DSG/SM/283-FEM/1552

DEVANT LE FORUM INTERNATIONAL DES FEMMES, LA VICE-SECRÉTAIRE GÉNÉRALE DÉFEND LA CAPACITÉ D’ADAPTATION DE L’ONU À UN MONDE EN ÉVOLUTION

15/3/2006
Vice-Secrétaire généraleDSG/SM/283
FEM/1552
Department of Public Information • News and Media Division • New York

DEVANT LE FORUM INTERNATIONAL DES FEMMES, LA VICE-SECRÉTAIRE GÉNÉRALE DÉFEND LA CAPACITÉ D’ADAPTATION DE L’ONU À UN MONDE EN ÉVOLUTION


Elle évoque l’évolution du rôle de l’Organisation en matière de maintien de la paix, sa souplesse après la guerre froide, et l’avènement de la mondialisation


(Publié le 04 avril – retardé à la traduction)


On trouvera ci-après le texte des observations faites hier, le 14 mars, par la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Louise Fréchette, devant le Forum international des femmes, à New York:


Merci, Lynn et Jan, pour ces aimables paroles.  Je suis très heureuse d’être ici et d’avoir l’occasion de m’adresser à vous.  Puisque notre réunion a lieu deux semaines et demie à peine avant mon départ de l’Organisation, le moment m’a semblé opportun pour jeter un petit coup d’œil en arrière, parler de mon expérience comme Vice-Secrétaire générale, et évoquer, aussi, la manière dont l’Organisation a évolué ces dernières années. 


Quand j’ai pris mes fonctions de Vice-Secrétaire générale en mars 1998, 14 mois après l’entrée en fonctions du Secrétaire général Kofi Annan, mon poste était aussi nouveau que moi-même.  Mais il était clair que je devais me mettre immédiatement à l’œuvre, tout en m’efforçant de dissiper les craintes suscitées par la création de mon poste. 


Pour commencer, certains États Membres avaient exprimé des doutes quant à l’idée même d’avoir un vice-secrétaire général.  Ils ont fait savoir qu’ils ne souhaitaient pas la création d’un nouveau centre de pouvoir au Secrétariat.  En fait, ils n’ont même pas autorisé l’établissement d’un nouveau barème de traitement pour ce poste, comme l’avait recommandé le Secrétaire général.  Ils ont préféré adopter la formule d’une « prime », ce qui traduisait bien leurs réticences et leurs incertitudes. 


Une certaine nervosité régnait aussi au sein du Secrétariat.  Bien que trop polis pour en parler, certains de mes collègues devaient, j’en suis sûre, se méfier de mes nouvelles fonctions.  Allais-je empêcher les hauts fonctionnaires d’être en contact direct avec le Secrétaire général?  Allais-je vouloir superviser leurs activités ou m’y ingérer?  Et quelles seraient les questions dont j’aurais à m’occuper?  La résolution de l’Assemblée générale portant sur la création de mon poste était plutôt vague.  Elle évoquait des tâches générales, comme aider le Secrétaire général à assurer la cohésion du système des Nations Unies, et renforcer le rôle de l’Organisation en matière de développement social et économique.  La définition d’emploi s’arrêtait à peu près là. 


Dès le départ, j’ai estimé que le mieux à faire serait de m’employer avec mes collègues à apporter des améliorations là où elles étaient nécessaires, et de m’abstenir d’intervenir là où les choses se passaient bien.  Et c’est ainsi, en fait, que mon travail a commencé à se définir. 


Ainsi, une part non négligeable de ma tâche consistait à coordonner les activités du système des Nations Unies.  Ce système, comme vous le savez, est aussi complexe que vaste, et l’une des principales difficultés est de faire en sorte qu’il fonctionne avec le moins de redondances et de heurts possible, tout en s’efforçant de ne rien laisser de côté.  


L’action de l’ONU en Iraq est le meilleur exemple de longue durée de ma contribution à l’effort de coordination.  Pendant plus d’un an, à partir de 2002, j’ai présidé un comité chargé de prévoir l’éventualité d’une crise humanitaire en cas de guerre.  Après que la guerre ait été déclarée, il nous a été demandé de veiller à ce que les différentes institutions du système agissent de manière cohérente et complémentaire.  Notre groupe a réuni des hauts fonctionnaires de divers organismes des Nations Unies pour s’assurer que chacun connaissait parfaitement sa mission.  


Il y a eu d’autres initiatives similaires au fil des années, de la Sierra Leone au Kosovo en passant par le Timor oriental, mon rôle étant chaque fois de m’assurer que les différents membres de la famille des Nations Unies parlaient d’une même voix. 


J’ai également été appelée à coordonner la préparation de conférences des Nations Unies et d’autres manifestations de haut niveau, du Sommet sur le développement durable tenu à Johannesburg aux sommets sur la société de l’information organisés à Genève et à Tunis.  Et il y a eu aussi les « super-sommets », le Sommet du Millénaire en 2000 et le Sommet mondial de 2005. 


Je suis sûre que vous avez déjà beaucoup entendu parler du Sommet mondial de septembre dernier et de ses résultats, et je ne m’y attarderai donc pas.  Je voudrais en revanche dire un mot du Sommet du Millénaire tenu en 2000, qui aura toujours une signification particulière pour moi, en raison de tous les espoirs dont il était porteur.  Je ne veux pas paraître trop nostalgique: même à cette époque, la communauté internationale faisait face à des difficultés et des différends.  Mais un vent d’harmonie palpable soufflait dans la salle où étaient réunies les personnalités dirigeantes.  Le monde semblait plus insouciant, les défis plus faciles à surmonter.  Aujourd’hui, ce monde semble bien distant. 


Un aspect particulier de notre travail m’a personnellement touchée plus que tout autre: l’action contre le VIH/sida.  Je me souviens encore du jour où Nitin Desai, à l’époque Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a présenté aux membres du Conseil de direction un exposé sur l’impact du sida en Afrique et ailleurs dans le monde en développement, et sur l’étendue des ravages provoqués par ce fléau, qui, au-delà du simple individu, anéantissait des sociétés entières et menaçait du même sort des pays entiers. 


Bien des signes alarmants nous ont montré la nécessité d’accélérer et d’intensifier sans demi-mesures les efforts déployés par la communauté internationale pour lutter contre la pandémie.  Notre campagne renforcée a abouti au lancement de l’Appel du Secrétaire général en faveur de la lutte contre le VIH/sida, à Abuja, au printemps 2001, qui a débouché à son tour sur la création du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, et l’adoption d’une série d’autres mesures. Peu après, l’Assemblée générale a tenu sa première session extraordinaire sur le VIH/sida.


Notre action contre le VIH/sida est un parfait exemple de la manière dont l’ONU peut mener des projets et travailler en même temps à leur exécution en partenariat avec des acteurs très divers, étatiques et non étatiques, grâce pour l’essentiel à ONUSIDA, judicieusement dirigé par le docteur Piot.  La session extraordinaire de l’Assemblée générale a réuni des gouvernements, des ONG, des personnes vivant avec le VIH/sida et des représentants du secteur privé –tous ceux en somme qui doivent s’engager pleinement si nous voulons gagner ce combat.  C’est ce type de partenariat que l’ONU entend forger dans son travail sur le terrain, chaque jour. 


Naturellement, ma description de poste prévoyait également de nombreuses tâches officielles et diplomatiques conçues pour épauler le Secrétaire général, qui ne peut pas être partout à la fois.  Cela s’est traduit par la nécessité de recevoir très fréquemment des diplomates –dont, bien sûr, les époux d’un grand nombre d’entre vous– pour discuter de questions très diverses.  


Et cela signifiait aussi être assise aux côtés du Président de l’Assemblée générale pendant tous les débats généraux qui se sont tenus depuis ma prise de fonction.  J’ai dû sans doute entendre plus de discours de débat général prononcés par des chefs d’État ou de gouvernement que n’importe qui d’autre au cours des huit années passées! 


Certes, il m’a fallu rester assise sans bouger pendant longtemps –mais j’ai trouvé que l’expérience en valait vraiment la peine.  Il s’agit, après tout, d’un mécanisme essentiel de l’ONU –qui offre à tous les pays, grands et petits, riches ou pauvres, une tribune, du haut de laquelle ils peuvent se faire entendre.  Qui permet de prendre le pouls de la planète.  C’est pourquoi je ne suis absolument pas d’accord avec ceux qui affirment que le débat général ne sert à rien et qu’il faudrait le supprimer.  


Étant moi-même un produit de la réforme de l’ONU, j’ai participé activement au programme de réforme de l’Organisation.  En 2000, j’ai apporté ma contribution au rapport Brahimi dont j’ai ensuite coordonné le suivi, ce qui a permis d’améliorer le fonctionnement des opérations de paix des Nations Unies et de renforcer notre capacité à gérer les grandes missions de maintien de la paix. 


En 2002, j’ai aidé le Secrétaire général à diriger l’effort sous-tendant un train de réformes qui a contribué à préparer le terrain pour l’essentiel de l’action menée aujourd’hui afin d’adapter les règles et règlements de l’Organisation aux réalités présentes. 


L’année suivante, j’ai orienté les travaux du groupe dirigé par l’ancien Président du Brésil, M. Cardoso, dont le rapport est consacré à l’interaction de l’ONU avec la société civile, notamment les ONG.  Le rôle joué par l’ONU à cet égard revêt une importance croissante dans le contexte actuel; en effet, comme l’a dit le Président Cardoso dans son rapport, l’Organisation, placée au cœur d’un réseau de réseaux, rapproche les acteurs de tous les secteurs de la société.  Je regrette que ce rapport n’ait pas reçu toute l’attention qu’il méritait, et que certaines des recommandations pratiques qui y étaient formulées n’aient pas été retenues et suivies d’effet.  C’est un sujet qui continuera encore longtemps de nous intéresser.


J’ai participé également très activement aux réformes destinées à améliorer la sécurité du personnel.  Trop longtemps, nos systèmes de sécurité n’ont pas évolué avec la situation internationale ou la présence croissante de l’ONU sur le terrain.  Nos hommes et nos femmes payaient d’un prix trop lourd ce déphasage.  En 2000, nous avons lancé une initiative de réforme de la sécurité qui a abouti à la création d’un poste à plein temps de coordonnateur des Nations Unies pour les questions de sécurité.  Grâce à cette réforme, nous semblions enfin faire des progrès dans un domaine qui n’a bénéficié que d’un soutien modéré pendant trop longtemps. 


Mais à peine ces réformes avaient-elles été mises en œuvre qu’a eu lieu l’attentat à la bombe contre les bureaux de l’ONU à Bagdad.  Je n’oublierai jamais cette journée.  Je rentrais à New York d’une visite privée de quelques jours en Europe.  Des collègues de l’ONU sont venus m’accueillir à l’aéroport, livides.  À ce moment-là, Sergio Vieira de Mello était déjà mort.  On ne savait pas ce qu’étaient devenus les autres, dont je connaissais plusieurs personnellement.  Les jours se sont succédés dans une incertitude douloureuse où nous restions paralysés.  


On n’imagine jamais qu’une telle chose puisse arriver à des personnes que l’on connaît bien, jusqu’à ce qu’elle arrive.  Aujourd’hui, pourtant, ce type d’incident fait partie de la vie des fonctionnaires internationaux, ce qui, hélas, en dit long sur l’état de notre monde.  Il y a quelques semaines à peine, j’ai appris la mort d’un ancien collègue du service diplomatique canadien dans une explosion, en Afghanistan.  Je ne me souviens de rien de tel lorsque j’étais jeune diplomate.  La vie dans le service diplomatique semble bien plus risquée aujourd’hui.


Après l’attentat de Bagdad, nous savions, et les États Membres ont compris, qu’il nous fallait prendre le taureau par les cornes et imposer des mesures bien plus draconiennes pour assurer la sécurité du personnel.  Je suis reconnaissante aux États Membres de nous accorder les moyens d’utiliser les ressources nécessaires et d’acquérir les compétences dont nous avons besoin. 


Mes amis, comme vous le constatez, la réforme a occupé l’essentiel du temps que j’ai passé à l’ONU, et il est probable qu’elle occupera encore l’Organisation pendant un certain temps.  Vous avez sans doute entendu et lu beaucoup de choses sur l’énorme réforme dans laquelle nous sommes maintenant engagés, et je ne vais donc pas m’y attarder. 


En revanche, j’aimerais vous parler un peu de la manière dont l’ONU a changé au cours des 10 ou 20 dernières années, de la manière dont elle a constamment entrepris des réformes pour s’adapter à l’évolution du monde.  À la fin des années 1980, deux nouveaux phénomènes ont transformé le paysage international et, partant, l’ONU: la fin de la guerre froide et la mondialisation. 


S’il en est qui doutent de la capacité de l’ONU à changer et à innover, qu’ils examinent les différentes manières dont elle a réagi à cette évolution de la situation internationale depuis environ 1990. 


Prenez simplement l’exemple du rôle de l’ONU dans le maintien de la paix.  Nos missions de maintien de la paix sont devenues à la fois plus nombreuses et plus complexes: durant les 45 premières années de son histoire, l’ONU n’en a déployé que 13 mais, au cours des 15 années qui ont suivi, leur nombre a doublé.  Nous avons aujourd’hui déployé plus de 70 000 hommes dans des missions, plus que n’importe quel pays à l’exception des États-Unis d’Amérique.  


Le rôle du personnel chargé du maintien de la paix a évolué au point de n’avoir presque plus rien à voir avec le rôle traditionnel de surveillance du cessez-le-feu qui était le sien à l’ère de la guerre froide.  À présent, les missions des Nations Unies ont des tâches très variées: aider la transition politique, fournir des services de police, faire fonctionner des tribunaux, organiser des élections, désarmer des milices et des anciens combattants et protéger les agents humanitaires, pour n’en citer que quelques-unes parmi bien d’autres. 


Les missions de maintien de la paix relèvent désormais souvent du Chapitre VII de la Charte qui autorise –en réalité oblige– les soldats de la paix à recourir à la force, non seulement pour se défendre eux-mêmes, mais aussi pour faire face aux éléments armés qui menacent la population civile. 


Par deux fois dans sa récente histoire, il a même été demandé à l’Organisation de faire office de gouvernement d’un territoire, comme au Timor oriental, qu’une administration provisoire de l’ONU a accompagné jusqu’à l’indépendance en 2002, et au Kosovo, territoire dont l’administration continue d’incomber en dernier ressort à l’ONU, dans l’attente d’une conclusion prochaine des pourparlers sur son statut définitif. 


Les sanctions sont un autre domaine où l’ONU a innové ces dernières années.  En Iraq, après la guerre du Golfe de 1991, le Conseil de sécurité a imposé le régime de sanctions le plus global jamais élaboré.  Les leçons tirées des conséquences imprévues d’un dispositif aussi sévère ont permis au Conseil de sécurité d’énoncer des mesures plus soigneusement ciblées, comme les interdictions de voyage et le gel des comptes bancaires.  Entre autres nouveaux types de sanctions, le Conseil de sécurité a pris des mesures visant à lutter contre l’exploitation illégale des ressources naturelles afin de priver les combattants de ressources financières. 


Il y a eu des innovations encore plus révolutionnaires en matière de justice pénale.  Au milieu des années 1990, l’ONU a fait œuvre de pionnier en créant deux tribunaux pénaux spéciaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda.  L’Organisation a en outre mis en place un tribunal mixte en Sierra Leone pour permettre à ce pays déchiré par la guerre de traduire en justice ses propres criminels de guerre, tout en bénéficiant de compétences de juges et de procureurs internationaux. 


Mais l’innovation la plus notable dans ce domaine a été, naturellement, la création de la Cour pénale internationale.  Bien que n’étant pas à proprement parler un organe des Nations Unies, la Cour a été établie grâce aux efforts de l’ONU, et le Conseil de sécurité peut lui renvoyer des affaires, comme il l’a fait dans le cas du Darfour l’an dernier. 


Cela nous amène naturellement à la question des droits de l’homme, domaine qui revêt aujourd’hui une importance sans précédent dans l’histoire des Nations Unies.  Comme vous le savez, les États Membres débattent actuellement de la création d’un Conseil des droits de l’homme qui remplacerait une Commission des droits de l’homme très critiquée. 


Mais d’autres faits nouveaux relativement récents concernant notre mécanisme de défense des droits de l’homme méritent aussi d’être signalés.  Le Haut Commissariat aux droits de l’homme lui-même n’existe que depuis 13 ans.  Les hauts commissaires qui se sont succédés à ce poste, notamment Mary Robinson et, maintenant, Louise Arbour, n’ont pas seulement plaidé vigoureusement la cause des droits de l’homme partout dans le monde: ils ont renforcé la capacité du Haut Commissariat à jouer un rôle concret sur le terrain.  Toutes les missions de maintien de la paix sont désormais dotées d’une composante Droits de l’homme, et plusieurs missions de surveillance des droits de l’homme sont en place dans des pays aussi différents que le Népal et la Colombie.  


Naturellement, le terrorisme est un autre domaine où l’ONU a dû évoluer avec son temps.  Déjà avant le 11 septembre 2001, le Conseil de sécurité avait imposé des sanctions contre Al-Qaida et créé un comité spécial chargé de surveiller ses agissements.  Mais immédiatement après les attentats, le Conseil est allé bien plus loin en adoptant la résolution 1373.  Il a imposé une série d’obligations à tous les États Membres, dressé une liste de terroristes et d’organisations terroristes et créé le Comité contre le terrorisme, à la fois pour s’assurer que les États Membres respectent les dispositions de la résolution et pour les aider à renforcer leur capacité à promulguer et à appliquer des lois contre le terrorisme.  Nous espérons que l’Assemblée générale sera en mesure d’adopter cette année une convention générale sur le terrorisme international et une stratégie mondiale de lutte contre le terrorisme, conformément à la décision issue du Sommet mondial de septembre dernier. 


Mes amis, vous pouvez donc constater qu’au cours des dernières années, l’ONU a montré qu’elle était un instrument souple, sur lequel les États Membres peuvent compter, et comptent, pour assurer des fonctions très diverses.  Je pense qu’il y a deux raisons à cela: la légitimité universelle unique dont jouit l’ONU et sa capacité démontrée à mener à bien son action. 


C’est pour cette raison que l’on a demandé à l’ONU, il y a quatre ans, d’aider l’Afghanistan à prendre un nouveau départ.  L’ONU a servi de médiateur dans ce que l’on a appelé le processus de Bonn, qui a permis la formation d’un gouvernement afghan provisoire.  L’ONU a convoqué la Loya Jirga, posant ainsi les bases d’une constitution afghane.  L’ONU a ensuite participé à l’organisation d’élections qui ont donné au peuple afghan son premier président et son premier parlement librement élus. 


C’est aussi pour cette raison que l’on a demandé à l’ONU de jouer un rôle clef similaire en Iraq, malgré toute la polémique suscitée par le refus du Conseil de sécurité d’entériner l’action militaire des États-Unis dans ce pays en 1993.  Un an plus tard, l’ONU s’est vu demander de participer à la formation du gouvernement provisoire de l’Iraq, puis d’aider à organiser les élections et le référendum. 


Et c’est encore pour cette raison que l’ONU s’est vu demander de vérifier le retrait des troupes syriennes du Liban et de procéder à une enquête criminelle approfondie sur l’assassinat de l’ancien Premier Ministre Rafic Hariri.  C’est la première enquête de ce type jamais menée par l’ONU, qui s’acquitte de cette tâche avec toute la fermeté, la minutie et la neutralité qui s’imposent dans un climat politique très tendu. 


Voilà quelques-unes des raisons pour lesquelles je quitterai l’Organisation des Nations Unies extrêmement fière de l’avoir servie.  Je partirai aussi bien plus consciente du caractère complexe, des points forts et des faiblesses du système de l’ONU qu’au moment où j’étais la Représentante permanente du Canada auprès de l’Organisation. 


Dans l’ensemble, ces huit dernières années ont constitué une expérience dont j’ai profité pleinement, et je suis profondément reconnaissante au Secrétaire général de m’avoir donné cette chance.  J’apprécie tout particulièrement d’avoir eu le plaisir et le privilège de travailler pendant ces huit années avec des collègues de si haut niveau. 


Les fonctionnaires des Nations Unies sont l’atout principal de l’Organisation.  La vaste majorité d’entre eux y travaillent parce qu’ils croient sincèrement que c’est la chose à faire.  Leur travail est loin d’être apprécié à sa juste valeur à l’extérieur de l’Organisation, et ils sont souvent lésés par des systèmes de gestion peu satisfaisants à l’intérieur de l’Organisation.  Nous sommes maintenant en plein cœur d’une réforme de la gestion qui, je l’espère vivement, permettra de leur donner l’encadrement, les mécanismes et les conditions de travail améliorés qu’ils méritent tellement. 


Enfin, permettez-moi de dire un mot en particulier des femmes qui travaillent à l’ONU –pas seulement parce que je m’adresse aujourd’hui au Forum international des femmes, mais aussi parce que je le pense sincèrement: au cours de ces huit dernières années, j’ai été impressionnée et inspirée par le talent et les compétences des femmes que j’y ai rencontrées, à tous les niveaux d’activité de l’ONU. 


Sous la direction du Secrétaire général actuel, l’ONU compte plus de femmes occupant des postes à responsabilités que jamais auparavant.  Lorsque j’ai pris mes fonctions, la liste incluait Nafis Sadiq au FNUAP, Carol Bellamy à l’UNICEF, Sadako Ogata au HCR, Catherine Bertini au PAM, Mary Robinson comme Haut Commissaire aux droits de l’homme, et, parmi les institutions spécialisées, Gro Harlem Brundtland à l’OMS.  J’ai beaucoup appris à leur contact, et, qui plus est, j’ai trouvé leur compagnie extrêmement enrichissante.  Nous avions toutes pris l’habitude de dîner ensemble deux fois par an en marge des réunions du Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies, et j’attacherai toujours une grande valeur à l’esprit de camaraderie qui s’est installé entre nous. 

Depuis leur départ, plusieurs d’entre elles ont été remplacées par des femmes tout aussi remarquables, comme Louise Arbour, Thoraya Obaid et Ann Veneman.  Et au niveau hiérarchique immédiatement inférieur est un groupe de femmes tout aussi douées et qualifiées.  L’ONU doit à présent parvenir à recruter, retenir et valoriser la prochaine génération de jeunes femmes de manière à finalement atteindre l’objectif de parité des sexes à tous les échelons du Secrétariat de l’ONU. 


Mes amis, vous le voyez, l’expérience m’a appris que l’ONU est plutôt bien préparée pour l’avenir, et bien mieux que beaucoup le pensent.  J’espère que vous emporterez ce message avec vous aujourd’hui et que vous le transmettrez autour de vous.  Je vous remercie de m’avoir écoutée, et je suis prête maintenant à répondre à vos questions.  


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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