DES NORMES INTERNATIONALES DOIVENT ENCORE ÊTRE ÉLABORÉES DANS LA LUTTE CONTRE LE COMMERCE ILLICITE DES ARMES LÉGÈRES, NOTAMMENT UN INSTRUMENT SUR LE COURTAGE
| |||
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York |
Comité préparatoire de la Conférence
des Nations Unies chargée d’examiner
les progrès accomplis dans l’exécution
du Programme d’action en vue de prévenir,
combattre et éliminer le commerce illicite
des armes légères sous tous ses aspects
5e et 6e séances – matin et après-midi
DES NORMES INTERNATIONALES DOIVENT ENCORE ÊTRE ÉLABORÉES DANS LA LUTTE CONTRE LE COMMERCE ILLICITE DES ARMES LÉGÈRES, NOTAMMENT UN INSTRUMENT SUR LE COURTAGE
Terminant son débat général qui avait commencé lundi, le Comité préparatoire de la Conférence des Nations Unies chargée d’examiner l’exécution du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite d’armes légères sous tous ces aspects a entendu ce matin plusieurs délégations. Ce débat a été suivi le reste de la journée par des interventions de représentants de plusieurs organisations intergouvernementales et organisations non gouvernementales.
Citant les progrès accomplis depuis l’adoption du Programme en 2001, les intervenants ont aussi passé en revue les domaines d’action qui méritent encore une réflexion et une action coordonnée, notamment la question du courtage en armes légères. S’il existe plusieurs instruments internationaux applicables au courtage, comme le Protocole de Nairobi et les directives de l’OSCE, certains comme le réseau d’ONG IANSA ont relevé une certaine incohérence et les faiblesses de ces instruments qui retardent leur incorporation en droit interne. Il leur est ainsi apparu nécessaire d’élaborer un cadre juridique international pour réglementer ces activités de courtage et ils ont accueilli avec satisfaction la création récente d’un Groupe d’experts gouvernementaux chargé de la question et qui devrait commencer ses travaux après la Conférence d’examen. Le représentant du Nigéria a souhaité que le régime juridique international du courtage qui sortira de ces travaux présente un caractère contraignant.
Pour le représentant du FAIR Trade Group, une ONG spécialisée dans les questions d’importation et d’exportation d’armes à feu, il faut éviter que les efforts proposés pour lutter contre le courtage illicite aient un impact sur le courtage licite. Il a dénoncé le « flou » qui entoure la définition du courtage, qui a pour conséquence de saper la lutte contre les activités illicites en la matière. Il a donc proposé que les juristes des services de courtage soient associés aux consultations sur la question.
D’autres représentants d’ONG, qui agissent dans les domaines du tir sportif et de la chasse, ont défendu les porteurs d’armes civils, qui doivent selon eux être exclus du traitement de la question du commerce illicite des armes légères et de petit calibre. À leurs yeux, il ne faut pas que les efforts menés en vue de lutter contre ce commerce illicite portent atteinte au tir sportif, à la chasse et au tourisme. Ces organisations ont présenté les mesures préventives qu’elles développent, comme l’éducation à la sécurité dans le stockage des armes à feu. À cet égard, des chiffres encourageants ont été donnés, qui démontrent la diminution des blessures par ces armes aux États-Unis.
Les représentants des pays suivants ont pris la parole de même que l’Observateur de la Palestine: Oman, Nigéria, Brésil, Îles Salomon, Zambie. Ont suivi les interventions des organisations intergouvernementales et organismes des Nations Unies ci-après: Union interparlementaire, Comité international de la Croix-Rouge, Ligue des États arabes, Organisation de la coopération économique de la Mer noire (BSCEC), Interpol, Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR), et Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Enfin, les ONG suivantes se sont exprimées: Regional Centre on Small Arms, Forum mondial sur l’avenir des activités de tir sportif, Sporting Arms and Ammunition Manufacturers Institute, Inc (SAAMI), FAIR Trade Group et SCI First for Hunters.
Le Comité préparatoire reprendra ses travaux demain à 10 heures, sous la forme de débats thématiques interactifs.
DÉBAT GÉNÉRAL, DÉCLARATIONS DES ORGANISATIONS INTERGOUVERNEMENTALES ET NON GOUVERNEMENTALES
M. MOHAMMED AQEEL BA-OMAR (Oman) a déclaré que le Sultanat d’Oman est soucieux de préserver l’ordre public et de permettre aux citoyens de vivre en paix, c’est pourquoi, a-t-il dit, nous avons adopté des mesures afin de contrôler l’usage des armes légères, lancé des campagnes de sensibilisation et établi un Comité de coordination. Il a signalé que le passage des armes et munitions, par les ports et aéroports, était étroitement surveillé, notamment grâce à l’utilisation de techniques de pointe. Il a souhaité que la communauté internationale, en plus des efforts déjà consentis, mobilise ses forces pour enrayer le phénomène de la prolifération des petites armes en adoptant notamment des mesures bien coordonnées entre tous les États, mais sans rouvrir les négociations sur le Programme d’action. Il faut par exemple limiter la fabrication de ces armes ainsi que les exportations de ces armes en direction des régions en conflit, sauf si c’est pour lutter contre l’occupant, a insisté le représentant. Quant aux organes chargés de la sécurité, il faut leur fournir tous les moyens pour lutter contre la contrebande et aider les États plus démunis. L’intervenant a conclu son propos en rappelant les principaux points de la position des États arabes tenir compte de la nécessité de l’élimination des armes nucléaires, du droit des peuples à l’autodétermination, du droit des États à la légitime défense, enfin, nécessité d’éliminer les causes profondes de la prolifération des armes légères.
M. SIMEON ADEKANYE (Nigéria) a souhaité que la Conférence chargée d’examiner l’exécution du Programme d’action aboutisse à une déclaration basée sur le document de travail du Président du 20 décembre 2005. Selon lui, peu de progrès ont été accomplis dans la mise en œuvre du Programme d’action. Cela se révèle à travers le nombre croissant de conflits et de victimes dans le monde, sans parler des crises humanitaires de grande envergure. Pour le représentant, il faut donc évaluer les réalisations depuis 2001 tout en élaborant une stratégie future pour s’attaquer aux domaines qui n’ont pas connu d’avancées. Il a rappelé l’engagement du Président nigérian Obasanjo en faveur d’un instrument juridiquement contraignant destiné à contrôler la circulation des armes spécialement auprès des acteurs non étatiques. En ce qui concerne les travaux du Groupe d’experts gouvernementaux sur le courtage, M. Adekanye a aussi souhaité que tout régime international qui en sortira présente un caractère contraignant. S’agissant de l’exploitation illicite des ressources naturelles, la Conférence d’examen doit être l’occasion d’explorer le lien qui existe entre cette exploitation et le commerce illicite des armes légères. Le représentant a aussi appelé à un renforcement des capacités de lutte dans le domaine des ALPC, qui doit être corroboré par une volonté politique soutenue par la communauté internationale. Enfin, il a rappelé la nécessité de prendre des mesures pour prévenir les conflits et poursuivre les solutions négociées des différends. Le représentant a conclu en soutenant que les rapports des réunions biennales de la Conférence d’examen devraient être examinés et adoptés par les États Membres, ceci afin de mieux refléter les positions nationales.
Mme LUCIA MAIERA (Brésil) a rappelé que son pays avait lancé des initiatives pour mettre un frein à la circulation des munitions et coopérait à cet effet avec les autres États de la région. La représente a observé que l’expérience collective de l’application du Programme, aux niveaux régional, national et international, avait révélé des lacunes. Elle a expliqué ces lacunes par le manque de clarté et de spécificité de certaines dispositions du Programme d’action et par le fait que certains domaines n’étaient pas traités de façon substantive ou pas du tout. C’est pourquoi la Conférence d’examen devra s’attaquer à certains points, notamment le problème de munitions. Malgré l’absence de ce point, le problème des munitions est lié aux ALPC, a remarqué la représentante, qui a souhaité que le Programme d’action s’harmonise avec les jurisprudences régionales en la matière. Elle a rappelé que le rapport du Groupe de travail qui a négocié l’instrument adopté récemment sur le marquage et le traçage des petites armes a fait une recommandation pour que la question des munitions pour armes légères soit abordée dans le cadre de l’ONU. Elle a en outre indiqué que la Conférence devait s’attaquer aussi à la réglementation de la détention des ALPC par les civils, qui n’était reflétée que de façon indirecte dans le Programme d’action. La Conférence d’examen devra également adopter des mesures pour faire respecter les législations nationales au niveau de l’importation et de l’exportation de ces armes et pour combattre le détournement de ces armes vers un marché illicite. Il faut que les critères de transfert soient transparents et équitables, a insisté l’intervenante, qui a par ailleurs estimé que l’ONU représentait le seul forum légitime pour adopter des mesures de ce genre. La représentante a conclu en soutenant l’idée que la Conférence d’examen devra mettre en place un mécanisme de suivi garantissant la mise en œuvre des mesures qu’elle prendra.
M. COLLIN BECK (Îles Salomon) a déclaré que le problème des armes légères menace le monde entier, en particulier les petits États insulaires en développement qui craignent que ces armes tombent entre de mauvaises mains. Le conflit ethnique qu’a connu le pays il y a quelques décennies a fait reculer considérablement son développement. Les Îles Salomon ont du se tourner vers leur région pour éradiquer la culture des armes découlant du conflit ethnique, a expliqué M. Beck. C’est ainsi que la Mission d’assistance régionale aux Îles Salomon (RAMSI) en 2003 a permis de restaurer la règle de droit et de collecter près de 3 700 armes sur une période de trois mois. En ce qui concerne la Conférence d’examen, le représentant a souhaité qu’on définisse mieux le cadre de coordination au sein du système des Nations Unies dans la mise en oeuvre du Programme d’action. Elle devrait aussi selon lui se concentrer sur la création d’une économie qui bénéficie à tous, en faisant le lien avec le Programme d’action de Bruxelles pour les pays les moins avancés et celui des Bahamas pour le développement durable des petits États insulaires en développement. Le représentant a enfin estimé que le Programme d’action sur le commerce illicite des armes légères devrait traiter de la question des armes fabriquées localement.
M. AMMAR HIJAZI, Observateur de la Palestine, a estimé qu’il était fondamental d’examiner l’importance des répercussions du sous-développement et de la pauvreté sur le commerce illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC) à travers le monde. Les conditions sociales et économiques du sous-développement et la pauvreté sont des terreaux où prospèrent des trafics de toutes sortes. Les membres du Comité préparatoire de la Conférence d’examen du Programme d’action de 2001 doivent donc s’attaquer aux politiques discriminatoires de pays qui alimentent les conflits civils, certains États faisant le choix de vendre des armes à des pays rongés par la guerre civile ou par d’autres types de conflit. L’intervenant a souhaité que la mise en œuvre du Programme d’action se fasse en accord avec les autres instruments du droit international, y compris le droit international humanitaire. Cette mise en œuvre du Programme d’action ne doit pas être contraire au droit humanitaire, ni affecter le droit des peuples à l’autodétermination, a insisté le représentant qui a déploré la présence des colons et des milices qui vivent de façon illégale sur les terres palestiniennes, propageant, selon lui, un sentiment d’insécurité dans la région.
M. TENS C. KAPOMA (Zambie) a déclaré que son pays n’avait cessé d’appuyer le programme d’harmonisation de la Communauté de développement des États d’Afrique australe (SADC). Au niveau national, un Comité national a été mis en place pour la mise en œuvre de la stratégie de Bamako et de celle de la SADC dans la lutte contre le commerce illicite des armes légères. Il a noté que la présence d’armes légères en Zambie était la conséquence de guerres civiles qui ont eu lieu dans les pays voisins. Le Gouvernement zambien a sensibilisé les populations au danger de ces armes et a encouragé ceux qui les détiennent à les remettre aux autorités. En ce qui concerne la question du marquage et u traçage, le représentant a noté que son gouvernement faisait en sorte que toutes les armes qui rentrent légalement en Zambie soient dûment enregistrées.
Mme ANDA FILIP, Observatrice de l’Union interparlementaire (UIP), a rappelé qu’au mois de mai 2006, la 114ème session de l’UIP se réunira à Nairobi et qu’elle se pencherait sur la question du renforcement du contrôle du trafic des armes légères et de petit calibre. Elle a noté qu’à cette occasion un rapport avait été préparé constituant un cadre d’action général pour les Parlements dans la lutte contre le commerce illicite de ces armes. Au titre des éléments figurant dans ce rapport, elle a notamment noté que le rôle des parlementaires dans la lutte contre le trafic des ALPC est d’une grande importance, dans la mesure ou ils sont appelés à élaborer des cadres législatifs qui couvrent tout le cycle de vie de ces armes (production, vente, courtage, détention, etc.) ainsi qu’à évaluer le respect de ces législations. Elle a rappelé qu’un autre rôle des Parlements découle de leur supervision constitutionnelle: le rapport les encourage à vérifier les transferts des armes reçus par leurs gouvernements respectifs. Enfin, la représentante a affirmé que les parlements doivent veiller à ce que les ressources soient disponibles pour réintégrer les enfants soldats dans la vie sociale.
Mme CRISTINA PELLANDINI (Comité international de la Croix-Rouge) a indiqué que le CICR et tous ses partenaires au sein du mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge sont chaque jour témoins des problèmes humanitaires causés par les ALPC, non seulement pendant les conflits armés mais également longtemps après la fin de ces conflits. La Conférence d’examen devra déterminer si le Programme d’action contient tous les outils nécessaires pour atteindre ses objectifs. Le Programme d’action a conduit à la création de normes et de mécanismes qui peuvent produire des effets à long terme. Cependant, davantage de précisions sont nécessaires selon le CICR. La représentante a mis en évidence plusieurs questions qui devraient être abordées selon elle par la Conférence d’examen. Tout d’abord, elle a souhaité qu’un cadre international soit mis en place pour réglementer le courtage des armes concernées. À ce sujet, elle s’est d’ailleurs félicitée de la décision de mettre en place le groupe d’experts gouvernementaux, espérant que son mandat est suffisamment clair. Elle a aussi souligné la nécessité d’élaborer des normes communes pour le transfert d’armes, les autorisations d’exportation, et l’octroi de licences. Selon elle, il faut également appuyer des mesures supplémentaires pour réglementer les violations du droit humanitaire international lors de l’utilisation des ALPC. Enfin, Mme Pellandini a suggéré que les États mettent en place une feuille de route lors de la Conférence d’examen, au lieu de se limiter au plus petit dénominateur commun.
M. WAEL AL-ASSAD (Ligue des États arabes) a indiqué que les États arabes tentent d’identifier les besoins nationaux en matière de lutte contre le commerce illicite des armes légères, tout en se coordonnant au niveau régional. Les États arabes ont accompli des progrès significatifs au niveau régional au cours des trois dernières années, a-t-il affirmé. Le Conseil des ministres de l’intérieur arabes et le Conseil des ministres de la justice arabes ont abordé ce problème, en adoptant notamment une Convention arabe de lutte contre le terrorisme. Une loi arabe modèle sur les armes à feu a aussi été adoptée en 2002. Le représentant a aussi signalé la création de points focaux nationaux. La Ligue des États arabes a mis l’accent sur la sensibilisation et sur le renforcement des capacités pour porter assistance à ses États membres. À cet égard, l’intervenant a évoqué la Conférence qui s’est tenue au Caire en 2003, qui a mis en exergue notamment les besoins en la matière. Enfin, un Point focal régional a été mis en place en 2004, et une réunion d’experts a déterminé ses objectifs. Ce Point focal a réuni il y a 3 semaines les points focaux nationaux.
Selon le représentant, ce qui a été obtenu jusqu’à présent par rapport au Programme d’action des Nations Unies n’est pas à la hauteur de ce qui était visé, ce qui rappelle le besoin de coordination aux niveau régional et international. Il est cependant essentiel de ne pas renégocier le Programme d’action pour ne pas saper les efforts réalisés par les États, a-t-il poursuivi. Il a aussi demandé que soit respecté le droit des peuples à l’autodétermination et la souveraineté nationale. Enfin, le représentant a évoqué la nécessité de s’attaquer aux racines des conflits, c’est-à-dire aux problèmes économiques, politiques et ethniques ou religieux de différentes régions et sociétés.
M. TUGAY ULUSEVIK (Organisation de la coopération économique de la Mer noire (BSCEC)) a d’abord présenté cette organisation intergouvernementale, en notant qu’elle avait notamment pour but de contribuer à la paix internationale et au bien-être des populations de cette région par le biais de la coopération entre ses Etats membres. Le processus de développement, a-t-il ensuite rappelé, ne peut que se faire dans un environnement stable, libre du crime organisé sous toutes ses formes. Il a noté qu’en 1998, la BSCEC avait lancé un accord, entré en vigueur en 1999, sur le crime, complété par la suite, par deux Protocoles additionnels dont un sur le terrorisme. Les États sont engagés à prendre des mesures nécessaires pour lutter contre le trafic des stupéfiants. Toutes ces mesures sont dans le droit fil du Programme d’action de 2001, a conclu l’orateur.
M. KLAUS ULRICH KERSTEN (Interpol) a rappelé que la mission d’Interpol est d’aider les États dans la prévention du crime et dans les enquêtes pénales. Cela passe notamment par des communications entre les polices nationales. Interpol est cité explicitement dans l’instrument sur le marquage et le traçage de ALPC, au paragraphe 35 qui invite les États à utiliser les mécanismes et outils qu’il propose. Le Weapons Electronic Tracing System (IWeTS) est le système de traçage d’INTERPOL qui constitue un outil à la disposition des États pour les enquêtes pénales nationales et transnationales. Le représentant a décrit la simplicité de la procédure pour les services de police, qui est utilisable 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Son utilisation peut aboutir à la réduction de la circulation des ALPC, selon lui. Le représentant a suggéré que chaque pays nomme un point de contact central chargé de rassembler les requêtes relatives au traçage et à l’identification des armes. Le rôle d’Interpol était déjà prévu dans le paragraphe 37 lors de l’élaboration du Programme d’action, qui encourage les États et l’Organisation mondiale des douanes à améliorer la coopération pénale internationale. Avec la CPI, Interpol conduit actuellement une étude de faisabilité sur la possibilité de lancer un projet pilote de collecte et d’analyse d’information sur les activités d’acteurs clés du trafic illicite des ALPC et sur leur manière d’opérer.
Mme VANESSA FARR (Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR)) a félicité les États Membres pour s’être engagés dans l’application du Programme d’action et pour avoir accordé une attention particulière aux femmes et aux enfants. Elle a souhaité que ce point soit retenu dans le cadre des débats thématiques qui s’ouvriront demain.
Mme KATHLEEN CRAVERO (Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD)) a souhaité que soient identifiés les obstacles qui empêchent la mise en œuvre du Programme d’action. Nous devons travailler à ce que de nouvelles mesures spécifiques pour lever ces obstacles trouvent leur place dans le document final de la Conférence d’examen. Elle a indiqué que le PNUD avait alloué plus de 40 millions de dollars dans le cadre de l’assistance à de nombreux États, notamment pour le désarmement et la réinsertion. Elle a signalé trois domaines sur lesquels pourrait se pencher la Conférence d’examen: l’impact de la pauvreté et du sous-développement et leur lien avec le commerce illicite des ALPC, le problème de l’accès facile aux armes et la propagation non maîtrisée de ces armes, enfin, le renforcement des capacités nationales.
M. FRANCIS SANG (Regional Centre on Small Arms) a présenté son organisation qui regroupe les États de la région des Grands lacs et de la corne de l’Afrique. Depuis la signature du programme d’action en 2001, des processus d’application sont mis en œuvre dans ces deux régions, a-t-il expliqué. Au Kenya et en Ouganda, par exemple, des mesures ont été prises concernant la maîtrise des armes légères. Le représentant a aussi cité la destruction de milliers d’armes légères dans plusieurs pays comme preuve que ces États s’attaquent au problème, pour trouver une solution de façon durable. Toute une série de directives ont été élaborées par l’Organisation, sur les différents chapitres du Programme d’action. Le représentant a d’ailleurs indiqué que l’harmonisation des législations des États Membres a déjà commencé. Les régions considérées accordent une importance particulière aux mesures visant à réduire la demande d’armes légères, a-t-il ajouté. Il faut aussi envisager d’élaborer des mesures de contrôle des transferts des ALPC. Le représentant a enfin reconnu le rôle de la société civile dans ces actions.
Le représentant du Forum mondial sur l’avenir des activités de tir sportif a noté que cela fait près de 10 ans que les Nations Unies se sont engagées sur la question des armes légères. Se félicitant des progrès accomplis, il a souligné les efforts qui restent à faire dans ce domaine. La majorité des armes légères dans le monde sont détenues légalement par des civils, a-t-il noté. Selon lui, ces porteurs d’armes civils ne font pas partie du problème. Le représentant a par ailleurs assuré que son organisation était prête à apporter son expertise sur les questions spécifiques du courtage, du transfert des ALPC, de la sécurité et des douanes.
Le représentant du Sporting Arms and Ammunition Manufacturers Institute, Inc (SAAMI) a rappelé que les armes à feu peuvent faire un grand bien comme un grand mal. Il serait trop simpliste de vouloir éliminer cet outil, même si les actes de violence criminelle sont à rejeter. Il a souligné le danger de rechercher des solutions nobles et idéalistes, qui ne seraient pas réalistes et seraient donc inapplicables. Le SAAMI peut apporter sa compétence sur des questions comme le système de distribution, la fabrication, le transport et le stockage d’armes à feu. L’éducation sur la sécurité des armes à feu peut éviter des tragédies et le SAAMI participe à cet effort. Le représentant a fait état des brochures qui contiennent des indications claires sur les conditions de détention des armes, et de vidéos sur la question. Il a cité les chiffres encourageants qui démontrent la diminution des blessures par ces armes aux États-Unis. Le tir sportif est une des activités qui augmente le plus dans le pays, a-t-il indiqué. Quant à la question du commerce illicite des armes légères, elle mérite toute notre attention, a-t-il conclu.
Le représentant du FAIR Trade Group, une organisation spécialisée dans les questions d’importation et d’exportation d’armes à feu, s’est dit préoccupé par le fait que les efforts proposés pour lutter contre le courtage illicite aient un impact sur le courtage licite. La plupart des activités liées au courtage concernent la chasse et le sport. Il a dénoncé le flou qui entoure la définition du courtage, flou qui sape au contraire la lutte contre le courtage illicite. Il a souhaité que les juristes des services de courtage soient associés aux consultations sur la question. Certaines nations, telles que les États-Unis, qui ont des réglementations bien développées, pourraient servir d’exemple, a-t-il jugé. Nous devons veiller à ne pas exacerber la situation actuelle en rendant le problème encore plus complexe. Il faut donc, a estimé l’intervenant, qu’il y ait un contrôle étroit des États et des définitions précises pour lutter contre le courtage illicite. Enfin, l’orateur a demandé que le Groupe d’experts gouvernementaux sur le courtage consulte l’industrie de l’importation et de l’exportation des armes légères et de petit calibre qui est prête à apporter son expérience et son expertise.
La représentante de SCI First for Hunters a abordé le rôle de la chasse dans les activités internationales de développement. Elle a signalé que la biodiversité durable est essentielle pour le monde, rappelant que ce sont les pays les plus pauvres qui présentent la plus grande richesse en la matière. Elle a présenté les programmes de chasse gérés de façon communautaire par les autochtones comme des programmes de ressources naturelles très fructueux. Elle a ainsi cité le Communal Areas Management Program for Indigenous Resource Areas (CAMPFIRE) qui existe au Zimbabwe, dans un but de développement durable. Ce programme et d’autres dans divers pays africains, sont tous fondés sur la chasse et la participation de chasseurs étrangers. Ils ne pourront pas se poursuivre si on interdit le port d’armes, a averti la représentante. Selon elle, il ne faut pas que les efforts menés en vue de lutter contre le commerce illicite des armes légères portent atteinte au tir sportif, à la chasse et au tourisme.
PRÉSENTATION PAR LE RÉSEAU D’ACTION INTERNATIONALE SUR LES ARMES LÉGÈRES (IANSA)
Dimension humaine du problème des petites armes
Mme REBECCA PETERS, du Réseau d’action internationale sur les armes légères (IANSA), a indiqué dans sa présentation d’ensemble, que cette organisation présente dans plusieurs pays dans le monde œuvrait activement à la réduction de la prolifération des armes à feu. Nous y participons de nombreuses façons, notamment par la recherche, la communication, l’assistance et l’appui aux victimes, a-t-elle dit. Ce Comité préparatoire revêt une importance cruciale, a remarqué l’intervenante, parce qu’il prépare l’ordre du jour de la Conférence d’examen de juin/juillet 2006 qui façonnera la politique mondiale sur les armes légères et de petit calibre pour les années à venir. Elle a souhaité que le document final de cette Conférence d’examen reconnaisse qu’il est nécessaire d’apporter des précisions au Programme d’action pour la réduction de la prolifération de ces armes. Enfin, avant de donner la parole à d’autres orateurs, pour qu’ils interviennent sur le premier thème de cette présentation d’ensemble « Dimension humaine des armes légères », l’intervenante a insisté sur le rôle des ONG qui sont les témoins directs des effets dévastateurs des ALPC et qui sont nécessaires pour aider à formuler des solutions créatives et effectives.
Par la voix de différents représentants d’associations de son réseau, l’IANSA s’est ensuite exprimé sur les trois premiers sous-thèmes suivants: développement durable, questions de genre et assistance aux survivants jeunes. Selon NADIRA MALLIK, de l’ONG South Asia Partnership du Bangladesh, les États en situation de conflit sont souvent obligés de dépenser beaucoup plus d’argent pour faire face à la violence que pour l’éducation ou la santé. Intervenant sur les questions de genre, CARMEN ROSA DE LEON, de l’Institut d’éducation pour le développement durable du Guatemala, a rappelé que les femmes, qui étaient rarement détentrices d’armes légères en étaient pourtant des victimes quotidiennes, en particulier dans des pays comme le Guatemala ou le Venezuela à fortes populations d’autochtones. Elle a regretté que le Programme d’action n’ait pas réellement développé cet aspect du commerce illicite des armes légères. VLADIMIR DJUMIC, originaire de Serbie-et-Monténégro, a pour sa part relevé que de nombreuses milices et guérillas des conflits de l’après Guerre froide étaient souvent composées de jeunes qui s’en sortaient pour la plupart avec des handicaps physiques à vie. Les conséquences de la violence armée sont considérables, a-t-il insisté, non seulement pour les jeunes pris individuellement mais également pour l’ensemble de la société.
Normes et réglementations
Le chapitre portant sur les normes et réglementations en matière de commerce des armes légères a été abordé en premier lieu sous l’angle de la réglementation des transferts internationaux. Mme OCHIENG ADALA, de Africa Peace Forum, a souligné la nécessité de garantir que les transferts d’armes ne fassent pas l’objet d’irrégularités. De nombreux États se sont engagés à maîtriser le transfert d’ALPC à travers des instruments internationaux tels que des protocoles. Cependant, ils ne sont pas toujours cohérents et les fabricants sont très habiles pour exploiter les failles des législations nationales. Les ONG travaillent avec des juristes pour participer à l’élaboration de normes. Ainsi, la représentante a proposé l’adoption de plusieurs principes tels que l’obligation de ne pas transférer des armes aux États qui pourraient s’en servir en violation du droit international ; et celle de tenir compte de l’usage probable qui sera fait de ces armes avant d’en autoriser le transfert. S’agissant de la réglementation nationale des armes légères, l’Association pour la politique publique en Argentine a fait valoir que la majorité des armes légères sont en possession de civils et que presque toutes les armes illicites ont été fabriquées dans des conditions légales. Mme MARIA PIA DEVOTO a donc considéré que seul le strict contrôle du marché licite peut permettre de contrôler le commerce illicite. Elle a suggéré que soit interdite la détention par les civils d’armes militaires; que des restrictions soient imposées à travers l’âge minimum d’acquisition des armes; que les États disposent d’un bon système d’information; qu’une éducation soit menée sur la sécurité pour le stockage; que la vente des munitions soit restreinte. Quant au sujet du courtage illicite, le représentant d’Amnesty International, M. BRIAN WOOD, a expliqué que les courtiers d’armes ne prennent pas forcément possession eux-mêmes des armes. Ils travaillent dans des réseaux de courtage international, comme ceux qui ont armé le génocide du Rwanda par exemple, et très peu des courtiers font l’objet de poursuites. L’impression est donc que l’ONU n’agit pas et que la communauté internationale se fait complice de violations des droits de l’homme. M. Wood a aussi rappelé qu’il existe plusieurs instruments internationaux applicables au courtage, comme le Protocole de Nairobi et les directives de l’Organisation de sécurité et de coopération en Europe (OSCE), mais qu’il y a une certaine incohérence et faiblesse dans ces documents, ce qui retarde leur incorporation en droit interne. C’est pourquoi le réseau IANSA demande l’élaboration d’un instrument juridique international sur le courtage.
Accumulation et usage à mauvais escient des armes légères
M. HECTOR GUERRA (Amnistie International Mexique) intervenant plus particulièrement sur la question de l’usage à mauvais escient, a appelé les Etats à renforcer le contrôle exercé sur les fonctionnaires chargés de la sécurité afin de protéger le droit des populations à la vie. Nous sommes préoccupés de voir que peu d’Etats ont inclus les principes du droit à la vie dans leurs législations nationales. Il y a des agents de la sécurité qui violent impunément les droits de l’homme, a déploré l’intervenant qui a demandé que la police soit formée aux questions de droits de l’homme. Il a enfin souhaité que les normes de l’ONU sur l’utilisation des armes à feu par les agents de police soient intégrées dans les législations nationales.
M. ZAHA AL MAJALI, Directeur adjoint du Centre pour les droits de l’homme à Amman en Jordanie, intervenant sur le sous-thème: Réduction de la demande des armes légères, s’est inquiété de constater que l’offre d’armes aux différentes parties au Moyen-Orient avait entraîné de graves violations des droits de l’homme. Afin de combattre ce fléau, nous devons à la fois en assécher les sources et œuvrer pour une réduction de la demande, comme le demande le Programme d’action de 2001, a estimé l’intervenant. Il a noté que les conflits présents et passés au Moyen-Orient avaient entraîné une augmentation de la demande d’armes de sorte qu’aucun foyer de la région n’était démuni en armes légères, y compris au sein des pays non parties à un des différents. Il a demandé que la société civile soit partie intégrante à l’action des Etats et que les pays victimes de ces armes soient soutenus par la communauté internationale dans leurs efforts pour s’en débarrasser.
Mme ROSLYN MUNGAI, de l’organisation OXFAM/Kenya, a présenté un programme qui avait permis de réduire la demande en armes au Nord du Kenya. Malgré la volonté politique du Gouvernement, la sécurité n’est pas toujours assurée sur tout le territoire, et il était dangereux de voyager dans cette région du pays, a-t-elle indiqué. OXFAM et le Gouvernement kényen ont donc mis au point un programme consistant notamment en la mise en place de comités de paix, le recours plus fréquent aux conseils d’anciens, au système de justice traditionnelle, un renforcement de la participation des femmes ainsi que la création d’écoles. Grâce à la confiance renforcée des communautés du nord envers les autorités, la population a rendu volontairement les armes en sa possession. Il faut ainsi d’abord s’attaquer aux sources de la violence pour permettre de donner aux gens un choix autre que les armes légères, a insisté l’intervenante qui a demandé qu’une priorité soit également accordée au système sécuritaire et que les programmes s’inspirent du savoir local.
Mme PAMELA COLE, originaire de la Gambie, intervenant sur le sous-thème: Élimination des stocks d’armes a observé que les informations sur le nombre exact des armes étaient difficiles à trouver compte tenu du caractère illicite de ce commerce. Toutefois, on estime à 640 millions le nombre d’armes légères dans le monde. Les armes à feu à domicile peuvent aggraver la violence au sein des foyers. Afin de remédier à ce problème, le Programme d’action mentionne quelques propositions, a-t-elle rappelé, notamment portant sur les processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR). Des milliers d’armes ont été collectées en Sierra Leone. Elle a affirmé que son organisation tentait de réduire la prolifération des armes dans d’autres pays voisins de la région. Enfin, elle a suggéré les propositions de politiques générales suivantes: adopter des législations nationales pour détruire les excédents d’armes légères, y compris les munitions; inclure les programmes de collecte d’armes dans les stratégies de consolidation de la paix; s’assurer que la possession d’armes à feu s’accompagne d’obligations; s’assurer que les processus de désarmement sont inclusifs.
M. FLORY SHAMBA, parlant au nom du Réseau sur les armes légères en République démocratique du Congo, a insisté sur la dimension humaine, parfois terrible, du contexte violent dans lequel plusieurs pays se trouvent. Il a dit être la voix des autres, qui ne sont pas ici, qui ignorent ce qui se dit et se fait dans les forums internationaux, ceux et celles qui portent dans leur peau et dans leurs âmes, les abus des armes légères. Ils et elles sont nombreux, de tous les âges, appartiennent à des couches sociales diverses, et sont aussi soucieux de voir leurs conditions changées, a-t-il insisté. Il a ensuite évoqué la situation d’un enfant soldat à Kinshasa envoyé au front, durant la guerre de 1997, sans aucune préparation, aujourd’hui gravement handicapé. Il a également rappelé le témoignage d’une femme violée par des tortionnaires armés. Enfin, il a conclu que ces exemples sont représentatifs d’une dimension particulière, et qu’il convient de quantifier la distance qui sépare les débats politiques de la réalité que les populations vivent sur le terrain.
* *** *
À l’intention des organes d’information • Document non officiel