ONG/581-PI/1673

KOFI ANNAN JUGE QUE LA 58e CONFÉRENCE DPI/ONG A MARQUÉ LE PROCESSUS DES NATIONS UNIES À LA VEILLE DU SOMMET MONDIAL

09/09/2005
Communiqué de presseONG/581
PI/1673
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conférence annuelle DPI/ONG

matin et après-midi


KOFI ANNAN JUGE QUE LA 58e CONFÉRENCE DPI/ONG A MARQUÉ LE PROCESSUS DES NATIONS UNIES À LA VEILLE DU SOMMET MONDIAL


La 58e Conférence annuelle du Département de l’information pour les organisations non gouvernementales (DPI/ONG) a achevé ses travaux aujourd’hui, après trois jours de débats articulés autour du thème: « Notre défi: des voix pour la paix, la conclusion de partenariats et le renouveau ».  La séance de clôture a accueilli le Secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan, qui a encouragé les ONG à continuer à faire entendre leur voix pour obliger les gouvernements à tenir leurs promesses et à les transformer en gestes concrets.  M. Kofi Annan a déclaré que les ONG donnaient tout son sens à l’expression « Nous, les peuples », et qu’elles avaient fortement marqué le processus des Nations Unies à la veille d’un Sommet mondial qui pourrait être d’une importance inestimable pour tous les peuples et tous les pays.  Il a ensuite rendu hommage au rôle des ONG, qui collaborent souvent avec l’ONU sur le terrain et qui sont capables d’identifier en amont les crises à venir avant même qu’elles soient encore pensables pour les diplomates.  M. Kofi a ensuite passé la parole à Mme Shirin Ebadi, Fondatrice et ancienne Présidente de la National association in support of Children’s Rights et Présidente du Human Rights Defence Centre en Iran.  Mme Ebadi, dont l’action lui a valu le prix Nobel de la paix 2003, a tenu un vibrant plaidoyer en faveur de la liberté d’action des ONG.  Évoquant sa propre expérience en Iran, elle a dénoncé les gouvernements non démocratiques qui interdissent les ONG ou tentent d’en prendre le contrôle.  


Avant de clôturer ses travaux, la conférence a adopté par acclamation la déclaration suivante: nous les mille ONG réunies aujourd’hui invitons le monde à s’unir pour la paix, la sécurité et le développement.  Nous vous demandons d’adopter une version plus large du monde, d’abandonner les intérêts étroits et de mettre en œuvre des changements concrets exprimés de manière concrète(…).  Nous vous prions de ne pas gâcher cette occasion.


La séance du matin, consacrée au « Dialogue sur l’avenir de l’Organisation des Nations Unies », a porté sur la nécessité de renforcer l’association entre l’ONU et les organisations de la société civile.  « La coopération internationale entre les Etats est affectée par la complexité de plus en plus grande du monde, a affirmé le Président de la 59e session de l’Assemblée générale, M. Jean Ping.  Cette coopération passe désormais aussi par de multiples canaux et elle n’est plus le fait des seuls États ».  Soulignant que « de nouveaux acteurs, dont les ONG, ont désormais voix au chapitre comme force de proposition et d’action », M. Ping s’est félicité que les Nations Unies se soient engagées à s’ouvrir davantage à la société civile, citant notamment la tenue d’auditions informelles de l’Assemblée générale avec la société civile en juin.  Trois tables rondes ont fait suite au débat, pour permettre des rencontres entre les représentants de la société civile et des États Membres: « Comment bâtir un monde plus sûr »; « L’ONU et la société civile » et « Eliminer la pauvreté: des dates à respecter, des vies à sauver ». 


La première séance de l’après-midi était consacrée au thème: « Aucun répit jusqu’à l’échéance de 2015 » et visait à fournir un espace de dialogue informel entre les représentants de la société civile et des États Membres, et à permettre de définir des axes de discussion pour favoriser un dialogue plus dynamique autour de l’action de l’Organisation et de sa réforme.  M. Somavia, Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a reconnu que de nombreux acteurs autres que les gouvernements avaient un rôle à jouer, mais qu’ils devaient d’abord trouver la manière d’influer sur les gouvernements.  Il va falloir définir des mécanismes institutionnels appropriés, a-t-il expliqué, jugeant ce processus possible dans la mesure où il fonctionne à l’OIT.  Prenant la parole au nom de M. Eliasson, Président élu de la soixantième session de l’Assemblée générale, son Chef de Cabinet, M. Lars Hjalmar Wide, a affirmé que ce dernier entendait renforcer le travail des Nations Unies avec les ONG.



DIALOGUE SUR L’AVENIR DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES


JEAN PING, Président de la cinquante-neuvième session de l’Assemblée générale des Nations Unies, a déclaré que tout dialogue devait prendre en considération la nature multipolaire de notre monde, y compris la société civile.  La coopération internationale entre les États est affectée par la complexité de plus en plus grande du monde.  Elle passe désormais aussi par de multiples canaux, étatiques ou non, officiels ou non, et elle n’est plus le fait des seuls États.  L’État n’est plus le seul acteur au monde, a-t-il affirmé, il y en a de nouveaux, dont les ONG qui ont désormais voix au chapitre comme force de proposition et d’action.  Nous devons donc nous féliciter que les Nations Unies se soient engagées à s’ouvrir davantage à la société civile, comme l’ont montré les auditions de l’Assemblée générale en juin dernier.  En ce moment même se tient la deuxième conférence mondiale des Présidents des Parlements.  De plus, le Conseil économique et social permet aux autorités locales, notamment aux mairies, de renforcer leur coopération avec l’ONU. 


M. Ping a enfin salué la tenue de cette Conférence DPI/ONG et la tenue de plusieurs tables rondes en son enceinte.  Un dialogue entre les différentes composantes de la communauté internationale sur le tracé de notre avenir commun, de l’Organisation et de nos peuples est possible mais aussi indispensable.  Ce qui est en jeu, c’est une action collective face aux défis de notre temps, confronté à un monde à plusieurs vitesses.  Il a alors évoqué la pauvreté, les épidémies telles que le VIH/sida, les violations des droits de l’homme et les inégalités qui menacent la sécurité collective.  La coopération internationale peut prendre un nouveau tournant, plus humain si tous les États, en collaboration avec tous les acteurs, parviennent à faire du dialogue une vertu dynamique, a-t-il déclaré, ajoutant que c’est la foi en l’humanité tout entière qui est au fondement même de l’action des Nations Unies.  La participation des ONG à ce projet collectif est capitale.  Le Président de l’Assemblée générale a relevé leur souplesse d’action, qui tranche avec la lourdeur habituelle des appareils politiques et qui constitue un outil précieux en cas d’urgence.  Les ONG constituent également un réservoir de ressources humaines pour de nombreux pays à qui celles-ci font défaut.  Un dialogue est donc toujours utile, mais il doit être respectueux des cadres institutionnels en place et s’inscrire dans un partenariat, afin de favoriser des échanges toujours plus efficaces.


JOHAN LØVALD, Représentant permanent de la Norvège auprès des Nations Unies, a déclaré qu'aujourd'hui l’Organisation était à la croisée des chemins ce qui exige plus que l'instauration d'un dialogue mais un partenariat avec la communauté des ONG.  Les gouvernements doivent élargir leur partenariat avec la communauté des ONG qui ont permis de faire accélérer des programmes politiques et de mettre en lumière des questions méconnues.  En Norvège par exemple, la société civile est l'épine dorsale du pays en ce qu'elle représente la liberté d'expression et qu'elle agit au nom des nécessiteux.  Il s'agit de l'essence même de la démocratie.  La Norvège est le pays qui achemine le plus d'aide publique au développement par le biais des ONG.  Celles-ci ont un rôle important de contrôle des politiques des gouvernements qui sont ainsi appelés à rendre des comptes.  Elles sont également importantes dans le domaine du maintien de la paix en ce qu'elles disposent de réseaux importants et de connaissances de première main. 


Le rôle de la société civile dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement ne saurait être trop mis en exergue.  Nous devons toutefois nous souvenir qu'il ne sera guère positif pour l'ONU de s'engager dans un partenariat au Siège avec les ONG si celles-ci ne peuvent pas s'exprimer au niveau national dans leur propre pays.  L'élargissement de la participation de la société civile pourrait être limitée pour des questions logistiques qui devraient pouvoir être réglées par le biais de consultations préalables.  Nous devons trouver les moyens d'institutionnaliser votre participation.  Pour cela, la question du financement est essentielle.  Le Secrétaire général a créé un fonds d'affectation spéciale pour faciliter la participation des ONG en provenance de pays en développement. 


L’Ambassadeur a annoncé le lancement d'une commission pour l'émancipation juridique des pauvres dont les activités économiques et transactions ne sont pas reconnues et qui souffrent de l'absence de droits de propriété.  Cette nouvelle commission élaborera un programme axé sur l'action et sur les stratégies à mettre en place par les gouvernements.  Vous devez être la voix des pauvres.  Nous avons besoin de vous pour véhiculer sur le terrain les Objectifs du Millénaire en matière de développement.


BERNICE ROMERO, Advocacy Director de Oxfam International, a rappelé que des milliers de problèmes affectaient la vie des citoyens, et qu’ils ne relevaient jamais d’un seul gouvernement.  Le Sommet mondial de la semaine prochaine constituera une occasion de renouveler les engagements liés à la pauvreté ou aux conflits, a-t-elle estimé.  Les gouvernements doivent faire preuve de volonté pour parvenir à des accords sensés.  L’Appel mondial à agir contre la pauvreté regroupe des entités très diverses de par le monde, prouvant sa force et empêchant que sa voix soit oubliée.  Surmonter les différences à travers une collaboration est le seul moyen pour nous d’obliger les gouvernements à agir contre la pauvreté ou la prolifération des armes, a-t-elle affirmé.  Alors que les négociations entre les gouvernements se déroulent, nous constatons l’absence de vision commune.  De nombreux gouvernements ne veulent pas encore prendre les mesures nécessaires pour annuler complètement la dette ou pour assurer des échanges commerciaux équitables aux pays du Sud.  Nous craignons que le succès échappe au Sommet mondial en ce qui concerne la pauvreté, car les discussions semblent sans fin et vident les textes de leur substance, a estimé Mme Romero.  Or, nous voulons que les actions gouvernementales changent la situation actuelle et remédient aux problèmes.  Pour que le Sommet soit pertinent, Oxfam demande que soit rédigé un texte énonçant plusieurs recommandations en matière de génocide, d’Objectifs du Millénaire pour le développement, de réduction des armes et de prévention des catastrophes.  Nous avons pris l’engagement de réduire la pauvreté extrême il y a cinq ans mais de nombreuses personnes continuent à en souffrir, tout comme elles continuent à subir la violence.  La communauté internationale doit être un lieu où des engagements véritables devraient se concrétiser.  Si le Sommet de la semaine prochaine veut réellement réussir, nous devons changer l’état actuel des choses, a-t-elle conclu.


MARK MALLOCH BROWN, Chef de Cabinet au Bureau exécutif du Secrétaire général et modérateur de la réunion, a indiqué que le Secrétariat des Nations Unies avait un objectif: faire clairement entendre la voix vigoureuse de la société civile avant le Sommet.  Les visées de certains visant à tuer de grandes idées comme la création d'un conseil des droits de l'homme doivent être mises au grand jour.  Votre voix doit être plus unifiée que jamais pour lancer un défi au Sommet.  Vous disposez d'une occasion extraordinaire de prendre la vedette sur les gouvernements, de lancer un appel en faveur de l'action et faire en sorte que le texte de conclusion du Sommet devienne un succès.  Il ne s'agit pas seulement d'un examen à mis parcours des Objectifs du Millénaire mais aussi des soixante ans de l'Organisation, ce qui constitue une occasion historique.  Le Secrétaire général qui a dégagé une vision des droits de l'homme qui repose sur une perception complète des libertés dans le monde et sur la sécurité humaine.  Les tentatives réductrices de ces Objectifs sont regrettables.  La présentation du rapport de M. Volker a constitué un moment important pour les Nations Unies mais également un appel en faveur de la réforme de la gestion de l'Organisation.  Les gouvernements doivent nous donner les outils pour accomplir ces tâches.  Je vous demande instamment d'envoyer un message à ceux qui se trouvent dans les salles de négociations pour que le document final du Sommet soit historique et novateur.


TABLE RONDE


Éliminer la pauvreté: des dates à respecter, des vies à sauver


Ouvrant les débats, ANN VENEMAN, Directrice générale du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a estimé que le monde n’avait jamais été si bien placé pour atteindre l’objectif d’élimination de la pauvreté.  Nous disposons de la Feuille de route, il nous faut maintenant faire montre de la volonté nécessaire pour l’appliquer, a-t-elle déclaré, rappelant que selon la Banque mondiale, 1,1 milliard de personnes continuent à subsister avec moins d’un dollar par jour et que les enfants sont les premières victimes.  Tout en citant les progrès accomplis par l’Inde et la Chine pour faire reculer la pauvreté sur leur territoire, elle a prévenu qu’au rythme actuel, de nombreux pays n’atteindraient pas les OMD dans les délais prévus, notamment en ce qui concerne les enfants.  Le monde paiera un lourd tribut si nous n’améliorons pas la situation, a-t-elle affirmé.


Plusieurs participants au débat ont alors évoqué les initiatives concrètes sur le terrain des ONG, y voyant un signe d’espoir alors que les gouvernements, selon eux, n’ont pas encore commencé à lutter assez efficacement contre la pauvreté.


SYLVAN BARNET a présenté le Rotary Club, dont il est le représentant aux Nations Unies.  Le Rotary tente de faire avancer la paix et le bien-être grâce à l’idéal du bénévolat.  Il a notamment évoqué les campagnes de vaccination menées contre la poliomyélite.  La mobilisation de millions de bénévoles constitue un précieux héritage, a-t-il déclaré.  Il a jugé nécessaire de définir des priorités dans la lutte contre la pauvreté, précisant que le Rotary met l’accent sur la pauvreté en milieu rural ainsi que sur la durabilité et l’autonomie au travers de la mise en place de microcrédits, notamment en faveur des femmes.   


Après avoir demandé de respecter une minute de silence en hommage aux victimes de l’ouragan Katrina, UWEM ROBERT OTU, Président du Mouvement africain de jeunesse au Nigéria, a lui aussi estimé que les petits partenariats entre ONG, qui aident les êtres humains à survivre, offraient un espoir dans un monde dont les gouvernements n’ont pas encore mis un terme au protectionnisme, ni adopté le Protocole de Kyoto.  Appelant les gouvernements à agir enfin, il a critiqué les institutions internationales qui font passer les intérêts réels des peuples au second plan.  Il a ainsi évoqué le domaine de l’eau au Nigéria, s’étonnant que la Banque mondiale mette souvent comme condition aux réformes le renforcement du secteur privé.  Or celui-ci est souvent plus préoccupé par le niveau de ses actions et des profits, que par le droit des êtres humains à accéder librement à ce bien commun.  Par ailleurs, l’intervenant a fermement dénoncé les ravages de la corruption dans le monde en développement, demandant là aussi aux gouvernements d’agir.  Les Nations Unies doivent voter une résolution prévoyant des sanctions contre la corruption, a-t-il déclaré.  Si nous demandons aux pays développés de verser 0,7% de leur PNB à l’aide publique au développement, nous devons aussi prévoir des sanctions contre ceux qui détournent une partie de cet argent.  Nous devrions également sanctionner les pays qui, comme la Suisse, acceptent de recevoir dans leurs banques cet argent détourné, a-t-il conclu.


HICHAM EL GUERROUJ, athlète et ambassadeur bénévole de l’UNICEF au Maroc, a souhaité souligner le rôle du sport dans la lutte contre la pauvreté et ses corollaires.  Il a expliqué que le sport permettait aux jeunes de développer des comportements sains, à même de les aider à se protéger de fléaux tels que la drogue, la délinquance ou la violence.  Chaque dollar investi dans des activités physiques équivaut à trois dollars économisés en dépenses telles que les soins médicaux, a-t-il précisé, soutenant que le sport est un espace de socialisation et d’inclusion permettant d’atteindre les plus vulnérables, et de renforcer la confiance des femmes et des fillettes en elles.  C’est aussi une voix vers la paix car le sport transcende les cultures et j’espère donc que les ONG reconnaîtront davantage ses vertus et les intégreront dans leurs programmes d’action, a-t-il ajouté.


HANIFA MEZOUI, Responsable de la section des ONG au sein du Département des affaires économiques et sociales, a tenu à souligner que le statut consultatif des ONG auprès du Conseil économique et social leur donne accès aux processus intergouvernementaux.  Des audiences publiques des ONG sont organisées avant les grandes réunions et le Conseil joue un rôle central dans une action mondiale et concertée, grâce à des partenariats solides avec les ONG du monde, y compris des régions sous représentées, afin qu’elles puissent concevoir des idées et réaliser leurs rêves.  Elle a appelé les ONG à utiliser pleinement ces mécanismes.


Plusieurs représentants d’ONG ont ensuite pris la parole pour appeler les gouvernements à agir enfin.  La représentante d’une ONG du Minnesota a affirmé que la communauté internationale disposait bien des outils permettant de lutter contre la pauvreté et qu’il était grand temps de les employer.  Elle a vivement dénoncé l’attitude des pays développés, dont la surproduction et la volonté de conserver des mécanismes commerciaux inéquitables contribue au maintien de la pauvreté.  Pour sa part, la représentante de la Société Sacré-Coeur a souligné la nécessité de placer les pauvres au cœur des efforts de lutte contre la pauvreté, en les aidant à s’autonomiser et à prendre en charge les efforts de développement.  De même, elle a appelé à l’adoption d’une approche sexospécifique.


En conclusion, Mme VENEMAN a relevé que toutes les questions étaient interconnectées et que ONG et Nations Unies devaient donc travailler ensemble en faveur des personnes défavorisées.

TABLE RONDE


Aucun répit jusqu’à l’échéance de 2015


JUAN SOMAVIA, Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a expliqué avoir l’impression que les gouvernements avaient une attitude moins ouverte aux ONG que par le passé.  De nombreux acteurs autres que les gouvernements ont un rôle à jouer, mais ils doivent d’abord trouver la manière d’influer sur les gouvernements.  À l’avenir, nous devrons définir des mécanismes institutionnels appropriés.  Rappelant que l’OIT regroupait des gouvernements, des responsables « donneurs d’ordre » et des salariés, M. Somavia a expliqué qu’il était plus facile de faire respecter un accord lorsque tous avaient participé à sa conception.  L’expérience de l’OIT nous a montré que ce processus fonctionnait, et il représente l’avenir, a-t-il affirmé.  Pourtant j’ai l’impression qu’actuellement, non seulement nous n’allons pas dans cette direction, mais nous reculons, et il apparaît donc de plus en plus clairement que le processus institutionnel doit être formé. 


M. Somavia a ensuite affirmé que le lien entre le développement et la mondialisation pouvait être utile s’il y avait des règles du jeu justes, et à condition de ne pas oublier l’aspect local, essentiel au développement.  Les populations ont envie de rester chez elles mais elles n’y trouvent pas de travail, a-t-il déclaré, estimant que la communauté internationale ne présentait pas suffisamment de propositions locales.  Par ailleurs, il a estimé que l’emploi constituait un problème mondial mais que la communauté internationale ne voulait pas le reconnaître.  Le chômage ne cesse de croître et 90% des nouveaux emplois créés en Afrique relèvent du secteur informel, a-t-il déclaré, avant de souligner que le chômage est massif chez les jeunes.  Il a également évoqué le travail des enfants, qui ont une activité alors même que parfois leurs parents sont au chômage.  Le problème du chômage ne relève donc pas que d’une politique gouvernementale, mais il concerne le monde entier.  M. Somavia a enfin fait remarquer que la Déclaration du Millénaire avait passé sous silence la nécessité d’avoir un emploi pour sortir de la pauvreté. 


M. CYRIL RITCHIE, représentant de la Conférence des organisations non gouvernementales ayant des relations consultatives avec les Nations Unies (CONGO), a déclaré que cette dernière connaissait très bien les points forts et les points faibles de l'ONU.  Même si nous ne sommes pas satisfaits de la façon dont les objectifs sont poursuivis, a-t-il ajouté, nous les partageons en étant conscients de notre rôle qui consiste à aider l'ONU à mieux interpréter les dispositions de la Charte dans l'intérêt des objectifs de développement.  Il a insisté sur toute l'importance du rapport Cardoso et sur la nécessité de parvenir à une participation régulière des ONG à toutes les réunions des Nations Unies.  Il faut que les ONG prennent la défense des victimes de toutes les injustices et des opprimés du monde entier et mènent des activités de plaidoyer.  Nous entendons nos gouvernements s'engager à n'épargner aucun effort pour atteindre les Objectifs de développement, a-t-il dit, mais nous pouvons nous interroger sur leur volonté réelle face aux résultats obtenus. 


Depuis 1972, a-t-il précisé, les gouvernements se sont constamment engagés à sauver le monde de lui-même.  Il a cité les conférences de Beijing sur la situation des femmes, du Caire sur la population et le développement, le Sommet de la Terre à Rio en 92, ou encore les conférences sur le financement du développement à Monterrey en mars 2002 et sur le développement durable à Johannesburg en septembre 2002, comme autant de grandes promesses qui ont été suivies de peu d'effets. 


Évoquant les conditions à mettre en place pour que se pratique une réelle coopération internationale, il faut, outre une réelle volonté politique, une Organisation des Nations Unies forte et dont le Secrétaire général peut gérer la structure sans ingérence extérieure.  À titre d'illustration, il a précisé que le budget de la Ville de Stockholm était supérieur à celui de l'Organisation.  Il a rappelé que les milliers de personnes qui constituaient les ONG n'avaient pas la mémoire courte et se souviendraient des insuffisances des hommes politiques. 


S’exprimant au nom de JAN ELIASSON, Président élu de la soixantième session de l’Assemblée générale, son Chef de Cabinet, LARS HJALMAR WIDE, a reconnu qu’il en était à se demander si on parviendrait ou non à un document final de qualité pour le Sommet.  Un rapport indique que les délégations progressent lentement dans la mise au point d’un texte définitif.  Il a estimé que la lenteur de ces négociations ne découlait pas seulement de la mauvaise volonté de certains gouvernements, mais aussi de la complexité du monde, qui rend difficile la conciliation de toutes les positions.  Par ailleurs, il a souligné que les propositions contenues dans le rapport du Secrétaire général « Dans une liberté plus grande » étaient ambitieuses.  Même si le document final n’est pas parfait, il constituera un bon point de départ, a-t-il assuré, avant d’affirmer que les Nations Unies œuvreraient en faveur d’une commission des droits de l’homme plus efficace et de la création d’une commission de consolidation de la paix.


Reconnaissant que les Nations Unies faisaient face à de nombreuses critiques, le Chef de cabinet de M. Eliasson a tenu à rappeler que l’Organisation travaillait dans un environnement mondial qui avait fortement évolué.  Nous devons blâmer aussi les diplomates, qui s’occupent trop de microgestion, a-t-il déclaré.  Par ailleurs, il a jugé qu’il fallait encourager les gouvernements à fournir tous les efforts nécessaires pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement.  Il a également estimé que la Réunion de haut niveau devait condamner fermement le terrorisme et toutes ses manifestations.  Concernant la réforme du Conseil de sécurité, il a jugé nécessaire d’y assurer une plus grande représentativité.  Il a ensuite jugé que toute proposition devait être mise à l’épreuve sur le terrain.  Il a conclu en affirmant la volonté de  M. Eliasson de travailler avec les ONG. 


Mme MELBA PRIA OLAVARRIETA, Chef de la Section chargée des ONG au sein du Ministère des affaires étrangères du Mexique, a déclaré que l'expérience nous montrait que les représentants de la société civile devaient apprendre à négocier.  Elle a souligné la nécessité de mener un travail constant en direction des gouvernements, notant que ceux-ci changeaient périodiquement.  La société civile a un rôle essentiel pour faire avancer des priorités qui ne sont pas toujours celles des gouvernements.  Si les ONG parlent souvent de l'amélioration des politiques publiques, les gouvernements sont des institutions lourdes et très lentes à réagir.  Elle a exhorté les ONG à ne pas devenir lourdes comme des gouvernements.  Un des problèmes qui se posent aux ONG est la difficulté d'être entendues au niveau mondial tout en restant efficace au niveau local.  Elle a insisté sur la nécessité pour les ONG de devenir de véritables professionnels des domaines dans lesquels elles travaillent.  L’intervenante a déclaré que cette réunion d'aujourd'hui mettait en évidence les progrès réalisés en matière de participation des ONG aux travaux de l'ONU, même si beaucoup restait à faire.  En conclusion, elle a déclaré qu'il ne fallait pas perdre de vue que le monde ne nous était pas seulement légué par nos parents mais aussi prêté par nos enfants.  



Réponses aux questions


Le Chef de Cabinet du Président de la prochaine session de l'Assemblée générale s'est dit persuadé de l'influence de la société civile sur les négociations en cours.  Il y a une influence évidente de la société civile sur toutes les questions, a-t-il insisté en ajoutant que c'était par le biais d'un processus, un dialogue et d'une interaction constante que l’on parviendrait à faire la différence. 


M. Ritchie a estimé indispensable de canaliser le potentiel des grandes entreprises pour qu'elles aient un rôle positif dans la vie des gens par leurs capacités de créer des emplois.  S'agissant de la vente d'armes, même s'il est vrai que se sont les gouvernements qui les vendent, il serait peut-être judicieux de mener une campagne pour que plus personne n'achète d'armes.  Nous sommes membres de la société civile parce nous ne sommes d'accord avec rien, mais même d’opinions politiques différentes nous pouvons nous entendre.  Si les processus démocratiques étaient mieux compris par les citoyens les gouvernements seraient mieux contrôlés.


S'agissant d'une question sur les moyens de financement novateurs du développement, le Chef de Cabinet du Président de la soixantième session de l'Assemblée générale s'est réjoui du fait que ce sujet est de plus en plus abordé et sous les feux de la rampe.  Il a précisé qu'une séance de la soixantième session de l'Assemblée générale serait consacrée à cette question et que 40 délégations étaient déjà inscrites. 


Répondant à une série de questions relatives à l'emploi, M. Somavia a déclaré qu'il souhaitait que la création d'emplois de qualité soit un objectif des politiques en regrettant que de plus en plus souvent tel ne soit plus le cas même en temps de croissance économique.  Il faut promouvoir des investissements qui soient générateurs d'emplois.  Pour se faire, il faut une conjugaison des efforts public et privé.  Répondant à des questions sur les moyens de rendre l'ONU plus efficace Mme Olavarrieta, a justifié la présence des ONG par leur capacité de renforcer les institutions internationales. 


Parmi les autres réponses, M. Ritchie a déclaré que la différence entre les représentants des gouvernements et ceux des ONG était que les premiers pensaient d'abord aux intérêts nationaux et les deuxièmes à parvenir à un monde meilleur.  Dans le même ordre d'idées, le Chef du Cabinet du Président de la soixantième Assemblée générale a rappelé qu'il y avait 191 État Membres et qu'il était judicieux, à défaut de consensus, de lancer des négociations par petits groupes de pays qui iront sensibiliser des groupes plus grands.  Il s'est dit favorable à l'idée d'accorder une place, une représentation physique des ONG au sein des Nations Unies.  Parmi les autres questions, M. Somavia a notamment souligné la nécessité d'un instrument international relatif aux migrations et celle de promouvoir les petites entreprises. 



SÉANCE DE CLÔTURE


Nous les peuples: chaque voix compte


M. SHASHI THAROOR, Secrétaire général adjoint à la communication et à l’information des Nations Unies, a estimé que cette cinquante-huitième Conférence marquait l’ouverture d’une nouvelle phase de la participation des ONG aux Nations Unies.  Il a déclaré que l’Organisation était impatiente de travailler avec les ONG au programme qu’elles ont en commun, soulignant que Kofi Annan défendait les valeurs qui sont celles des ONG.


M. KOFI ANNAN, Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, a estimé que la forte représentation des ONG lors de cette conférence était une preuve supplémentaire de l’importance qu’elles accordent à la mission dont s’acquitte l’ONU dans le monde.  Depuis que j’ai pris mon poste, a-t-il déclaré, de nombreux événements sont intervenus, dont le plus important est la révolution menée par les ONG.  La mobilisation de masse autour du sommet du G-8 cet été en est l’exemple le plus récent.  Se tournant vers Shirin Ebadi, il a jugé que son action, qui lui a valu le prix Nobel de la paix en 2003, démontrait la contribution qu’apportent les ONG dans les domaines des droits de l’homme, de la paix, du désarmement et de la démocratie.  Évoquant sa récente tournée au Niger, il a rapporté y avoir constaté l’excellente collaboration mise en œuvre entre les ONG et les Nations Unies pour remédier à la crise alimentaire.  « Sans les ONG, nous ne pourrions même pas espérer commencer à faire face à des situations de ce type », a-t-il affirmé, avant d’évoquer également le partenariat entre ONU et ONG au Soudan.  « Les ONG travaillent souvent loin devant nous, pour mettre en lumière des risques et des problèmes nouveaux.  Elles voient souvent ce qui n’est pas encore apparent pour les diplomates et pensent ce qui semble encore impensable aux gouvernements et inadmissible aux fonctionnaires », a insisté M. Kofi Annan.


« Nous voici réunis ici à la veille d’un Sommet mondial qui pourrait être d’une importance inestimable pour tous les peuples et tous les pays, a-t-il poursuivi.  Je tiens à vous assurer que vous avez fortement marqué le processus.  Je sais que vous avez parfois l’impression de parler dans le désert, mais les auditions de juin dernier ont marqué un réel progrès dans les rapports entre l’ONU et la société civile.  Le document final officiel en porte l’empreinte, surtout en ce qui concerne l’égalité des sexes et l’environnement.  Et ici, cette semaine, lors de cette conférence, vous nous avez pour ainsi dire payés de retour en écoutant un nombre sans précédent de représentants de gouvernements et de parlementaires.  Vous ne serez peut-être jamais entièrement d’accord avec eux et c’est probablement une bonne chose.  Mais à tout le moins vous commencez, eux et vous, à vous écouter, à vous comprendre et à vous apprécier, et ce n’est pas rien.  Nous devons poursuivre ce dialogue », a-t-il insisté.


Le Secrétaire général a ensuite appelé à redoubler d’efforts pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement, qui représentent un investissement essentiel dans la sécurité de l’humanité.  « Pendant toute la semaine qui vient de s’écouler, j’ai rappelé aux ambassadeurs qui négocient le document final du Sommet que, dans le monde d’aujourd’hui, où tout se tient, l’intérêt collectif coïncide souvent avec l’intérêt national.  C’est dans cet esprit qu’ils doivent négocier. »


« Quoi qu’on décide et obtienne, l’ONU ne pourra avancer seule.  Vous avez tous un rôle clef à jouer.  Tout comme vous avez observé de près et influencé les négociations sur le texte final du Sommet, vous devrez suivre de près ce qui sera fait pour en appliquer les dispositions.  Les citoyens et citoyennes que vous représentez attendront de vous que vous jugiez le document final et que vous nous disiez si les réformes adoptées par les dirigeants vont assez loin.  Et nous avons tous besoin de vous pour suivre ce qui se passe dans les pays et veiller à ce que les gouvernants de vos pays obtiennent des résultats concrets dans les mois et les années à venir.  Vous devez donc vous faire les garants de la réforme du système international », a-t-il poursuivi.


« En ce soixantième anniversaire de l’Organisation des Nations Unies, reconnaissons une fois de plus la sagesse de ses fondateurs, qui, à l’Article 71 de la Charte, ont prévu des consultations avec les ONG.  Des échanges étroits avec la société civile étaient alors jugés indispensables à la bonne santé de l’Organisation et au bien-être des peuples.  C’est aussi vrai aujourd’hui qu’alors – et peut-être plus encore », a-t-il ajouté.  « Que votre activité principale soit d’aider à déterminer les politiques mondiales ou d’aider directement ceux qui sont dans le besoin, vous donnez tout son sens à l’expression « Nous, les peuples ».  Je vous remercie tous pour votre engagement et compte sur votre appui dans la période cruciale qui s’annonce », a-t-il conclu.


Mme SHIRIN EBADI, prix Nobel de la Paix, Fondatrice de la National Association in Support of Children's Right et Présidente du Human Rights Defence (Iran), a salué le rôle de médiateur joué par les ONG partout dans le monde entre le public et leur gouvernement.  La fonction la plus importante des ONG, a-t-elle ajouté, consiste à transmettre les aspirations, préoccupations et critiques des populations aux gouvernements en offrant des suggestions pour combler des lacunes ou améliorer les conditions de vies des populations.  L'un des avantages caractéristiques des ONG, a-t-elle ajouté, est qu'elles sont indépendantes des gouvernements.  L'indépendance vis-à-vis des gouvernements, a-t-elle néanmoins déclarée, ne signifie pas qu'elles ne puissent obtenir ou accepter de l'aide mais qu'une telle aide ne peut influer en rien sur leur autonomie ou spécificité. 


Par ailleurs, elle a déclaré que lorsque les ONG réalisaient leurs activités de manière pacifique, il n'y avait aucune raison que les gouvernements s'ingèrent dans leurs activités.  Citant les difficultés faites aux ONG par les gouvernements, elle a cité les difficultés qu'elle avait eues depuis trois ans pour obtenir l'inscription et la reconnaissance d'un centre des droits de l'homme en Iran.  Dans les sociétés ou les gouvernements font obstacle aux travaux des ONG, un soutien international ferme à l'appui des organisateurs d'ONG est indispensable.  Elle a jugé nécessaire des pressions sur les États concernés, une fonction, qui selon elle, l'ONU était la seule à pouvoir exercée.  Elle a aussi dénoncé les tentatives de certains gouvernements d'infiltrer les ONG et de les détourner de leurs objectifs. 


Dans ses observations relatives à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, Mme Ebadi a regretté que de trop nombreux États Membres de cette Commission étaient connus pour ne pas respecter les droits de l'homme, et n'avaient ratifié aucune des conventions majeures des droits de l'homme comme par exemple la Convention de lutte contre la discrimination à l'égard des femmes ou la Convention de lutte contre la torture.  C'est pourquoi, dans un souci d'efficacité et de crédibilité, elle a suggéré que le nouvel organe chargé de remplacer la commission des droits de l'homme comprenne parmi ses membres des organisations internationales des droits de l'homme comme la Fédération internationale des droits de l'homme, Amnesty International ou Human Rights Watch. 


Dans ses remarques de clôture, M JOSEPH DONELLY, Président de la Conférence, s'est félicité du succès de cet événement.  Il faut nous demander aujourd'hui, a-t-il dit quelles  nouvelles voix ont été entendues au cours de ces trois dernières journées et quelle voix nous ferons résonner en rentrant chez nous.  Nous devons aussi nous demander ce que nous devrons entreprendre pour rassembler d'autres voix.  L’intervenant a estimé que si l'adversité permettait à l'individu de mieux se connaître, il était aujourd'hui urgent que les gouvernements s'associent aux ONG.  Nous avons franchi beaucoup de portes et de couloirs encombrés pour arriver où nous sommes arrivés aujourd'hui.  Nous venons chaque année pour rappeler que ce partenariat entre société civile et gouvernement est possible.  M. Donelly a précisé qu'il a été informé que les questions posées au cours de cette conférence de la société civile seraient transmises au Sommet des États Membres.  Nous devons veiller, a-t-il insisté, pour nos six milliards de frères et de sœurs à travers le monde, à ce que cette chance qui s'offre de nous faire entendre par nos gouvernements de façon à ce qu'une liberté plus grande soit partagée par tous, ne soit pas gâchée. 


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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