En cours au Siège de l'ONU

ECOSOC/6208

LE CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL OUVRE SA SESSION DE FOND 2006

3 juillet 2006
Conseil économique et socialECOSOC/6208
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil économique et social

Session de fond de 2006


LE CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL OUVRE SA SESSION DE FOND 2006


Déclarations ministérielles sur le thème « Comment s'affranchir de la pauvreté » et débat avec les institutions commerciales et financières du système des Nations Unies


(Publié tel que reçu)


GENÈVE, 3 juillet (Service d’information des Nations Unies) -- Le Conseil économique et social, présidé par M. Ali Hachani de Tunisie, a ouvert ce matin sa session de fond 2006 en adoptant son ordre du jour et son programme de travail.  Il a en outre approuvé le principe d'entendre des organisations non gouvernementales dans le cadre de son débat de haut niveau.  Le Conseil a également entendu le Vice-Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies ainsi que des déclarations liminaires de haut niveau sur le thème «Comment s'affranchir de la pauvreté».  Il a ensuite tenu une concertation sur les politiques avec les chefs de secrétariat des institutions commerciales et financières du système des Nations Unies.


Dans son discours d'ouverture, le Président a rappelé que cette session était la première après le Sommet mondial de 2005, au cours duquel les dirigeants ont réaffirmé sans équivoque leur détermination à atteindre rapidement les objectifs de développement convenus au plan international, y compris les Objectifs du Millénaire pour le développement.  Aucun pays ne peut relever seul ce défi.  Et les Nations Unies, symbole de multilatéralisme et force motrice du partenariat mondial pour le développement, peuvent appuyer les Gouvernements, ce qu'elles feront de manière encore plus efficace quand l'Organisation aura été renforcée et réformée.  Le Conseil économique et social, principal organe de l'ONU chargé de la promotion du développement économique et social, est particulièrement bien placé pour accroître l'intégration et la coordination des efforts déployés afin de donner effet à l'«agenda du développement», a estimé le Président du Conseil.


M. Mark Malloch Brown, Vice-Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, a pour sa part estimé utile que le Conseil se penche sur le problème particulièrement grave du chômage, et surtout du chômage des jeunes, un véritable défi pour la communauté internationale.  Le chômage des jeunes contribue directement à l'instabilité des sociétés a-t-il souligné.


Le Conseil a ensuite entendu des déclarations liminaires de hauts dignitaires sur le thème «Comment s'affranchir de la pauvreté».  Sont intervenus M. Shaukat Aziz, Premier ministre du Pakistan; Mme Luisa Diogo, Premier Ministre du Mozambique; M. Jens Stoltenberg, Premier Ministre de la Norvège; M. Chadli Laroussi, Ministre du travail et de l'emploi des jeunes de la Tunisie; et M. Juan Somavía, Directeur général de l'Organisation internationale du travail.


Le Conseil économique et social a ensuite eu un dialogue avec les chefs de secrétariat des institutions financières et commerciales du système des Nations Unies s'agissant de la concertation sur les politiques et les faits nouveaux importants survenus dans l'économie mondiale et la coopération économique internationale.  Ont participé au débat M. José Antonio Ocampo, Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires économiques et sociales; M. Supachai Panitchpakdi, Secrétaire général de la Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement; Mme Valentine Rugwabiza, Directrice générale adjointe de l'Organisation mondiale du commerce; M. François Bourguignon, Premier Vice-Président de la Banque mondiale; M. Reinhard Munzberg, Représentant spécial du Fonds monétaire international et M. Kim Hak-Su, Secrétaire exécutif de la Commission économique et sociale de l'ONU pour l'Asie et le Pacifique.


Le Conseil économique et social tiendra, à partir de 9h30 demain, son débat de haut niveau consacré à la création, aux niveaux national et international, d'un environnement qui se prête à un plein-emploi productif et un travail décent pour tous, et son impact sur le développement durable.  Il consacre l'après-midi à des tables rondes ministérielles informelles consacrées aux examens ministériels annuels et au Forum biennal de la coopération pour le développement.



Déclarations d'ouverture


M. ALI HACHANI, Président du Conseil économique et social, a déclaré que cette session était la première, après le Sommet mondial de 2005, au cours de laquelle les dirigeants ont réaffirmé sans équivoque leur détermination à atteindre rapidement les objectifs de développement convenus au plan international, y compris les Objectifs du Millénaire pour le développement.  Le Sommet a marqué une avancée significative de la cause du développement, il a généré des mesures importantes sur l'aide et l'allègement de la dette, mesures réclamées depuis plusieurs années.  Le Sommet a également donné lieu à l'engagement d'adopter, à la fin de 2006 au plus tard, des stratégies globales de développement national à même d'atteindre les objectifs fixés conjointement.  Aucun pays ne peut relever seul ce défi.  Les Nations Unies, symbole du multilatéralisme et force motrice du partenariat mondial pour le développement, peuvent appuyer les Gouvernements et le feront de manière encore plus efficace quand l'Organisation aura été renforcée et réformée, conformément aux décisions prises lors du Sommet.


Le Conseil, principal organe de l'ONU chargé de la promotion du développement économique et social, est particulièrement bien placé pour accroître l'intégration et la coordination des efforts déployés afin de donner effet à l'«agenda du développement».  Le Conseil peut agir en mobilisant les décideurs autour d'une évaluation globale des progrès accomplis: les réunions ministérielles permettront de d'assurer que tous les acteurs travaillent en synergie pour améliorer le sort de centaines de millions de personnes.  Chaque réunion devrait s'articuler autour d'une photographie des progrès enregistrés au plan mondial, une évaluation thématique ainsi que des interventions nationales volontaires qui permettraient de départager les pratiques optimales et les enseignements tirés de l'expérience.  Le Forum biennal de coopération pour le développement est un saut qualitatif majeur dans l'impact des efforts déployés dans le domaine du développement international.  Le Forum est la seule instance multilatérale permettant de rassembler toutes les parties prenantes concernées dans un dialogue sur la cohérence des mécanismes de coopération internationale.  En outre, pour promouvoir l'efficacité de l'action des Nations Unies face aux catastrophes naturelles et humanitaires, il faut déterminer la valeur ajoutée que l'ECOSOC peut apporter aux activités actuelles de l'Organisation.  Les événements spéciaux sur la «grippe aviaire» et les «crises alimentaires en Afrique» ont montré le rôle important que le Conseil peut jouer en matière de sensibilisation.  Enfin, le Conseil a montré, grâce à ses groupes consultatifs spéciaux sur le Burundi, la Guinée-Bissau et Haïti, qu'il constitue un forum unique de promotion d'une approche intégrée de la consolidation de la paix au lendemain d'un conflit.


Lors du Sommet de 2005, les dirigeants ont souligné le rôle fondamental qui unit l'emploi et la réduction de la pauvreté, la parité entre hommes et femmes et l'intégration sociale.  Ils sont résolus de faire du plein emploi notamment un objectif fondamental de leurs politiques nationales et internationales.  Il s'agit d'une avancée politique majeure, car le défi de l'emploi est aussi déterminant dans les pays en transition et en développement que dans les pays développés.  Il appartient au Conseil économique et social de donner suite de façon efficace aux espoirs suscités par le Sommet et de reconnaître le caractère central de l'emploi décent dans les politiques économiques et sociales.


M. MARK MALLOCH BROWN, Vice-Secrétaire général des Nations Unies, a d'entrée de jeu rappelé que trente mille enfants meurent chaque jour de maladies évitables, qu'en vingt ans soixante pays se sont appauvris, que l'eau potable reste inaccessible pour un milliard de personnes, entre autres obstacles au développement.  Les Nations Unies doivent réagir avec vigueur devant cette triste réalité.  Dans ce contexte, il est utile que le Conseil économique et social se penche lors de son segment de haut niveau sur le problème particulièrement grave du chômage, et surtout du chômage des jeunes, un véritable défi pour la communauté internationale.  Les jeunes de 15 à 24 ans représentent un quart de la main-d'œuvre active mais aussi la moitié des chômeurs.  Les jeunes sont en général les derniers à être recrutés et les premiers à être renvoyés.  Jeunes migrants dans les nouvelles villes du Sud, enfants de la classe moyenne sans perspective d'emploi, tous sont confrontés à l'exclusion ou à la précarisation des conditions de travail.


Le chômage des jeunes contribue directement à l'instabilité des sociétés, et ce n'est probablement pas un hasard si près de la moitié des jeunes de Timor Leste sont actuellement sans emploi, a souligné M. Malloch Brown.  Or, il existe des stratégies orientées vers l'emploi.  En Allemagne, un accord national garantit un emploi pour tous les jeunes qui en demandent; le fait d'acquérir une expérience de travail entraîne une augmentation radicale des chances d'emploi, il convient donc de favoriser les apprentissages, comme l'on fait en Croatie ou au Japon.  Il est aussi possible d'agir en renforçant l'auto-emploi et en encourageant le micro-financement, mesures d'autonomisation qui donnent aussi de bons résultats, comme au Mexique, qui aide les jeunes femmes à ouvrir de petites entreprises.  Les Nations Unies, en collaboration avec les États membres, doivent encourager l'action en faveur de l'emploi des jeunes et l'ECOSOC doit jouer son rôle à cet égard.


Déclarations liminaires de haut niveau sur le thème « Comment s'affranchir de la pauvreté »


M. SHAUKAT AZIZ, Premier Ministre du Pakistan, a rappelé qu'en dépit des progrès enregistrés dans de nombreux pays et régions, une importante proportion de la population mondiale continue de vivre dans la pauvreté.  Les économies les plus dynamiques du monde sont aujourd'hui, à juste titre, préoccupées par les déséquilibres des échanges mondiaux, par la hausse des prix du pétrole, par les déficits budgétaires et par les fluctuations monétaires, qui sont autant de signes d'une fragilité économique globale.  Ces déséquilibres affectent également et peut-être de manière plus aiguë, les plus pauvres et les plus vulnérables.  Pourtant, peut-être pour la première fois de l'histoire, le monde a la capacité collective de mettre un terme à la faim et à la pauvreté et de promouvoir le progrès social.  Si la mondialisation nous a exposés à des défis, elle offre aussi d'énormes possibilités.  La paix et la stabilité étant des conditions préalables essentielles pour la croissance et le développement, nous devons les appréhender avec le même sentiment d'urgence que la pauvreté et le développement, a souligné M. Aziz.


Le Premier Ministre pakistanais a attiré l'attention sur la responsabilité première qui incombe aux pays en développement en matière de réformes et de renforcement des capacités.  Il a en outre mis l'accent sur la nécessité d'améliorer le climat d'investissement et de créer des opportunités pour le secteur privé.  M. Aziz a d'autre part rappelé qu'un meilleur accès aux marchés des pays riches a un impact direct et immédiat sur les économies des pays en développement.  Il a en outre souligné que les pays développés devraient progressivement lever les restrictions pesant sur les migrations liées au travail.


Le Premier Ministre pakistanais a ensuite présenté la politique globale de réformes multisectorielles menée dans son pays, qui a contribué à la lutte contre la pauvreté.  Aujourd'hui, la Pakistan fait partie des économies asiatiques à croissance rapide, a-t-il fait valoir.  Depuis 2001, le taux de pauvreté est passé de 34,5% à 23,9%, a-t-il précisé.  Les Nations Unies ayant un rôle pivot à jouer pour promouvoir l'ordre du jour mondial dans le domaine du développement, il nous incombe à tous de nous assurer que les avantages offerts par le système des Nations Unies soient utilisés plus pleinement et plus efficacement.  En tant que co-président, avec les Premiers Ministres de la Norvège et du Mozambique, du Groupe d'experts de haut niveau sur la cohérence du système des Nations Unies en matière de développement, d'aide humanitaire et d'environnement, mis en place par le Secrétaire général, nous nous efforçons de dégager des recommandations susceptibles de permettre aux États Membres d'établir, aux Nations Unies, un système de développement bien équipé pour soutenir les efforts déployés au niveau national par les pays en développement, a souligné M. Aziz.


M. JENS STOLTENBERG, Premier Ministre de la Norvège, a souligné que son pays a la chance de posséder une économie prospère et de jouir d'un quasi-plein emploi.  «Je crois que l'un des plus grands produits que nous ayons développés en Norvège est l'État providence, l'un des plus équitables, des plus sûrs, des plus compétitifs et des plus innovateurs du monde», a fait valoir M. Stoltenberg.  Et il ne s'agit pas seulement d'une question de disponibilité suffisante de ressources financières, a-t-il précisé: la Norvège est devenue prospère parce qu'elle a mis en place l'État providence.  Si l'on revient quelques décennies en arrière, on se souvient que des économistes, des politiciens et des écrivains prédisaient le déclin de l'État providence dans les pays nordiques, assurant que les gagnants de demain seraient les pays ayant des politiques sociales plus faibles.  Mais cela ne s'est pas produit, a fait observer M. Stoltenberg.  Ainsi, un système protégeant largement les travailleurs, un système de sécurité sociale public et universel et même un niveau relativement élevé de taxation ne constituent pas des désavantages économiques, mais donnent même un avantage compétitif, a-t-il fait valoir.  Nous sommes certes une économie de marché, mais nous avons trouvé un équilibre entre l'État et le marché, a-t-il insisté, ajoutant que chaque année, la Norvège ne ménage pas ses efforts pour améliorer ce système car il y aura toujours des lacunes, même dans les économies les plus développées.


M. Stoltenberg a ensuite indiqué que le principal message qu'il souhaitait aujourd'hui faire passer était que les plus grands bénéfices que les pays puissent dégager, tant au plan économique qu'au plan politique, découlent de l'autonomisation des femmes, de l'égalité des chances à leur égard et de l'accroissement de leur participation dans la vie active.  Une population en santé et bien éduquée est un atout de première importance pour tout pays, a également souligné le Premier Ministre norvégien.  Il a par ailleurs indiqué que son pays contribuerait à hauteur d'un milliard de dollars d'ici 2015 pour des campagnes de vaccination et d'immunisation.  M. Stoltenberg a regretté que les négociations commerciales de l'Organisation mondiale du commerce n'aient pas abouti la semaine dernière, à Genève.  Il n'en demeure pas moins que nous disposons toujours d'un régime global contraignant pour le commerce, doté de mécanismes effectifs de règlement des différends et de sanctions, a-t-il fait valoir.  Nous n'avons pas été en mesure de nous mettre d'accord sur un régime similaire afin d'assurer la promotion et la protection des droits de l'homme et du travail décent pour tous, a-t-il poursuivi.  En outre, les règles que nous avons élaborées pour assurer la protection de l'environnement sont particulièrement fragmentées et les mécanismes d'application faibles.  Nous ne devons pas courir le risque de voir la compétition commerciale et la compétition pour l'investissement nuire à notre capacité de promouvoir et de protéger le bien commun, a souligné M. Stoltenberg.  Le dumping social est l'antidote à la mondialisation sans garde-fou, a-t-il déclaré.


MME LUISA DIOGO, Premier Ministre du Mozambique, a déclaré que l'adoption, en 2000, des Objectifs de développement pour le millénaire et l'élan politique qui a suivi ont montré qu'il faut adopter une vision intégrée des efforts mondiaux pour la lutte contre la pauvreté.  Il faut créer des contextes nationaux et internationaux favorables au plein emploi et à un travail décent pour tous.  En Afrique, l'agriculture emploie la majorité de la main-d'œuvre et génère l'essentiel du produit intérieur brut des pays du continent.  Les revenus dans ce secteur sont très bas et l'Afrique ne sortira pas de la pauvreté avant qu'ils n'augmentent.  De nombreuses femmes sont employées dans ce secteur, souvent dans des conditions précaires.  Malheureusement, la situation de l'emploi montre une tendance inquiétante au chômage, notamment des femmes et des jeunes, deux groupes nombreux en Afrique.  Le secteur agricole africain est très intensif en main-d'œuvre, ce qui signifie que l'emploi joue un rôle crucial dans la réduction de la pauvreté et des inégalités entre les sexes, notamment.  C'est dans ce contexte de lien entre performance agricole et pauvreté que l'Afrique doit favoriser la notion de «travail décent», ce qui nécessitera une approche intégrée des politiques économiques et sociales.  L'emploi est fondamental pour la réalisation des objectifs de développement pour le millénaire et est au cœur de l'autonomie économique.


Mme Diogo a proposé des pistes pour explorer le lien entre emploi et éradication de la pauvreté.  D'abord, il convient que les États aient une idée très claire des facteurs démographiques à l'œuvre ainsi que de certains concepts clés pour l'Afrique: l'emploi, le secteur parallèle, la part des femmes dans les activités productives, le rôle du secteur familial.  La réduction de la pauvreté exige plus de richesses, lesquelles découlent d'activités productives.  En d'autres termes, il faut créer de la valeur ajoutée, étant entendu aussi que ces activités dépendent du dynamisme du secteur privé.  La richesse est aussi une fonction de l'accumulation de capital, physique et humain.  À cet égard, le Mozambique a adopté un plan quinquennal qui vise à la création d'emplois en intervenant sur le capital humain, notamment en termes d'amélioration de la santé et de l'éducation; sur le développement économique (création d'infrastructures); sur la bonne gouvernance (lutte contre la corruption notamment); sur certaines questions transversales comme le sida ou l'environnement.  Le Mozambique connaît certaines difficultés, et le rôle des Nations Unies est crucial pour la réponse à certaines questions: quel est la définition de l'emploi, comment intégrer les définitions uniformisées dans le dialogue national? Comment distinguer les secteurs formel et informel? Bref, la réalisation des objectifs généraux de développement durable exige des partenariats élargis entre les États, les Nations Unies et la société en général, de manière à ce que les pays puissent se lancer sur la voie du développement durable et de l'amélioration des conditions de travail des populations.  «Le meilleur programme contre la pauvreté est l'emploi et la meilleure garantie de la richesse est le travail décent», a conclu Mme Diogo, citant le Secrétaire général des Nations Unies.


M. CHADLI LAROUSSI, Ministre du travail et de l'emploi des jeunes de la Tunisie, a attiré l'attention sur les phénomènes de recrudescence du chômage, de la pauvreté et de la marginalisation dans la misère, à travers le monde.  Il a insisté sur la nécessité d'orienter les bénéfices du développement afin de gommer les disparités entre les peuples.  Il a fait appel au dialogue, à la solidarité et à la responsabilité commune en vue de l'instauration d'une économie mondiale régie par des règles de justice et d'égalité.  Il faut promouvoir des politiques volontaristes en matière d'emploi, a-t-il insisté.  Il a rappelé l'initiative du Président tunisien qui, il y a plusieurs années déjà, appelait à la signature d'un pacte universel de paix et de progrès.  Il faut que les pays industrialisés augmentent leur aide publique au développement afin de la porter à 0,7% de leur produit national brut, a poursuivi M. Laroussi.  L'emploi est une priorité absolue de la politique de développement suivie par la Tunisie, a-t-il souligné.  Il a par ailleurs fait valoir que le revenu par habitant en Tunisie a été multiplié par 4 depuis 1987.  Tout cela a bénéficié à l'équilibre social et à la stabilité, a-t-il ajouté.


La Tunisie est aujourd'hui classée dans les 20 premiers pays pour ce qui est de la croissance économique, a également fait valoir M. Laroussi.  Elle a aussi été honorée en étant élue membre du nouveau Conseil des droits de l'homme, eu égard à son succès dans le domaine des droits de l'homme, a-t-il déclaré.  En outre, le Sommet mondial de 2005 sur la société de l'information a lancé les bases d'une solidarité numérique mondiale.  M. Laroussi a d'autre part indiqué que la Tunisie a instauré un système de microcrédits afin de financer la création d'entreprises par les personnes n'ayant pas accès aux facilités bancaires classiques.


M. JUAN SOMAVÍA, Directeur général de l'Organisation internationale du travail, après avoir évoqué les principaux facteurs à l'œuvre dans la crise de l'emploi que traverse le monde, a présenté six domaines d'action prioritaires à cet égard.  D'abord, la nécessaire valorisation du travail, lequel ne doit plus être considéré comme une simple variable d'ajustement mais dont il faut au contraire mesurer toute l'importance sociale.  Il semble que le modèle de développement libéral ait fait l'impasse sur ces valeurs.  Ensuite, il faut prendre acte de l'urgence de l'action politique.  Le «travail décent» est une demande majeure des électeurs dans les sociétés démocratiques du monde entier, avec des conséquences profondes sur la crédibilité des structures de gouvernance - gouvernements, secteur des affaires ou organisations internationales.  Au-delà, surgissent des doutes quant à la capacité des systèmes institutionnels de résoudre le chômage.  Ne pas agir serait donc une grave erreur politique, d'autant plus que le chômage est l'un des plus importants risques pour la sécurité dans de nombreux pays.  Par ailleurs, si la diversité du travail est quasiment infinie, tous les pays doivent faire face aux mêmes défis.  Les solutions à ces problèmes sont variables, mas certains éléments de l'action politique sont, eux, fixes: productivité de l'emploi, développement des entreprises, normes et dialogue social, sans oublier la question de l'égalité entre les sexes.  Tous ces aspects doivent être renforcés dans le respect de la diversité des pays.


Il est tout aussi important d'appliquer des politiques de développement local et communautaire, M. Somavía déplorant à cet égard que, si beaucoup de conseils sont prodigués sur la manière de se connecter à l'économie mondiale, très peu existent sur la manière de favoriser l'économie locale.  Dans le même temps, l'environnement politique doit être adapté à l'évolution des marchés, un facteur déterminant pour le développement des entreprises et la création des opportunités d'emplois nécessaires, avec en point de mire le maintien d'une certaine flexibilité.  Enfin, il convient de renforcer la coopération entre les organisations internationales du système multilatéral.  En effet, aucun gouvernement ni aucune organisation internationale ne saurait mettre en place, isolément, les politiques nécessaires au plein emploi ni au travail décent.  Au contraire, il faudra engager une coopération intense aux plans national et international, coopération qui est encore malheureusement insuffisante, a dit M. Somavía.  L'action à cet égard doit consister en une révision des systèmes de gestion des ressources et de l'efficacité des résultats.  Il faudra que les organisations internationales adoptent une conception de leur action qui soit entièrement centrée sur l'emploi, l'Organisation internationale du travail ayant naturellement un rôle particulier à jouer dans ce domaine.  Les quatre piliers de son action - emplois, droits, protection sociale et dialogue social - recoupent les notions d'égalité entre hommes et femmes et de développement.


Concertation sur les politiques et débats avec les chefs de secrétariat des institutions financières et commerciales du système des Nations Unies


Documentation


Dans le cadre du dialogue avec les chefs de secrétariat des institutions financières et commerciales du système des Nations Unies s'agissant de la concertation sur les politiques et les faits nouveaux importants survenus dans l'économie mondiale et la coopération économique internationale, le Conseil dispose notamment de l'«Étude sur la situation économique et sociale dans le monde, 2006: divergences de la croissance et du développement» (E/2006/50). L'Étude souligne qu'à maints égards, les inégalités de revenu sont grandes en 2006 et ne cessent d'augmenter à travers le monde.  La principale raison en est que dans les pays industrialisés, le niveau des revenus a augmenté régulièrement au cours des cinq dernières décennies, alors que cela n'a pas été le cas dans de nombreux pays en développement.  Seul un petit nombre de ces derniers ont connu une croissance soutenue ces dernières décennies, mais on retiendra surtout qu'ils comprennent les deux pays les plus peuplés de la planète, à savoir la Chine et l'Inde.  Si l'on tient compte du fait qu'à eux seuls ces deux pays représentent plus d'un tiers de la population mondiale, alors l'inégalité commence à diminuer au niveau mondial.  Si on exclut ces deux pays, toutefois, on s'aperçoit qu'elle a continué à augmenter fortement, à partir de niveaux déjà très élevés.  L'Étude sur la situation économique et sociale dans le monde pour 2006 est consacrée aux causes et aux effets de la divergence des revenus entre les pays.


Le succès du développement dépend à la fois des efforts engagés au niveau national et de l'existence d'un environnement propice au niveau international.  La divergence accrue des revenus s'explique en partie par le nombre croissant des cas d'effondrement de la croissance.  Les pays dotés de structures et d'institutions économiques insuffisantes et dont l'infrastructure et le capital humain sont peu développés ont moins les moyens de profiter de l'intégration des marchés mondiaux.  Du coup, il est plus difficile aux pays en développement de sortir de la pauvreté et de réduire leur vulnérabilité aux chocs mondiaux.  La montée des inégalités dans le monde accroît donc la probabilité que la croissance s'effondre et qu'un conflit éclate.  Le problème posé par cette inégalité croissante a un impact important sur l'application de l'Agenda des Nations Unies pour le développement.  L'impossibilité d'infléchir cette tendance pourrait donc avoir de vastes conséquences pour le développement humain.


Présentations


M. JOSÉ ANTONIO OCAMPO, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales de l'ONU et animateur de la discussion, a fait observer que, comme le montre l'Étude de cette année, l'économie mondiale s'est bien portée.  Une certaine modération de la croissance mondiale est néanmoins attendue pour le second semestre de 2006, reflétant un certain nombre de risques qui ont pris du poids récemment, comme en témoigne la volatilité croissante des marchés financiers et des marchés des produits de base ces deux derniers mois.  Parallèlement, la croissance rapide des pays en développement, qui constitue sans aucun doute la tendance mondiale la plus positive de ces dernières années, persiste.  Parmi les éléments qui ont contribué à créer cet environnement, figurent l'allègement de la dette de certains des pays les plus pauvres du monde ainsi que les engagements accrus en rapport avec l'aide publique au développement.  Les pays en développement ont également profité d'une forte croissance des échanges mondiaux et de prix élevés soutenus par l'expansion économique dans certaines grandes économies en développement.  Ces conditions exceptionnelles sont cependant menacées par des risques croissants, au premier rang desquels figurent les incertitudes qui entourent les négociations commerciales actuelles.  Certains des plus gros risques sont associés aux déséquilibres globaux, en particulier au déficit élevé des comptes courants aux États-Unis - qui pourrait atteindre 900 milliards en 2006.  Ainsi, persiste la possibilité d'un ajustement désordonné et soudain des déséquilibres globaux, en particulier par le biais d'une forte dévaluation du dollar.  M. Ocampo a donc insisté sur l'importance que revêt la coopération internationale pour faire face au risque.  Le Fonds monétaire international devrait faire office de chef de file en la matière, a-t-il suggéré.


En fait, l'inégalité économique internationale s'est accrue ces dernières années, a poursuivi le Secrétaire général adjoint.  Résumant les principales conclusions que l'on peut tirer de l'Étude de 2006 sur la situation économique et sociale dans le monde, il a fait remarquer que la croissance des pays en développement à titre individuel dépend non seulement de leurs politiques économiques internes - comme cela a été souligné ces dernières décennies - mais aussi des environnements économiques régionaux et globaux.  En outre, une croissance économique soutenue est liée à la capacité de diversifier la structure de production nationale, a souligné M. Ocampo.  Une autre conclusion essentielle de l'Étude 2006 est que la stabilité macroéconomique, l'investissement et la croissance se renforcent mutuellement, a-t-il ajouté, attirant enfin l'attention sur la stratégie de réduction des divergences économiques internationales avancée par ce rapport.


M. SUPACHAI PANITCHPAKDI, Secrétaire général de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED), a déclaré que le redressement de l'économie mondiale entamé en 2002 continue sans désemparer, malgré la crise actuelle du pétrole.  Des centaines de millions de personnes ont bénéficié de l'embellie.  La croissance en Inde et en Chine a fortement contribué à ce résultat, l'Amérique latine ayant aussi réussi à tirer globalement son épingle du jeu.  Le continent africain, qui profite de l'augmentation des cours des matières premières, a aussi tiré quelques bénéfices de cette tendance.  Cependant, les changements ont été moins spectaculaires dans les pays exportateurs de biens manufacturés, tel le Brésil, a observé M. Panitchpakdi. 


Le Secrétaire général de la CNUCED estime en tout état de cause qu'il ne convient pas de céder à un optimisme déplacé, car des difficultés demeurent.  D'abord, le prix réel des matières premières (hors pétrole) est sous son niveau d'il y a trente ans; les prix dépendent de facteurs indépendants du contrôle des pays producteurs, comme la demande des économies émergentes, par exemple.  Ensuite, la volatilité des marchés laisse planer le risque d'un renversement brutal de tendance.  Enfin, plusieurs pays très pauvres ne profitent pas du tout de l'envolée des prix, pour une série de facteurs structurels.  Par ailleurs, la cohérence entre les systèmes financiers et commerciaux doit être renforcée par des mesures macroéconomiques.  Une autorité monétaire mondiale comme le Fonds monétaire international pourrait jouer un rôle important dans le renforcement du cadre institutionnel.  M. Panitchpakdi a aussi fait valoir que les initiatives récentes visant à l'annulation de la dette de certains pays et au renforcement de l'aide directe sont les bienvenues, mais que le développement dépend, au long terme, d'une confluence de facteurs agissant au niveau national et international: croissance économique, ouverture des marchés aux exportations des pays endettés, création d'un contexte général propice au développement.


MME VALENTINE RUGWABIZA, Directrice générale adjointe de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), a rendu compte des importantes consultations de haut niveau qui se sont déroulées la semaine dernière à l'OMC, à Genève, afin de tenter de combler les écarts subsistants s'agissant de trois piliers du présent cycle de négociations, à savoir les subventions agricoles, ainsi que les tarifs à l'importation concernant les produits agricoles et les biens industriels.  Malheureusement, les Ministres ne sont pas parvenus à réduire leurs divergences sur ces questions essentielles, a déploré Mme Rugwabiza.  Les résultats de ces discussions sont clairs, a-t-elle poursuivi: il n'y a pas eu de progrès et nous sommes dans une situation de crise.  Cela est grave, non seulement pour les négociations sur l'agriculture mais aussi pour l'ensemble du cycle.  Il sera désormais beaucoup plus difficile de conclure le cycle de Doha cette année, a déclaré Mme Rugwabiza.


La seule bonne nouvelle que nous puissions communiquer est que personne ne souhaite abandonner les efforts, a ajouté la Directrice générale adjointe de l'OMC.  La situation n'est pas désespérée et nous pensons que les écarts peuvent être réduits, a-t-elle poursuivi.  Les principaux perdants d'un système commercial multilatéral affaibli seront les pays en développement, a-t-elle affirmé, avant d'ajouter qu'il est acquis que dans le cadre du présent cycle, les pays en développement auront moins à faire que les pays développés.  Elle a déclaré que si les présentes négociations sont si difficiles, c'est parce que le cycle actuel de négociation est plus ambitieux que les précédents.  Mme Rugwabiza a souligné que l'aide au commerce est le premier véritable test de la cohérence du mandat que l'OMC partage avec d'autres acteurs.  C'est également un domaine où l'OMC ne peut réussir seule.  Le mandat de l'OMC est et reste l'élaboration de règles commerciales équitables.


M. FRANÇOIS BOURGUIGNON, Premier Vice-Président de la Banque mondiale, a insisté sur l'aspect «bien public» du développement.  Il a relevé à cet égard une situation économique mondiale favorable, accompagnée d'une véritable convergence dans toute l'économie mondiale.  Les pays pauvres connaissent eux-mêmes des taux de croissance supérieurs à ceux des pays développés, convergence que l'on ne voyait plus depuis les années 1960.  De nombreux experts estiment qu'il s'agit d'une tendance durable qu'il convient de favoriser.  Cependant, ces convergences ne sont pas présentes dans tous les pays d'Afrique subsaharienne, en retard chronique avec le reste du monde économique, décalage qui risque de lui faire rater le chemin de la croissance durable.  Dans ce cas précis, la communauté internationale doit viser au renforcement de l'action contre les pandémies et des stratégies nationales de réduction de la pauvreté.  L'aide financière internationale doit aussi être augmentée, tout en harmonisant et en coordonnant ces efforts.  Le droit du savoir et de la connaissance, l'accès aux marchés sont d'autres facteurs importants pour le commerce, la croissance et, finalement le développement.  Il est donc important que le cycle de Doha aboutisse.  Enfin, les migrations sont un élément important de la vie économique internationale, et doivent être aménagées de telle sorte qu'elles profitent à toutes les parties concernées (migrants, pays de destination et pays d'origine).  La Banque mondiale entend dispenser son assistance en collaboration avec toutes les agences spécialisées des Nations Unies.


M. REINHARD MUNZBERG, représentant spécial du Fonds monétaire international (FMI) a fait observer que la croissance de l'économie mondiale reste très forte mais que des risques persistent, liés, notamment, aux prix du pétrole - élevés et volatiles; au risque de pandémie de grippe aviaire; et aux déséquilibres globaux.  Une action s'impose afin de réduire graduellement les déséquilibres existants, a-t-il déclaré.  Afin de contribuer à la résolution de ce problème, le FMI est en train de développer un nouvel outil; il envisage des consultations multilatérales dans le cadre desquelles des questions particulières ayant une signification au niveau mondial et régional seront examinées globalement et collectivement.  Les premières de ces consultations se focaliseront sur la réduction des déséquilibres mondiaux tout en maintenant une forte croissance mondiale.  Travailler sur les pays à faibles revenus reste une tâche cruciale pour le FMI, a par ailleurs souligné M. Munzberg.


M. KIM HAK-SU, Secrétaire exécutif de la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie et le Pacifique (CESAP), au nom des cinq Commissions économiques régionales des Nations Unies, a rappelé que les cinq dernières années ont été une période en or du point de vue de la croissance, en particulier dans les pays en développement.  Un environnement international favorable a contribué à ces bonnes performances.  Pour autant, près d'un sixième de la population mondiale continue de vivre dans la pauvreté.  Il faut que la croissance se traduise mieux par une réduction de la pauvreté.  La croissance économique élevée n'a pas permis d'empêcher le taux de chômage d'augmenter, a souligné M. Kim.  Il faut donc améliorer le fonctionnement des marchés de l'emploi, en mettant l'accent sur l'emploi des jeunes, faute de quoi les populations concernées auront peu d'espoir de voir leurs vies s'améliorer.


Dialogue interactif


Au cours du dialogue interactif qui a suivi, le représentant de l'Afrique du Sud (au nom du Groupe des 77 et de la Chine) a dit l'importance du travail du Fonds monétaire international dans le domaine du développement, tout en estimant que ce n'est pas seulement la voix du FMI qui importe, mais aussi celle des pays en voie de développement, qui doit être prise en compte.  La représentante de la Finlande (au nom de l'Union européenne) a souligné que gouvernements et sociétés civiles des pays en voie de développement doivent appliquer de véritables politiques nationales axées sur l'emploi, appuyés par la communauté internationale.  L'Union européenne estime en outre que l'annulation de la dette est un moyen d'action efficace.  Il faut d'une manière générale créer des possibilités d'emploi et favoriser le développement durable, a dit la représentante.  Le Brésil a relevé qu'une attention plus grande doit être accordée à l'environnement économique international.  Pour la Thaïlande, pays en développement et pays développés partagent une responsabilité commune pour ce qui est d'assurer l'application du consensus de Monterrey en matière de financement du développement.  Pour sa part, la CNUCED devrait mettre sa capacité d'analyse au service de la fourniture de conseils aux pays en développement, de manière à les aider à réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement.  Le représentant de la République dominicaine a estimé nécessaire la tenue d'un sommet sur le pétrole et a souligné l'importance d'aborder dans une perspective internationale les grands problèmes que sont les migrations et l'adoption des technologies de l'information sur l'emploi.  La Fédération de Russie a souligné qu'il est impossible d'ignorer les incertitudes s'agissant des prévisions relatives aux taux de croissance dans le monde.  Avec les diverses institutions concernées, il faut renforcer la tendance d'assainissement de l'économie, afin d'éviter d'autres crises.

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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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