COMMISSION DU DÉSARMEMENT: LA POLITIQUE DE DEUX POIDS DEUX MESURES ET LE REFUS DES ÉTATS NUCLÉAIRES DE DÉTRUIRE LEURS ARSENAUX PERSISTENT, SELON DES DÉLÉGATIONS
| |||
Department of Public Information • News and Media Division • New York |
Commission du désarmement
Session de fond de 2006
271e & 272e séances – matin & après-midi
COMMISSION DU DÉSARMEMENT: LA POLITIQUE DE DEUX POIDS DEUX MESURES ET LE REFUS DES ÉTATS NUCLÉAIRES DE DÉTRUIRE LEURS ARSENAUX PERSISTENT, SELON DES DÉLÉGATIONS
Des États accusés de violer le régime de non-prolifération nucléaire invoquent leur droit à se défendre contre des menaces et des agressions nucléaires extérieures
« Alors que les pays riches dépensent en moyenne chaque année 800 milliards de dollars en achats d’armements et en frais d’entretien pour des armées mobilisant 20 millions de soldats, les sommes consacrées en 2004 à la lutte contre la pauvreté et à l’amélioration des conditions de vie des enfants, femmes et hommes vivant sous le seuil de pauvreté n’ont atteint que 225 millions de dollars », a regretté ce matin le représentant de la République-Unie de Tanzanie, devant la Commission du désarmement, en constatant la mauvaise volonté des États nucléaires à respecter leurs engagements de désarmement.
Lançant un appel à l’arrêt des dépenses militaires, le représentant a rappelé aux délégations prenant part au débat général de la session de fond 2006 de la Commission, que la sécurité et le développement étaient interdépendants. Comme la majorité des délégations qui se sont exprimées après lui, il a insisté sur la nécessité d’un désarmement nucléaire complet et généralisé dont la mise en œuvre des mesures devrait se faire concomitamment à celles qui ont trait à la lutte contre la prolifération des technologies et des armements nucléaires. À cet égard, des délégations, dont celles du Bangladesh, du Chili et de l’Afrique du Sud, ont regretté l’absence de progrès observés dans les processus de désarmement nucléaire et, en ce qui concerne la non-prolifération, dans le renforcement des régimes d’inspection de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Mesures de désarmement et imposition des dispositions du Traité de non-prolifération nucléaire ayant trait au respect de la non-prolifération devraient aller de pair, ont estimé des délégations en rejetant toute politique de « deux poids, deux mesures » et toute mesure qui serait discriminatoire.
À cet égard, après s’être félicitée du succès des créations de zones exemptes d’armes nucléaires dans la lutte contre la prolifération, la délégation de l’Égypte a regretté que malgré les efforts déployés depuis 25 ans par les États arabes, avec le soutien d’un nombre appréciable de pays, la création d’une zone de ce type continue à se heurter au refus d’Israël de se joindre au TNP et de placer ses installations sous le contrôle de l’AIEA. Le Pakistan et l’Inde, puissances nucléaires de facto puisque ces deux pays sont dotés de l’arme nucléaire sans être parties au TNP, ont indiqué qu’ils souhaitaient que la Commission surmonte les blocages que ses travaux ont connu en 2005 et parvienne à un consensus sur des recommandations ayant trait au désarmement nucléaire, à la non-prolifération et à une interdiction de toute tentative de militarisation de l’espace extra-atmosphérique. « La Commission devrait être capable de faire des recommandations qui prennent en considération les raisons pouvant pousser un État à acquérir des armes de destruction massive », a déclaré le représentant du Pakistan. Estimant que l’accumulation d’armes conventionnelles et non conventionnelles par un voisin avec qui il a un différend frontalier ou idéologique pouvait pousser un pays à se doter d’armes nucléaires, le représentant pakistanais a néanmoins indiqué qu’il était nécessaire que tous les États détenteurs de ces armes puissent parvenir à un consensus, basé sur la confiance, qui seul, a-t-il souligné, pourrait rendre possible un désarment généralisé.
Un certain nombre de délégations ont rappelé l’obligation qu’ont les États dotés d’armes atomiques de fournir des garanties de sécurité aux pays ne disposant pas d’armes de ce type. Les délégations du Bangladesh et du Pakistan ont relevé le caractère aléatoire des garanties négatives de sécurité actuelles qui, bien souvent, sont « trop restrictives et partiales » et n’empêchent pas certaines puissances de menacer de frappes nucléaires des pays ne possédant pas d’arsenaux atomiques. La communauté internationale devrait sans réserve condamner ce genre de menaces, ont dit les délégations. Accusant les États-Unis d’être responsables des tensions qui traversent la péninsule coréenne, la délégation de la République populaire démocratique de Corée a déclaré cet après-midi qu’« ayant été désigné comme cible potentielle de frappes nucléaires préventives », son pays n’avait d’autre choix que de « développer, à son corps défendant, une dissuasion nucléaire pour se mettre à l’abri des menaces américaines et d’une possible invasion ». Se joignant à la perception du représentant de l’Iran, la délégation nord-coréenne a estimé que ce sont les pays détenteurs de gros stocks d’armes atomiques, qui continuent de développer de nouveaux types d’armes, et leurs alliés, qui posent la plus grande menace à la paix et à la sécurité internationales. Faisant part de ses doutes sur le bien-fondé du débat actuellement en cours sur les risques de prolifération, le représentant nord-coréen a estimé que l’accent mis sur la non-prolifération ne visait qu’à cacher le désir qu’ont certaines puissances de s’arroger le monopole de détention des armes nucléaires et de destruction massive pour perpétuer un ordre injuste et intimider sans risque les peuples qui se distinguent par la différence de leurs valeurs et de leurs cultures.
Outre ceux déjà cités, les délégations suivantes ont pris la parole: Népal, Jamaïque, Jordanie, Libye, Saint-Marin, République de Corée, Fédération de Russie et Kazakhstan.
La prochaine séance plénière de la Commission du désarmement sera annoncée dans le Journal.
RECOMMANDATIONS EN VUE DE RÉALISER LE DÉSARMEMENT NUCLÉAIRE ET LA NON-PROLIFÉRATION DES ARMES NUCLÉAIRES; MESURES DE CONFIANCE CONCRÈTES DANS LE DOMAINE DES ARMES CLASSIQUES; RAPPORT DE LA COMMISSION DU DÉSARMEMENT À L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE À SA SOIXANTE ET UNIÈME SESSION
Déclarations
M. HERALDO MUÑOZ (Chili) a déclaré que son pays regrettait que des divergences politiques et un manque d’engagement de la part de différentes parties s’opposent encore au respect total des obligations du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN). La réunion d’examen du Traité de non-prolifération (TNP) tenue l’année dernière s’est achevée par un échec qui est reflété dans l’absence de référence aux questions de désarmement nucléaire que l’on a pu observer dans le Document final du Sommet mondial de 2005. On constate que certains États déploient beaucoup d’efforts pour acquérir des technologies qui leur permettraient de maîtriser le cycle complet de la production de matières fissiles, a dit le représentant. Bien que ces pays déclarent que ces efforts sont réalisés à des fins pacifiques, leurs activités affaiblissent cependant le régime de non-prolifération.
Le Chili invite tous les États qui ne l’ont pas encore fait à adhérer au Protocole additionnel au Traité de non-prolifération et à l’appliquer, a dit M. Muñoz. Sa délégation espère que cette session de la Commission pourra jeter les bases d’un débat de fond sur la vérification et le respect du TNP, a poursuivi le représentant. Les efforts déployés par la communauté internationale devraient être menés parallèlement à ceux qui sont déployés pour assurer la non-prolifération. Il est regrettable qu’une démarche unilatérale vise à se substituer au cadre multilatéral qui devrait régir la gestion des questions liées à la prolifération, a regretté M. Muñoz. Le Chili estime que la société civile devrait être invitée à prendre part aux travaux de la Commission du désarmement afin de servir de passerelle avec le grand public et de l’informer sur les responsabilités des États. Le public devrait savoir qui est réellement responsable des blocages paralysant le travail de la Commission, a dit le représentant.
M. JAYANT PRASAD (Inde) a lié les dysfonctionnements du mécanisme de désarmement des Nations Unies à une érosion de l’éthique qui devrait régir les relations internationales. Toutefois, la relance des travaux de cette Commission après deux ans reflète un engagement en faveur du multilatéralisme. Abordant le premier point de l’ordre du jour relatif au désarmement nucléaire, le représentant a fait part de la ferme position de son Gouvernement en faveur d’un désarmement général et complet qui soit vérifiable et non discriminatoire et placé sous contrôle international. L’intervenant a aussi expliqué que pour son pays, le désarmement et la non-prolifération vont de pair et se renforcent mutuellement. La Commission, a–t-il ajouté, pourrait par ses recommandations ouvrir la voie aux négociations au sein de la Conférence du désarmement. Nous présenterons dans le cadre du Groupe de travail consacré au désarmement nucléaire des propositions visant à parvenir au désarmement et à la non-prolifération nucléaires.
Le représentant a identifié l’absence de confiance mutuelle entre États comme un problème de taille dont s’est fait le reflet le Document final du Sommet de septembre dernier. L’absence de consensus sur un chapitre à intégrer dans le Document témoigne des différences importantes entre États sur les objectifs et les priorités dans ce domaine. Il faut tenir compte des diverses positions tandis que les États devront faire preuve de sincérité et de flexibilité. Un moyen de relancer la confiance serait pour les États nucléaires de réaffirmer leur engagement en faveur de l’élimination totale de leurs arsenaux. S’agissant des armes classiques, il a estimé que les travaux de la Commission devraient prendre pour base le document de travail élaboré en 2003.
M. AUGUSTINE MAHIGA (République-Unie de Tanzanie) a déclaré que les États devraient adopter des politiques de défense qui évitent l’esprit de confrontation et promeuvent au contraire la confiance, la transparence et une plus grande coopération afin de construire un monde plus sûr pour tous. La communauté internationale devrait s’atteler à détruire la majorité des stocks d’armes nucléaires stratégiques qui posent en ce moment une menace à la survie de l’humanité, a dit M. Mahiga. La lenteur des progrès en matière de désarmement nucléaire est regrettable, a poursuivi le représentant en relevant que depuis sept ans, la Conférence du désarmement n’a pas été capable de se mettre d’accord sur un programme de travail. Quant à la Commission du désarmement, elle n’a pas pu parvenir à un consensus au mois de juillet dernier, en ce qui concerne la question nucléaire, pour ses travaux de 2006. La Tanzanie espère donc que cette session pourra accomplir des progrès en ce sens.
Plusieurs régions se sont déclarées zones exemptes d’armes nucléaires, a dit M. Mahiga. Mais les retards que prend l’agenda du désarmement nucléaire complet accroissent la possibilité de la prolifération des armements de destruction massive, qui pourraient tomber entre les mains de terroristes. L’attitude qui prévaut actuellement a contribué à encourager le détournement de ressources précieuses qui auraient du être consacrées au bien-être des populations du monde et ainsi les Objectifs du Millénaire pour le développement ne seront pas atteints. Les statistiques disponibles montrent que les pays riches dépensent 800 milliards de dollars chaque année à acheter des armes. Vingt millions de personnes sont des soldats d’armées régulières. Mais les sommes consacrées à la promotion d’une vie acceptable pour les hommes, femmes et enfants de la planète n’atteignent que 225 millions de dollars par an, selon les chiffres du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), a indiqué M. Mahiga. Si 50 milliards de dollars supplémentaires ne sont pas versés à la lutte contre la faim et la pauvreté, les OMD ne seront pas atteints en 2015, a regretté le représentant tanzanien.
M. DANIELE D. BODINI (Saint-Marin) a fait remarquer que la Commission se réunissait à un moment particulièrement difficile car la menace que font peser les armes de destruction massive suscite de plus en plus de préoccupations. La grande majorité des États Membres qui ne détiennent pas de telles armes sont des témoins impuissants devant une telle menace qui se compte par milliers d’ogives nucléaires. L’érosion de la souveraineté des nations, l’instabilité internationale et nationale, les actes désespérés de terrorisme, des gouvernements irresponsables contribuent à l’incertitude effrayante qui caractérise notre avenir.
Nous espérons que les trois prochaines semaines nous permettront de fournir des directives en faveur du désarmement nucléaire. Tout aussi importante est la question de la réduction et du contrôle des armes classiques, et notamment le trafic illicite de telles armes. Il nous faut parvenir à un équilibre entre la transparence et les besoins de défense.
M. HONG-GHI CHOI (République de Corée) a déclaré que le TNP devrait être préservé de toute violation et que le Protocole additionnel au TNP, accordant à l’AIEA plus de pouvoir en matière de contrôle, devrait être érigé en nouvelle norme internationale et universelle de vérification. Tous les États devraient adhérer au Traité, a recommandé M. Choi. Un système de vérification plus intransigeant et plus intrusif augmenterait la confiance des pays dans l’efficacité de cet instrument.
Cependant, a dit le représentant, nous devons être conscients que les efforts de non-prolifération doivent être accompagnés de ceux ayant trait au désarmement nucléaire, comme cela est stipulé dans l’article VI du TNP. La République de Corée se félicite à cet égard des efforts déployés par les États dotés de l’arme nucléaire. Nous les appelons à poursuivre sur cette lancée et à réduire leurs arsenaux conformément au Traité de Moscou. Nous notons que les efforts actuels restent insuffisants et ne répondent pas aux demandes formulées lors de la Conférence d’examen du TNP tenue en 2000, a dit M. Choi. La République de Corée encourage donc les États nucléaires à être plus proactifs sur cette question et à faire preuve de transparence. Les États nucléaires devraient donner à ceux qui ne sont pas dotés d’armes atomiques des garanties négatives de sécurité, a estimé le représentant en rappelant que ces obligations font partie des termes et des dispositions du TNP.
M. IFTEKHAR AHMED CHOWDHURY (Bangladesh) a déclaré que la Commission se réunissait à un moment difficile de son histoire marqué par l’absence de progrès et voire même une régression sur plusieurs fronts comme nous l’avons vu avec les récents développements s’étant produits en dehors des mécanismes multilatéraux de désarmement et de non-prolifération. Le représentant a lancé des appels en faveur de l’universalité du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) et du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN), en rappelant que son pays avait été l’une des premières nations d’Asie du Sud de l’Annexe II qui à dresser la liste des pays dont la ratification est essentielle à l’entrée en vigueur du Traité. Le représentant a rejeté les doctrines nucléaires ainsi que la théorie de la dissuasion nucléaire. Nous devons donc nous engager en faveur de la destruction totale des armes nucléaires, a-t-il dit.
Le représentant s’est dit profondément déçu par l’échec de la Conférence d’examen de 2005 du TNP tout en estimant que les résultats obtenus précédemment étaient toujours valables et devaient être mis en œuvre. C’est le cas selon lui des 13 mesures pratiques de désarmement adoptées en 2000. Il a appelé les États nucléaires à prendre des mesures immédiates pour réduire de manière accélérée et irréversible leurs arsenaux nucléaires. Il a demandé instamment à la Conférence du désarmement de reprendre des travaux de fond et de lancer des négociations en vue d’un programme échelonné de destruction des arsenaux nucléaires.
Le recours aux armes nucléaires contre des États qui n’en sont pas dotés viole le concept d’assurances négatives de sécurité. Sur la question du recours à l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, le représentant s’est dit déconcerté par les restrictions, selon lui non justifiées, sur les exportations de matériel et de matières nucléaires vers les pays en développement qui ne possèdent pas l’arme nucléaire. Ces barrières doivent tomber.
M. AIZAZ AHMAD CHAUDHRY (Pakistan) a déclaré que la Commission devrait être capable de faire des recommandations prenant en considération les raisons et les motifs qui poussent des États à acquérir des armes nucléaires et de destruction massive. Ces motifs incluent la perception que ces États ont des menaces que leur posent des pays ayant des forces conventionnelles ou nucléaires qui pourraient remettre en question l’existence même de leurs voisins. Les disputes frontalières et l’application discriminatoire de règles et normes internationales font aussi partie des raisons qui poussent un État à chercher à se doter d’armes de destruction massive. La menace de prolifération ne peut être contenue que si les actions prises à cet effet sont accompagnées de mesures de désarmement. Le monde n’est pas seulement menacé par la prolifération, il est aussi mis en danger par la prolifération verticale que causent les Etats nucléaires qui modernisent leurs arsenaux et multiplient le nombre d’armes et d’arsenaux dont ils disposent, a estimé M. Chaudhry.
Un Conseil de sécurité non équitable et aux décisions discriminatoires ne peut remplacer les cadres de négociation multilatéraux, et l’imposition unilatérale de restrictions et de régimes sélectifs ne pourra pas promouvoir la sécurité. Une fois que des traités sont signés, on doit les respecter, a estimé le représentant. Il est donc important que le mandat du Comité 1540 du Conseil de sécurité soit transféré à un organe de l’ONU qui soit plus représentatif de toute la communauté internationale, au sein de l’Assemblée générale. Bien que le Pakistan soit un État doté de l’arme nucléaire, il souscrit aux objectifs du TNP, a poursuivi le représentant. Notre pays est prêt à continuer à agir dans le respect des obligations prises par les États nucléaires dans les articles 1, 2 et 3 du TNP. Le Pakistan soutient des négociations pour l’interdiction de la production et du transfert illicites des matières fissiles, conformément au Mandat Shannon et à la proposition A-5, qui préconisent la mise en place d’un traité universel, non discriminatoire, multilatéral et universel, dont l’application par les États serait mutuellement vérifiable.
À moins que le désarmement nucléaire complet ne soit achevé, les États non nucléaires continueront d’avoir besoin d’assurances de sécurité de la part des pays dotés d’armes atomiques. Les assurances de sécurité actuellement fournies par les pays dotés de l’arme nucléaire sont trop restrictives, partiales et n’assurent pas une vraie sécurité des pays qui n’ont pas de tels arsenaux, a regretté le représentant du Pakistan. Nous devons condamner sans ambages tout pays nucléaire qui menacerait un État non pourvu d’armes nucléaires d’une agression faisant usage de ces armes. Le Pakistan regrette aussi que les réglementations actuelles ne garantissent pas une véritable interdiction de la militarisation de l’espace extra-atmosphérique, a poursuivi M. Chaudhry. La Chine et la Fédération de Russie ont fait beaucoup de travaux que nous estimons louables sur cette question, et le Pakistan soutient la proposition A-5, qui demande que des négociations s’ouvrent sans délai sur cette question dans le cadre d’un Comité ad hoc.
M. YOUCEF YOUSFI (Algérie) a déclaré que la Commission du désarmement abordait ses travaux dans un contexte international préoccupant et lourd de conséquences pour la paix et la sécurité. Toutefois, ces difficultés n’entament pas notre ferme conviction selon laquelle le désarmement général et complet demeure la seule option salutaire. « Ma délégation, a assuré le représentant, entend contribuer au succès de cette session et aboutir à un consensus sur les points de l’ordre du jour ». La réalisation du désarmement nucléaire repose inéluctablement sur la rupture définitive avec l’ordre établi de la doctrine de la dissuasion nucléaire et de la suprématie militaire. Elle doit être activement entreprise à travers la revitalisation de la Conférence du désarmement en vue de mettre en place un programme de travail lui permettant de lancer des négociations pour l’élaboration des instruments juridiques contraignants liés au désarmement nucléaire et aux garanties négatives de sécurité.
Pour le représentant, la mise en œuvre de l’engagement pris par les États nucléaires lors de la Conférence d’examen du TNP de 2000 d’éliminer sans équivoque leurs arsenaux nucléaires de même que l’universalité du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires se révèlent être des moyens tout à fait indiqués en vue de parvenir au désarmement nucléaire. Le représentant a souligné que les 13 mesures adoptées en 2000 pour la mise en œuvre de l’article VI du TNP, constituent un véritable programme d’action traçant la voie du désarmement. De même, ces efforts devraient être accompagnés par un effort international commun destiné à promouvoir la coopération technique et les échanges scientifiques en vue de garantir à l’ensemble des États la possibilité d’utiliser l’énergie atomique à des fins pacifiques.
De l’avis du représentant algérien, l’approche sélective consistant à singulariser les armes classiques comme étant le seul domaine sur lequel les mesures de confiance devraient s’appliquer constitue une approche partielle.
M. AMR ABOU EL ATTA (Égypte) a déclaré que la création de zones exemptes d’armes nucléaires dans beaucoup de régions du monde est une contribution importante au contrôle de la prolifération nucléaire. À cet égard, malgré les succès réalisés par les Traités de Tlatelolco, Rarotonga, Bangkok et Pelinda, l’Égypte et les États arabes ont en vain milité pendant 25 ans pour la création d’une zone exempte d’armes nucléaires dans la région du Moyen-Orient. Bien que les États arabes promeuvent cette idée, Israël a constamment refusé d’adhérer au TNP, et continue de ce fait de poser une sérieuse menace à la sécurité régionale et à l’intégrité du régime de non prolifération. Au vu de cette situation, la délégation de l’Égypte poursuivra les efforts qu’elle a engagés en vue de la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, a dit M. Atta.
Le régime de non-prolifération est aujourd’hui gravement menacé par le refus de certains États de respecter les dispositions du TNP relatives au désarmement nucléaire, a poursuivi le représentant. Ces États continuent de développer des doctrines stratégiques basées sur la possession et l’usage d’armes nucléaires et d’en menacer des pays qui n’en sont pas dotés. L’Égypte soutient à cet égard l’appel lancé par le Mouvement des pays non alignés, qui demande, au plus tôt, la convocation d’une conférence internationale au cours de laquelle la communauté internationale devrait parvenir à un accord sur l’élimination programmée des armes nucléaires. Cet accord devrait arrêter un agenda de mise en œuvre du désarmement sur un temps défini, et il interdirait le développement des armements atomiques, leur acquisition, leurs essais, leur stockage, leur usage, et la menace d’en faire usage contre un pays qui n’en est pas pourvu.
M. ANDREY DENISOV (Fédération de Russie), évoquant le Document final du Sommet de septembre, a lui aussi regretté que les États Membres ne soient pas parvenus à un accord sur la section consacrée au désarmement. Il a toutefois estimé que le bilan des Nations Unies en la matière était plutôt positif. Nous avons évité la menace d’un conflit nucléaire, évité que des armes nucléaires ne tombent entre des mains terroristes et prévenu des dizaines de conflit. Face aux menaces actuelles, a ajouté le représentant, nous appelons tous les États à mettre scrupuleusement en œuvre la résolution 1540 du Conseil de sécurité qui vise à lutter contre le trafic des armes de destruction massive sur le marché noir. Il a aussi lancé des appels en faveur de l’intégrité du TNP. Il revient à l’Agence internationale de l’énergie atomique de veiller à la non-prolifération des armes nucléaires tout en veillant au droit légitime des États d’utiliser l’énergie atomique à des fins pacifiques. Nous lançons des appels pour une résolution calme et non politisée de la question iranienne. Le TICEN est aussi un élément central du désarmement et nous appelons les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier cet instrument.
Le représentant s’est dit en faveur d’un traité d’interdiction des matières fissiles et de la mise en place d’un comité ad hoc au sein de la Conférence du désarmement. Il a aussi appuyé la création de zones exemptes d’armes nucléaires en précisant que son pays avait fournit des assurances de sécurité aux États participant à ces zones. M. Denisov a également abordé la question de la réduction des arsenaux nucléaires russes et fait valoir les efforts déployés par la Russie pour une entré rapide de la nouvelle version du Traité sur les forces conventionnelles en Europe. Les États Membres de l’OTAN devront à cet égard achever leur processus de ratification de ce traité. Si cette situation ne change pas, les participants à la Conférence d’examen du traité du mois de mai devront décider du futur de ce traité « pierre angulaire » de la stabilité en Europe.
Mme NCUMISA PAMELA NOTUTELA (Afrique du Sud) a déclaré que sa délégation était inquiète du manque de progrès en matière de désarmement nucléaire. Ce fait résulte du manque de bonne foi et de volonté politique de certains États nucléaires, a dit la représentante en indiquant que l’Afrique du Sud est en faveur d’un désarment nucléaire généralisé et complet. Il est impératif que cette session de la Commission du désarmement démontre le caractère délibératif de cet organe dans les domaines du désarmement et de la non-prolifération, a poursuivi Mme Notutela. L’Afrique du Sud espère que les délibérations de cette session identifieront des recommandations en faveur du désarmement nucléaire et de la construction de la confiance entre les États.
Bien que les armements nucléaires soient le plus grand souci de la communauté internationale, l’Afrique du Sud tient à attirer l’attention de la Commission sur l’accumulation d’armes conventionnelles et de petit calibre à laquelle se livrent certains États. Au-delà des besoins de légitime défense, l’excès d’accumulation crée les conditions de la déstabilisation de régions entières, et les efforts de reconstruction que mène la communauté internationale dans des zones sortant de conflit sont paralysés par la prolifération des armes de petit calibre. C’est pourquoi l’Afrique du Sud se prononce en faveur de l’établissement et du renforcement de mesures de confiance entre États. La transparence des transferts d’armes est un élément crucial de l’établissement de cette confiance, et elle permet de détecter les accumulations impromptues d’armements par un État ou une entité non étatique dans une zone sensible. La Commission devrait donc encourager l’application de l’instrument international permettant aux États d’identifier et de tracer, de manière opportune et sûre, les transferts illicites de petites armes et d’armes de petit calibre, a suggéré Mme Nutotela.
M. YERZHAN KAZYKHANOV (Kazakhstan) a indiqué que l’année passée a vu la célébration du 10e anniversaire du retrait de l’arsenal nucléaire qu’avait laissé le régime soviétique sur le territoire de son pays. Le Kazakhstan a depuis volontairement procédé à sa dénucléarisation, accédé au TNP en tant qu’État non nucléaire et fermé son site servant aux essais. Nous réaffirmons notre attachement au TNP qui est la pierre angulaire des efforts mondiaux de non-prolifération. Le désarmement et la non-prolifération se renforcent mutuellement et dans ce cadre, il est indispensable d’accélérer l’entrée en vigueur du TICEN. Le représentant s’est par ailleurs dit en faveur de la création de nouvelles zones exemptes d’armes nucléaires qui contribuent à renforcer la sécurité dans diverses régions du monde. Le Kazakhstan est pleinement engagé dans des négociations sur un traité visant l’établissement d’une telle zone en Asie centrale.
M. ARUN PRASAD DHITAL (Népal) a souligné l’importance que son pays attache au système multilatéral de désarmement et de non-prolifération qui garantit la transparence et une obligation de reddition. Le Népal est partie au TNP et aux divers instruments internationaux et soutient l’expansion du Registre des Nations Unies sur les armes classiques. Le représentant a également soutenu une élimination totale et complète des armes nucléaires ainsi que des armes de destruction massive. Sur un plan régional, le représentant a appuyé la mise en place de mécanismes qui seraient à même de renforcer la confiance. Il a réitéré la proposition de son Gouvernement d’ouvrir le Centre régional pour la paix et le désarmement en Asie et au Pacifique à Katmandou dans les six mois suivant la signature par le pays hôte d’un accord avec le Secrétariat des Nations Unies. Pour cela, nous attendons avec impatience le projet d’accord qui doit être préparé par le Secrétariat, a indiqué le représentant népalais.
Mme NORMA TAYLOR ROBERTS (Jamaïque) a déclaré que les défis auxquels la communauté internationale était confrontée en matière de non-prolifération et ceux que posent la prolifération verticale, due à la modernisation, par des États nucléaires, de leurs arsenaux, menacent les fondements du multilatéralisme en matière de contrôle des armements. De nouvelles justifications sont avancées en ce moment pour expliquer un « besoin d’armes nucléaires plus sophistiquées » face aux dangers qu’on ne perçoit pas clairement, a déploré Mme Roberts. La Jamaïque se félicite de l’opportunité que lui offre la tenue de travaux de cette session de la Commission du désarmement pour faire des propositions sur la voie à suivre afin d’établir, promouvoir et élaborer des normes universelles de désarmement.
Les récents échecs que la communauté internationale a connus sur cette question doivent nous amener à proposer des idées sortant des sentiers battus pour relancer le dialogue sur la question du désarmement. L’approche que préconise la Jamaïque est basée sur un ferme engagement en faveur du multilatéralisme et sur une ferme volonté politique, a dit la représentante en estimant que seul un dialogue soutenu contribuerait à réduire les tensions actuelles et les menaces qu’elles font courir à la survie de l’humanité. Le renforcement des mesures de confiance susceptibles d’améliorer la sécurité collective dépendra de l’absence de discrimination et de l’application non sélective des normes et des régulations régissant le contrôle des armements, le désarmement et la non-prolifération, a estimé Mme Roberts.
M. MEHDI DANESH-YAZDI (République islamique d’Iran) a déclaré que l’existence de milliers d’ogives nucléaires aux mains d’États détenteurs de l’arme nucléaire et la menace de plus en plus fréquente de recours à ces armes constituent des motifs de préoccupations majeures pour la paix et la sécurité. Des armes nucléaires sont déployées dans des pays qui n’en détiennent pas mais qui relèvent de la coalition de certains États, ce qui contribue à exacerber une situation déjà tendue. Il est préoccupant de constater l’apparition d’une nouvelle génération d’armement nucléaire non stratégique de faible puissance et la menace quotidienne de leur utilisation contre des États qui ne sont pas dotés de l’arme nucléaire. Malheureusement, des tentatives graves ont été faites pour affaiblir les mesures approuvées par consensus en 1995 et en 2000 lors des conférences d’examen du TNP.
En 2000, les participants avaient convenu de mettre en œuvre 13 mesures de désarmement et avaient appelé Israël, nommément, à ratifier le TNP. De plus, la Conférence d’examen avait réaffirmé que l’Agence internationale de l’énergie atomique était la seule autorité à même de garantir le recours à l’énergie atomique à des fins pacifiques et avait confirmé les obligations auxquelles sont tenues les parties au Traité de faciliter les échanges d’équipement, de matériel et de technologies à des fins pacifiques. Toutefois, la tenue de la Conférence d’examen de 2000 a été suivie d’un déni du droit des États à l’énergie atomique à des fins pacifiques tandis que certains États nucléaires sont revenus sur leur obligation d’éliminer sans équivoque leurs arsenaux nucléaires.
L’adoption des points de l’ordre du jour de cette session fournit l’occasion de revitaliser le processus de désarmement nucléaire. La Commission du désarmement devrait tenir des discussions de fond sur son premier point de l’ordre du jour, à savoir le désarmement nucléaire. La priorité dans ce cadre devrait porter sur les assurances négatives de sécurité. En effet, les positions prises récemment par certains États sur le recours à l’arme nucléaire contre des États non nucléaires ont créé un climat international peu sûr où la sécurité des États non nucléaires est en danger. À ce stade, nos efforts doivent porter sur la conclusion d’un accord juridiquement contraignant sur le non-recours à l’arme nucléaire, a insisté le représentant iranien.
Mme SAJA MAJALI (Jordanie) a insisté sur les principes et la vision contenus dans le Document final de la première session extraordinaire consacrée au désarmement. En vertu de ces principes, les États Membres devraient à la fois s’acquitter de leurs obligations visant à prévenir la prolifération des armes nucléaires sous tous leurs aspects et poursuivre leurs efforts dans le cadre multilatéral afin de réaliser le désarmement nucléaire sous un contrôle international efficace et de renforcer les régimes internationaux de désarmement, de contrôle des armes et de non-prolifération. Le TNP demeure la pierre angulaire des efforts de désarmement et de non-prolifération et, dans ce cadre, une mise en œuvre non discriminatoire et non sélective de ses dispositions est nécessaire. De plus, il est indispensable de mettre en œuvre l’ensemble de mesures adoptées en 1995 lors de la Conférence d’examen du TNP.
L’élimination totale des armes nucléaires est la seule garantie contre leur utilisation ou la menace de leur utilisation, a encore ajouté la représentante. Par ailleurs, le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, qui constitue une étape importante du régime de non-prolifération, n’est pas encore entré en vigueur, ce qui, a estimé la représentante jordanienne, est une source de préoccupation. Mme Majali a également ajouté que les zones exemptes d’armes nucléaires demeuraient indispensables au maintien des régimes de non-prolifération et, dans ce cadre, la création d’une zone exempte d’armes nucléaires comme le demande la résolution 487 (1981) du Conseil de sécurité.
M. KIM CHANG GUK (République populaire démocratique de Corée) s’est étonné que « certains États dotés d’armes nucléaires aient forcé les autres pays à débattre de la question des armements nucléaires sous un angle visant à opposer les valeurs et les cultures ». Cette forme de débat n’a pas pour but de promouvoir la paix et la sécurité de tous les peuples, mais plutôt d’assurer la « suprématie nucléaire » d’un pays sur les autres. Ce débat ne vise pas à débarrasser le monde des arsenaux nucléaires qui menacent ses populations. La puissance militaire des promoteurs de cette forme de « dialogue » ne vise qu’à imposer une soi-disant « démocratie » ou « liberté » à travers le monde, à des peuples qui n’en demandent pas tant, a dit le représentant. Les espoirs qu’avait fait naître la fin de la guerre froide, a-t-il estimé, se sont évanouis du fait de ce type de comportement, qui a, au contraire, augmenté les risques de déflagration nucléaire généralisée. Si les États dotés d’arsenaux nucléaires daignaient écouter la majorité des pays, qui n’en sont pas pourvus, en vue de parvenir à un accord sur l’interdiction de la production et de l’usage de ces armes, nous ferions beaucoup de progrès dans les domaines du désarmement et de la non-prolifération.
Ces deux notions vont ensemble, et le désarmement devrait être réalisé en priorité. Mais au Conseil de sécurité et dans les autres instances de désarmement, les États-Unis et leurs alliés veulent en faire deux questions distinctes et veulent faire croire au monde que seule la prolifération nucléaire pose une menace à l’humanité. En d’autres mots, ils prétendent que si la prolifération était éliminée, le monde serait en totale sécurité parce que les pays riches actuellement détenteurs d’arsenaux nucléaires sont trop sages, pacifiques et respectueux de la vie pour poser le moindre danger au monde, s’est étonné M. Chang Guk. Le but recherché par les États-Unis et leurs alliés, a-t-il estimé, est de se réserver le monopole de la détention des armes atomiques. La République populaire démocratique de Corée considère la doctrine nucléaire américaine, basée sur la possibilité d’une première frappe nucléaire, comme une menace au monde, au désarmement et à la non-prolifération. Cette doctrine est une violation du TNP.
Le développement de nouveaux types de bombes et de missiles nucléaires, les menaces de frappes préventives et les politiques de « deux poids deux mesures » de l’administration américaine nous éloignent du désarmement et de la non-prolifération et mèneront le monde à la guerre atomique, a déclaré le représentant. « La question nucléaire qui se pose dans la péninsule coréenne est le résultat direct de la politique hostile des États-Unis envers notre pays », a ajouté M. Chang Guk en accusant les États-Unis de vouloir procéder à un changement de régime à Pyongyang par la force.
Il a ensuite dénoncé le fait que son pays ait été « désigné comme objectif probable de frappes nucléaires préventives qui seraient lancées en usant de nouveaux types d’armements ». « Notre pays n’a donc pas d’autre choix que celui de développer une dissuasion nucléaire pour se mettre à l’abri des menaces américaines et d’une possible invasion », a dit le représentant. Cependant la République populaire démocratique de Corée reste favorable à l’établissement d’une péninsule de Corée dénucléarisée, a dit M. Chang Guk en se référant à la Déclaration commune de Beijing, qui a été publiée en septembre dernier à l’issue des pourparlers à Six sur la question du nucléaire.
M. EMAD M. B. BEN-SHABAN (Jamahiriya arabe libyenne) a déclaré que son pays avait volontairement renoncé à tout programme d’acquisition d’armes de destruction massive. La Libye a voulu, par cet exemple, montrer à tous les pays du Moyen-Orient qu’il était possible de renoncer à ce type d’armements. Elle appelle de tous ses vœux la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-orient et demande à Israël de renoncer à son arsenal nucléaire qui menace non seulement le Moyen-Orient, mais aussi l’Afrique et l’Europe méditerranéenne, a fait remarquer le représentant. La Libye pense qu’il est temps de redonner vie aux mécanismes de désarmement, dont les blocages actuels sont causés par la mauvaise volonté politique de certains pays. La Libye soutient les demandes et les points de vue présentés par la délégation de l’Indonésie, qui s’exprimait hier au nom du Mouvement des pays non alignés, a poursuivi le représentant en souhaitant une meilleure coopération internationale dans le domaine du désarment nucléaire.
* *** *
À l’intention des organes d’information • Document non officiel