’ayant pas tenu compte de la version israélienne des événements de la semaine dernière, vous avez apporté de l’eau au moulin de ceux qui veulent revenir aux vieilles pratiques de la Commission des droits de l’homme?  Pouvez-vous parler également de vos relations avec l’Ambassadeur Bolton?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je voudrais commencer par dire que l’une des raisons sous-tendant la réforme de la Commission des droits de l’homme était justement de s’écarter des pratiques passées, des pratiques que nous avons tous critiquées s’agissant de la sélectivité et de la politisation de la Commission.  Au sein du nouveau Conseil, nous avons fait en sorte que chaque Gouvernement fasse l’objet d’un examen.  Aucun pays ne peut se proclamer champion des droits de l’homme.  Et donc, le Conseil des droits de l’homme peut se pencher sur Israël, mais il devra se concentrer également sur les autres pays.  Nous avons également indiqué qu’il faudrait commencer par examiner la situation des droits de l’homme dans les pays membres du Conseil eux-mêmes, et ceci permettra, je l’espère, de s’éloigner de la sélectivité et de  la politisation du mécanisme d’examen de la Commission.


J’en arrive maintenant à la deuxième partie de votre question.  J’ai réagi à des spéculations de la presse qui indiquaient que qu’une mine antipersonnel avait été placée sur la plage.  J’ai ajouté que cela semblait étrange.  Il faut savoir que mon commentaire sur cette dépêche est intervenu avant la publication des conclusions de l’enquête, et à l’heure même où nous parlons, je ne suis pas sûr que le rapport final de l’enquête ait été publié.  Je pense que nous devrions tous attendre que le Gouvernement israélien publie son rapport définitif pour faire de nouveaux commentaires.  Je puis vous dire, que dans l’intervalle, j’ai eu une longue conversation directement avec le Premier Ministre Olmert, et que j’ai également parlé au Président Abbas de l’Autorité palestinienne.  Je vais continuer à dialoguer avec eux.


Pour ce qui est de l’Ambassadeur Bolton, je travaille avec lui comme je travaille avec les 190 autres ambassadeurs.  Je crois qu’en tant que Secrétaire général, j’ai bien travaillé avec ses prédécesseurs et je continuerai à bien travailler avec lui ainsi qu’avec les 190 autres ambassadeurs qui ont la charge de cette Organisation.


Question (interprétation de l’anglais) : À propos du Soudan, vous avez avec d’autres personnalités encouragé la signature de l’Accord au Darfour, mais cet Accord ne prévoit aucun calendrier pour le désarmement des Janjaouites et la situation continue de s’aggraver.  Je voudrais savoir comment une force de maintien de la paix des Nations Unies pourra agir, puisque malgré les accords intervenus, les tueries se poursuivent?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : La première chose que je voudrais dire est que nous devons continuer à exercer des pressions sur les parties ayant signé l’Accord.  Il faut absolument qu’elles respectent l’Accord qui a été signé.  Cela concerne le Gouvernement soudanais, qui est responsable du désarmement des Janjaouites de même que les groupes rebelles.  Nous devons maintenir les pressions sur les deux groupes rebelles non parties à l’Accord et exercer des pressions pour qu’ils le rejoignent.


Pour l’heure, il y a plusieurs choses importantes à faire.  Premièrement, selon moi, il faut trouver les moyens de renforcer la force de l’Union africaine présente sur le terrain.  Il faut lui donner l’appui matériel et logistique nécessaires pour qu’elle s’acquitte plus efficacement de sa tâche et qu’elle protège les populations sur le terrain.  Nous travaillons d’arrache-pied avec l’Union africaine sur ce point et il y aura bientôt une conférence d’annonce de contributions à Bruxelles afin de mobiliser des fonds et de renforcer l’appui logistique à cette force.  Même si une force des Nations Unies prend le relais, cela va prendre du temps et il est par conséquent important que nous appuyons la force de l’Union africaine pour qu’elle puisse mieux accomplir sa tâche et qu’elle puisse assurer la protection.  Il est également très important que les parties et la force de l’Union africaine commencent à mettre en œuvre certaines des dispositions de l’Accord, qui doit être appliqué de manière urgente.


La deuxième chose est que nous devons intensifier nos efforts humanitaires et mobiliser les ressources nécessaires pour venir en aide aux personnes déplacées.  Vous avez vu les conditions sur le terrain lorsque vous vous êtes rendu dans la région.  Sur ce point, Jim Morris m’a indiqué que vers octobre prochain, il devrait pouvoir être possible de distribuer à nouveau des rations entières.  Vous vous souviendrez qu’elles avaient été réduites.  Il s’agit donc d’une bonne nouvelle.


Parallèlement, Jean-Marie Guéhenno, le Chef des opérations de maintien de la paix, dirige sur le terrain une mission d’évaluation conjointe entre l’Union africaine et les Nations Unies.  Un projet sera présenté au Conseil de sécurité, lequel, espérons-le, autorisera le déploiement d’une force des Nations Unies.  Pour l’heure, nous sommes en contact régulier avec les Gouvernements en vue de pouvoir mobiliser des troupes, de sorte qu’une fois la décision prise, nous puissions déployer rapidement la force.


Mais pour en revenir à votre question, les parties ayant signé l’Accord doivent respecter les dispositions de l’Accord et la force de l’Union africaine sur le terrain doit être renforcée. Nous, nous ne sommes pas encore sur le terrain et, par conséquent, nous ne pouvons pas agir.


Question(interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, pour ce qui est du rapport Brammertz, il semblerait que le mandat sera renforcé. Donc, il y aura une prorogation du mandat afin qu’on puisse également enquêter sur les 14 autres affaires liées à l’assassinat de l’ex-Premier Ministre, M. Rafik Hariri. Donc, je voulais savoir comment vous avez l’intention de procéder et je voulais également savoir si vous avez eu des contacts avec le Président de la Syrie parce que vous avez donné votre propre avis dans votre propre rapport. Dans le rapport sur la résolution 1559 (2004), vous aviez indiqué que la Syrie était une partie clef dans cette situation.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je pense que Brammertz et son équipe vont fournir une aide technique supplémentaire aux autorités libanaises dans le cadre de leur enquête. Nous ferons de notre mieux pour les aider afin de pouvoir mener à bien cette enquête.


Pour ce qui est de votre deuxième question, j’ai indiqué très clairement qu’il faudra que la délimitation des frontières intervienne. Je n’ai pas eu de contact direct avec la Syrie sur cette question mais il s’agit bien sûr de quelque chose qui n’est pas exclu. Si à un certain moment, cela est nécessaire, je serai prêt à aider les deux parties à mener à bien la démarcation comme nous avons aidé le Liban et Israël dans le sud.


Les deux parties doivent tomber d’accord sur la démarcation. Il s’agit d’une question qui relève des deux parties. S’il y a accord entre les deux parties et si elles ont besoin de notre aide, nous serons prêts à les aider.


Question (interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, j’ai compris que ce n’est pas vous qui nommez votre successeur. Mais vous avez eu l’expérience d’être candidat et d’être également Secrétaire général adjoint. J’aimerais savoir si vous avez, non pas des conseils mais est-ce que vous pouvez nous dire ce qui est important pour être candidat au poste de Secrétaire général?


Le Secrétaire général(interprétation de l’anglais) : Le Secrétaire général adjoint doit tout d’abord se concentrer sur son travail en tant que Secrétaire général adjoint et ses responsabilités vis-à-vis de l’Organisation des Nations Unies. Si il ou elle est élue, il ou elle devra démissionner et ensuite assumer ses nouvelles responsabilités.


Question(interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, vous avez dit dans votre déclaration liminaire que vous pensez que l’atmosphère empoisonnée semblait s’être dissipée. Ce n’est pas la conclusion que j’ai tirée des commentaires de l’Ambassadeur Bolton cette semaine. Il a répété les mêmes arguments qu’il avait avancés la semaine dernière, à savoir que le discours de M. Mark Malloch Brown était, d’après lui, la plus grande erreur qui s’est produite ici depuis 1989 et qu’il pensait également que ceci risquerait de retarder l’effort de réforme. J’aimerais savoir si vous avez d’autres indications du Gouvernement américain selon lesquelles il ne va pas prendre aussi au sérieux l’incident de la semaine dernière que l’Ambassadeur Bolton?


Le Secrétaire général(interprétation de l’anglais) : Je ne vois pas d’indications selon lesquelles l’Administration américaine souhaite se retirer de l’effort de réforme ou semble croire que le processus de réforme est devenu beaucoup plus difficile qu’au cours de la semaine dernière. J’ai également eu des contacts avec un certain nombre d’autres ambassadeurs de la plupart des groupes dans cette maison. Je crois qu’ils partagent mon opinion selon laquelle l’atmosphère est bien meilleure. Ils sont déterminés à aller de l’avant et à réformer l’Organisation. J’ai indiqué que nous avons déjà réalisé beaucoup de progrès mais il nous reste encore d’autres choses à faire.


Je crois qu’il est également important de replacer les choses dans leur contexte. La réforme, comme je l’ai dit déjà à de nombreuses reprises, c’est un processus et non pas un événement unique. Ce n’est pas un spectacle à Madison Square Garden qui ne dure qu’un soir. Il y a trois phases d’après moi : ce que nous pouvons réaliser d’ici à la fin du mois de juin – je pense que les États Membres doivent montrer qu’ils ont fait des efforts - ; ce que nous pouvons réaliser entre maintenant et la fin de cette session de l’Assemblée générale ; et ce que nous pourrons réaliser au cours de la prochaine session de l’Assemblée générale. Bien entendu, lorsque mon successeur viendra, il aura peut-être ses propres propositions supplémentaires de réforme. Donc, il s’agit d’un processus de réforme en cours. Les États Membres doivent garder cela à l’esprit et travailler d’arrache pied pour obtenir autant de résultats que possible.


Je pense que cette réforme va se poursuivre, elle doit se poursuivre. Les limites au niveau du budget seront levées. Il ne devrait pas y avoir de crise, à mon avis, ce mois-ci. Je crois que les États Membres comprennent que l’Organisation a du travail à faire. Les États Membres nous ont confié ce mandat de réforme dont le but est de nous rendre plus efficace et plus utile. Donc, si quelqu’un dit que les réformes ne sont pas satisfaisantes et qu’il va retirer les contributions et les ressources financières, cela sera extrêmement difficile pour les autres États Membres de poursuivre ces réformes.


Question (interprétation de l’anglais) : Dans son rapport récent au Conseil de sécurité, le Procureur en chef du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie, Mme Carla Del Ponte, a demandé que le Conseil de sécurité accorde à son Bureau une autorité supplémentaire afin qu’elle puisse appréhender et traduire en justice d’anciens criminels de guerre de l’ex-Yougoslavie puisqu’il semble que plus personne ne fasse d’effort pour arrêter ces personnes. Quel est votre avis à ce sujet, compte tenu du fait que certains États Membres ont critiqué cette déclaration de Mme Del Ponte et ont également critiqué le travail du Tribunal?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Il est regrettable que certains des auteurs principaux des crimes n’aient toujours pas été arrêtés et poursuivis. Je parle de Mladic et Karadzic. Je crois que les Gouvernements de cette région et les forces de l’OTAN recherchent ces personnes depuis de nombreuses années mais malheureusement n’ont pas réussi à arrêter ni l’un ni l’autre. A mon avis, il n’est pas réaliste de s’attendre à ce que le Tribunal pour l’ex-Yougoslavie et son Procureur fassent davantage que ce qu’ont fait l’OTAN et les Gouvernements et trouvent Mladic et Karadzic et les livrent à La Haye. Je n’ai pas devant moi la déclaration complète de Mme Carla Del Ponte ou sa demande. Mais il me semble que c’est un événement assez peu probable que la Cour ou le Tribunal qui travaille sur ces questions ne va pas pouvoir lui-même effectuer l’arrestation.


Question (interprétation de l’anglais) : Pourriez-vous nous parler des derniers efforts visant à créer un tribunal international sur le Liban?


Et s’agissant du Soudan, que pensez-vous des conditions posées par le Gouvernement soudanais selon lesquelles les forces de l’Organisation des Nations Unies ne devraient pas prendre pour cibles les Soudanais, y compris les Janjaouites?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je vais commencer par la question du tribunal. Nous sommes en train de travailler sur la question du tribunal. Nous sommes en contact étroit avec les autorités libanaises. Nous sommes également en contact avec le Ministre de la justice et son équipe. Vous vous souviendrez sans doute que mon conseiller juridique, Nicolas Michel, s’est rendu au Liban. Une équipe libanaise est venue ici. Nous continuons à travailler de façon très professionnelle et nous avons l’intention de mettre en place un tribunal. Ce sera un tribunal compétent qui pourra juger des affaires qui lui seront présentées. Je ne peux pas vous fixer de date pour l’instant pour le début des travaux de ce tribunal. Mais nous faisons des progrès.


En ce qui concerne la situation au Soudan, bien entendu, lorsque l’Accord de paix entrera en vigueur et lorsque nous aurons des casques bleus sur le terrain, une chose qu’il faudra aborder sera la question du désarmement. Il y a énormément d’armes qui circulent sur le terrain et, bien entendu, dans l’accord lui-même il y a des dispositions selon lesquelles les Janjaouites devraient être désarmés. Je pense que la façon la plus facile de désarmer les Janjaouites serait que le Gouvernement soudanais s’en charge car après tout ils sont alliés au Gouvernement. Mais, le désarmement ne doit pas se limiter uniquement aux Janjaouites. Il y a également d’autres groupes qui devront être désarmés si nous souhaitons pacifier la situation.


Question (interprétation de l’anglais) : Jusqu’à présent, cela n’a pas été possible, comme vous le savez. Les Janjaouites posent des conditions.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Vous dites désarmer?


Question (interprétation de l’anglais) : Vous dites donc qu’il faut le désarmement se fasse par les casques bleus et non pas par le Gouvernement, c’est bien ça que vous dites?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Mon idée, c’est que si le Gouvernement peut les désarmer, parfait. Mais le plus important pour nous, c’est le désarmement quels que soient ceux qui s’en chargent. C’est vrai que le Gouvernement devrait se charger du désarmement, mais s’il ne le fait pas, s’il ne souhaite pas le faire, et bien il faudra que quelqu’un d’autre s’en charge. Normalement, la meilleure façon de procéder au désarmement, c’est de travailler avec le Gouvernement et la population et nous souhaitons encourager le Gouvernement à le faire et nous nous attendons à ce que le Gouvernement le fasse, parce qu’après tout, c’est sa responsabilité.


Question : L’Union européenne a demandé aujourd’hui à l’ONU de lever partiellement l’embargo qui frappe la Somalie car c’est l’unique façon pour le Gouvernement de pouvoir exercer son autorité sur l’étendue du pays. Est-ce que vous allez adresser une requête au Conseil de sécurité sur cette question, et aussi sur la réunion initiée par le Département d’État des États-Unis, quelle est la position de l’ONU à cette réunion qui s’ouvre aujourd’hui?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : En ce qui concerne la première question, j’estime que ce n’est pas si simple pour le Conseil de sécurité d’en discuter. On a une situation d’un pays qui est totalement déstabilisé avec toutes sortes de milices, des gens armés. Il y a déjà trop d’armes dans ce pays. Est-ce que la solution, c’est de lever l’embargo pour faire rentrer davantage de drame? Ou bien il y a une autre façon d’essayer de pacifier le pays, de réconcilier la population et ensuite de voir ce que l’on peut faire? Déjà, il y a un Gouvernement somalien, des groupes islamiques et des seigneurs de guerre et puis il y a d’autres acteurs. C’est donc une question à étudier vraiment très sérieusement avant de prendre une décision.


La réunion prévue par les États-Unis à laquelle ils vont consulter un petit nombre de pays – je ne suis même pas sûr que nous, les Nations Unies, soient invitées – mais en tout cas, c’est un bon pas en avant de commencer à s’impliquer et de discuter avec d’autres pays de ce que l’on peut faire pour aider les Somaliens. Je suis donc encouragé par cette réunion.


Question (interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, je voudrais revenir sur une autre question qui a été posée. Vous avez eu un grand débat sur les questions d’impartialité des fonctionnaires de l’ONU et vous-mêmes d’ailleurs, vous vous êtes prononcé sur cette question en 2004. Vous avez indiqué que la guerre en Iraq était illégale – c’était un peu avant les élections.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Quel est donc le rapport avec l’impartialité? Est-ce que cela signifie prendre parti?


Question (interprétation de l’anglais) : En fait, moi, je voudrais avoir votre définition de l’impartialité. Vous avez défendu Mark Malloch Brown récemment après sa déclaration alors que certains indiquent que M. Malloch Brown a critiqué les États-Unis dans sa déclaration. Donc, pour vous, qu’est-ce que l’impartialité? Vous vous êtes prononcé sur la guerre en Iraq et M. Malloch Brown a fait cette déclaration qui visait les États-Unis, alors qu’il s’agit d’une année fondamentale, une année électorale pour les États-Unis.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Vous savez, nous en tant que fonctionnaires internationaux, nous ne nous impliquons pas dans les politiques des différents pays. Nous sommes ici depuis des années et, depuis des années, un grand nombre d’élections se sont tenues et je n’ai jamais été impliqué dans une élection ou dans une campagne, quelle qu’elle soit. Ce qui se passe, c’est qu’il y a des événements qui se déroulent dans le monde et l’Organisation doit réagir. Selon l’évolution des événements, vous pouvez avoir à vous prononcer et ce que vous dites peut être considéré comme une critique vis-à-vis de telle ou telle partie mais ce n’est jamais notre intention. A propos de l’exemple que vous avez cité, si l’on dit que quelque chose est illégale, si l’on dit que la guerre est illégale, vous dites que cela signifie prendre parti et moi, je ne suis pas du tout en train de prendre parti. Mon interprétation de la déclaration de Mark Malloch Brown, c’est que pour moi, il s’agissait d’un appel en faveur d’une Organisation renforcée. Mark Malloch Brown disait aux Nations Unies et aux États les plus puissants et aux autres qu’il fallait travailler ensemble, qu’il fallait défendre les Nations Unies, qu’il fallait réformer les Nations Unies et ce, dans l’intérêt de tous.


Et moi, je pense très franchement que, lorsqu’on lit la déclaration en toute honnêteté, il est très difficile de tirer d’autres conclusions que celles que je viens d’énoncer ici. En fait l’essence de la déclaration est très claire. Bien sûr, on peut mettre l’accent sur tel ou tel mot ou mettre en exergue telle ou telle phrase en perdant de vue le reste, mais ce que je peux dire, c’est que l’essence du message est très clair : défendons l’Organisation des Nations Unies, renforçons-la, travaillons et œuvrons pour les Nations Unies. Lançons ce message au monde entier et indiquons quelles sont les contributions de l’Organisation. Voilà quel était le message.


Question (interprétation de l’anglais) : Je voudrais rebondir.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Oui, bien sûr, ma réponse ne vous a pas suffit probablement.


Question (interprétation de l’anglais) : Est-ce que vous êtes en train de suggérer que M. Bolton dans son observation a critiqué les Nations Unies? Et vous avez parlé également du plafond des dépenses : Est-ce que le plafond des dépenses va être levé? Est-ce que vous avez reçu des assurances de la part du Secrétaire d’État Rice et de M. Bolton? Est-ce qu’ils appuieraient cette levée du plafond des dépenses?


Et pour ce qui est du Soudan, le Soudan a indiqué que la force de maintien de la paix sur le terrain serait une force intrusive et cela signifierait que l’on irait chercher les coupables pour les traduire devant la Cour pénale. Le responsable de la Cour pénale s’est exprimé également à ce sujet. Vous avez pourtant de grands criminels comme Mladic et Karadzic qui n’ont pas encore été traduits devant les tribunaux.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Alors pour ce qui est de ce que vous jugez être une insulte, j’ai voyagé dans le pays et je me suis rendu dans un grand nombre de régions comme par exemple ce que l’on peut appeler l’Amérique moyenne, comme le Minnesota. Il s’agit de personnes gentilles qui comprennent quelle est la situation. Et vous avez également des électeurs particulièrement compétents. Ils ont d’ailleurs élu des sénateurs particulièrement compétents comme Humphrey ou Mondale. Et je ne pense pas qu’ils vont interpréter la déclaration de M. Malloch Brown comme une déclaration insultante, condescendante ou même vulgaire. Vous savez, moi, je connais le Minnesota et je connais les gens de cette région.


En fait, notre interprétation de ces déclarations est différente. Moi, je vous ai donné ma propre interprétation et je pense qu’elle est correcte. Je pense à l’esprit qui se dégageait de cette déclaration et à son intention très claire. Oublions donc où cette déclaration a été lue, oublions devant qui elle a été lue et concentrons-nous sur la déclaration elle-même.


Alors, pour ce qui est du plafond des dépenses, ce que nous souhaiterions bien entendu, c’est que la réforme aille de l’avant et la réforme est en train de progresser, comme je l’ai indiqué. J’ai eu des contacts avec les États Membres et il semblerait qu’ils souhaitent progresser tout en tenant compte de ce qui a été réalisé jusqu’à présent. L’idée du plafond des dépenses est une idée qui a été énoncée pour exercer des pressions sur la réforme et pour qu’elle puisse aller de l’avant. Je pense que, d’ici un mois, des progrès seront réalisés. Les États Membres se rendront compte que la réforme va de l’avant et qu’il n’est pas nécessaire de conserver le plafond des dépenses et je pense que l’on s’entendra pour lever ce plafond.


Je n’ai pas eu d’assurances de la part du Secrétaire d’État. Je lui parle régulièrement, mais c’est une question que je n’ai pas soulevé avec elle parce que ce n’est pas l’une des crises les plus importantes dont nous sommes en train de parler. La réforme continue mais vous savez, il y a un grand nombre de problèmes dans le monde et c’est de ceux-là dont je parle surtout avec elle.


Pour ce qui est du Soudan, vous avez fait une observation très importante. Jean-Marie Guéhenno est sur le terrain justement et les Soudanais sont effectivement préoccupés par le rôle de la Cour pénale. Ils sont préoccupés par ce que peut signifier la Cour pénale pour certaines des personnes inculpées. Ils souhaitent savoir si les forces des Nations Unies, une fois sur le terrain, arrêteront des Soudanais inculpés par la Cour.


Tout d’abord, je voudrais dire que le Conseil de sécurité n’a pas encore arrêté de mandat à ce sujet et le mandat sera un mandat beaucoup plus vaste. Le mandat sera de protéger et d’aider à mettre en œuvre l’Accord de paix afin de protéger les populations et d’aider le peuple soudanais et surtout la population du Darfour – pas simplement la population du Darfour mais également la population au sud. Il faut donc aider les Soudanais à pacifier le pays et à construire l’unité du pays. Les accords qui sont intervenus pour le Sud et pour le Darfour auront également un impact sur tout le pays.


Lorsque l’on parle d’Accord de paix global, il s’agit d’un accord qui pacifie tout le pays et donne le sentiment à tous les Soudanais qu’ils vivent en paix et dans l’harmonie avec ses voisins.


Question (interprétation de l’anglais) : M. le Secrétaire général, CNN voudrait vous inviter avec M. Bolton à regarder le match de football du 22 juin entre les États-Unis et le Ghana. Peut-être serez-vous intéressé? Et peut-être aussi que…


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Nous sommes très bons. Faites attention : Le Ghana est très bon.


Question (interprétation de l’anglais) : J’allais vous demander de faire l’évaluation de cette coupe du monde.


Et aussi – mon français n’est pas très bon – pouvez-vous nous apporter quelques précisions sur la situation compliquée en Somalie? Pensez-vous que le fait que les tribunaux islamiques aient pris le contrôle et rétabli le calme est une bonne chose? Ou craignez-vous qu’il s’agisse d’un retour en force des Taliban, avec des lois religieuses très strictes et des couvre-feux, et que le pays devienne un refuge pour les fauteurs de troubles?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : En toute honnêteté, je ne sais pas grand-chose sur la question de la Cour islamique. Mais ce que je peux vous dire, c’est que le peuple somalien est las des seigneurs de la guerre qui ont plongé le pays dans la misère et l’ont ravagé, qui l’ont terrorisé pendant plus de 15 ou 16 ans et je suis persuadé que la plupart des Somaliens, à l’exception peut-être de ceux qui ont intérêt à prolonger la situation, diront « Bon débarras ». Cela étant dit, la Cour islamique devrait-elle être en mesure d’imposer la loi et l’ordre tout en préservant les droits et libertés des personnes? Ou au contraire, risque-t-elle de réduire leurs droits et liberté, c'est-à-dire d’apporter la sécurité en réduisant les libertés. Il y a également le Gouvernement somalien transitoire qui se trouve dans le sud du pays et a pris contact avec ce groupe de la Cour islamique. La situation est donc pour l’instant très fluide. Mais il est important de trouver un moyen pour que les Somaliens puissent travailler ensemble pour mettre un terme à la violence qui secoue ce pays depuis plus de 16 ans et pour que l’on puisse commencer à rétablir l’ordre. Je les implore de travailler ensemble : la Cour islamique, le Gouvernement transitoire et la population. Mon représentant en Somalie va revenir ici aujourd’hui et il va m’informer sur la situation. Je pense que j’aurai une meilleure idée de ce qui se passe sur le terrain. J’ai entendu des rapports inquiétants sur la présence d’Al-Qaida mais je n’ai pour l’instant aucun élément de preuve qui appuie cela. Tout ce que je peux vous dire, c’est que la population est lasse des seigneurs de la guerre et ne désire qu’une chose : recouvrer sa liberté.


Question (interprétation de l’anglais) : Merci beaucoup d’être ici aujourd’hui. Pour continuer sur la question de la Somalie : avez-vous un plan d’action immédiat pour la Somalie? Les États-Unis se réunissent aujourd’hui pour la première fois à la mission de la Norvège. C’est un groupe de contact qui va plancher sur la question de la Somalie. Est-ce que vous avez l’impression d’être un peu écarté de l’action étant donné que Washington prend l’initiative? Et avez-vous un plan d’action immédiat au nom de l’ONU?


Le Secrétaire général  (interprétation de l’anglais) : J’aimerais vous dire que pour avoir un plan pour un pays, il faut que le pays lui-même participe également. Le pays doit absolument être impliqué et participer. Il faut qu’il y ait une certaine appropriation de la part du pays et cela signifie qu’il faudra travailler, organiser les choses avec les Somaliens pour que le Gouvernement s’exprime vraiment en leur nom. Jusqu’à récemment, ils ont travaillé avec l'Autorité intergouvernmentale pour le développement qui a parlé d’envoyer une force de paix. En général, nous ne faisons pas concurrence aux organisations régionales. Lorsque les organisations régionales décident de jouer un rôle de fer de lance, nous les appuyons. C’est d’ailleurs quelque chose dont j’ai parlé avec mon représentant sur le terrain. Si nous arrivons à une situation où l’ONU doit intervenir directement et travailler avec le Gouvernement de la Somalie, nous le ferons bien entendu. Nous travaillerons avec les Somaliens. D’ailleurs nous avons déjà travaillé avec le Gouvernement transitoire. Nous avons travaillé pour la formation du Parlement etc., et il y a également d’autres groupes impliqués dans ce processus. Il va donc falloir tout d’abord préciser la situation et voir comment nous pouvons permettre aux Somaliens de travailler ensemble. Peut-être qu’ensuite, la communauté internationale pourra intervenir mais nous ne pouvons pas mettre au point un plan pour eux. Nous devons mettre au point un plan avec eux. Il nous faut les aider à s’organiser et à mettre au point un plan qui soit bon pour tous.


Question (interprétation de l’anglais) : Une autre question sur la Somalie. Pensez-vous que c’était une erreur de la part des États-Unis d’avoir appuyé ces seigneurs de la guerre? 


Ma question principale est la suivante : il vous reste six mois. Nous avons déjà évoqué la réforme de la gestion et le Darfour. Quelles seront vos priorités avant que vous ne quittiez votre poste? La question du Zimbabwe est-elle une priorité pour vous que le Zimbabwe revienne au sein de la communauté internationale?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Personnellement, je n’aurais jamais appuyé les seigneurs de la guerre. Je n’aurais jamais conseillé au Conseil de sécurité d’appuyer les seigneurs de la guerre en Somalie.


En ce qui concerne votre question sur les six mois à venir, vous n’étiez peut-être pas dans la salle mais j’ai dressé une liste de toute une série de questions sur lesquelles nous travaillons. Qu’il s’agisse du Moyen-Orient élargi en passant par l’Iran, le Congo, le Timor-Leste, nous avons toute une série d’activités et j’ai également le projet de me rendre au Zimbabwe. Ce plan est toujours d’actualité et j’aimerais beaucoup me réunir avec le Président Mugabe le 1er juillet à Banjul lorsque je participerai au Sommet de l’Union africaine. J’espère pouvoir discuter encore davantage de cette question et peut-être fixer une date pour ma visite. Je pense que le Zimbabwe a beaucoup contribué à cette région en termes économiques et agricoles notamment. C’était un grenier à blé pour la région à l’époque. Ce pays a toujours la capacité de se retrouver dans cette situation. Lorsque nous pensons au peuple du Zimbabwe, nous devons faire tout notre possible pour aider le Zimbabwe et sa population, et empêcher un éclatement total du pays. Ce sera beaucoup plus difficile de ramasser les morceaux après plutôt que d’essayer de prévenir cet éclatement. Je pense que la communauté internationale doit trouver un moyen d’apporter une assistance au Zimbabwe afin d’inverser la situation économique et le système social.


Question (interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, en ce qui concerne votre successeur, lors de votre visite en Asie, vous avez dit que le prochain Secrétaire général devrait être une personne de l’extérieur de l’Organisation et un Asiatique mais ceci vous exclurait vous-même après tout, car vous venez de la maison et cela exclue également M. Shashi Tharoor qui fait également partie de la maison. Alors pourquoi dites-vous que le prochain Secrétaire général doit être quelqu’un qui vienne de l’extérieur? Et quel sera votre legs?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je pense que je vais répondre à vote question en disant « oui ». S’agissant de la question de l’origine asiatique du Secrétaire général, oui. J’ai dit que de nombreux États Membres pensent que le prochain Secrétaire général doit être asiatique.


En ce qui concerne votre deuxième question, je n’ai en revanche pas fait de recommandation spécifique. Je n’ai pas dit qu’il fallait absolument que le prochain Secrétaire général vienne de l’extérieur de l’ONU. Ce n’est pas à moi de répondre à la question de savoir si cette personne va venir de l’extérieur ou de l’intérieur de l’ONU. Il semble qu’on penche plutôt maintenant pour quelqu’un qui vienne de l’extérieur. Comme je l’ai indiqué, si un Secrétaire général adjoint est élu, il ou elle devra renoncer à ses fonctions de Secrétaire général adjoint. Dans l’intervalle, sa responsabilité est vis-à-vis de l’Organisation et nous devons veiller à ce que cela soit respecté.


En ce qui concerne mon legs et compte tenu de l’ordre du jour que je vous ai présenté aujourd’hui, il me reste encore beaucoup à faire. Je suis déterminé à continuer à travailler jusqu’à minuit le 31 décembre. Et peut-être que si vous êtes présent, j’aurai alors l’occasion de vous dire « au revoir », à la suite de quoi, je pense prendre de très longues vacances avec ma femme. Je crois d’ailleurs qu’elle les mérite encore plus que moi et ensuite j’aurai le temps de réfléchir à mon legs.


Question (interprétation de l’anglais) : Vous avez critiqué la communauté internationale pour s’être retirée beaucoup trop tôt du Timor-Leste. Est-ce que vous avez les mêmes critiques à émettre pour d’autres problèmes? Lorsqu’il y avait des problèmes de gouvernance, étiez-vous au courant des problèmes de gouvernance au Timor-Leste? Aviez-vous des renseignements à ce sujet? Étaient-ils suffisants? Et s’ils l’étaient, les avez-vous utilisés pour conseiller le Timor-Leste? Ou peut-être est-ce que les DOMP avaient des renseignements en ce sens?   Les Australiens semblent être réticents à l’idée de transformer leur opération de maintien de la paix en force des Nations Unies. Souhaiteriez-vous que cette opération soit hybride ou unifiée?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Pource qui est du Timor-Leste, vous savez que les choses évoluent toujours très rapidement. C’est une question de personnalité et de leadership. Cela dépend aussi de la façon dont on gère le licenciement de certaines personnes. Nous savions qu’il y avait des tensions à la tête du pays mais nous ne nous attendions pas à une telle explosion. Car il s’agit de personnes qui se sont battues et ont travaillé ensemble, de personnes qui, ensemble, ont lutté contre la puissance coloniale, de personnes qui se connaissent très bien. Nous ne nous attendions donc pas à assister à de tels événements. Cela dit, nous avons effectivement fourni des conseils au Gouvernement. Mais, bien sûr, nous ne pouvons rien imposer. Nous ne pouvons qu’offrir nos conseils. C’est au Gouvernement et aux autres de trancher.


Pour ce qui est de la force de maintien de la paix, pour le moment, les Australiens sont effectivement sur le terrain mais la situation est difficile car il ne s’agit pas d’une force multinationale ni d’une coalition de pays volontaires. En fait, les autorités du Timor-Leste ont envoyé quatre lettres à ces gouvernements et ont signé avec chacun d’entre eux des accords bilatéraux. Ces pays sont donc sur le terrain à titre indépendant. Nous les avons encouragés à coordonner leurs efforts. Je pense qu’ils devront rester sur le terrain pour six mois, voire plus même si une mission des Nations Unies est déployée, car cela prendra du temps. Pour le moment, les autorités timoraises souhaiteraient que l’ONU envoie une force de police assez importante le plus rapidement possible. En effet, le volet militaire sera pris en charge par l’Australie, la Nouvelle-Zélande et la Malaisie. Si nous déployons une force policière sur le terrain, il faudra de toute façon travailler avec les autres forces sur le terrain, australiennes et autres.


A long terme, tout dépendra de l’accord qui interviendra au sein du Conseil de sécurité et de ce que décidera le Gouvernement. Si le Conseil de sécurité décide de déployer une nouvelle force de maintien de la paix, qui inclurait des contingents et une composante policière, et si l’Australie décide de se joindre à cette force des Nations Unies, alors à ce moment-là ce serait sous le commandement de l’ONU. Si l’on décide d’opérer différemment et que le Conseil accepte une force indépendante, les choses seront alors différentes. Ce serait un peu comme au Kosovo, où les opérations des Nations Unies travaillaient côte à côte avec les forces de l’OTAN.


Question (interprétation de l’anglais) : Nous savons que la Charte des Nations Unies indique très clairement que le Secrétaire général est responsable en chef de l’administration. On a assisté à une évolution de ce rôle au cours de ces dernières années. Cela fait plus de dix ans que vous êtes Secrétaire général, selon vous, quelle est la description de l’emploi de Secrétaire général? Selon vous, quelles sont les compétences et attributions essentielles d’un Secrétaire général?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : C’est le type de question auquel je suis quelque peu réticent à répondre. De toute façon, quelle que soit ma réponse, je vais être accusé de rédiger une description d’emploi qui correspondrait à l’un ou l’autre des candidats. Je voudrais juste dire qu’effectivement c’est un emploi qui va bien au-delà du responsable d’administration. Vous devez être le diplomate en chef du monde, vous devez vous occuper de négociations et il y a un grand nombre d’autres questions dans lesquelles le Secrétaire général s’implique. Encore une fois, il n’est pas un simple fonctionnaire chargé d’administrer. Je dois être très prudent. Je ne dois pas définir ce poste de façon précise.


Question (interprétation de l’anglais) : Pensez-vous que c’est une mission impossible.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Oui, oui, tout à fait. Parfois, il s’agit d’une véritable mission impossible. Vous savez, lorsque j’ai pris mes fonctions, on parlait d’une mission particulièrement difficile. Je dois dire que cela est vrai.


Question (interprétation de l’anglais) : Lorsque vous avez pris vos fonctions, il y a de cela dix ans, je me rappelle que je vous avais demandé si vous régleriez le problème de Chypre pendant votre mandat. Je vous repose aujourd’hui la question, dix ans plus tard, car le problème continue d’exister. On a l’impression qu’il s’agit d’un feuilleton pour les Nations Unies. Vous avez très peu de temps avant votre départ. Estimez-vous que le problème pourra être réglé? Le plan qui porte votre nom ayant été rejeté, pensez-vous qu’une occasion a été ratée? Quelle sera la prochaine étape?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je voudrais tout d’abord dire que vous devez admettre que je me suis rapproché d’une solution et que j’ai été beaucoup plus proche que d’autres d’une solution. Malgré cela, nous n’avons pas pu résoudre le problème. Je suis toujours en contact avec les parties et je me rappelle de mes derniers contacts avec M. Papadopoulos à Paris. Nous avions indiqué à l’époque qu’il était nécessaire de reprendre les pourparlers. Je lui avais indiqué que je souhaitais que les mots se traduisent en actions. J’avais ajouté que je souhaitais que l’on arrête de parler pour commencer à agir. Ce ne serait qu’à ce moment-là que je serais convaincu que les parties sont prêtes à avancer. Vous savez que les parties ne se sont pas réunies depuis deux ans. C’est ce que nous essayons d’obtenir actuellement. La situation a été rendue beaucoup plus complexe par le fait que Chypre est maintenant membre de l’Union européenne. La Turquie veut à son tour adhérer à l’Union européenne. Il y a eu d’ailleurs une controverse la semaine dernière autour de la question des Grecs qui voulaient élargir l’accord concernant les nouveaux membres. Lorsque vous négociez et que vous avez un pays déjà membre du club et un autre pays qui veut se joindre au club, cela ne facilite pas la tâche, bien au contraire. Je pense que cette situation a davantage compliqué le processus.


M. Gambari va se rendre sous peu dans la région : il ira à Chypre, en Grèce et en Turquie. Il va essayer de prendre le pouls de la situation avant de me rendre compte de ses contacts. Il me dira s’il nous est possible d’œuvrer davantage et de lancer la prochaine étape afin que des progrès puissent intervenir. Pour le moment, je ne peux rien promettre. Je ne peux pas dire que je règlerai le problème d’ici décembre. Disons que je me suis rapproché d’une solution.


Question (interprétation de l’anglais) : Une question qui concerne l’Asie et les droits de l’homme. Les médias en Chine et en Asie centrale ont dit que vous aviez félicité le Groupe de Shanghai de la réunion qui vient d’avoir lieu à propos de la lutte contre le terrorisme. Vous avez dit que vous louiez ces efforts. Vous savez certainement sans doute que le HCR (inaudible) l’Ouzbékistan qui a déporté des personnes, la Chine qui exerce des pressions sur ses minorités.


J’aimerais savoir si vous avez des conseils concernant l’équilibre nécessaire entre les droits de l’homme et la lutte contre le terrorisme et si vous pensez que ce sont des choses complètement séparées.


Seriez-vous prêt à appuyer une sorte de loi sur la liberté d’expression au sein de l’ONU au cours des six mois qui vous restent?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Pourriez-vous préciser votre troisième question? Qu’entendez-vous par une « loi sur la liberté d’expression au sein de l’ONU »?


Question (interprétation de l’anglais) : Dans le rapport du (inaudible) du personnel qui vient d’être publié, il est indiqué que certains documents devraient être rendus publics aux médias ou aux employés et non pas au coup par coup mais de façon généralisée, que c’est un droit. Dans votre proposition de réforme vous avez dit que vous étiez favorable à quelque chose de ce genre, alors j’aurais voulu savoir ce que vous avez l’intention de faire à ce sujet.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : En ce qui concerne la question des mesures nécessaires contre le terrorisme et la question des libertés civiles et des droits de l’homme, ma position est parfaitement claire. On ne peut pas faire de compromis entre des mesures efficaces contre le terrorisme et les libertés et les droits fondamentaux des personnes. Affaiblir les droits de l’homme, affaiblir l’état de droit dans le cadre de notre lutte contre le terrorisme, c’est  donner la victoire aux terroristes, une victoire qu’ils n’auraient jamais pu remporter par eux-mêmes. C’est pour cette raison que j’ai toujours été très préoccupé par les excès et les abus que j’ai constatés dans le monde dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il a été très facile pour certains gouvernements d’arrêter des personnes sans justification et ensuite de s’attendre à ce que personne ne pose de questions. Nous devons donc faire extrêmement attention à ne pas affaiblir l’état de droit et les droits fondamentaux dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.


En ce qui concerne mon message à cette réunion du Groupe de Shanghai, je crois que cette réunion avait pour thème les questions de sécurité et de lutte contre le terrorisme. Je l’encourage dans cette direction. Je suis parfaitement conscient des difficultés qu’éprouve le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés vis-à-vis du gouvernement que vous avez mentionné. D’ailleurs, M. Gutierrez, du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, a indiqué qu’il ne devait pas y avoir de refoulements forcés pour certaines personnes, qu’il ne devait pas y avoir de déportations forcées, et en plus de cela, il a pris des dispositions avec d’autres gouvernements qui seraient prêts à apporter leur aide pour loger ces personnes. Nous demandons donc aux gouvernements de remettre ces personnes au Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés dont je sais que le chef a beaucoup travaillé pour tenter de les loger.


Quant à la question que vous avez posée sur une loi sur la liberté d’expression ou sur le mécanisme permettant de rendre publics les documents, je crois qu’en tant qu’Organisation, nous sommes très ouverts. Et parfois je dis que dans cette maison, dès qu’il y a deux exemplaires du même document, on peut considérer qu’il relève du domaine public. Mais c’est vrai que nous devons nous efforcer de publier la plus grande quantité d’informations possibles. Bien sûr, il y a certains documents confidentiels qui ne doivent pas être rendus public, sinon cela poserait beaucoup de problèmes. On me demande parfois quelle est la teneur de mes discussions avec certains présidents, mais là, il est difficile pour moi de révéler ces informations immédiatement. Et donc certains documents sont classés confidentiels pendant une certaine période de temps, mais à part cela, nous essayons d’être aussi ouverts que possible.


Question  (interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, les Nations Unies travaillent très dur pour désarmer les seigneurs de guerre en Afghanistan. Maintenant, le Président Hamid Karzai dit qu’il va les réarmer. Ces seigneurs de guerre afghans sont tout à fait semblables à ceux qui se trouvent en Somalie. Avez-vous des commentaires?


Le Secrétaire général  (interprétation de l’anglais) : Ma position sur les seigneurs de guerre en Afghanistan est la même que celle que j’ai vis-à-vis des seigneurs de guerre en Somalie. Ils ne méritent aucun appui. Il ne faut surtout pas les armer. C’est une vue à court terme, car lorsque ces gens sont armés et affermis dans leur pouvoir, cela rend la vie beaucoup plus difficile dans le pays. Il faut trouver d’autres moyens d’imposer l’ordre et la sécurité. On ne peut pas compter sur des hors-la-loi pour essayer de remettre de l’ordre dans un pays. On a vu ce qui s’est produit par le passé. C’est contre-productif.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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