LA TROISIÈME COMMISSION RECOMMANDE DE MODIFIER SUR UNE BASE TEMPORAIRE LES MÉTHODES DE TRAVAIL DU CEDAW
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Troisième Commission
28e et 29e séances – matin et après-midi
LA TROISIÈME COMMISSION RECOMMANDE DE MODIFIER SUR UNE BASE TEMPORAIRE LES MÉTHODES DE TRAVAIL DU CEDAW
Elle entend les déclarations de trois Rapporteurs
spéciaux, d’un Représentant du Secrétaire général et d’un Expert indépendant
La Commission sociale, humanitaire et culturelle (Troisième Commission) a adopté cet après-midi deux projets de résolution sur la promotion des femmes.
La Commission a recommandé d’autoriser le Comité pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), à titre exceptionnel et temporaire, à compter du 1er janvier 2006, de tenir trois sessions annuelles de trois semaines chacune. Elle a également recommandé d’autoriser le Comité, toujours à titre exceptionnel et temporaire, à se réunir en 2006 et 2007, pendant sept jours au maximum, en groupes de travail parallèles au cours de sa troisième session annuelle de 2006 et de ses première et troisième sessions annuelles de 2007.
L’adoption de ce projet de résolution par 160 voix pour et 1 voix contre, celle des États-Unis, a donné lieu, à la demande de ces derniers, à des votes distincts sur les deux paragraphes pertinents. Expliquant son vote, la représentante des États-Unis a déclaré que son pays n’est pas partie à la Convention et qu’une telle augmentation des coûts engendrés par ces décisions n’est pas acceptable. Elle a également dit ne pas pouvoir accepter l’appel lancé aux États pour qu’ils ratifient la Convention, ainsi que l’expression de satisfaction exprimée au paragraphe 3 sur l’augmentation du nombre de ratifications à son protocole.
Le CEDAW a la charge d’étudier les rapports que lui présente tous les quatre ans chacun des 170 États parties à a la Convention, sur les mesures d'ordre législatif, judiciaire, administratif qu'ils ont adoptées pour lutter contre les discriminations à l’égard des femmes dans leur pays et sur les progrès réalisés à cet égard. Le Comité a cependant accumulé, au cours des dernières années, un certain retard dans l'examen des rapports.
L’autre projet de résolution, adopté sans vote, portait sur l’amélioration de la condition de la femme en milieu rural.
La Troisième commission a également poursuivi l’examen des rapports, en portant tout d’abord son attention sur les droits de l’homme des réfugiés, des personnes déplacées dans leur pays et des Palestiniens.
Le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants, M. Bustamante, a indiqué que la Convention internationale sur les droits de travailleurs migrants et leurs familles venait d’entrer en vigueur et qu’elle constituait désormais un instrument juridiquement contraignant pour les 34 États qui l’ont ratifiée.
Le Représentant du Secrétaire général sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur pays, M. Kälin, a, pour sa part, rappelé la responsabilité qui incombait aux États de protéger ces personnes et a déploré que, malgré les efforts déployés, l’année écoulée n’avait pas vu le nombre de personnes déplacées diminuer.
Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme des Palestiniens dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, M. Dugard, s’est félicité que le retrait de la bande de Gaza se soit déroulé dans de bonnes conditions. Il a toutefois indiqué que Israël est toujours puissante occupante, dans la mesure où elle continue à contrôler les frontières et le couloir aérien du territoire et à entraver la circulation des marchandises avec l’extérieur. Dans ces conditions, a-t-il souligné, le Gouvernement israélien a toujours des obligations humanitaires à remplir à l’égard des Palestiniens. Il a en outre demandé au Conseil de sécurité, à l’Assemblée générale des Nations Unies et au Quatuor d’entériner l’avis consultatif rendu par la Cour internationale de Justice, par lequel le mur construit par Israël sur les territoires occupés a été déclaré illégal.
La Troisième Commission a également entendu le Rapporteur spécial sur le droit de toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mental possible, M. Hunt, qui a souligné l’inquiétante fuite des compétences des professionnels de la santé, qui tend à remettre en cause la réalisation du droit à la santé dans les pays en développement. Il a souligné que les pays développés avaient la responsabilité d’aider, sur une base partenariale, les pays en développement à atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement en matière de santé.
L’Expert indépendant sur les effets des politiques de réforme économique et de la dette extérieure sur la jouissance effective de tous les droits de l’homme, en particulier les droits économiques, sociaux et culturels, M. Nyamwaya Mudho, a, pour sa part, considéré qu’à l’heure de la mondialisation, il était nécessaire d’adopter une perspective globale des problèmes économiques et sociaux que rencontrent les pays fortement endettés et que le Consensus de Monterrey constituait, à cet égard, un pas historique dans la bonne direction.
En début de séance, la Commission avait entendu les réponses de la République populaire démocratique de Corée, à la suite de la présentation faite la veille par le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans ce pays.
La Commission a également été saisie de deux projets de résolution, l’un portant sur les tortures et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (A/C. 3/60/L. 25), présenté par le Danemark, l’autre sur les principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire (A/C. 3/60/L. 24), présenté par le Chili.
La Troisième Commission reprendra ses travaux lundi 31 octobre à 10 heures.
QUESTIONS RELATIVES AUX DROITS DE L’HOMME
- QUESTIONS RELATIVES AUX DROITS DE L’HOMME, Y COMPRIS LES DIVERS MOYENS DE MIEUX ASSURER L’EXERCICE EFFECTIF DES DROITS DE L’HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES
- SITUATIONS RELATIVES AUX DROITS DE L’HOMME ET RAPPORTS DES RAPPORTEURS ET REPRÉSENTANTS SPÉCIAUX
- RAPPORT DE LA HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L’HOMME
Suite du dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans la République populaire démocratique de Corée
Au représentant du Canada qui se déclarait préoccupé par l’internement, la torture et les exécutions dont sont victimes les ressortissants de RPDC qui ont été rapatriés de l’étranger, M. Muntarbhorn a lancé un appel aux pays voisins pour qu’ils adoptent une attitude humanitaire envers ces réfugiés, en ne les refoulant pas dans leur pays d’origine. Il a notamment insisté pour que les femmes, qui font souvent l’objet de traite et d’exploitation sexuelle, ne soient pas considérées comme des immigrantes illégales, mais comme des victimes. Le représentant du Japon a, pour sa part, demandé à la communauté internationale de prendre des mesures pour régler la question de la rétention de ressortissants japonais en RPDC. Interrogé par ailleurs par plusieurs délégations sur les démarches qu’il avait entreprises pour établir un dialogue avec la RPDC, le Rapporteur spécial a indiqué avoir fourni des efforts constants en ce sens depuis qu’il a été nommé. Il a précisé avoir été reçu non officiellement à la mi-2004 par les autorités du pays, non en tant que Rapporteur spécial des Nations Unies, mais comme Professeur. Il a alors assuré le Gouvernement de son indépendance et du fait que sa seule préoccupation était les droits de l’homme. Il lui a envoyé son rapport avant qu’il soit publié, mais celui-ci l’a rejeté. Il a affirmé qu’il poursuivrait ses efforts, espérant un jour être reçu dans le pays. Au représentant des États-Unis qui lui demandait quelles mesures lui paraissaient prioritaires, le Rapporteur spécial a indiqué que toutes les recommandations qu’il avait émises dans son rapport, ainsi que l’ensemble de celles édictées par les organes conventionnels qui veillent à l’application des traités dont la RPDC est partie, lui paraissent réalisables, en particulier le respect du droit à l’alimentation et des libertés civiles, mais aussi l’amélioration du système judiciaire, qui pourrait commencer par l’acceptation de la coopération technique du Bureau du Haut Commissariat aux droits de l’homme.
Le représentant de la République populaire démocratique de Corée a déclaré que son pays rejetait totalement le rapport et la résolution portant mandat du Rapporteur spécial, estimant que celui-ci opérait des distorsions de la réalité, en se fondant uniquement sur les « mensonges » des ONG. Il a estimé que le rapport et la résolution constituaient des tentatives de renverser le système socialiste en vigueur en RPDC, en prenant pour prétexte la question des droits de l’homme. Les limites ont été dépassées, s’est-il exclamé, accusant les États-Unis et l’Union européenne de soutenir des ONG hostiles à PyongYang pour leurrer l’opinion publique mondiale et inciter le peuple de RPDC à l’émeute contre la soi-disant tyrannie de son Gouvernement. Il a enfin déclaré être déterminé à répondre à la bonne volonté par la bonne volonté et à la confrontation par la confrontation. C’est sur cette base que le Gouvernement refuse la venue de M. Muntarbhorn, mais qu’il a accepté la visite, en 2004, du Comité des droits de l’enfant et du Comité de la CEDAW.
La représentante de Cuba s’est quant à elle, interrogée sur la véracité des informations données sur la situation en RPDC, qui ne se fondent que sur les allégations d’ONG, ce qui tend, selon elle, à remettre en cause l’impartialité et l’objectivité du rapport. Elle a fait part de son hostilité à toute volonté de manipulation politique visant à exercer des pressions contre un Gouvernement souverain. Le représentant de la Chine, tout en reconnaissant la bonne foi de M. Muntarbhorn, a abondé dans le sens des deux orateurs précédents, ajoutant que la résolution de la Commission des droits de l’homme qui lui a confié ce mandat montre la politique à géométrie variable que celle-ci applique et est une nouvelle preuve de son discrédit.
En réponse à ces propos, M. MUNTARBHORN a insisté sur sa volonté de maintenir une approche indépendante, constructive et courtoise, rappelant qu’il n’avait pas sollicité ce mandat et que son seul souci était d’apporter sa contribution au plein exercice des droits de l’homme. Il a assuré avoir reçu ses informations de représentants de gouvernements, d’ONG et d’organisations des Nations Unies, dont les opinions à l’égard du régime en vigueur en RPDC sont variables. Il a émis le vœu qu’un dialogue serein puisse être trouvé avec les autorités de PyongYang.
Déclarations liminaires et dialogue
M. JORGE BUSTAMANTE, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants, a indiqué qu’il avait été nommé il y a trois mois. Il a estimé que les politiques gouvernementales en faveur des migrants doivent aller au-delà du simple contrôle des frontières et doivent tenir compte de la dimension des droits de l’homme. La Convention internationale sur les droits de travailleurs migrants et leurs familles est désormais entrée en vigueur et constitue un instrument juridiquement contraignant pour les 34 États qui l’ont ratifiée. Le premier rapport qui sera examiné en décembre 2005 sera celui du Mali. Le Rapporteur a dit son intention de s’acquitter de son mandat conformément aux procédures spéciales de la Commission des droits de l’homme et a l’intention de mettre l’accent sur les marchés de l’emploi afin de faire la lumière entre les migrations internationales et les droits de l’homme. Le Rapporteur a également précisé que son travail s’articulera autour des communications d’individus sur des violations de leurs droits de l’homme. J’ai l’intention d’établir un dialogue avec les gouvernements, les ONG et les représentants de la société civile, les migrants eux-mêmes et tous les acteurs des migrations internationales.
Le représentant du Pakistan a dit à quel point ce mandat était important, compte tenu des 200 millions de migrants que compte le monde. Il a dit approuver le cadre juridique établi par le Rapporteur spécial pour lancer ses activités tout en lui demandant de se pencher sur la violence faite aux femmes et aux enfants ainsi que la question du regroupement familial des travailleurs migrants. Le représentant du Brésil a demandé des précisions sur la différence faite entre ressortissants et non ressortissant en rappelant que les droits de l’homme sont universels et que les États se sont engagés au titre de la Convention au respect des droits de tous les individus se trouvant sur leur territoire et sous leur juridiction. La représentant du Mexique a demandé au Rapporteur comment il envisageait les modalités de son dialogue avec les acteurs concernés. De son côté le représentant du Royaume-Uni, s’exprimant au nom de l’Union européenne, a demandé au Rapporteur s’il avait l’intention de modifier les priorités thématiques de son prédécesseur et s’il avait identifié des pratiques optimales pour lutter contre la traite des migrants. Quels sont selon vous les liens entre migrations et droits de l’homme? Le représentant du Koweït a fait remarquer que, dans son rapport, le Rapporteur spécial précise que ses méthodes de travail tiennent compte du fait que les États et pouvoirs publics se refusent à reconnaître l’existence d’une demande de main d’œuvre de la part des pays d’accueil. Le représentant a estimé que cette hypothèse n’était pas très précise et pouvait induire en erreur. On ne peut pas non plus généraliser cette hypothèse à tous les pays
Le Rapporteur spécial a expliqué que selon lui, il existe une dialectique entre deux actes de souveraineté des sociétés d’accueil, une dialectique qui est reflétée par les droits accordés aux citoyens des pays et ceux accordés aux travailleurs migrants. Cette question sera développée dans son prochain rapport. Cette dialectique est en contradiction avec l’engagement pris par les États de respecter les droits de l’homme de toute personne, indépendamment de ses origines. Il a indiqué qu’il tentera aussi de clarifier dans son prochain rapport le lien entre nationalité et citoyenneté. Il a aussi dit son intention de travailler sur la question du lien entre différents groupes vulnérables, notamment les femmes et les enfants.
M. JOHN DUGARD, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans le territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, a déclaré que, malgré le retrait récent de la bande de Gaza, Israël poursuivait son expansion en Cisjordanie et continuait de perpétrer des violations des droits de l’homme contre le peuple palestinien.
Il a rappelé qu’en août et septembre 2005, Israël avait procédé avec succès au retrait des colonies de la bande Gaza, ce dont il s’est félicité, d’autant que les conditions de cette opération ont été satisfaisantes. En effet, les difficultés que l’on pouvait craindre à ce sujet ne se sont pas réalisées, a-t-il relevé. Il a cependant également indiqué que, même si cette portion de territoire n’est plus colonisée, Israël continue d’en contrôler les frontières et le couloir aérien et d’entraver la circulation des marchandises avec l’extérieur. Il a également déclaré que dans les semaines qui ont suivi le retrait, Israël avait repris ses bombardements intensifs et ses assassinats ciblés. De plus, de nombreux prisonniers de Gaza continuent d’être détenus dans les prisons israéliennes. L’occupation restant une réalité, Israël est toujours puissante occupante et continue donc d’être assujettie à des obligations humanitaires, notamment en veillant à ne pas entraver l’accès des habitants de Gaza aux soins médicaux et à différentes ressources. Force est pourtant de constater que tel n’est pas le cas, a-t-il poursuivi.
Le Rapporteur spécial a par ailleurs indiqué que la prédiction selon laquelle Israël utiliserait cette opération pour détourner l’attention de la communauté internationale de l’extension des colonies en Cisjordanie et de la construction du mur, s’est réalisée. Le mur une fois achevé devrait mesurer 750 km de long, dont seulement 150km correspondront à la Ligne verte. 240 km sont déjà achevés, qui pénètrent largement sur le territoire palestinien. Or ce mur ne peut que contribuer à diviser la Palestine en cantons et empêcher l’unité du territoire, a-t-il affirmé. La justification de cette mesure, fondée sur des raisons de sécurité, a été validée par la Haute Cour de justice israélienne. Le Rapporteur spécial a cependant déclaré que la protection des colons aurait pu être assurée en respectant le tracé de la Ligne verte. Apparemment, le tracé choisi visait en réalité à englober les principales implantations d’Israéliens, a-t-il estimé. De fait, 76% des colons de Cisjordanie sont désormais inclus par ce tracé. Il a ajouté que la faille du raisonnement de la Haute Cour israélienne était qu’elle ne se penchait pas sur la question du caractère illégal des implantations. Il en résulte que le mur sera maintenu tant que les colons resteront. Il s’agit d’une annexion de facto de la portion de territoire intégrée par la construction du mur, a-t-il conclu.
M. Dugard a en outre déclaré qu’Israël utilisait également le mur pour modifier le visage de Jérusalem-Est, notamment en réduisant le nombre de Palestiniens habitant dans la ville -dès lors que ceux-ci perdront leur statut d’habitants de Jérusalem-Est et seront transférés en Cisjordanie. Déjà, 184 000 colons israéliens sont présents à Jérusalem-Est et ce chiffre augmentera avec l’annexion prochaine d’une importante implantation. L’un des objectifs de cette politique semble être ainsi de faire de Jérusalem-Est une ville juive et d’empêcher que les palestiniens puissent en faire leur capital, a déclaré le Rapporteur spécial, ajoutant que le mur servait non seulement les seuls intérêts des colons israéliens, mais qu’il engendrait également des violations des droits de l’homme des Palestiniens, à différents niveaux. Tout d’abord, le mur contredit leur droit à l’autodétermination en fragmentant le territoire palestinien et en compromettant ainsi la viabilité d’un futur État. Ensuite, les Palestiniens qui vivent sur la portion de territoire comprise entre le mur et la Ligne verte subissent de nombreuses discriminations. Les permis qui leur sont imposés et les postes de contrôle entravent leur liberté de circulation. La liberté de la personne est compromise par les nombreuses arrestations de Palestiniens (700 ces dernières semaines), qui s’accompagnent de mauvaises conditions de détention, mais aussi de tortures et d’assassinats ciblés de militants. De plus, la moitié des Palestiniens vivent en dessous du seuil de pauvreté, ils ont vu leur accès aux soins de santé et à l’éducation constamment détérioré, tandis que la destruction de maisons palestiniennes lors des opérations de sécurité israéliennes a crée de nombreux sans-abri.
Le Rapporteur spécial a en outre rappelé qu’en 2004, la Cour internationale de Justice (CIJ) avait estimé que le mur était illégal, de même que les implantations, et que de nombreuses pratiques israéliennes dans le cadre de l’occupation étaient contraires au droit humanitaire et aux droits de l’homme. Il a engagé la communauté internationale à transformer cet avis consultatif en action politique. Or, pour l’heure, a-t-il déploré, le Conseil de sécurité refuse de l’entériner. De même, le Quatuor chargé de faire progresser la paix dans la région ne mentionne pas l’avis consultatif dans son rapport, où le mur est qualifié de simple « barrière de séparation ». Il a estimé qu’il était difficile de comprendre que l’ONU accepte une déclaration qui est manifestement contraire à l’interprétation de son organe judiciaire et l’a enjoint à émettre une opinion qui incarne le droit des Nations Unies.
Le représentant d’Israël a déclaré que son pays soulignait depuis plus de dix ans le problème du mandat du Rapporteur spécial, qui tend à n’examiner le problème que d’un seul point de vue. Il a regretté que, dans son rapport, comme dans ses déclarations dans les médias, le Rapporteur spécial utilise son mandat pour servir ses propres opinions politiques, qui sont fondées sur des a priori. Il a regretté que le rapport ne favorise pas un dialogue qui aurait pu être renoué à la suite du retrait de la bande de Gaza. Il a ensuite relevé un certain nombre d’inexactitudes dans le rapport, notamment relatives aux prédictions alarmantes qui avaient été faites avant le retrait. Il a indiqué que le Président de l’Autorité palestinienne lui-même estimait que ces rapports étaient problématiques et a déploré que le Rapporteur spécial ne mentionne pas la menace grave que représente pour Israël les intentions de l’Iran de rayer son pays de la carte.
M. DUGARD a reconnu avoir un programme politique à défendre, mais a souligné qu’il ne visait qu’un seul but: le respect des droits de l’homme et du droit humanitaire international, mais aussi la création de deux États vivants côte à côte et en paix. Il a cependant le sentiment que la volonté d’Israël n’est pas de promouvoir réellement cette solution. S’il a admis que le retrait de Gaza s’était bien passé, il a souligné que le représentant d’Israël n’avait pas nié que l’occupation y persistait. Il a également estimé injuste d’avoir été placé sur le même plan que le Président iranien, n’ayant jamais proposé de faire disparaître Israël et appuyant la création de deux États.
Aux questions de la représentante de la Palestine et de nombreuses délégations du Moyen-Orient, qui s’inquiétaient du non-respect par Israël de l’avis de la CIJ et du retard dans la création du registre sur les dégâts causés par la construction du mur, M. Dugard a déclaré qu’il était malheureux que l’ONU ne traite pas cette question en priorité. Il a estimé que le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale devraient approuver l’avis consultatif, tandis que le Quatuor devrait jouer un rôle plus actif pour mettre un terme à la construction du mur. Aux inquiétudes manifestées par ces mêmes délégations sur la situation des droits de l’homme dans les territoires occupés, le Rapporteur spécial a répondu que si la construction du mur était stoppée et que les tronçons déjà édifiés étaient démantelés, cela améliorerait les conditions de vie des Palestiniens vivant entre le mur et la Ligne verte et à proximité. Leurs droits humains seraient également mieux respectés si les contrôles cessaient et que le couvre-feu était levé pour que l’économie palestinienne ait une chance de se développer normalement. Il a conclu que Israël et le Quatuor devraient aborder ces questions de façon plus décidée.
En réponse au Royaume-Uni, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, M. Dugard a déclaré qu’en l’absence de coopération du Gouvernement israélien, il n’était pas en mesure de s’exprimer avec précision sur les conditions de détention des 8 000 prisonniers palestiniens en Israël. Il a cependant indiqué avoir reçu des informations alarmantes, notamment d’ONG israéliennes. À la question du Venezuela, il a par ailleurs indiqué que l’accès à l’eau était l’une des questions les plus importantes au Moyen-Orient, précisant que, la zone bouclée entre la Ligne verte et le mur comprenant de nombreux puits, la construction du mur avait grandement réduit l’accès des Palestiniens à ces ressources. La représentante des États-Unis s’est, quant à elle, déclarée surprise que le Rapporteur spécial présente un rapport aussi partial et ne reconnaisse pas les obligations des deux parties. Comme le représentant israélien, elle a souligné que les Palestiniens et les Israéliens s’étaient engagés à régler la situation par le dialogue et que le Rapporteur spécial ne faisait que critiquer les efforts déployés de part et d’autre pour trouver une solution pacifique et durable, à laquelle les États-Unis entendent contribuer.
M. DUGARD a estimé que la réunion de la Troisième Commission était l’occasion de demander à la représentante des États-Unis la manière dont son pays considérait l’avis rendu par la CIJ, indiquant qu’il semblerait qu’il ne l’ait pas apprécié. Or, il apparaîtrait que le Gouvernement américain soit en mesure d’imposer son point de vue aux autres membres du Quatuor.
M. WALTER KÄLIN, Représentant du Secrétaire général chargé de la question sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays, a rappelé la responsabilité qui incombe aux États de protéger ces personnes. Il est triste de constater que malgré les efforts consacrés, l’année écoulée n’a pas vu de réduction du nombre de personnes déplacées dans leurs propres frontières. Des pays comme le Soudan, en particulier le Darfour où il y a plus de 2 millions de déplacés, et l’Ouganda du nord ont fait la une des journaux. Mais d’autres pays connaissant des problèmes importants comme le Népal, les Balkans, le sud Caucase ou le Pérou qui ont disparu des écrans de télévision. Avec le tsunami, les tremblements de terres, les inondations et les ouragans, la communauté internationale est devenue progressivement consciente de l’aide dont avaient besoin des millions de personnes déplacées. Elle n’a reconnu que lentement que ces personnes appartenaient à cette catégorie et qu’ils avaient eu aussi besoin d’une protection à long terme. La destruction des bidonvilles au Zimbabwe a par ailleurs montré que bien que légitimes, tout projet de rénovation urbaine doit se faire dans le respect des droits de l’homme.
L’approche globale adoptée par les directeurs interinstitutions des Nations Unies devrait permettre de combler des lacunes. Le Représentant s’est félicité de l’accord selon lequel le Haut Commissariat pour les réfugiés prendra la direction des efforts pour venir en aide aux personnes déplacées dans des situations particulièrement complexes. Il a précisé que jusqu’à ce jour son mandat a été bien accueilli dans les pays visités. Le dialogue avec les donateurs est également une partie importante de son mandat. M. Kälin a demandé instamment au Gouvernement du Népal ainsi qu’au parti maoïste de respecter les droits de l’homme pour que les individus ne soient pas forcés de quitter leur foyer et il a demandé au gouvernement de reconnaître sa responsabilité principale dans le déplacement à grande échelle de dizaine de milliers de népalais. Une crise humanitaire se profile dans ce pays.
Dans les Balkans, a—t-il dit, faut déployer des efforts rapides et concertés, en particulier pour ceux qui ont été victimes d’atrocités, les foyers ayant à leur tête une femme, les minorités ethniques, les personnes âgées et les personnes appelées à témoigner. Il s’est dit frappé par les conditions de vie des Tziganes à Mitrovica. Il faut une mise en œuvre vigoureuse de la déclaration de 2005 sur le retour des réfugiés. Au Soudan, le Représentant a estimé qu’il fallait faire bien plus pour assurer la sécurité des personnes rentrant dans leur foyer dans le Soudan du Sud. Il a demandée au Gouvernement de Khartoum de s’abstenir de mesures causant des retours prématurés. Les défis futurs portent sur l’efficacité de la nouvelle architecture humanitaire. Il faut prendre des décisions rapides et disposer des ressources nécessaires, s’appuyer sur une approche reposant sur les droits de l’homme et préciser la manière dont on conçoit l’acheminement de l’aide aux personnes déplacées dans leur propre pays.
La représentante de l’Azerbaïdjan a demandé au Représentant ce qu’il pensait de l’approche groupée adoptée par le système des Nations Unies pour faire face aux situations d’urgence comme les catastrophes naturelles. Le représentant du Népal a indiqué que la question doit être vue à la lumière du conflit en cours. Il a indiqué que son pays avait du mal à quantifier le nombre de personnes déplacées qui ne préviennent pas le Gouvernement. Il a précisé que son pays allait verser des dédommagements à ces familles si le chef de famille a été tué ou si leurs biens ont été pillés. À court terme, il faut acheminer des secours médicaux d’urgence et leur permettre de disposer d’une source de revenu. Nos efforts doivent être complétés par l’aide de la communauté internationale. Le représentant de la Turquie a indiqué que son pays allait créer un nouveau service au sein du Ministère de l’intérieur qui sera chargé de mettre en place la stratégie globale interinstitutions. Il a demandé des précisions sur la capacité de réaction interinstitutions des Nations Unies. La représentante de la Géorgie a expliqué que la population géorgienne est exterminée et expulsée de leur lieu de naissance dans les provinces sécessionnistes de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud. Le nombre de personnes déplacées d’Abkhazie est de 200 000. Le représentant de la Serbie-et-Monténégro a indiqué que son pays avait mis en place un programme de construction de logements sociaux. Des mesures visent également l’intégration sociale des personnes déplacées par le biais de prêts leur permettant de mettre sur pied de petites entreprises. Il existe aussi des programmes de formation professionnelle. Cependant, nous ne disposons pas des ressources financières nécessaires à la mise en œuvre des programmes recommandés par le Représentant spécial, a souligné le représentant. Il a par ailleurs précisé que les efforts en matière de régularisation administrative des personnes déplacées se heurtent aux entraves posées par la MINUK. De même, en Serbie-et-Monténégro nous ne souffrons aucune forme de discriminations, qu’il s’agisse de la communauté tzigane ou d’autres minorités ethniques. Le représentant a relevé que les personnes déplacées sont toujours encouragées à retourner dans leurs foyers, même si les conditions de sécurité ne sont pas réunies, alors que ceux qui souhaitent s’installer ailleurs ne le sont pas. Le représentant du Royaume-Uni, a demandé au nom de l’Union européenne, quels étaient les principaux défis pour alléger les souffrances de ces personnes? Dans le contexte des catastrophes naturelles récentes, il a demandé quelle était la durabilité des retours. Le représentant du Soudan, a attiré l’attention sur le fait que le retour des populations dans le Sud du Soudan peut devenir chaotique, au risque de faire déraper le processus de paix. Le représentant de la Suisse a demandé ce que M. Kälin pensait des propositions de réforme du Haut Commissariat pour les réfugiés.
M. KÄLIN s’est dit encouragé par l’intérêt que les délégations ont accordé à son intervention. Les situations impliquant les déplacements de populations sont compliquées et difficiles à traiter. Le système antérieur de réaction de la communauté internationale ne disposait pas de plan de division du travail des différentes institutions concernées ce qui ne faisait que retarder la réaction humanitaire. La nouvelle approche qui répartit les responsabilités dès le départ rend les choses plus claires. Il ne sera peut-être pas possible d’appliquer ce modèle à toutes les situations. Les gouvernements doivent aussi reconnaître l’existence de personnes déplacées et les consulter sur leur besoin afin d’en faire des agents actifs de leur destin. Il faut aussi comprendre que la vulnérabilité particulière des personnes déplacées par les catastrophes naturelles peut prendre une dimension des droits de l’homme. La sécurité et la fin de l’impunité, de même que la restitution des biens et avoirs mais également l’existence d’infrastructures et de services de base sont nécessaires au retour durable des réfugiés. Il faut également qu’ils puissent bénéficier d’une situation économique viable.
PROMOTION DE LA FEMME
Le projet de résolution sur l’amélioration de la condition de la femme en milieu rural (A/C.3/60/L.14 Rev.1), tel qu’amendé oralement et adoptée sans vote,contient une série de recommandations à l’intention des États Membres pour qu’en collaboration avec lesorganismes des Nations Unies et la société civile, ils créent un environnement propice à l’amélioration de la situation des femmes rurales et veillent à ce que leurs besoins et leurs apports soient pris en considération. Il leur est recommandé d’oeuvrer en faveur de l’autonomisation politique et socioéconomique des femmes rurales et de les aider à participer pleinement et sur un pied d’égalité aux décisions à tous les niveaux, mais aussi d’intégrer le souci de l’égalité des sexes dans la conception, la mise en oeuvre, le suivi et l’évaluation des politiques et programmes de développement. Il leur est également recommandé de faire en sorte que les vues des femmes rurales soient prises en compte dans la conception, l’exécution, le suivi et l’évaluation des politiques et activités relatives aux situations d’urgence, aux catastrophes naturelles, à l’aide humanitaire, à la consolidation de la paix et à la reconstruction après les conflits.
Il est par ailleurs recommandé aux États membres de déployer des efforts et d’intensifier l’action menée pour répondre aux besoins fondamentaux des femmes rurales, de concevoir et appliquer des politiques qui favorisent et protègent l’exercice par les femmes et les filles rurales de tous les droits humains et de toutes les libertés fondamentales, et créer un environnement qui ne tolère pas les violations des droits des femmes et des filles, y compris la violence dans la famille, la violence sexuelle et la violence à motivation sexiste. Il est leur recommandé entre autres de concevoir des programmes d’assistance et des services consultatifs visant expressément à promouvoir les aptitudes économiques des femmes rurales, et à offrir des microcrédits et autres services financiers et services aux entreprises à davantage de femmes en milieu rural, surtout aux ménages dirigés par une femme.
D’autres recommandations portent sur l’intégration de dispositions dans le droit national tendant à protéger le savoir, les innovations et les pratiques des femmes autochtones et des communautés locales en matière de médecine traditionnelle, de diversité biologique et de techniques locales; sur la prise de mesures pour veiller à ce que le travail non rémunéré des femmes et leur contribution à la production agricole et non agricole, y compris les revenus générés dans le secteur non structuré soit visible; la nécessité de pallier le manque de données fiables et ventilées par sexe disponibles et d’élaborer des lois et réviser celles qui sont en vigueur afin que, lorsqu’il existe un régime de propriété foncière et immobilière privée, des droits égaux soient accordés aux femmes rurales en ce qui concerne la propriété de terres et d’autres biens, y compris par voie de succession, et introduire des réformes administratives et autres mesures nécessaires pour accorder aux femmes les mêmes droits qu’aux hommes en matière de crédit, de capital, de recours aux technologies appropriées et d’accès aux marchés et à l’information.
La résolution recommande aussi de lancer des programmes visant à permettre aux femmes et aux hommes vivant en milieu rural de concilier leur travail et leurs responsabilités familiales et encourager les hommes à partager également avec les femmes les tâches ménagères et l’éducation des enfants; de mobiliser des ressources, notamment au niveau national et au moyen de l’aide publique au développement, pour assurer aux femmes un meilleur accès aux systèmes d’épargne et de crédit existants et lancer des programmes en leur faveur pour leur fournir des capitaux, des connaissances et des outils qui renforcent leurs capacités économiques et de favoriser un système éducatif attentif aux différences entre les sexes, qui tienne compte des besoins particuliers des femmes rurales afin d’éliminer les stéréotypes sexistes et les tendances discriminatoires à leur égard.
Explications de position
La représentante des États-Unis a déclaré que son pays était engagé en faveur de l’autonomisation des femmes et de la jouissance par celles-ci de leurs droits fondamentaux. Elle a cependant tenu à souligner que le projet de résolution n’était qu’un cadre politique et ne créait par d’obligation juridique pour les États au niveau international. Elle a également précisé que si les États-Unis étaient favorables à l’accès de toutes à la santé reproductive, cela ne signifiait pas qu’ils apportaient leur soutien à l’avortement. La représentante du Venezuela a indiqué que sa délégation ne s’était pas portée coauteur du projet de résolution car elle a des réserves sur le Document final du Sommet de 2005, auquel il fait référence à deux reprises dans le texte.
Aux termes du projet de résolution sur la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (A/C.3/60/L.17), tel qu’amendé oralement par la Norvège et adopté par 160 voix pour, une contre (États-Unis), l’Assemblée générale, prierait instamment les États parties à la Convention de prendre les mesures voulues pour que l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention (sur les sessions du Comité) puisse être accepté dès que possible par la majorité des deux tiers des États parties et entrer en vigueur. Elle déciderait d’autoriser le Comité, à titre exceptionnel et temporaire, à compter de janvier 2006, à tenir trois sessions annuelles de trois semaines chacune, précédées dans chaque cas d’une réunion d’une semaine d’un groupe de travail d’avant-session, et de continuer à autoriser deux sessions annuelles du Groupe de travail sur les communications présentées conformément au Protocole facultatif à la Convention (paragraphe 14).
Elle déciderait également d’autoriser le Comité, à titre exceptionnel et temporaire, à se réunir en 2006 et 2007 pendant sept jours au maximum en groupes de travail parallèles au cours de sa troisième session annuelle de 2006 (juillet/août) et de ses première et troisième sessions annuelles de 2007 (janvier et juillet/août, respectivement), en tenant dûment compte des impératifs d’une répartition géographique équitable, afin d’examiner les rapports présentés par les États parties en application de l’article 18 de la Convention (paragraphe 15). L’Assemblée prierait instamment le Comité d’évaluer les progrès accomplis et décide qu’elle fera le point en ce qui concerne le temps de réunion du Comité au bout de deux ans, en tenant également compte du contexte plus large de la réforme des organes conventionnels.
Si le projet de résolution A/C.3/60/L.17 était adopté par l’Assemblée générale, des ressources additionnelles d’un montant total de 9 519 300 dollars seraient requises au titre du chapitre 9, Affaires économiques et sociales (739 600 dollars), du chapitre 2, Affaires de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social et gestion des conférences (8 689 800 dollars) et du chapitre 28D, Bureau des services centraux d’appui (89 900 dollars) du projet de budget-programme pour l’exercice biennal 2006-2007. Cela représenterait un montant imputé sur le fonds de réserve et, par conséquent, cela devrait faire l’objet d’une ouverture de crédit pour l’exercice biennal 2006-2007 devant être approuvée par l’Assemblée générale à sa soixantième session. Pour davantage de détails, veuillez vous reporter au document portant la côte A/C.3/60/L.20).
À la suite d’un vote distinct de 147 voix pour, deux contre (États-Unis et Koweït) et six abstentions (Émirats arabes unis, Brunei, Malaisie, Myanmar, Japon et Singapour) le paragraphe 14 du dispositif a été maintenu. À la suite d’un vote distinct de 128 voix pour, 13 contre et 7 abstentions (Chine, Brunei, Malaisie, Japon, Myanmar, Qatar, Singapour) le paragraphe 15 du dispositif a été maintenu.
La représentante de la Norvège a estimé que le CEDAW ne pouvait pas s’acquitter de sa charge de travail compte tenu de la quasi-universalité de la Convention et du nombre croissant de pays ayant ratifié son protocole facultatif. La représentante des États-Unis a dit comprendre que les activités supplémentaires du Comité ne sont pas inscrites au budget ordinaire et ne souhaite pas voter en faveur d’un projet de résolution concernant une Convention à laquelle son pays n’est pas partie. Le représentant de la Nouvelle-Zélande a rappelé que le CEDAW cherche à améliorer ses méthodes de travail mais la réalité c’est que le Comité a besoin de plus de temps et de plus de ressources. Nous ne pouvons pas d’un côté nous féliciter de l’augmentation de la charge de travail et de l’autre nous refuser à donner les moyens au Comité de s’acquitter de son mandat.
Le représentant du Japon a expliqué son abstention par le fait que le budget biennal de l’Organisation pour le prochain exercice va augmenter en deux ans d’un milliard de dollars. La représentante des États-Unis, expliquant sa position sur le paragraphe 15, a rapellé que son pays n’est pas partie à la Convention et qu’il ne peut accepter des coûts résultant de ces décisions. Le représentant du Pakistan, expliquant son vote sur le paragraphe 15, a estimé que l’idée de diviser le CEDAW en deux groupes va à l’encontre de son mandat qui est d’examiner les rapports des pays en plénière. Le représentant du Koweït, pays partie à la Convention, a estimé que de tels amendements doivent être discutés entre États parties et non pas dans le cadre des travaux de l’Assemblée. Il s’est demandé comment il était possible d’accepter des changements aux méthodes de travail d’un organe des droits de l’homme.
Le représentant de Cuba a estimé que la scission du Comité entre deux groupes parallèles va l’encontre du mandat du Comité et qu’une telle décision aurait due être examinée par les États parties. Si une telle mesure est prise, nous allons affecter le principe de la répartition géographique équitable. Le représentant de l’Inde a indiqué que son pays allait voter en faveur du paragraphe 15 qui précise que les mesures prises le sont à titre temporaire et exceptionnel. Le représentant de la Jamahiriya arabe libyenne a dit soutenir les objectifs de ce projet de résolution mais a dû voter contre le paragraphe 15 car les réunions parallèles prévues en 2006 et 2007 créeront un déséquilibre géographique dans la composition de ces groupes parallèles. Le représentant du Japon a indiqué que son pays s’était abstenu pour les mêmes raisons que celles invoquées lors du vote du paragraphe 14.
La représentante de l’Algérie a indiqué avoir voté en faveur du maintien du paragraphe 15 tout en précisant qu’il s’agissait d’une mesure provisoire ne créant pas de précédent. La représentante de l’Égypte a dit avoir voté contre le maintien du paragraphe 15 pour ne pas diviser le CEDAW et ne pas modifier sa composition. Diviser le Comité en deux chambres travaillant parallèlement ne permettra pas de mettre en œuvre le principe de la répartition géographique équitable. Le représentant de la Chine a expliqué son abstention lors du vote sur le paragraphe 15 en estimant qu’il n’était pas adéquat de diviser le Comité en deux groupes parallèles.
La représentante de l’Ouganda a indiqué que son pays votera en faveur du maintien du paragraphe 15 et du projet de résolution dans son ensemble à condition que cela ne soit pas un précédent. Le fait qu’aucun expert africain ne figure au sein du Comité montre que la question de la répartition géographique équitable ne se pose pas dans les circonstances actuelles. La représentante du Burkina Faso s’est dite en faveur du projet de résolution et des paragraphes 14 et 15 tout en signalant que son pays n’est pas co-auteur de ce texte. La représentante du Venezuela a indiqué que son pays avait voté en faveur de ces paragraphes mais que les mesures prises doivent être provisoires.
La représentante des États-Unis, faisant une déclaration générale, a dit ne pas pouvoir accepter l’appel lancé aux États pour qu’ils ratifient la Convention ni l’expression de satisfaction figurant au paragraphe 3 sur l’augmentation du nombre de ratifications du protocole étant donné que son pays n’est pas partie au CEDAW. La représentante de la Norvège, s’est félicitée, au nom des pays nordiques, de l’adoption du projet de résolution en estimant que les mesures adoptées permettront au Comité de mieux s’acquitter de son mandat.
QUESTIONS RELATIVES AUX DROITS DE L’HOMME
M. PAUL HUNT, Rapporteur spécial sur le droit de toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mental possible, a déclaré que le droit à la santé était la possibilité offerte à tous d’avoir accès à un système de santé efficace et intégré, c'est-à-dire à des soins, un système d’assainissement et une eau potable. Il a rappelé que les Objectifs du Millénaire pour le développement exigeaient de lutter contre la mortalité maternelle et infantile, le VIH/sida et le paludisme. Le premier OMD demande en outre de réduire de moitié la pauvreté extrême d’ici 2015, ce qui exige d’abord de réaliser le droit à la santé. Lors du Sommet mondial de 2005, les États Membres se sont engagés à améliorer les systèmes de santé des pays en voie de développement. Dans ce cadre, un partenariat est essentiel entre les pays concernés et les pays développés, a-t-il estimé. Il a ainsi demandé aux Ministres de la santé des pays à revenu moyen ou faible d’élaborer des programmes nationaux de santé plus hardis visant à réaliser les OMD, programmes qui doivent refléter les besoins de leur population et non les ressources que les donateurs sont susceptibles de leur conférer. Ces programmes seront ensuite placés au cœur des stratégies du développement, qui devront être adoptés en 2006.
Le Rapporteur spécial a rappelé que depuis 20 ans, les systèmes sanitaires de nombreux pays s’étaient affaiblis, notamment du fait d’une inquiétante fuite des compétences, qui affecte particulièrement le continent africain. Ainsi, ce sont de 30 à 50% des diplômés des facultés de médecine d’Afrique du sud qui quittent chaque année leur pays pour aller travailler aux États-Unis ou au Royaume-Uni. Si la liberté de circulation et le droit au travail des professionnels de santé doivent être respectés, a-t-il admis, il convient de trouver un équilibre avec le droit à la santé, que cette fuite tend à remettre en cause dans les pays d’origine. Dès lors, les pays développés doivent faire en sorte que leurs politiques de formation dans le domaine de la santé ne mettent pas en jeu le droit à la santé des pays en développement. Force est de constater, en effet, que la fuite des compétences approfondit l’inégalité en matière d’espérance de vie (elle est en moyenne de 80 ans dans les pays développés contre 40 ans dans certains pays d’Afrique) et en matière de mortalité infantile (100 enfants pour mille meurent avant cinq ans dans certains pays, contre 10 pour mille dans les pays à revenu élevé).
Parmi ses recommandations, M. Hunt a proposé que les pays développés envisagent une politique de restitution, par exemple par la création d’un fonds de dédommagement. De même que le droit de vote est à la base de tout système démocratique, le droit à la santé est à la base d’un système de santé efficace et accessible à tous, a-t-il souligné.
En réponse à la question de la Nouvelle-Zélande, M. Hunt a estimé que les pays développés avaient la responsabilité de ne pas entraver la réalisation progressive des droits économiques et sociaux des pays en développement, notamment du droit à la santé. Cette obligation découle des articles 55 et 56 de la Charte des Nations Unies, qui évoquent un appui mutuel et une responsabilité partagée, ainsi que de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui, à l’article 28, parle d’un ordre économique international juste. De même, le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels et la Convention internationale des droits de l’enfant mentionnent la nécessité d’une coopération internationale. Ces textes introduisent donc, selon lui, la responsabilité pour les pays développés d’aider les pays en voie de développement à réaliser progressivement le droit à la santé.
Au représentant du Royaume-Uni, qui, au nom de l’Union européenne, s’interrogeait sur la manière de protéger les droits des professionnels de la santé tout en évitant la fuite des compétences, le Rapporteur spécial a indiqué que les pays d’origine devaient améliorer les conditions de travail des professionnels de santé, tandis que les pays développés devaient accroître le nombre de professionnels de santé qu’ils forment.
En réponse aux observations du représentant de la Chine sur la grippe aviaire et les problèmes de répartition du stock de médicaments antiviraux, il a estimé que la communauté internationale devait adopter en la matière une approche fondée sur les droits de l’homme, ce qui requérait de prendre en considération les groupes vulnérables en vue d’une distribution équitable. Il a proposé de s’inspirer des bonnes pratiques mises en œuvre par certains pays dans l’accès aux antirétroviraux contre le VIH.
Répondant au représentant du Brésil, M. HUNT a, enfin, fait part de la contribution de l’ONG « Initiative pour une mondialisation équitable », qui a organisé des séminaires avec des laboratoires pharmaceutiques, en vue d’établir, sur la base d’un dialogue constructif, ce qu’il était réaliste d’attendre de leur part dans la réalisation du droit à la santé.
M. BERNARD ANDREW NYAMAYA MUDHO, Expert indépendant sur les effets des politiques d’ajustement structurel et de la dette extérieure sur la jouissance effective de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, a indiqué qu’il est concentré non seulement sur les effets négatifs de la dette extérieure mais qu’il a aussi examiné l’expérience des pays qualifiés de « succès ». Il a également accordé une attention particulière au travail mené et aux initiatives prises par les institutions financières internationales, les organisations du Système des Nations Unies et les ONG. À l’heure de la mondialisation, il faut adopter une perspective globale des problèmes que rencontrent les pays en développement et le Consensus de Monterrey, est à cet égard, un pas historique dans la bonne direction. Il s’agit là d’un aboutissement remarquable.
L’Expert indépendant a estimé qu’il appartient à toutes les parties d’examiner comment les pays en développement mettent en œuvre des politiques visant à promouvoir les droits de l’homme. Au titre des traités internationaux de droits de l’homme que les gouvernements ont ratifiés, ces derniers ont contracté des obligations contraignantes sur le plan international. Les normes des droits de l’homme fournissent un cadre important aux gouvernements, et de ce fait, les principes comme l’égalité, la participation et la non-discrimination doivent être intégrés à toutes les phases des processus pertinents et des politiques et programmes liés à l’ajustement structurel et à la dette.
Pendant des décennies, les pays en développement ont consacré une bonne part de leur recette à la dette extérieure au détriment des dépenses de base. Le montant de la dette a quadruplé et des ressources financières cruellement nécessaires ont quitté le territoire de ces pays. C’est pourquoi l’Expert a salué l’annulation de la dette des pays les plus endettés, geste qui mérite l’appui de toute la communauté de donateurs. Cet apport de ressources est crucial. Par ailleurs l’expérience montre qu’il n’y pas de modèle unique et l’approche actuelle de la viabilité de la dette est inadéquate. La nouvelle approche doit tenir compte des besoins urgents des pays en développement dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le développement. L’Expert indépendant a déploré n’avoir reçu à ce jour que peu des réponses des États membres sollicités pour faire connaître leur point de vues sur de nouvelles directives.
Le représentant de Cuba a demandé à l’Expert de décrire les mesures qui pourraient être prises par les institutions financières internationales pour atténuer les effets des mesures d’ajustements structurels. Le représentant de la Tunisie a demandé, compte tenu des réponses limitées que l’Expert a reçues pour la rédaction de nouvelles directives, s’il avait l’intention de rencontrer les États Membres de manière informelle.
L’Expert indépendant a répondu que la Banque mondiale, qui mettait en place auparavant des politiques d’ajustements structurels standard, laisse une plus grande liberté aux États pour élaborer et mettre en place leurs propres programmes. Outre les nouvelles politiques de la Banque, une nouvelle méthode s’impose pour l’analyse de la viabilité de la dette. Répondant à la question du représentant de la Tunisie, l’Expert a indiqué qu’il était disposé à rencontrer les délégations.
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