SG/SM/9788

TRANSCRIPTION DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’ONU, KOFI ANNAN, ET DE SON CHEF DE CABINET, MARK MALLOCH BROWN, AU SIÈGE, LE 29 MARS 2005

29/03/2005
Communiqué de presse
SG/SM/9788
Conférence de presse

                                                            SG/SM/9788

                                                            29 mars 2005


TRANSCRIPTION DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’ONU, KOFI


ANNAN, ET DE SON CHEF DE CABINET, MARK MALLOCH BROWN, AU SIÈGE, LE 29 MARS 2005


Le Secrétaire général ((parle en anglais): Comme vous le savez, j’ai reçu ce matin M. Paul Volcker, Président de la Commission d’enquête indépendante du programme « pétrole contre nourriture », ainsi que les membres de la Commission – le juge Richard Goldstone et le professeur Mark Pieth.  J’ai reçu leur deuxième rapport intérimaire, et bien entendu, M. Volcker a déjà fait un point de presse ce matin. J’ai établi la Commission il y a un an pour qu’elle procède à une enquête car j’étais déterminé à faire absolument toute la vérité sur les allégations de fraude et de corruption relatives au programme « pétrole contre nourriture », et les membres de la Commission se sont attelés à la tâche avec tout le sérieux attendu d’eux.


J’étais bien conscient que les allégations les plus graves laissaient entendre que j’aurais moi-même indûment influencé le processus d’achat en faveur de Cotecna Inspection Services, mon fils étant employé par cette entreprise.  Mais je savais que cela était faux et je savais donc en toute confiance qu’une enquête approfondie me laverait de tout soupçon.


Et c’est ce qu’a fait la Commission.  Après 12 mois d’une enquête exhaustive, le rapport indique clairement que « rien n’indique que le choix de Cotecna en 1998 ait été le résultat d’une influence indue de la part du Secrétaire général dans le processus d’appel d’offres ou de sélection ».  Après que tant d’allégations graves et fausses ont été faites contre moi, l’exonération de la Commission indépendante est évidemment un grand soulagement.


Bien que j’en sois reconnaissant, je constate également, bien sûr, que la Commission me reproche de ne pas avoir déféré la question au Bureau des services de contrôle interne, ou à son Bureau juridique, en vue d’une enquête officielle une fois que je savais que la Cotecna s’était vu attribuer un contrat en janvier 1999.  J’accepte cette critique.  Cependant, j’ai indiqué à la Commission, par le truchement de mon avocat, les raisons qui m’ont poussé à demander un autre type d’enquête, à la lumière des renseignements dont je disposais à l’époque.  Les mesures que j’ai prises étaient pleinement compatibles avec les règlements de l’ONU.


La Commission émet également des critiques à l’égard de trois de mes collègues, ou ex-collègues, hauts responsables de l’Organisation.  Ces résultats soulèvent à chaque fois des questions diverses et complexes que je dois examiner avec soin avant de décider des mesures à prendre.


Pour des raisons que n’importe quel parent peut comprendre, les moments les plus difficiles et les plus douloureux que j’ai personnellement vécus au cours de l’année écoulée ont été lorsqu’il semblait que mon fils, Kojo, aurait agi de façon indue ou ne m’aurait pas dit toute la vérité sur ses actes.  La Commission d’enquête a désormais rendu son jugement sur ces questions.  J’aime mon fils et j’ai toujours attendu de sa part qu’il fasse montre de la plus grande intégrité.  Je suis profondément attristé que des preuves du contraire aient été mises au jour, et en particulier par le fait que mon fils n’ait pas pleinement coopéré avec la Commission d’enquête.  Je l’avais instamment engagé à le faire et je l’exhorte à réexaminer sa position et à coopérer.


Lors du point de presse qu’il a fait aujourd’hui, M. Volcker a eu la gentillesse de mentionner les propositions que j’avais faites la semaine dernière dans mon rapport « Dans une liberté plus grande » et a exprimé l’espoir que les résultats de la Commission contribueraient à l’objectif plus large de la réforme de l’ONU.  Je crois que cet espoir est pleinement justifié. Les réformes que je propose, en particulier l’amélioration de la gestion du Secrétariat, visent, entre autres choses, à corriger les fautes que la Commission d’enquête a mises au jour.  Alors que j’attends avec grand intérêt le rapport final de la Commission d’enquête dans le courant de l’année, je prends déjà des mesures et continuerai de le faire sur la base de ses résultats.  Les États Membres de l’ONU et leurs peuples ont certainement le droit de s’attendre à ce que désormais le Secrétariat soit plus transparent dans la façon dont nous nous acquittons de nos mandats et respectons leurs souhaits, et à ce que les gestionnaires aient à rendre des comptes.


Enfin, je tiens à remercier tout le personnel de l’ONU d’avoir continué –chose admirable- à rester axé sur son travail cette année, une année qui a été très difficile.  Elle a été difficile pour nous tous.  Mais en dépit des distractions, nous avons été en mesure d’apporter des contributions importantes au succès d’élections historiques en Afghanistan, en Iraq, au Burundi et dans les territoires palestiniens.  Et bien sûr, nous avons coordonné la réponse à la crise du tsunami.  Nous avons été le chef de la file de la réaction mondiale face à ce drame, la crise du tsunami dans l’océan Indien, et aujourd’hui encore, avec le séisme que nous avons vu hier, nous avons été actifs sur le terrain et heureusement, nous avons des éléments sur place à même de fournir une assistance. Et malheureusement, comme je l’ai déjà dit, nous devons aider les victimes du séisme en Indonésie. Nous favorisons également l’avancée du processus de paix au Moyen-Orient. Et dans de nombreuses autres régions du monde, loin des gros titres, il y a des crises cachées, des drames  que le personnel de l’ONU s’attache sans relâche à soulager. Il y a toujours plus à faire et nous ne l’oublions pas.


Question  (interprétation de l’anglais):Ma question porte sur votre fils: vous avez dit que vous lui avez parlé. Quand? Que lui avez-vous dit? Et que lui vous a-t-il dit? Envisage-t-il de coopérer avec la Commission?


Le Secrétaire général  (interprétation de l’anglais): J’ai déjà indiqué que c’est ce que je lui ai dit.  Et je l’exhorte à coopérer.  Je l’ai toujours exhorté à coopérer.  Je l’ai invité et d’après les indications que j’ai données, j’espère qu’il va revoir sa position.  Je lui ai demandé de revoir sa position.  Il n’a pas pu me répondre immédiatement au téléphone.


Question (interprétation de l’anglais): Vous avez décidé en octobre de financer l’enquête menée par Paul Volcker sur le compte 2.2 de l’Iraq.  Allez-vous revoir votre position et pour quelles raisons avez-vous décidé de consacrer certains montants qui relevaient de ce compte à des questions sans aucun lien avec la gestion du programme « pétrole contre nourriture », notamment les aides aux victimes iraquiennes de l’attentat perpétré contre le Siège de l’ONU à Bagdad en 2003?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Sur votre première question, le compte 2.2 visait à couvrir les dépenses administratives liées au Programme « pétrole contre nourriture ».  Il avait été mis de côté à cette fin; on a vérifié ce compte et il est tout à fait légitime que les frais de la Commission soient financés par ce compte. En ce qui concerne ceux qui ont été tués ou blessés en  Iraq, à ma connaissance, peu d’entre eux travaillaient pour le Programme « pétrole contre nourriture ».  Certains travaillaient pour l’ONU.  Je ne crois pas que tout le monde ait été payé sur ce compte.  Je n’ai pas les détails, mais concernant ceux qui travaillaient pour ce Programme, il était légitime que leurs dépenses y soient imputées.


Question (interprétation de l’anglais): Êtes-vous l’homme qu’il faut pour diriger les travaux de l’Organisation?  Vos détracteurs, à Washington mais aussi dans ce bâtiment, au sein même de votre personnel, montrent du doigt Benon Sevan, l’homme qui dirigeait le Programme « pétrole contre nourriture »; Dileep Nair, mentionné dans le rapport; Ruud Lubbers, accusé de harcèlement sexuel; le Congo, sexe et maintien de la paix, -sachant que vous avez dirigé le Département des opérations de maintien de la paix; votre ancien chef de cabinet, qui a détruit des documents; sans oublier la décision des hauts fonctionnaires de renvoyer du monde en Iraq.  Pensez-vous que l’heure soit venue de vous retirer pour le bien de l’Organisation?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Surtout pas. Laissez-moi vous redire qu’à propos des questions que vous avez soulevées, nous allons examiner certaines des questions les plus complexes qui ont été soulevées.  Je trouve malheureux que vous remettiez sur le tapis des choses qui ont été réglées. La question Lubbers a été réglée.  Une enquête en bonne et due forme a été menée.  Il n’a pas été jugé coupable.  Pourtant, vous n’arrêtez pas de citer son nom chaque fois que vous abordez ces questions.  Ce n’est pas juste pour lui, ni pour le HCR, ni pour le système.  La question est réglée.  S’il vous plaît, laissez Lubbers tranquille.


Concernant les autres questions que vous avez soulevées, comme l’exploitation sexuelle au Congo, nous examinons les dossiers de manière très énergique.  Des dispositifs ont été mis en place pour éviter que cela ne se reproduise à l’avenir, non seulement au Congo, mais dans n’importe quelle autre opération menée par l’ONU de par le monde.  Il n’est pas inhabituel que des institutions de cette taille, qu’il s’agisse d’institutions gouvernementales dans ce pays ou ailleurs ou de sociétés privées, rencontrent ce genre de problèmes.  Et quand des problèmes se posent, il faut les résoudre, tirer les leçons qui s’imposent et passer à autre chose.  J’ai beaucoup de travail à accomplir et je vais le faire.  Vous connaissez les tâches qui m’attendent.  Merci Mesdames et Messieurs.


Le Secrétaire général a quitté la salle de conférence et son Chef de Cabinet, Mark Malloch Brown, a poursuivi la conférence.


Question (interprétation de l’anglais): En fait, ma question était pour le Secrétaire général.  En dépit des conclusions de M. Volcker, il a dit plusieurs fois aujourd’hui qu’il n’y avait pas d’éléments de preuve suffisants.  Il y a beaucoup de scepticisme à l’égard des conclusions de la Commission.  Il y a eu des réunions secrètes, des paiements secrets, des enquêtes internes retardées.  Comment est-ce que l’ONU peut publiquement dire que le Secrétaire général a été exonéré, qu’il n’a pas été impliqué dans tout cela? Est-il suffisant de dire que la Commission Volcker l’a exonéré?


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Comme l’a dit M. Volcker, il a mené une enquête exhaustive et n’ayant pas trouvé d’éléments de preuve, il a conclu qu’il n’y avait pas eu d’interférence de la part du Secrétaire général dans l’attribution du contrat à la Cotecna.  C’est maintenant à ceux d’entre vous qui voulez poursuivre cette affaire qu’incombe d’établir la preuve.  M. Volcker a donné son avis.  Il est très clair.  Comme il l’a dit tout du long, il est toujours difficile de prouver quelque chose par la négative.  Le mieux que l’on puisse dire, c’est qu’il n’y a pas d’élément de preuve.  Je pense que dans sa réponse quelque peu impatiente à Richard, au demeurant tout à fait utilisable, le Secrétaire général a voulu dire: « C’est assez, cela fait des mois que cela dure.  Nous avons accédé à toutes les demandes d’information.  Il est temps de passer à autre chose.  Il y a beaucoup de choses à faire. »


Question (interprétation de l’anglais): Vous dîtes qu’il n’y a pas d’élément de preuve, mais un journal a rapporté aujourd’hui que des documents avaient été détruits.  Lorsque M. Volcker a abordé la question des réunions avec la Cotecna, il a indiqué qu’il n’existait aucune minute des réunions, que personne n’avait pris de note à part lors d’une loterie destinée à lever des fonds pour l’ONU.  C’est cela pour vous pas d’élément de preuve.  Comment pouvez-vous dire qu’il n’y a pas d’élément de preuve?


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Non, ce ne sont pas des éléments de preuve (??).  C’est que toutes les personnes qui ont participé à ces réunions ont été interrogées.  Comme pour toute réunion, vous dépendez en fin de compte de la parole de ceux qui étaient dans la salle.  Comme nous n’avons cessé de le dire à propos de ces réunions depuis que la question a été soulevée la semaine dernière, c’était plutôt insignifiant qu’il n’y ait personne pour prendre des notes.  Il ne s’agissait pas de réunions officielles.  Encore une fois, M. Volcker a examiné tout ce qu’il y avait à examiner.  Il a dépensé des millions de dollars pour l’enquête et il a conclu qu’il n’y avait rien. 


Question (interprétation de l’anglais): Comme vous n’êtes pas le Secrétaire général, vous aurez certainement du mal à répondre à ma question.  Je voudrais exprimer le sentiment de la salle en disant que nous aurions souhaité que le Secrétaire général reste dans la salle pour qu’il nous dise ce qu’il savait et à quel moment, parce qu’à moins que vous puissiez être dans sa tête, cela ne nous sera pas d’une très grande utilité.  Enfin, j’essaierai malgré tout.


La Cotecna a apparemment engagé Kojo en raison des liens personnels de Kofi Annan avec Michael Wilson.  Et Elie Georges Massey a dit qu’il l’avait engagé à cause de ses relations personnelles.  Les cadres de la Cotecna ont cherché à décrocher des contrats avec l’ONU avant et après l’embauche de Kojo Annan.  Il est évident que la Cotecna voulait se servir de cette relation pour avoir accès au Secrétaire général.  Que le Secrétaire général se soit ou non laissé utiliser ou qu’il aurait été impliqué, aujourd’hui la question a été traitée en partie de manière satisfaisante.  Mais pourquoi ne pas se préoccuper davantage de l’apparition du conflit d’intérêt? Comment pouvait-il ne pas savoir que c’était là la véritable intention?


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Permettez-moi d’abord d’expliquer pourquoi c’est moi qui suis là et non le Secrétaire général.  Fred l’a expliqué.  Ce n’est pas parce que je peux dire ce que le Secrétaire général aurait dit mais parce que le rapport, outre les questions concernant sa conduite, pose des questions d’intérêt général pour l’Organisation.  Il a été décidé qu’il ferait sa déclaration, qu’il répondrait aux questions sur son comportement et que moi je répondrais aux questions de caractère plus général sur l’Organisation.  Car vous avez raison, je ne peux pas parler à sa place. 


Je voudrais expliquer la raison pour laquelle il n’a pas pu rester pour répondre à des questions interminables au lieu de remonter travailler dans son bureau.  C’est qu’il s’est exposé à des heures d’interrogatoire devant la Commission d’enquête de M. Volcker.  Il a été interrogé à plusieurs reprises sur justement tous ces points.  C’est pourquoi il ne juge pas nécessaire de se soumettre une fois de plus à un nouveau procès en salle 226.


Les meilleurs enquêteurs des États-Unis et du monde se sont occupés de cette affaire pendant 12 mois.  Nous connaissons leurs conclusions.  Je doute grandement que vous puissiez faire mieux qu’eux avec les informations qui figurent dans le rapport.  Ces informations sont claires et explicites.  Il est rendu compte de chacune de ces réunions et on sait ce qui s’est passé s’agissant des observations de chaque partie.  La conclusion est que quelles que soient les aspirations de la Cotecna en cherchant à développer une relation avec le Secrétaire général, elle n’y est pas arrivée.  Il n’y a pas eu d’influence dans l’attribution des contrats.  Le Secrétaire général s’est soumis aux interrogatoires.  Aucune organisation ne l’a fait, aucun dirigeant d’organisation ne s’est soumis à ce genre d’exercice. 


C’est fait, c’est passé.  Le verdict a été rendu.  Il ne veut pas rouvrir le débat avec vous chaque fois qu’il donne une conférence de presse.  Il s’est déclaré satisfait de l’exonération.  Il faut maintenant passer à autre chose. 


Question (interprétation de l’anglais): Mark, vous connaissez la maxime des journalistes: c’est de vouloir étouffer une affaire qui vous perd.  Nous avons découvert aujourd’hui que le lendemain du jour où le Conseil de sécurité a donné son aval à l’enquête, son chef de cabinet a détruit les documents se rapportant aux années 1997 à 1999, qui sont précisément celles où le fils de Kofi Annan travaillait pour la Cotecna.  Pourquoi le Secrétaire général n’assume-t-il pas la responsabilité personnelle du fait que son propre chef de cabinet a détruit des documents dans son bureau, des documents qui présentaient un intérêt pour l’enquête?


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Il a dit que l’Organisation devrait examiner de très près cette question car toute enquête pâtit de destruction de documents, surtout après qu’instruction ait été donnée de préserver les documents.


Mais comme le dit le rapport, il semble - et le rapport semble aller dans ce sens – qu’il existe une explication très raisonnable à cela.


Question (interprétation de l’anglais): On a jugé justement que ce n’était pas une explication raisonnable.


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Enfin, je vous dirai que pour nous, c’est une explication très plausible que, sur un dossier qui n’était pas un dossier original mais une copie d’autres documents existants, pour des raisons d’espace, les secrétaires de M. Riza aient demandé l’autorisation de leur chef pour détruire ces documents afin de faire de l’espace pour d’autre dossiers chronologiques.  Mais nous avons passé en revue les années suivantes et nous avons vérifié avec le service des archives de l’ONU et il est vrai que la politique officielle est de détruire les documents chaque année.  Il n’y a donc pas eu d’infraction aux règles de l’ONU, mais vous avez tout à fait raison – et je pense que le Secrétaire général serait d’accord aussi – pour parler d’« imprudence » -- c’est le mot, je crois, du Groupe de haut niveau – au sujet de ce fait, qui est non conforme, de toute façon, avec le mémorandum du Secrétaire général sur ces questions.  Il va donc falloir examiner cela de plus près.


Question (interprétation de l’anglais): Une des conclusions du rapport de M. Volcker – la deuxième– est qu’il reste des questions quant au moment où le Secrétaire général aurait eu vent du contrat.  Oui, il dit qu’il n’a pas influé sur ce contrat, mais il dit qu’il n’a pas suffisamment de preuves sur ce point.  Et c’est là une question que le Secrétaire général n’a pas abordé dans sa déclaration ni auparavant.


Et puisque vous répondez à toutes les questions, j’ai pensé que je vous poserais une question d’ordre institutionnel, soulevée par M. Volcker dans sa conférence de presse.  Il avait une citation disant qu’il s’agissait d’une enquête très agressive, que l’ONU avait eu un problème de crédibilité au niveau de son fonctionnement administratif et qu’il espérait que cette enquête serait dans l’intérêt de l’institution.  Est-ce que vous auriez des observations à faire là-dessus?


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Certainement.  Le Secrétaire général a clairement indiqué aujourd’hui que tout cela - tant les conseils contenus dans ce rapport en vue d’améliorer la gestion que ceux qui provenaient du dernier rapport sur la question – serait pris très au sérieux.  A dire vrai, nous avons eu une brève discussion avec M. Volcker ce matin où nous avons parlé de notre impatience de connaître leurs conclusions sur la gestion, qui seront dans le rapport qui sort cet été, car nous examinons actuellement des changements d’encadrement pour faire en sorte que les règles en matière de conflits d’intérêts soient aussi strictes qu’elles devraient l’être, qu’il y ait suffisamment de transparence dans la procédure d’achats pour qu’il n’y ait pas d’influences indues, etc.


Par conséquent, les conclusions de Volcker sur tout cela sont extrêmement importantes pour les changements en cours au sein de l’Organisation.  Et de même que nous avons lu attentivement le dernier rapport et que nous en avons tiré toutes les recommandations en matière de gestion pour les incorporer à la planification de la réforme en cours à l’Organisation, nous ferons la même chose avec celui-ci, et en particulier avec celui qui sort cet été. 


Question (interprétation de l’anglais): Je croyais que vous ne vouliez pas parler au nom du Secrétaire général?


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Écoutez.  Je croyais que vous aviez décidé que vous ne vouliez pas vraiment que je le fasse.  Disons que, si l’un des problèmes est de se rappeler des événements qui se sont produits il y a sept ou huit ans, le Secrétaire général sait que lorsque son chef de cabinet l’a appelé – je crois que c’était le 21 janvier – pour lui dire que le Sunday Telegraph avait l’intention de publier un article disant que la Cotecna avait obtenu ce contrat et que son fils travaillait pour la Cotecna, sa réaction a été une réaction de surprise et de grand étonnement: il savait bien que son fils travaillait pour cette société mais il n’avait aucune idée qu’ils avaient obtenu le contrat « pétrole contre nourriture ».  Donc, il garde un souvenir extrêmement clair de tout cela et que tout ce qui tendrait à faire croire qu’il était au courant de la candidature de la Cotecna avant tout cela – sans parler du fait que la Cotecna l’aurait joint pour essayer de l’influencer – est absolument faux, 100% faux.  Cela ne s’est pas produit.


Question (interprétation de l’anglais): Puisque vous continuez de le défendre avec l’argument qu’il n’est pas un voleur, je voudrais vous poser une question sur la gestion.  A ce stade, la personne qu’il avait personnellement choisie pour diriger le programme « pétrole contre nourriture » est complètement discréditée; son chef de cabinet est cité dans ce dernier rapport pour avoir fait quelque chose que le rapport n’estime pas crédible – l’explication n’en est pas crédible; l’enquête sur le programme « pétrole contre nourriture » du chef du Bureau des services de contrôle interne est considéré comme laissant à désirer; le comportement de son fils laisse à désirer, et également des membres de sa famille.  Le cercle semble se refermer; M. Annan est-il donc, comme l’a demandé Richard, l’homme qui doit mener cette énorme entreprise de réforme de l’ONU?


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Entendons-nous d’abord: je répondrai à la question « est-ce que le cercle se referme? »  Quand vous répondrez à la question « est-ce que la terre a tremblé? ».  Renoncez-vous maintenant au principe que j’appellerais: « il est innocent, donc laissez-le tranquille »?  Ce n’est pas un voleur.


Question (interprétation de l’anglais): C’est ce que Richard Nixon disait aussi.


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Convenons tout d’abord que la question a probablement fait un grand pas aujourd’hui.  On a définitivement fait un sort aux élucubrations de corruption sur le Secrétaire général à ce niveau pour passer à une seconde question, qui est de savoir si la gestion est suffisamment efficace.  Là-dessus, il est le premier à reconnaître que ce n’était évidemment pas le cas.  Plusieurs personnes ont maintenant été citées de façons très dommageables pour l’Organisation et pour chacun d’entre nous qui y travaillons.  D’où, encore une fois, l’importance de la partie prospective, dans le rapport Volcker, qui consiste à demander si, après avoir éliminé toutes les accusations de criminalité et de corruption portées contre le système et contre le Secrétaire général, et après avoir signalé les défaillances d’autres parties, comment on peut progresser, mettre en place les réformes en matière de gestion pour corriger cela?  Et je dirais que le type de choses que nous faisons sur un choix plus ouvert, de meilleure qualité de l’encadrement, la réforme des achats et de l’audit, le renforcement du BSCI en cours –toutes ces questions représentent une réponse très sérieuse aux questions soulevées et montrent que le Secrétaire général prend tout cela au sérieux.


Question (interprétation de l’anglais): Il y a une heure environ, Richard Goldstone – qui a, quelque importance au sein de la Commission – m’a dit qu’il ne s’agissait pas en fait d’une enquête sur Kofi Annan et Kojo.  Il me disait, en réponse à ma question sur le moment choisi, la raison du traitement spécial réservé au Secrétaire général, qu’avant le rapport final, on en parlait.  Il m’a dit que non, que c’était en fait la fin de la partie de l’enquête axée sur les achats.  Maintenant, comme nous le savons tous, le programme était plus vaste, et portait sur d’importants indices de corruption, avec des liens avec d’autres personnages proches du Secrétaire général, et pas juste Kojo – beaucoup ici dans la salle savent de quoi je parle.  Je me demande, par conséquent, pourquoi, à ce stade, le Secrétaire général ou vous-même ou quiconque penserait qu’il est raisonnable de dire que toute enquête sur Kofi Annan est terminée.  La Commission dit que la partie portant sur les achats est terminée, mais il y a beaucoup d’autres choses car c’est un énorme programme.


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Il y a deux aspect.  Pour être clairs: lorsque la Commission Volcker a été créée, le Secrétaire général lui a demandé: occupez-vous de moi, de Kojo, de Benon Sevan aussi rapidement que possible, car la présence de ces allégations contre moi et d’autres entrave beaucoup l’efficacité de notre gestion de cette institution.  Donc, il a toujours été dans l’intention de Volcker de traiter cette question de Kojo et de son père dans le premier rapport – celui de février.  Cela s’est avéré trop compliqué: il y avait trop de pistes à suivre, trop à creuser avant de publier le rapport.  Donc, ils ont décidé de publier une première partie et de traiter ça en deuxième.  Mais les allégations contre le Secrétaire général ont été examinées dans le cadre des achats.


Maintenant, vous avez tout à fait raison: si ce qui a été clarifié jusqu’à présent est la gestion globale du compte 2.2 à une ou deux infimes exceptions près, maintenant, des personnes ont été l’objet de critiques personnelles ou innocentées pour leur rôle dans tout cela.


En juin, un rapport final sera publié sur la mise en œuvre des mesures sur le terrain en Iraq et cela s’écarte de l’autre question, à savoir celle de la contrebande du pétrole et des sommes beaucoup plus importantes utilisées par Saddam qui n’avaient rien à voir avec le programme « pétrole contre nourriture ».  Il donnera un tableau d’ensemble et sera embarrassant pour beaucoup mais pas pour le Secrétaire général.


Question (interprétation de l’anglais): (Inaudible) … Sans les pièces détachées, il ne pouvait y avoir de contrebande.


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Sans pièces détachées, il n’y aurait pas eu de pétrole et sans pétrole, il n’y aurait pas eu de revenu et sans revenu, il n’y aurait pas eu de nourriture.


Question (interprétation de l’anglais): Si l’ONU était un navire et Kofi Annan son capitaine et si tous ces événements avaient eu lieu sous son commandement – je me réfère ici aux questions de Benny et de Richard Roth -, il assumerait une part de responsabilité pour ce qui est des accusations portées contre Benon Sevran et contre son fils après la divulgation du nom des sociétés travaillant avec les Pakistanais.  Quelle est donc la responsabilité personnelle du Secrétaire général? A-t-il des comptes à rendre pour ce qui s’est passé quand il tenait le gouvernail?


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Je vais répondre à votre question mais je crois qu’elle témoigne de votre hésitation à considérer que le verre est à moitié plein.  C’est vrai qu’il y a eu des défaillances dans l’enquête en 1999 et c’est parce que des défaillances et des faiblesses ont été reconnues que l’enquête Volker a été ouverte.  Après avoir mené une enquête inadéquate, on s’est rendu compte après coup que cela ne suffisait pas.  Le chef du Bureau des services de contrôle interne (BSCI) et le Conseiller juridique ont été consultés et il y a des points de vue divergents sur ce qu’ils ont dit.  Mais on s’accorde généralement à dire que l’enquête de M. Connors était suffisante.  Avec le recul, on s’est rendu compte que cela n’était pas le cas.  Les activités de Claudia et d’autres présents dans cette salle ont montré qu’il fallait mener d’autres enquêtes; d’où la Commission Volcker.


Lorsqu’on se soumet à un examen approfondi de votre part ou de celle de Volcker, l’on peut se permettre une petite pause de célébration et de joie lorsqu’on a été innocenté de tout acte répréhensible.  Mais cela n’empêche pas de corriger les faiblesses constatées en matière d’encadrement.  Certaines de ces défaillances sont dues à des décisions prises par des personnes de son entourage.  Soulevons la question de l’infrastructure intergouvernementale et la façon dont cela lie un Secrétaire général et l’empêche de prendre certaines décisions.  M. Volcker a dit d’ailleurs que l’ONU se retrouve dans un cercle vicieux infernal.  On nous impose des missions impossibles; le monde entier insiste pour qu’on les mène à bien, mais entre-temps, on ne nous donne pas les ressources pour nous acquitter de ces énormes tâches.  Le programme « pétrole contre nourriture » et le maintien de la paix le démontrent constamment.  On essaie d’assurer le maintien de la paix sans ressources et de faire un peu la même chose à bon prix avec le pétrole contre nourriture.  Nous assumons ces programmes qui nous sont imposés,

puis nous sommes critiqués et cela aboutit à des études encore plus sceptiques.  J’espère que l’une des leçons à tirer n’est pas plus de microgestion de l’ONU en nous imposant des contrôles encore plus stricts mais de comprendre clairement les tâches qui nous sont confiées, d’obtenir suffisamment de ressources et de déléguer plus d’autorité au Secrétaire général pour qu’il réalise ces tâches. 


Question (interprétation de l’anglais): (Inaudible) … J’ai l’impression que c’est un rapport où chacun peut lire ce qu’il veut y trouver.  Est-ce qu’il y aura des procédures disciplinaires contre M. Dileep Nair et quand est-il de son statut?


Encore une autre question, en ce qui concerne les réunions avec Ellie Massey, le Secrétaire général lors de son premier entretien avait dit qu’il ne l’avait pas rencontré avant que la Cotecna n’obtienne le contrat et par la suite les enquêteurs ont découvert le contraire, notamment une note qui affirmait que c’est Kojo qui avait organisé la réunion avec Ellie.  Pourquoi a-t-il essayé de le cacher?  Ce rapport montre en outre qu’il a permis à Kojo d’influencer ces réunions au milieu d’une période très chargée de l’Assemblée générale.


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Je voudrais répondre à cette dernière question.  Sur ce point, lorsque le Secrétaire général a été interrogé en premier par la Commission Volker, on ne lui avait pas dit à l’avance quels seraient les sujets sur lesquels il serait interrogé.  Il ne disposait pas alors de documents ni de possibilité de rafraîchir sa mémoire.  Lorsqu’on lui a posé des questions sur des réunions de 15 minutes ayant eu lieu il y a sept ou huit ans, c’est vrai qu’il ne s’en est pas souvenu au début.  Quand il est revenu pour un deuxième entretien après avoir eu l’occasion de le vérifier, il a indiqué à la Commission qu’effectivement ces réunions avaient eu lieu.  Le rapport indique que le Secrétaire général accompagné de son Conseiller avait volontairement donné l’information voulue parce qu’il avait eu l’occasion de vérifier ces documents.


S’agissant de Kojo, vous savez qu’il n’assistait pas à la réunion et tout fils peut raisonnablement demander 15 minutes à son père.


Question (interprétation de l’anglais): J’ai deux questions.


Question (interprétation de l’anglais): (inaudible).   


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Désolé, j’avais oublié votre question quant aux procédures disciplinaires contre M. Nair, la réponse est: « inévitablement ».


Question (interprétation de l’anglais): M. Volcker à la fin de sa conférence de presse a laissé entendre que Kojo Annan pourrait être impliqué dans d’autres aspects du programme « pétrole contre nourriture ».  Est-ce que le Secrétaire général a connaissance d’autres comportements répréhensibles de son fils?  Quand le Secrétaire général a-t-il eu connaissance que M. Riza détruisait des documents et comment?  Quelle a été sa réaction?


Enfin, pour enchaîner sur l’intervention de Maggie, pouvez-vous demander au Secrétaire général de nous revoir?  Le rapport comporte de nombreuses lacunes auxquelles seul le Secrétaire général peut répondre. 



M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais):De toute évidence, vous aurez des contacts réguliers avec le Secrétaire général.  Mais je ne peux pas lui conseiller de se soumettre à un procès en salle 226.  Vous dites que le rapport est plein de lacunes.  J’ai l’impression, quant à moi, que ce rapport donne un exposé complet de tout ce qui s’est passé.  Un juge, un expert en blanchiment de capitaux, un ancien chef de la Réserve fédérale se sont acquittés de cette tâche et ont tiré des conclusions.  Ces conclusions sont là et je veux être très clair à ce sujet.


S’agissant de la question de savoir quand le Secrétaire général a appris que des documents avaient été détruits, c’est seulement en décembre dernier après un entretien entre M. Riza et la Commission d’enquête à laquelle les enquêteurs avaient demandé des documents. 


M. Riza avait recherché des fichiers chronologiques et découvert qu’ils avaient été détruits.  À l’époque, il en avait informé le Secrétaire général et en avait informé au même moment la Commission d’enquête.  M. Riza et ses secrétaires considéraient que c’était tout à fait routinier.  En aucune circonstance, ils avaient indiqué au Secrétaire général qu’ils détruisaient systématiquement des fichiers chronologiques.  Et le Secrétaire général ne l’a su qu’en décembre, ce qui l’a perturbé.


Question: Est-ce lié au départ de M. Riza? 


M. Malloch Brown: Vous avez une note en bas de page dans le rapport à ce sujet: qu’il m’ont interviewé, Monsieur Riza, le Secrétaire général, la Vice-Secrétaire générale pour comprendre la chronologie du départ de M. Riza.  C’était prévu bien avant tout cela.


      Question: (inaudible)


      M. Malloch Brown: M. Volcker a dit très clairement que Kojo n’a pas été très franc avec son père et ne lui a pas tout dit pour ce qui est des paiements qu’il a reçus.  Il est raisonnable de supposer qu’il n’a pas divulgué d’autres activités à son père, mais je ne peux pas en dire plus au nom de son père. 


Question (interprétation de l’anglais): Est-ce qu’on peut récupérer les dossiers?


M. Malloch Brown (interprétation de l’anglais): Généralement, l’accès au disque dur n’est pas possible.  On a les versions papier des documents.  On a coopéré sur tout cela déjà.  N’oubliez pas que nous avons donné, comme l’a confirmé M. Volcker ce matin, 120 % de coopération dans son enquête.  Il n’y a aucune tentative de cacher quoi que ce soit.  Merci.


*   ***   *

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.