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SOC/4664

CRÉER UNE « SOCIÉTÉ POUR TOUS » NÉCESSITE DE PENSER LES POLITIQUES SOCIALES COMME UN INVESTISSEMENT PROFITABLE ET FRUCTUEUX DANS LE CONTEXTE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

10/02/2005
Communiqué de presse
SOC/4664

Commission du développement social

Table ronde sur le thème

« Favoriser l’insertion sociale »


CRÉER UNE « SOCIÉTÉ POUR TOUS » NÉCESSITE DE PENSER LES POLITIQUES SOCIALES COMME UN INVESTISSEMENT PROFITABLE ET FRUCTUEUX DANS LE CONTEXTE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE


(Publié le 11 février)


Troisième pilier de la Déclaration de Copenhague adoptée en 1995, l’objectif d’intégration sociale a posé les jalons pour construire une « société pour tous » dans laquelle chacun bénéficie d’une égalité de traitement, de l’égalité des chances et a la possibilité d’exercer ses droits, d’assumer ses responsabilités et de participer à tous les aspects de la vie en collectivité.  Les participants à la troisième table ronde organisée dans le cadre du Segment de haut niveau de cette session de la Commission du développement social ont dressé un bilan plutôt mitigé de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Copenhague, dont on célèbre, cette année, le dixième anniversaire.


S’ils ont salué les progrès réalisés, notamment pour ce qui est de renforcer le consensus de Copenhague et de diffuser, au niveau mondial, des normes en matière de développement social, les 35 participants, dont 10 ministres, se sont accordés à reconnaître l’importance qu’il y a à intégrer plus avant les politiques économiques et sociales pour associer aux objectifs de croissance économique des objectifs sociaux.  De la discussion, se sont dégagées une série de mesures à gain rapide à prendre pour lever les obstacles à l’intégration sociale que sont la pauvreté, les discriminations, l’injustice sociale, l’iniquité, l’exclusion et aussi les autres maux de la société, que ce soient les épidémies, au premier rang desquels le VIH/sida, la désintégration du tissu familial, la corruption, le cloisonnement de la prise de décision politique ou encore la perception des politiques sociales comme fardeau économique. 


Une des priorités identifiées par les participants est de dépasser le clivage entre les politiques visant à réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement de celles qui tendent à mettre en œuvre les objectifs de Copenhague, a souligné le représentant de l’Allemagne, en invitant les autres États Membres à considérer les deux séries d’engagements comme les deux côtés d’une même pièce et donc à intégrer la mise en œuvre des engagements de Copenhague dans les programmes formulés dans le cadre du suivi du Millénaire.  Et, chose essentielle pour faire vivre l’esprit de Copenhague, comme l’a souligné la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Asie occidentale, Mervat Tallawy, il est nécessaire de concentrer l’action des gouvernements sur la solidarité et la coordination des mesures et d’affecter les ressources adéquates aux politiques sociales.  Comment peut-on parler de développement social lorsque l’on sait que l’on dépense 20 fois plus pour militariser le monde que pour le développer, et que l’on connaît l’impact de la guerre et des déplacements de population sur la cohésion sociale? s’est interrogé le Ministre de la sécurité sociale, de la solidarité nationale, du bien être des personnes âgées et de la réforme de Maurice, Samiollah Lauthan, en sa qualité de Président de la table ronde. 


Pour la Secrétaire d’État à la santé et aux affaires sociales de la Suède, comme pour plusieurs autres participants, il est nécessaire de changer le paradigme qui préside à la prise de décisions politiques.  À ce titre, elle a souligné que la protection sociale ne devait pas être une question de charité ou être perçue comme un fardeau économique mais plutôt comme un facteur de production et de croissance et un moyen de préparer l’avenir.  Bon exemple de ce qui peut être atteint lorsque l’État prend la décision active de chercher à contrecarrer le coût social de la transformation de l’économie et de la société à l’ère de la mondialisation, l’exemple de la Thaïlande qui a refondu sa politique sociale en la pensant en terme de facteur de croissance et de processus fondé sur des objectifs communs et sur les leçons tirées du passé et du dialogue avec les organisations de la société civile.  Face à l’impression dominante que société moderne rime avec exclusion sociale, l’exemple du Pérou, donné par le Chef de cabinet du Ministre de la femme et du développement social, offre une piste à suivre pour ce qui est de la relance des relations entre les gouvernements et la société civile.  Comme il l’a expliqué, le processus de consultation de la société civile, initié par le Président Toledo, en 2001, a abouti à la convocation mensuelle du forum d’accord national auquel participent les représentants de la société civile, du secteur privé, de l’Église et à la formulation, dans ce cadre, de 30 politiques à moyen et à long termes pour le développement durable, dont 6 traitent du développement social exclusivement.  À ce titre, il a insisté sur l’importance du suivi des politiques au niveau local et, faisant écho à la déclaration du Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes, Jose Luis Machinea, il a souligné l’importance de la solidarité et de la coordination des initiatives, au plan international, régional, national mais aussi local.  Le représentant de l’ECLAC a insisté sur l’importance de la répartition équitable des fruits de la croissance, sur la durabilité environnementale des politiques et la viabilité sociale des emplois créés.  « Encourager la croissance pour promouvoir l’emploi: mais de quels emplois parlons-nous? » s’est-il interrogé, en soulignant que l’augmentation du nombre d’emplois n’éliminait pas nécessairement « le risque de désintégration sociale si les emplois créés n’étaient pas décents et assortis d’une protection sociale ». 


Poursuivre l’objectif de créer une société pour tous suppose aussi, comme l’a souligné la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population, Thoraya Obaid, l’intégration sociale tout en sachant que les femmes, les jeunes, et les personnes âgées, pour ne citer que ces trois groupes vulnérables, -sans pour autant oublier les exclus parmi les exclus que sont les minorités, les réfugiés et les personnes déplacées-, continuent de faire l’objet de discriminations et ne participent pas à la vie de la collectivité sur un pied d’égalité.  Les femmes sont victimes de la violence, que ce soit du viol comme outil de guerre ou de la violence domestique, les jeunes constituent la moitié des pauvres, la moitié des chômeurs et la moitié des séropositifs.  Pour Mme Obaid comme pour la représentante du Council on Foreign Relations, Barbara Herz, il est essentiel dans le contexte actuel de redoubler d’efforts pour promouvoir l’émancipation économique, la santé et la participation à la vie politique des femmes et la scolarisation des petites filles. 


Si l’ensemble des participants ont insisté sur l’éducation comme préalable à l’intégration sociale, l’accent a été mis sur la condition des petites filles qui, comme l’a souligné Mme Herz, en faisant référence à une étude de la Banque mondiale, constituent un investissement dont le rendement est supérieur en terme de développement.  Alors que deux enfants sur trois qui ne sont pas scolarisés sont des filles, chaque année de scolarisation permet à une fille d’augmenter ses revenus de 15 a 20%.  D’où l’importance de mobiliser la volonté politique et d’engager le débat sur le coût de l’éducation, la proximité des écoles, l’incitation à la scolarisation des filles et l’élimination des préjugés sexistes.


Parmi les nombreux sujets abordés à l’occasion de ce tour d’horizon des progrès réalisés en matière de développement social, le problème du vieillissement et ses implications en terme de régime de retraite, de protection sociale et de solidarité intergénérationnelle a occupé une place importante.  Avec, en 2004, une espérance de vie de 78,26 ans pour les hommes et de 85,33 ans pour les femmes, et 23 000 personnes de 100 ans ou plus, soit 3 000 de plus que l’année précédente, le représentant du Japon a tracé à grands traits les défis que le vieillissement de la population posent à la société, d’autant que le nombre de naissances baisse et que les populations jeunes deviennent indifférentes à la vie politique et collective.  Trois japonais sur 10 sont une personne âgée, a-t-il dit, en expliquant que si leur situation, aussi bien en matière de santé que de revenus, n’était pas défavorable, ce ne serait pas, toutes choses égales par ailleurs, le cas des générations futures.  D’où le risque d’un conflit entre générations et l’urgence de réformer le système de pensions et de retraite et le système d’assurance santé, de réfléchir aux modalités d’emploi des personnes âgées, aux meilleurs moyens de préparer le vieillissement et de prévenir les maladies.  À ce titre également, le représentant de l’Allemagne a invité les délégations présentes à se pencher sur la réforme de la sécurité sociale, à développer les politiques en faveur des enfants et de la famille et à engager le débat sur l’inclusion sociale dans le cadre de la Commission du développement social. 


Les défis auxquels font face l’ensemble des pays, que ce soient les pays riches et vieillissants, ou les pays en développement connaissant une transition démographique, sont colossaux et nécessitent un engagement politique fort et, surtout, la reconnaissance des politiques sociales comme investissement.  L’objectif étant, comme l’a souligné le Ministre de la sécurité sociale du Brésil, Amir Lando, « de faire du village mondial une fraternité ».    


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