LA TROISIÈME COMMISSION S’INQUIÈTE DE LA MONTÉE EN PUISSANCE DU RACISME
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Troisième Commission
34e séance – matin
LA TROISIÈME COMMISSION S’INQUIÈTE DE LA MONTÉE EN PUISSANCE DU RACISME
Certaines délégations soulignent le danger grandissant de l’islamophobie
La Commission sociale, humanitaire et culturelle a entamé ses travaux sur l’élimination du racisme et de la discrimination raciale et sur le droit des peuples à l’autodétermination.
Elle a d’abord entendu le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance, M. Diène, qui a souligné que les crises récentes, comme celle de la Côte d’Ivoire, montraient que le racisme et la xénophobie étaient le terreau des pratiques les plus violentes et pouvaient déboucher sur des violations massives des droits de l'homme. Ils sont toutefois aussi à la base de comportements quotidiens d’individus comme d’administrations ou d’entreprises, qui, fondamentalement, refusent de traiter certaines cultures, certaines religions ou certaines couleurs de peau à égalité. En ce sens, le Rapporteur spécial s’est inquiété que la recrudescence actuelle de la discrimination raciale et de la xénophobie, en particulier leur instrumentalisation politique à des fins électorales et, plus inquiétant, leur légitimation intellectuelle par les partis traditionnels, menace gravement la démocratie.
Le Rapporteur spécial a insisté sur le fait que l’ensemble des États doivent prendre en considération la tendance à la multiculturalisation, qui est à l’œuvre sur tous les continents. À cet égard, a-t-il souligné, les politiques de lutte contre le racisme et la discrimination raciale ne doivent pas être une fin en soi, mais doivent s’accompagner de la promotion d’un multiculturalisme, qui ne soit pas communautaire -chaque communauté vivant côte à côte, sans relations-, mais unitaire.
La présentation des rapports du Secrétaire général sur le suivi de la Conférence de Durban par le Représentant du Bureau de New York du Haut Commissariat aux droits de l’homme, M. Mokhiber, a par ailleurs permis de montrer que de nombreux acteurs avaient eu recours au Programme d’action de Durban pour lutter contre le racisme et l’intolérance. Désormais, ce sont en outre 170 États qui ont ratifié la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, celle-ci constituant la base normative sur laquelle doivent reposer les efforts internationaux en matière de lutte contre la discrimination raciale, a-t-il affirmé.
Lors des débats qui ont suivi, de nombreuses délégations ont souligné le problème particulier que représente la montée en puissance de l’islamophobie, dans un contexte de lutte contre le terrorisme, contre l’immigration clandestine et pour l’identité nationale.
Le représentant du Pakistan s’est ainsi dit préoccupé par les discours tenus contre l’Islam et les musulmans, qui se sont concrétisés par des attaques contre des lieux de culte, la fermeture de centres sociaux et culturels, des actes de discrimination raciale et une entrave aux droits civiques des musulmans dans de nombreux pays. Le représentant de l’Égypte a, pour sa part, regretté que certains gouvernements ferment les yeux sur la diffamation dont est victime l’Islam, préconisant que les États intègrent dans leurs programmes scolaires des enseignements sur la tolérance et l’égalité et mettent en place des mécanismes d’alerte précoce face aux agissements de mouvements fascistes et xénophobes.
Les représentants des pays suivants ont pris la parole au cours de la matinée: Royaume-Uni (au nom de l’Union européenne), Jamaïque (au nom du Groupe des 77 et de la Chine), Chine, Pakistan et Égypte.
Les travaux de la Troisième Commission reprendront demain, mardi 8 novembre, à 10 heures, avec la fin du dialogue sur les points 69 et 70 de l’ordre du jour et l’adoption de projets de résolution.
QUESTIONSRELATIVES AUX DROITS DE L’HOMME
- QUESTIONS RELATIVES AUX DROITS DE L’HOMME, Y COMPRIS LES DIVERS MOYENS DE MIEUX ASSURER L’EXERCICE EFFECTIF DES DROITS DE L’HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES
- SITUATIONS RELATIVES AUX DROITS DE L’HOMME ET RAPPORTS DES RAPPORTEURS ET REPRÉSENTANTS SPÉCIAUX
- RAPPORT DE LA HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L’HOMME
Droits de réponse
Le représentant du Canada, répondant aux allégations du représentant de l’Iran, a précisé que dans son pays, aucune personne n’est exécutée ou emprisonnée pour ses opinions, et encore moins des mineurs. Nous sommes conscients des défis auxquels nous sommes confrontés et nous sommes connus pour nos débats ouverts et dynamiques consacrés aux droits de l’homme. Nous disposons d’institutions judiciaires indépendantes et prenons au sérieux les visites des Représentants spéciaux des Nations Unis. La déclaration de l’Iran n’est rien de moins qu’une tentative de détourner l’attention de la situation troublante et sérieuse des droits de la personne dans ce pays.
Le représentant du Pakistan, répondant aux observations du Canada, a indiqué que le fait de vivre dans une tour d’ivoire ne confère pas le droit au Canada du juger d’autres pays. Le Canada est un exemple brillant de la manière dont les droits de l’homme ont été détournés au sein des Nations Unies. Ce pays a montré du doigt de nombreux pays, comme le nôtre ou le Soudan, mais nous aimerions savoir pourquoi le Canada a choisi d’adopter une approche aussi sélective qui vise des pays musulmans sans évoquer le sort des populations autochtones des pays développés. Nous sommes aussi inquiets de ce que l’Islam n’est pas respecté dans ces pays.
Le représentant de l’Éthiopie a réagi à la déclaration du représentant du Canada faite la semaine dernière qui laissait entendre que le recours à la force de la part de manifestants marquait un déclin des droits et libertés dans le pays. Le représentant a affirmé que les élections de 2005 ont été jugées justes et transparentes par les observateurs internationaux. Mais les manifestants ont choisi la violence pour tenter d’obtenir par la force ce qu’ils n’ont pas pu obtenir par les urnes. Il est regrettable que le gouvernement du Canada ait choisi de ne pas mentionner l’évolution positive de l’Éthiopie vers la démocratie.
Le représentant des États-Unis a rappelé que l’existence du pays repose sur la lutte contre toute tyrannie. Le Président des États-Unis ne saurait tolérer la torture quelqu’elle soit. Les ennemis combattants arrêtés au lendemain du 11 septembre l’ont été pour des raisons de sécurité nationale et lorsqu’il y a eu abus de la part de l’armée américaine, le gouvernement, s’est engagé à faire toute la lumière sur ces cas. Nous sommes aussi conscients que le chemin qui mène à la démocratie est long et diffère selon les pays mais le principe de démocraties est universel et chacun d’entre nous mérite d’en bénéficier.
La représentante de Chypre a déclaré que le représentant de la Turquie avait réagi à ses commentaires en se servant de fausses informations et en déformant la réalité. Si la division de Chypre persiste, a-t-elle affirmé, c’est parce que l’armée turque continue d’occuper illégalement un pays souverain et de susciter des mouvements sécessionnistes condamnés par les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et par les décisions de la Cour Internationale de justice (CIJ). La Turquie est responsable de l’isolement d’une partie de la population en raison de cette occupation et de son refus d’appliquer les décisions de la CIJ.
Le représentant de la Grèce a affirmé que la situation à Chypre était parfaitement claire et qu’elle avait été reconnue par les rapports du Secrétaire général. Par conséquent, aucune référence au passé ou fausse déclaration ne peut remettre en question les faits qui sont indiscutables. C’est parce que le Gouvernement turc continue d’exercer un contrôle militaire continu de Chypre que l’île continue d’être divisée.
Le représentant de l’Arménie a regretté que la rhétorique du passé continue d’être exercée en ce qui concerne le Nagorno Karabakh. L’idée selon laquelle l’Arménie occupe militairement le terrain est totalement fausse et contraire à la réalité sur le terrain, a déclaré le représentant, qui a au contraire accusé l’Azerbaïdjan d’exercer une occupation militaire. Il a rappelé que le statut de région autonome avait été historiquement garanti au Nagorno Karabakh par la Constitution soviétique. Ce qui c’est passé, c’est que la population qui vivait en dehors de cette région a fait l’objet d’une oppression, ce qui a conduit au déplacement de nombreuses personnes. Les accusations de l’Azerbaïdjan sont fausses et absurdes, comme celle qui attribue à l’Arménie la responsabilité d’avoir bloqué les communications. La délégation a rappelé qu’un simple examen de la géographie permettait de se persuader du contraire. En conclusion, le représentant a réitéré la position du Gouvernement arménien de rouvrir le dialogue pour trouver une issue pacifique au conflit.
Le représentant de l’Iran a regretté que le Canada ait déclaré que l’intervention de sa délégation avait pour but de détourner l’attention de la communauté internationale de la situation des droits de l'homme en Iran, affirmant que cette perception était sans fondement. Il a estimé que le Canada faisait preuve de sélectivité, en ne mettant en accusation que certains pays. Il l’a invité à répondre de façon responsable aux allégations de violations des droits de l'homme dans son propre pays.
Le représentant du Népal s’est inscrit en faux contre la déclaration du Canada, selon laquelle l’état d’urgence serait encore en vigueur dans son pays. Il a rappelé que, entré en vigueur le 1er février 2005, en respect de la Constitution népalaise, l’état d’urgence a été levé le 29 avril 2005. Il a ajouté que le Népal était partie à la plupart des traités internationaux relatifs aux droits de l'homme et soumettait régulièrement ses rapports aux organes conventionnels. Le Gouvernement népalais est pleinement engagé à promouvoir les droits de l'homme dans le pays, malgré le conflit en cours, a-t-il conclu.
À la suite de la déclaration du Canada, la représentante de la Côte d’Ivoire a déclaré que son pays était engagé dans une action coopérative avec les mécanismes des droits de l'homme, pour lutter contre la corruption et l’impunité dans le pays. Elle a appelé le Canada à renoncer à une logique de distribution de bons et mauvais points, qui néglige d’analyser objectivement la situation des droits de l'homme, et à s’orienter vers une démarche de coopération. Elle a enfin émis le vœu que l’amalgame ne soit pas fait entre les violations des droits de l'homme commises par des individus isolés –qui sont poursuivis et condamnés par l’État– et les violations des droits de l'homme et l’impunité qui seraient utilisés par l’État comme un moyen de gouvernement, ce qui n’est pas le cas en Côte d’Ivoire.
La représentante de l’Azerbaïdjan a tenu à répondre à la déclaration de l’Arménie en indiquant que l’Union soviétique, lorsqu’elle était encore l’arbitre dans la région, avait, par de nombreuses décisions, notamment celle du 10 janvier 1990, réaffirmé l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Azerbaïdjan et déclaré anticonstitutionnelle la décision de sécession du Nagorno Karabakh soutenue par l’Arménie. En outre, si l’Azerbaïdjan adhère au principe d’autodétermination des peuples, il condamne les tentatives artificielles, conduites par l’Arménie, de l’appliquer au Nagorno Karabakh, a-t-elle poursuivi, indiquant que la population de cette région disposait du niveau le plus élevé d’autodétermination au sein de l’Azerbaïdjan. Elle a également rappelé que le Conseil de l’Europe et le Conseil de Sécurité de l’ONU, par ses résolutions 182 et 880, avaient confirmé l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Azerbaïdjan sur ce territoire. Elle a enfin mis en cause l’intolérance de l’Arménie à l’égard des réfugiés et des minorités, en vue de créer un État « mono-ethnique ».
En réponse au droit de réponse exercé par le représentant d’Israël, la représentante de la Palestine a tenu à souligner que Israël était la puissance occupante dans les territoires palestiniens et à Jérusalem-Est. Or c’est l’occupation qui est à l’origine de tous les problèmes de la région depuis 40 ans, cette occupation étant, selon elle, de nature colonialiste et niant les droits des populations palestiniennes. Elle a déclaré que cette politique constante de l’État israélien était la cause, et non la conséquence, de la violence terroriste exercée par certains individus palestiniens.
La représentante de l’Arménie a souligné qu’elle n’avait pas fait référence, dans son premier droit de réponse, aux droits de l'homme, précisant que si des violations des droits des minorités sont effectivement dénoncées par différents rapports d’ONG et d’organisations intergouvernementales, elles concernent tant l’Arménie que l’Azerbaïdjan et le Nagorno Karabakh.
ÉLIMINATION DU RACISME ET DE LA DISCRIMINATION RACIALE
- ÉLIMINATION DU RACISME ET DE LA DISCRIMINATION RACIALE
- MISE EN OEUVRE INTÉGRALE ET SUIVI DE LA DÉCLARATION ET DU PROGRAMME D’ACTION DE DURBAN
DROIT DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION
Documentation
Note du Secrétaire général transmettant le rapport intérimaire du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme, Doudou Diène, sur la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, et mise en oeuvre intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban (A/60/283)
Le Rapporteur spécial propose à l’Assemblée générale une série de recommandations. L’Assemblée générale est invitée à attirer l’attention des États Membres sur les signes alarmants de régression du combat contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie découlant du nombre croissant de politiques et programmes de lutte contre le terrorisme qui génèrent de nouvelles formes de discrimination contre des groupes et des communautés entières, des religions et des traditions spirituelles. La gravité de la recrudescence de l’islamophobie doit faire l’objet, dans ce contexte, d’une attention particulière. L’Assemblée générale souhaitera peut-être également inviter les États Membres à accorder une grande vigilance à toutes les formes de diffamation des religions, notamment l’antisémitisme et la christianophobie.
L’Assemblée générale est invitée à accorder une attention particulière à la recrudescence du racisme, de la discrimination et de la xénophobie dont sont victimes les minorités nationales, ethniques, culturelles et religieuses, les populations immigrées, les demandeurs d’asile, les réfugiés, notamment par l’érosion de leurs droits économiques et sociaux (logement, éducation, santé) et par la perte graduelle des systèmes de protection découlant des instruments internationaux pertinents. L’Assemblée générale est en outre invitée à accorder une attention particulière au traitement discriminatoire de groupes qui se trouvent dans les zones d’attente et de rétention des aéroports, ports et frontières, et à recommander aux États Membres d’envisager de prendre les mesures nécessaires pour que ces zones ne deviennent pas des « zones de non-droit ».
Dans cette optique, le Rapporteur spécial recommande que la formation destinée à la police aux frontières comprenne un apprentissage des normes nationales et internationales relatives à l’interdiction de la discrimination raciale et de la xénophobie. Il encourage les gouvernements à s’abstenir d’adopter des mesures motivées par des « menaces pour la sécurité » qui puissent engendrer des discriminations, en particulier, fondées sur des motifs de race, de couleur, de langue, de religion, de nationalité, d’origine nationale ou ethnique. Il encourage également les gouvernements à prendre des mesures urgentes en vue d’assurer que toute personne en zone d’attente et susceptible d’être expulsée bénéficie des garanties de base, dont le respect des droits humains fondamentaux, y compris le droit d’obtenir une assistance juridique.
Le Représentant spécial rappelle aux gouvernements leur obligation de veiller à ce que nul ne soit renvoyé vers un pays où les violations des droits fondamentaux des personnes sont à craindre. Il attire l’attention sur la situation spécifique des mineurs se trouvant dans ces zones d’attente. Il estime qu’ils doivent bénéficier d’une attention spécifique afin de remédier aux problèmes constatés, qu’ils aient trait à l’application de la procédure légale, aux pratiques de l’administration ou au mauvais fonctionnement des procédures de prise en charge des mineurs isolés.
Le Rapporteur spécial invite les États Membres à agir de façon plus déterminée contre le racisme dans le sport, en s’engageant dans des activités d’éducation et de sensibilisation, ainsi qu’en condamnant très fermement les auteurs d’incidents racistes, en coopération avec les instances sportives nationales et internationales. Une collaboration plus institutionnelle et approfondie entre les organismes sportifs nationaux et internationaux et les Nations Unies devrait être établie. Il recommande à cet effet que, à l’occasion de la Coupe du Monde de football de 2006 en Allemagne, sur l’initiative de la FIFA et du pays hôte, un événement particulièrement significatif et symbolique soit organisé en collaboration avec les Nations Unies, notamment le Haut Commissariat aux droits de l’homme, afin de transmettre un message fort contre le racisme.
Le Rapporteur spécial réitère également la recommandation faite dans son rapport à la Commission, en vue d’encourager les instances sportives internationales à promouvoir la dimension nationale du combat contre le racisme et à demander aux fédérations nationales de leur soumettre des rapports annuels sur les incidents à caractère raciste et sur les mesures prises pour y répondre.
Le Rapporteur spécial estime, en dernière analyse, que le combat en profondeur et dans la durée contre le racisme et la violence en général dans le sport nécessite que les instances sportives nationales et internationales redonnent une plus grande vitalité aux valeurs fondamentales du sport et prennent des mesures contre les valeurs du nationalisme et de la dimension financière de la compétition sportive.
Rapport du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (A/60/263)
Dans son rapport, la Rapporteure spéciale donne une vue d’ensemble des activités qu’elle a menées, de l’orientation qu’elle a donnée à ses travaux et de la façon dont le groupe de travail peut poursuivre ceux-ci. Elle met l’accent sur le fait que sa démarche plutôt pragmatique s’est écartée de celle adoptée par son prédécesseur et a ouvert la voie à une remise en cause fondamentale de la question du mercenariat et de son rapport avec la promotion et la protection des droits de l’homme. En ce qui concerne le terme « mercenaire », elle recommande de revoir sur le fond et dans son ensemble la définition juridique du mercenaire et de ses activités.
Par ailleurs, elle propose un débat international au sujet de la Convention internationale contre le recrutement, l’utilisation, le financement et l’instruction de mercenaires. Conformément au mandat qui lui a été donné, la Rapporteure spéciale fait état des entretiens qu’elle a eus avec des sociétés militaires et de sécurité privées, et des efforts qu’elle a accomplis afin de promouvoir l’élaboration d’un code de conduite pour ce secteur d’activités, y compris au moyen de consultations avec des représentants des organisations concernées. La déclaration publiée à l’issue de la réunion qu’elle a tenue en juin 2005 à Londres avec les représentants de sociétés militaires et de sécurité privées est reproduite à l’annexe II de son rapport. La Rapporteure évoque également la situation actuelle de la Convention internationale et l’élaboration de lois nationales contre le mercenariat.
Lettre du 17 octobre 2005, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent du Yémen auprès de l’ONU (A/60/440)
Par cette lettre, est transmis le communiqué final de la réunion annuelle de coordination des ministres des affaires étrangères des États membres de l’Organisation de la Conférence islamique, tenue au Siège de l’ONU, le 23 septembre 2005.
Lettre du 25 octobre 2005, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent du Bélarus auprès de l’ONU (A/C. 3/60/4)
Par cette lettre, sont transmises des informations sur la situation des minorités nationales au Bélarus.
Rapport du Secrétaire général sur les efforts déployés au niveau mondial pour éliminer totalement le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée et pour assurer la mise en oeuvre intégrale et le suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban (A/60/307)
Dans son rapport, le Secrétaire général présente les activités menées par les États, le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, les organismes des Nations Unies, les institutions spécialisées, les organisations internationales et régionales, les institutions nationales de défense des droits de l’homme, les organisations non gouvernementales et les groupes et organisations de jeunes pour mettre en oeuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban adoptés par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.
Il montre que les nouvelles formes de racisme font l’objet d’une attention croissante. Les gouvernements réagissent plus souvent contre la cybercriminalité et la diffusion d’idéologies racistes par le biais de l’internet. En même temps, les gouvernements, les organisations intergouvernementales, les institutions nationales de défense des droits de l’homme et les organisations non gouvernementales utilisent l’internet pour informer le public des activités qu’ils mènent et diffuser des messages positifs sur l’égalité et la non-discrimination. Les crimes et incidents racistes font désormais davantage l’objet de rapports et d’activités de suivi, souvent assortis de statistiques. Enfin, se réjouit le Secrétaire général, les contributions montrent que le 21 mars, Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale, demeure un point de ralliement dans le monde entier.
Rapport du Secrétaire général sur le droit des peuples à l’autodétermination (A/60/268)
Dans son rapport, le Secrétaire général adopte une approche thématique pour présenter les violations des droits de l’homme commises contre le droit à l’autodétermination, résultant de l’intervention, de l’agression ou de l’occupation militaire étrangère. Il récapitule les faits nouveaux survenus lors de la soixante et unième session de la Commission, ainsi que les principes correspondants tirés de la jurisprudence du Comité des droits de l’homme.
Note du Secrétariat sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à l’autodétermination (A/60/319)
Dans cette note, le Secrétariat présente le mandat du groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice des droits des peuples à disposer d’eux-mêmes, composé de cinq experts, soit un par groupe régional, pour une période de trois ans. Ses fonctions sont:
- d’élaborer et présenter des propositions concrètes sur de nouvelles normes, de nouvelles directives générales ou de nouveaux principes fondamentaux susceptibles d’encourager une meilleure protection des droits de l’homme, en particulier du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, tout en faisant face aux menaces actuelles et nouvelles que présentent les mercenaires ou les activités ayant un lien avec les mercenaires;
- de solliciter l’avis et les contributions de gouvernements et d’organisations intergouvernementales et non gouvernementales sur des questions relatives à son mandat;
- d’observer les mercenaires et les activités ayant un lien avec les mercenaires dans les diverses formes et manifestations qu’ils revêtent dans différentes régions du monde;
- d’étudier et de dégager les questions, manifestations et tendances récentes concernant les mercenaires ou les activités ayant un lien avec les mercenaires et leurs incidences sur les droits de l’homme, en particulier sur le droit des peuples à l’autodétermination;
- d’observer et d’étudier les incidences des activités des sociétés privées qui offrent sur le marché international des services d’assistance, de conseil et de sécurité dans le domaine militaire sur l’exercice des droits de l’homme, en particulier le droit des peuples à l’autodétermination, et d’établir un projet de principes internationaux fondamentaux encourageant ces sociétés à respecter les droits de l’homme dans leurs activités.
Le Secrétariat indique les membres désignés pour participer au groupe de travail et précise que la première session aura lieu du 10 au 14 octobre 2005.
Rapport du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (A/60/18)
Dans son rapport, le Président du Comité indique que 170 États ont désormais ratifié la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Il présente:
- les rapports des États parties examinés par le Comité au cours de l’année écoulée, ainsi que diverses activités connexes;
- la situation dans plusieurs États parties au titre des mesures d’alerte rapide, de la procédure d’urgence et de la procédure de suivi;
- le débat thématique tenu par le Comité sur la prévention des génocides et la déclaration adoptée sur cette question;
- la suite à cette déclaration et la décision adoptée, définissant des indicateurs relatifs aux pratiques systématiques et massives de discrimination raciale;
- la recommandation générale formulée par le Comité concernant la prévention de la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement de la justice pénale;
- la question du multiculturalisme.
Le Président souligne que seuls 46 États parties ont fait la déclaration facultative reconnaissant la compétence du Comité pour
recevoir des communications au titre de l’article 14 de la Convention et, en conséquence, la procédure de présentation de communications individuelles, de même que la procédure de plaintes adressées entre États, sont sous-utilisées.
Il ajoute que seuls 39 États parties ont ratifié les amendements à l’article 8 de la Convention adoptée à la quatorzième Réunion des États parties, malgré les appels répétés de l’Assemblée générale les engageant à le faire. Ces amendements prévoient, entre autres, de financer le Comité sur le budget ordinaire de l’ONU. Le Président indique enfin que le Comité a adopté le mandat du coordonnateur chargé du suivi de ses conclusions et recommandations, et une procédure pour le suivi des opinions qu’il adopte en vertu du paragraphe 7 de l’article 14 de la Convention et a discuté de la réforme du système d’organes conventionnels.
Déclarations liminaires suivies de questions
M. CRAIG MOKHIBER, Représentant du Bureau de New York du Haut Commissariat aux droits de l’homme, a présenté les divers rapports du Secrétaire général sur le suivi de la Conférence de Durban qui montre que de nombreux acteurs ont eu recours au Programme d’action de Durban pour lutter contre le racisme et l’intolérance. De même, de nouvelles formes de racisme reçoivent davantage d’attention tandis que les gouvernements et la société civile ont recours à de nouvelles formes de communication, comme l’Internet, pour transmettre leur message d’égalité et de non-discrimination. En outre, il est clair que les crimes et incidents racistes sont de moins en moins ignorés. Le Haut Commissariat aux droits de l’homme a d’ailleurs inclus dans ses priorités la mise en œuvre du Programme d’action de Durban et a fourni une aide au suivi de la Conférence.
M. Mokhiber a aussi présenté le rapport du Secrétaire général sur le droit des peuples à l’autodétermination, ainsi que le rapport du Rapporteur spécial sur le recours aux mercenaires. Ce dernier a été nommé en 2004 et il s’agit de son deuxième et dernier rapport. Celui-ci attire l’attention sur les raisons motivant le recrutement de mercenaires et appelle à un examen de la nature des guerres modernes et des rôles et responsabilités de leurs divers acteurs. La Commission est aussi saisie d’une note préparée par le Secrétariat sur les travaux du Groupe de travail, relative au recrutement de mercenaires.
Dialogue avec le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée
M. DOUDOU DIÈNE, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui est associée, a attiré l’attention sur la complexité toujours plus grande du terrain de la discrimination en raison des amalgames qui sont faits dans la plupart des crises et des tragédies récentes. Dans ce contexte, il a rappelé qu’il avait souligné dans son rapport la nécessité d’accorder un traitement égal à toutes les formes de racisme et de discrimination sur la base de l’universalité de leur cause profondes en évitant ainsi leur hiérarchisation et en reconnaissant leur singularité et leur spécificités. Dans mon rapport, a précisé M. Diène, j’ai insisté sur la nécessité d’accorder une attention particulière à l’islamophobie créée par les évènements tragiques du 11 septembre. J’ai aussi souligné que d’autres formes graves de diffamation des religions, notamment l’antisémitisme et la christianophobie doivent faire l’objet d’une vigilance redoublée.
Le Rapporteur spécial a fait part d’une tendance inquiétante qui porte sur la banalisation et l’instrumentalisation du discours raciste et xénophobe dans les programmes politiques des partis démocratiques sous couvert de la lutte contre le terrorisme, de la défense de l’identité et de la préférence nationale ou du combat contre l’immigration illégale. Il faut aussi noter la régression de la volonté politique de nombreux gouvernements de combattre le racisme et la discrimination illustrée par le traitement, contraire aux normes internationales, des immigrants, demandeurs d’asile ou réfugiés, par les services de police et de sécurité, notamment dans les zones d’accueil et d’attente, dans les aérogares, les ports et les gares. Ces endroits sont caractérisés par l’absence de moyens de défense à disposition de groupes particulièrement vulnérables, l’utilisation par les forces de l’ordre de la violence physique et verbale de nature raciste, l’entassement, la promiscuité et l’absence de conditions sanitaires minimales.
Le Rapporteur spécial a condamné également les propos racistes tenus dans le milieu du sport et a incité les États Membres, en coopération avec les instances sportives nationales et internationales, à agir de manière plus déterminée contre le racisme. Il a dans ce contexte réitéré une de ses recommandations qui est d’organiser un évènement de nature internationale, significative et symbolique qui illustre la mobilisation internationale contre le racisme dans le sport à l’occasion de la Coupe du monde de football en 2006 en Allemagne.
À propos de ses visites au Brésil et au Japon, le Rapporteur spécial a estimé que ces deux pays, en acceptant sa mission de visite, avaient donné la preuve de leur engagement à lutter contre le racisme et la xénophobie. Au Brésil, a précisé le Rapporteur spécial, les communautés autochtones afro-brésiliennes, invisibles dans les structures de pouvoir politique, économique, social et médiatique restent sur la longue durée les victimes de marginalisation sociale et économique et de discrimination raciale. Mais en même temps, j’ai pu faire le constat des résultats du programme de discrimination positive mis en place dans le pays, notamment dans les universités. Le Japon de son côté est encore marqué par la réalité du racisme et de la xénopbobie. Outre les communautés Ainus et Burakumin, les minorités d’origine coréenne et chinoise ainsi que les nouveaux immigrés d’Asie, du Moyen-Orient et d’Afrique sont victimes de discrimination.
Le représentant de la Chine a dit prendre bonne note des observations faites par M. Diène au sujet du Japon. Il a dit approuver les conclusions selon lesquelles le racisme et la xénophobie sont une réalité de la société japonaise et ont des causes profondes qui sont reflétées dans la manière dont l’histoire est enseignée. De même, ce pays ne dispose pas de législation contre la xénophobie et le racisme. Il a demandé au Rapporteur spécial quelles étaient les propositions faites au gouvernement japonais pour remédier à ce fléau.
Le représentant du Brésil a reconnu que le rapport de M. Diène sur la situation des droits de l’homme au Brésil était exact. Il a demandé comment le Rapporteur spécial envisage le rôle du secteur privé pour assurer une plus grande diversité de la main d’œuvre sur le lieu de travail.
La représentante de la Côte d’Ivoire a demandé comment on pouvait classer son pays parmi les pays racistes et xénophobes quand on sait que 26 ethnies cohabitent en harmonie. La Côte d’Ivoire entend rester une terre d’accueil et ne connaît pas de tradition de xénophobie. Les faits que le Rapporteur spécial relate sont isolés et ne constituent pas des pratiques courantes. L’Assemblée nationale a par ailleurs adoptés plusieurs projets de loi sur notamment, le statut des étrangers.
La représentante de Cuba a appuyé l’idée du Rapporteur spécial selon laquelle il était nécessaire d’analyser en profondeur la question de l’islamophobie. Elle s’est aussi dite en faveur des mesures proposées pour promouvoir le multiculturalisme.
Le représentant de la République de Corée a évoqué la visite du Rapporteur spécial au Japon qui a constaté les formes de discrimination qui s’exercent contre les minorités ainsi que la manière dont l’histoire est enseignée.
Le représentante de la République populaire démocratique de Corée s’est dit préoccupé par la discrimination raciale qui s’exerce contre des ressortissants de pays étrangers au Japon. Il a demandé au Rapporteur spécial ce qu’il préconisait pour faire changer la situation.
Le représentant du Royaume-Uni qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, a demandé si le Rapporteur spécial entendait travailler dans le futur à la prévention du génocide et quelles mesures pouvaient être prises pour assurer une cohérence entre diverses organisations travaillant dans le cadre de la lutte contre le racisme. Quel rôle concret envisagez-vous pour la société civile?
Le représentant du Japon a assuré la Commission que son pays fournissait des efforts importants, notamment dans le domaine de l’éducation. Il a demandé au Rapporteur spécial quels pays il avait visité et comment il organisait ces visites, quels en sont les critères et quelles sont celles qu’il prévoyait à l’avenir?
Le représentant de l’Égypte a demandé au Rapporteur spécial s’il disposait d’éléments opérationnels qu’il pourrait partager avec les délégations. Il a également fait part de sa préoccupation face à l’islamophobie et a demandé quels étaient les efforts que la communauté internationale pourrait déployer pour lutter contre ce problème? Il a insisté sur le rôle de l’éducation dans la lutte contre l’extrémisme. La diffamation religieuse est-elle le fait de l’idéologie islamophobe a-t-il encore demandé?
Le Rapporteur spécial s’est félicité de la collaboration du Gouvernement japonais lors de sa visite, précisant avoir choisi ce pays, car, dans un contexte de montée générale du racisme, il lui semblait important d’étudier un pays marqué historiquement par son insularité culturelle, mais ayant une vocation internationale sur le plan économique, scientifique et culturel. Le Japon s’inscrivant en outre dans un processus long de « multiculturalisation », il souhaitait connaître les évolutions actuelles et les problèmes qu’elles soulèvent. Il a indiqué que, dans l’attente des réponses complémentaires du Gouvernement japonais, les propositions de son rapport étaient les suivantes. Il souhaiterait tout d’abord demander au Gouvernement japonais de renforcer son engagement politique de lutter contre le racisme et de se démarquer de façon claire des discours racistes et xénophobes tenus par le Gouverneur de Tokyo.
S’agissant de la manière dont l’histoire est enseignée et rédigée au Japon, dans la mesure où celle-ci participe du processus de construction identitaire du pays, il émettrait le vœu que cette histoire ne soit pas « autocentrée », qu’elle ne conduise pas à « démoniser » les peuples voisins -ce qui ne peut qu’aboutir à la discrimination et à la xénophobie-, mais qu’elle contribue à renverser l’image négative que les Japonais ont de leurs voisins coréens et chinois, montrant que ces pays ne sont pas seulement d’anciens pays colonisés, mais qu’ils ont joué un rôle fondateur dans la construction de l’identité du peuple japonais, étant l’une de leurs racines culturelles et religieuses majeures. L’histoire doit être un terrain de dialogue interculturel, a-t-il insisté. Il prônerait enfin l’adoption d’une législation nationale claire contre la discrimination et le racisme, dans la lignée de la Conférence de Durban, au-delà de la législation en cours d’élaboration au Japon sur les droits de l'homme.
Évoquant sa visite au Brésil, M. Diène s’est félicité de la volonté forte dont le Président Lula a fait montre au sujet de la lutte contre le racisme et les discriminations raciales. De fait, si les rues des villes brésiliennes sont multiculturelles et multicolores, les cercles du pouvoir restent exclusivement blancs. Là comme ailleurs, la carte de la pauvreté se confond avec la carte de la marginalisation des gens de couleur. La politique brésilienne de discrimination positive est donc une initiative très importante, a-t-il estimé.
À cet égard, il a insisté sur l’importance que la problématique du racisme ne soit pas seulement prise en charge par les appareils d’État, mais également par la société civile et le secteur privé. Au Brésil, certains représentants de l’État, notamment le Procureur d’État, sont sensibles aux fortes résistances que manifeste le secteur privé contre la politique de discrimination positive. Il convient donc de veiller à inclure les entreprises dans l’ensemble des politiques nationales contre le racisme et même de leur demander, dans le respect de leur autonomie, de mettre également en œuvre, de manière volontaire et civique, la politique de discrimination positive.
Répondant à la représentante de la Côte d’ivoire, il a reconnu que le long processus de construction de ce « pays-région » avait amené les différentes cultures et ethnies qui le composent à s’unir profondément, si bien que le multiculturalisme, qui est consubstantiel à la Côte d’Ivoire, a pendant longtemps empêché la marginalisation de certaines cultures. Tout montre, cependant, dans la récente crise ivoirienne, qu’une dynamique xénophobe s’est enclenchée, tant au sein de l’État que parmi les forces de l’opposition, dynamique qui cible volontairement des groupes ethniques précis. M. Diène s’est ainsi inquiété que les acquis multiculturels de ce pays soient en train de changer et en a appelé à la plus grande vigilance, afin d’éviter que des pratiques, liées à un conflit, ne se transforment en système.
M. Diène a par ailleurs déclaré que l’islamophobie était la forme la plus grave de discrimination, à l’heure actuelle, faisant référence à la tentative, dans de nombreux pays, d’identifier l’Islam au terrorisme. Certaines pratiques politiques et administratives, non seulement ostracisent les croyants, mais l’Islam lui-même comme religion, a-t-il souligné, estimant que ce danger grave devait être reconnu par l’Assemblée générale. Il a indiqué que la Commission des droits de l'homme lui avait demandé un rapport spécial sur ce sujet, annonçant qu’il participerait à Valence, fin novembre 2005, à une réunion de chercheurs sur la question, afin de recueillir toutes les données permettant d’établir un rapport complet et objectif. Il a ajouté que la christianophobie et d’autres formes de phobies à l’égard de différentes croyances religieuses étaient également indéniables dans certains pays, ce qui témoigne du développement d’une dynamique dangereuse. La séparation de l’Église et de l’État, qui fut un progrès en son temps, tend en effet à dériver vers une opposition à l’expression légitime de toute croyance religieuse. Il convient ainsi d’éviter la prétendue inéluctabilité de l’affrontement entre les cultures et les religions, telle que la brandit, par exemple, Samuel Huntington, en faisant preuve d’une extrême vigilance et en traitant toutes les phobies sur le même plan.
M. Diène a également estimé que les déclarations politiques xénophobes existeront toujours, car elles sont « rentables » sur le plan électoral. Ce qui est plus grave, a-t-il relevé, c’est que, par le biais du combat contre le terrorisme, contre l’immigration clandestine et pour l’identité nationale, ces programmes racistes imprègnent progressivement les programmes des autres partis, ceux-ci ayant baissé la garde à l’égard de ces thèses xénophobes, et ce, dans tous les pays et sur tous les continents. À cet égard, il a indiqué que le Brésil avait demandé et fait voter la rédaction d’un rapport sur la démocratie et le racisme, qui prenne en compte cette dimension.
Le Rapporteur spécial a enfin souligné que le moteur central du racisme actuellement, était le refus du multiculturalisme, y compris dans des pays insulaires comme le Japon. La plupart des racismes découlent en effet du refus d’une dynamique multiculturelle, qui est pourtant irrépressible dans la plupart des pays, a-t-il affirmé. Or le concept théorique identitaire, qui a fondé les États-nations au XIXe siècle, ne reflète plus la réalité de la rue. L’Union européenne, en concentrant sa construction sur les aspects politiques et économiques, a ignoré la question de son identité. Il est donc impératif, selon lui, qu’elle prenne en compte le fait que celle-ci ne peut plus se fonder sur la réalité de l’Europe du XIXe siècle, mais doit intégrer le multiculturalisme qui caractérise aujourd’hui la région.
M. Diène a ainsi recommandé que le combat contre le racisme soit davantage lié à l’élaboration de sociétés multiculturelles. En effet, la lutte contre la xénophobie ne peut être une fin en soi, mais doit s’accompagner de la promotion d’un multiculturalisme, qui ne soit pas communautaire -chaque communauté vivant côte à côte, sans relations-, mais unitaire.
Débat général
M. ADAM THOMSON (Royaume-Uni), prenant la parole au nom de l’Union européenne et des pays associés, a dit approuver comme principe fondamental le fait que tous les hommes et femmes naissent libres et égaux. Le racisme, la xénophobie sont autant de remise en question des principes fondateurs des Nations Unies. La Convention est un instrument vivant et le Comité contre la discrimination raciale en a montré la pertinence. Nous exhortons les États à mettre en œuvre ces dispositions et à mettre en œuvre au plan national des plans de lutte contre les manifestations du racisme. La Déclaration et le Programme d’action de Durban nous ont donné les moyens de lutter contre ces fléaux et nous avons été heureux de participer au Groupe de travail sur la mise en œuvre du Programme de travail de Durban. Nous regrettons que les États Membres de la Commission des droits de l’homme n’aient pas été en mesure de respecter la règle du consensus.
Le terrorisme constitue le défi le plus urgent et nous devons nous assurer que nos efforts sur le plan international soient compatibles avec le droit international. Nous réaffirmons l’appel lancé lors de la Conférence pour qu’aucune forme de racisme et de xénophobie ne soit tolérée. Le représentant a souligné l’importance de lutter contre les discriminations dont sont victimes les femmes, les fillettes et les groupes minoritaires. Il a insisté sur le rôle de l’éducation qui peut aider à comprendre les autres religions du monde. De plus en plus de mouvements adoptent une posture raciste sous prétexte de défendre l’identité nationale, a –t-il relevé. Nous sommes aussi préoccupés par le fait que les médias et notamment l’Internet soient utilisés comme moyens de propagande. Le représentant a indiqué que son pays avait adopté une législation interdisant les discriminations basées sur la religion, le sexe, la race ou toute autre forme. L’Union européenne par ailleurs finance d’autres initiatives, comme le Centre européen de lutte contre le racisme et la xénophobie, qui coopère avec la Commission européenne de lutte contre l’intolérance.
M. STAFFORD NEIL (Jamaïque), au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a estimé que la question du racisme et de la discrimination raciale doit occuper une place centrale dans les débats de la Commission. La Déclaration de Durban et son Programme d’action sont le résultat de négociations intenses mais équilibrées et impartiales. Aucun pays n’avait été visé. Le représentant s’est dit satisfait de voir que les pays agissent avec plus de détermination contre la cyber-criminalité dans la mesure où les progrès dans les domaines des communications pourraient servir de médium à la propagande raciste. Il a estimé regrettable que la lutte contre le terrorisme ait malheureusement donné la possibilité à certains partis politiques d’adopter des programmes racistes xénophobes en faisant la promotion du concept de « préférence nationale ».
Le représentant s’est également prononcé pour que les dirigeants sportifs dénoncent les comportements racistes lors de manifestations sportives. Il a estimé qu’outre l’holocauste, la communauté internationale devrait commémorer officiellement d’autres formes de racisme et de xénophobie comme l’esclavage de millions d’Africains et a souhaité que les Nations Unies prennent des mesures à cet égard. Il est également important que la lutte contre le racisme donne l’occasion de se pencher sur les inégalités socio-économiques du passé. Nous présenterons à cet égard un projet de résolution sur la mise en œuvre complète du Programme d’action de Durban.
M. LA YIFAN (Chine) a déclaré que le racisme était l’une des formes les plus graves de violation des droits de l'homme et était l’une des causes majeures de la discrimination, de la pauvreté et des conflits armés. Les gouvernements devraient ainsi lutter contre les formes modernes et traditionnelles de racisme, tandis que les organes de l’ONU devraient soutenir le travail du groupe d’experts sur la mise en œuvre du programme d’action de Durban, a-t-il déclaré. Il s’est félicité des recommandations formulées par le Rapporteur spécial, notamment à la suite de visites dans certains pays. Il a souligné l’intérêt de ses observations sur le traitement des étrangers dans les zones d’attente, des demandeurs d’asile et les réfugiés. Il a enfin déclaré soutenir le droit du peuple palestinien à l’autodétermination.
M. IMITIAZ HUSSAIN (Pakistan) a déclaré que la situation faite aux réfugiés et aux immigrants dans les aéroports et les centres de demandes d’asile mettait en évidence une montée en puissance du racisme. Il s’est dit préoccupé par les discours tenus contre l’Islam et les musulmans, qui se sont concrétisés par des attaques contre des lieux de culte, la fermeture de centres sociaux et culturels, des actes de discrimination raciale et une entrave aux droits civiques des musulmans dans de nombreux pays. Or ces pratiques ont influé négativement sur les relations intercommunautaires, a-t-il souligné. Si la plupart des gouvernements ont pris conscience de la nécessité de lutter contre les discriminations, leurs politiques restent souvent peu effectives, a-t-il par ailleurs déploré.
Le représentant a également estimé que l’occupation étrangère représentait une forme brutale de discrimination, se manifestant par un mépris à l’égard des peuples occupés, un refus du droit à l’autodétermination, mais aussi par la misère et la souffrance. Il a enfin mis en cause les campagnes de haine qui, dans certains pays, ont ciblé certaines personnalités éminentes, comme le prophète Mahomet, et certaines valeurs traditionnelles de l’Islam. Il a déclaré que celles-ci devraient être condamnées par la communauté internationale, notamment dans un souci de préserver la paix et les relations amicales entre États.
M. MOHAMED ELBADRI (Égypte) a estimé que l’intolérance et la haine vont à l’encontre des principes humanistes sur lesquels reposent les Nations Unies. Les efforts de l’Organisation, a-t-il rappelé, ont permis de conclure deux traités internationaux de promotion des droits de l’homme et d’adopter un Programme d’action. Les deux rapports du Secrétaire général et celui du Rapporteur spécial montrent que ce phénomène se maintient en évoquant un recul de la conscience internationale. Nous assistons à l’émergence de nouveaux mouvements fanatiques de l’extrême droite menant à l’oppression de certaines communautés notamment les communautés arabes et musulmanes. Nous assistons au recul de la lutte contre la discrimination raciale et la xénophobie en raison des mesures prises par certains gouvernements pour lutter contre le terrorisme. De même, certains gouvernements ferment les yeux sur la diffamation dont est victime l’Islam. Les États doivent adopter des cursus scolaires qui enseignent la tolérance et l’égalité et mettre en place des mécanismes d’alerte précoce face aux agissements de mouvements fascistes et xénophobes.
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