En cours au Siège de l'ONU

AG/SHC/3822

TROISIEME COMMISSION: L’AMÉLIORATION DE LA CONDITION DES ENFANTS DANS LES CONFLITS ARMÉS EXIGE LA STRICTE APPLICATION DES NORMES INTERNATIONALES

14/10/05
Assemblée généraleAG/SHC/3822
Department of Public Information • News and Media Division • New York

Troisième Commission

15e séance – matin


TROISIEME COMMISSION: L’AMÉLIORATION DE LA CONDITION DES ENFANTS DANS LES CONFLITS ARMÉS EXIGE LA STRICTE APPLICATION DES NORMES INTERNATIONALES


La Troisième Commission (sociale, humanitaire et culturelle) a entamé son débat sur la promotion et la protection des droits de l’enfant.


La présentation du rapport sur les enfants et les conflits armés et de l’étude approfondie sur la question de la violence à l’encontre des enfants a été l’occasion de rappeler quelques faits inquiétants: 4 millions d’enfants ne sont jamais allés à l’école; au cours des 10 dernières années, 2 millions d’enfants ont été tués dans des conflits armés; plus de 250 millions continuent d’être recrutés comme enfants soldats; des dizaines de milliers de filles sont victimes de violence sexuelle; 10,8 millions d’enfants de moins de 5 ans meurent chaque année de malnutrition.


Comme l’a souligné la Représentante spéciale par intérim du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, Mme Sham Poo, les enfants sont, directement ou indirectement, touchés par des conflits dans 30 pays dans le monde.  Elle s’est réjouie, à l’instar de nombreuses délégations, que l’Assemblée générale ait réaffirmé l’urgence de ce thème et que cette question ait été inscrite dans le Document final du Sommet mondial de 2005.  Elle a également signalé avec satisfaction que les instruments de protection des enfants dans les conflits armés avaient été renforcés par l’entrée en vigueur, en 2002, du Protocole facultatif à la Convention sur les droits de l’enfant interdisant le recrutement d’enfants soldats, et par la dernière résolution adoptée sur le sujet par le Conseil de sécurité le 26 juillet 2005 (résolution 1612), instaurant un mécanisme de production régulière de rapports sur les violations graves des droits des enfants.


Elle a cependant estimé que le fossé restait important entre ces normes internationales de protection et la réalité sur le terrain, c’est pourquoi un appel avait été lancé par le Représentant spécial, M. Otonnu, en faveur d’une campagne énergique, intitulée « la phase de la mise en oeuvre», visant à rendre ces normes effectives.  Dans cette perspective, le représentant du Royaume-Uni, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, a fait mention des directives européennes prises en faveur de la lutte contre le recrutement d’enfants soldats et a fait état des pressions constantes exercées par l’Union auprès des États qui ne respectent pas les textes internationaux en vigueur.


Mme Sham Poo a souligné l’importance de renforcer la sensibilisation, tant des gouvernements nationaux et des groupes armés eux-mêmes, que de l’opinion publique et des acteurs de la société civile.  Le représentant de l’île Maurice a, pour sa part, émis le vœu qu’un Conseiller dédié aux enfants soit détaché au sein des opérations de maintien de la paix des Nations Unies.


La violence affecte également les enfants vivant dans des pays en paix.  Sur ce sujet également, la prise de conscience est croissante, a indiqué M. Pinheiro, expert indépendant, auteur d’une étude approfondie sur la violence à l’égard des enfants.  Il a souligné que l’enjeu majeur pour éliminer ces violences était de remettre en cause les normes sociales qui les justifient, qu’il s’agisse des châtiments corporels ou des crimes d’honneur et des mutilations génitales.  Si l’approche répressive est sans doute contre-productive, a-t-il estimé, il est important de parler de cette violence et de déclarer clairement son caractère répréhensible, en affichant notamment à l’adresse des gouvernements qu’elle représente une menace à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement.


Les représentants des pays suivants se sont exprimés au cours du débat général: Royaume-Uni (au nom de l’Union européenne), Maurice (au nom de la SADC), Singapour, Chine, Égypte et Sénégal.


Les personnalités suivantes ont également pris la parole: la Représentante spéciale par intérim du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, le Directeur exécutif adjoint du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), le Représentant du Bureau de New York du Haut Commissaire des droits de l’homme et l’expert indépendant chargé de l’Étude de fond du Secrétaire général sur la violence à l’égard des enfants.


Le débat général sur cette question se poursuivra lundi 17 octobre à 10 heures.


PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’ENFANT


Documentation


Rapport du Secrétaire général sur l’état de la Convention relative aux droits de l’enfant (A/60/175)


Dans son rapport, le Secrétaire général indique qu’au 30 juin 2005, 192 États avaient ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant ou y avaient adhéré; 98 États avaient ratifié et 117 États signé le Protocole facultatif à la Convention concernant la participation des enfants aux conflits armés; 95 États avaient ratifié et 111 États signé le Protocole facultatif à la Convention concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.


Rapport du Secrétaire général sur la suite donnée aux textes issus de la session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée aux enfants (A/60/207)


Dans son rapport, le Secrétaire général fait part des progrès réalisés dans la suite donnée à la session extraordinaire de l’Assemblée générale intitulée « Un monde digne des enfants », en particulier dans les activités de suivi et les quatre principaux domaines visés:


-        la promotion d’une existence plus saine;

-        la promotion d’un enseignement de qualité;

-        la protection des enfants contre la maltraitance, l’exploitation et la violence;

-        la lutte contre le VIH/sida.


Le Secrétaire général estime que ces domaines d’action prioritaires doivent être dûment pris en compte dans les plans macroéconomiques, notamment dans les stratégies de réduction de la pauvreté.  Il indique en outre que La création de conseils nationaux de haut niveau pour les enfants, le renforcement des capacités des organismes nationaux chargés de l’enfance et la collaboration avec les parlementaires et les organisations de la société civile pour la promotion de budgets axés sur les enfants pourraient constituer des façons d’aller de l’avant.  Dans la même perspective, il déclare qu’il est nécessaire d’établir des normes et des mécanismes de soutien adaptés pour que les enfants puissent participer à l’examen des avancées réalisées.


Au niveau international, le Comité des droits de l’enfant pourrait, selon lui, promouvoir l’établissement de liens plus étroits entre le suivi des objectifs de la session extraordinaire, les Objectifs du Millénaire pour le développement et les rapports périodiques des États parties sur l’application de la Convention relative aux droits de l’enfant.  Il conviendrait d’utiliser les conclusions du Comité sur les rapports des États parties pour maintenir la mobilisation des gouvernements et du public autour des objectifs concernant les enfants.  Le Secrétaire général annonce qu’un rapport plus détaillé sera fourni lors de la réunion plénière commémorative en 2007.


Note du Secrétaire général transmettant le Rapport de l’expert indépendant chargé de conduire l’étude approfondie des Nations Unies sur la question de la violence à l’encontre des enfants (A/60/282)


Dans sa note, le Secrétaire général transmet l’étude des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants réalisée par l’expert indépendant, M. Paulo Sérgio Pinheiro, afin de rassembler des informations sur la situation dans ce domaine et sur les mesures à prendre afin de prévenir et de sanctionner de tels actes.


Dans le cadre des concertations régionales, sous-régionales et nationales, des réunions d’experts, des visites sur le terrain et de l’analyse des mécanismes de défense des droits de l’homme, notamment du Comité des droits de l’enfant, l’expert indépendant a défini pour ses travaux durant l’année à venir un certain nombre de domaines clefs, qui ont trait tout particulièrement à l’efficacité de la prévention et des interventions face à la violence envers les enfants: la persistance de la légalité et de la prévalence des châtiments corporels infligés aux enfants à la maison, à l’école, dans les centres de prise en charge, les institutions et le système de justice pour mineurs; la vulnérabilité des enfants qui ont des démêlés avec la justice, et des enfants de la rue, face à la violence; et l’ampleur des pratiques traditionnelles dangereuses.


L’expert indépendant est devenu très conscient aussi de l’existence de conditions sous-jacentes, telles que l’attitude de la collectivité face à la violence, la discrimination, la pauvreté, le statut inférieur des femmes et des filles, l’accès insuffisant à un enseignement de qualité, et la négation des droits de l’homme en général, qui aggravent la vulnérabilité des enfants face à la violence.  L’absence de données systématiques et de bonne qualité est devenue manifeste, tout comme l’importance de renforcer les moyens de ceux qui travaillent auprès des enfants.


Rapport du Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés (A/60/335)


Dans son rapport le Représentant spécial donne une vue d’ensemble de l’action à entreprendre en faveur des enfants touchés par les conflits, souligne les progrès qui ont été réalisés et recense les principaux éléments de la campagne pour la « phase de mise en œuvre », qui vise à faire appliquer sur le terrain les normes et les critères internationaux relatifs à la protection des enfants.


Les efforts concertés de ces dernières années ont permis de faire avancer la cause des enfants touchés par les conflits.  Et pourtant, malgré les progrès tangibles qui ont été réalisés, la situation des enfants dans les situations de conflit demeure grave et inacceptable.  C’est pourquoi le Représentant spécial a lancé un appel en faveur d’une campagne énergique visant la mise en œuvre des normes et des critères internationaux de protection des droits des enfants touchés par les conflits.


Cette « phase de mise en œuvre » consiste notamment à déterminer les parties qui commettent des violations graves des droits des enfants, à les désigner nommément et à les inscrire sur une liste; à ouvrir avec les parties en infraction un dialogue qui aboutira à l’établissement et à la mise en œuvre de plans d’action pour mettre un terme à ces violations graves; à mettre en place un mécanisme de surveillance et de communication de l’information pour les violations graves commises à l’encontre des enfants et un dispositif de responsabilisation grâce à une action concrète menée par des entités ou des organes de décision clef, tels que l’Assemblée générale.


Le Représentant spécial recommande à l’Assemblée générale d’envisager d’adopter une résolution distincte au sujet des enfants dans les conflits armés, au titre du point de l’ordre du jour intitulé Promotion et protection des droits de l’enfant, afin de continuer à mettre l’accent sur cette question.


Tous les États Membres devraient veiller à ce que les droits, la protection et le bien-être des enfants touchés par les conflits armés soient spécifiquement intégrés dans tous les processus de paix, accords de paix ainsi que dans les plans et les programmes de redressement et de reconstruction après les conflits, et à ce que les questions liées aux enfants dans les conflits armés figurent systématiquement dans le mandat de toutes les opérations de maintien de la paix, chaque fois que les enfants ont été gravement touchés par le conflit armé.


Les États Membres et les organismes des Nations Unies qui pilotent de grands processus institutionnels, en particulier la procédure d’appel global, les documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté et le bilan commun de pays/Plan-cadre des Nations Unies pour l’aide au développement, devraient veiller à ce que les problèmes des enfants dans les conflits armés y soient systématiquement et explicitement intégrés.


Les organismes des Nations Unies, les États Membres et les membres de la communauté internationale des donateurs devraient veiller à fournir un appui approprié au développement et au renforcement des capacités des institutions nationales et régionales et des réseaux locaux de la société civile afin de garantir la viabilité des initiatives locales de sensibilisation, de protection et de réinsertion des enfants touchés par les conflits armés.


Les États Membres, agissant par le biais d’organisations et de mécanismes régionaux et sous-régionaux, ainsi que les institutions financières internationales concernées, devraient veiller à ce que les problèmes des enfants touchés par les conflits aient un rang prioritaire dans leurs politiques et programmes de sensibilisation, particulièrement lorsqu’il s’agit de redressement et de développement après les conflits.


Tous les États Membres, en particulier lorsqu’ils envisagent des activités sous-régionales et transfrontières, devraient mettre au point des mécanismes et des instruments pour lutter contre l’enlèvement et le recrutement transfrontières des enfants, ainsi que contre les activités transfrontières qui ont des conséquences préjudiciables pour les enfants, comme le commerce illicite des ressources naturelles et des armes légères.  Tous les organismes concernés des Nations Unies devraient prendre des mesures spécifiques pour que la question des enfants dans les conflits armés soit systématiquement intégrée à leurs domaines d’activité respectifs et devraient aussi entreprendre d’évaluer à intervalles réguliers les progrès réalisés dans ce sens.


Déclarations liminaires suivies de questions


Mme KARIN SHAM POO, Représentante spéciale du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, a déclaré que dans plus de 30 pays dans le monde la vie des enfants est touchée directement et indirectement par les conflits armés.  En tant qu’ancienne Directrice adjointe de l’UNICEF, Mme Sham Poo a expliqué que la souffrance de ces enfants prend plusieurs formes, qu’ils soient orphelins, enfants soldats, réfugiés et déplacés dans leur propre pays, victimes de la violence sexuelle et de l’exploitation.  Ce qui est significatif cette année, s’est–elle félicitée, est que l’Assemblée générale a identifié les conflits et les enfants comme un thème prioritaire d’action de la communauté internationale auquel un chapitre est consacré dans le Document final du Sommet de Haut niveau.  De même, il existe maintenant sur cette question une sensibilisation mondiale plus importante.  Nous avons aussi vu au cours de ces dernières années, la mise en place d’une gamme de normes de protection des enfants comme par exemple le Protocole interdisant l’enrôlement des enfants dans les conflits armés.  Par ailleurs, ce thème est à l’ordre du jour du Conseil de sécurité depuis 1999.


Il est important d’avoir en tête l’intérêt premier de l’enfant.  C’est ce qui nous a permis dans le passé de parvenir à l’adoption des résolutions sur les enfants.  Malheureusement, malgré ces progrès, la situation des enfants dans les conflits est toujours grave et un écart considérable existe encore entre les normes et la situation sur le terrain.  Pour combler le fossé, il faut que la communauté internationale s’attache à mettre en œuvre les normes internationales sur le terrain.  L’année 2005 a marqué un tournant dans les activités de plaidoyer de la Représentante spéciale, a–t-elle encore ajouté.  Le rapport annuel du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés propose un régime structuré de protection tandis que des efforts sont en cours pour mettre en place le mécanisme de présentation de rapports sur la situation des enfants dans un pays donné à la demande du Conseil de sécurité.  Les activités de plaidoyer auprès du public sont également essentielles.  Il est indispensable aussi de mieux comprendre les normes autochtones qui traditionnellement fournissent une protection aux enfants en temps de guerre.  Ces normes doivent être considérées comme un complément important aux normes internationales.  Au cours des derniers mois, le Bureau de la Représentante spéciale s’est employé à réexaminer les dispositions de la résolution lui donnant mandat.  Le Bureau insiste sur les actions de plaidoyer et la coordination d’actions globales. 


Mme RIMA SALAH, Directeur exécutif adjoint du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a déclaré que le bilan du rapport sur le document du Secrétaire général « Un monde digne pour les enfants » montrait que des progrès dans la réalisation des objectifs n’étaient possibles que si la mise en place des plans d’action nationaux s’accompagnaient de ressources plus nombreuses et d’une volonté politique plus franche.  Elle a rappelé que plus d’un million d’enfants étaient privés d’au moins un des moyens essentiels leur permettant d’exercer pleinement leurs droits.  Elle a estimé qu’une approche sexospécifique de la pauvreté chez les enfants était nécessaire, dans la mesure où les filles ne la vivent pas de la même façon que les garçons, où elles sont plus rapidement et plus souvent retirées du système scolaire et sont davantage sujettes, en cas d’absence de soutien parental, à la prostitution et, dès lors, sont plus vulnérables au VIH/sida.


La représentante de l’UNICEF a en outre souligné l’importance de ne pas traiter la question de la pauvreté chez les enfants uniquement sous l’angle de la privation de revenus et à prendre en compte la dimension spirituelle, c’est-à-dire leur besoin de croire en l’avenir et de préserver la part d’innocence qui doit rester attachée à l’enfance.  Elle a donc estimé que les parents, appuyés par les gouvernements et les organisations de la société civile, devaient remplir le devoir qui est le leur de créer un environnement favorable à la sécurité physique, alimentaire et sanitaire et à la dignité des enfants, ces éléments étant interdépendants pour assurer l’épanouissement des générations futures.


M. CRAIG MOKHIBER, Représentant le Bureau de New York du Haut Commissaire des droits de l’homme, a dressé le bilan de la Convention sur les droits de l’enfant et de ses Deux protocoles facultatifs en expliquant que le Protocole sur l’implication des enfants dans les conflits armés comptait désormais 102 États parties et que le Protocole facultatif sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants en compte 101.  Outre l’examen des rapports périodiques présentés au titre de la Convention, le Comité des droits de l’enfant examine également l’application des Protocoles facultatifs, a précisé le représentant.  Le Comité a également adopté de nouvelles directives sur la forme et les modalités de présentation des rapports des États parties.


Le Comité a également commencé à travailler sur des questions spécifiques comme celles relative aux enfants sans soins parentaux.  Nous avons aussi examiné les activités de lutte contre la violence envers les enfants par le biais de consultations régionales.  L’étude réalisée sur cette question fournira aux États parties des outils concrets.  Le Comité des droits de l’enfant a lancé une série d’atelier pour donner effet à ses recommandations qui associera les gouvernements, les représentants de la société civile et les médias.


Questions aux Rapporteurs


En réponse aux préoccupations du représentant du Burundi, quant au fait que les mêmes groupes armés continuent de ne pas obtempérer à l’interdiction imposée par les normes internationales en matière d’enrôlement des enfants, Mme SHAM POO a estimé que la collaboration avec ces groupes était indispensable pour lutter efficacement contre le recrutement d’enfants soldats.  Mme SALAH a, pour sa part, accueilli favorablement la proposition formulée par la représentante de la Colombie, d’organiser une coopération entre les Gouvernements et l’UNICEF sur des projets concrets de prévention, mais a souligné l’importance de travailler également à la prise en charge des enfants qui avaient participé à des conflits, afin d’éviter qu’ils ne voient d’autre solution, pour assurer leur subsistance et leur sécurité, que de se tourner à nouveau vers ces groupes paramilitaires.  Elle a indiqué qu’un soutien aux familles était particulièrement important, dans la mesure où la pauvreté justifie souvent que les parents préfèrent laisser leurs enfants être enrôlés.  L’action de l’UNICEF, a-t-elle précisé, passe notamment par la mise en place de classes adaptées aux enfants qui ont accumulé un retard scolaire du fait de leur participation à un conflit.


Répondant à la demande, exprimée par le Royaume-Uni, de stratégies concrètes de l’UNICEF pour aider les Gouvernements à adopter des mesures juridiques permettant aux enfants sidéens ou orphelins du sida de vivre dans un environnement favorable et d’éviter toute stigmatisation, Mme Salah a indiqué qu’une campagne dédiée à la question des enfants face au VIH/sida était sur le point d’être lancée par son organisation.  Elle vise à tenter de stopper la transmission du virus par les parents, à apporter une aide pédiatrique aux enfants atteints par le virus et à porter une attention particulière aux besoins des enfants orphelins du fait du sida.  L’UNICEF développe par ailleurs différents programmes, a-t-elle indiqué, dont les buts sont de veiller à ce que les orphelins et les enfants sidéens soient acceptés dans toutes les écoles et qu’ils y bénéficient d’un environnement favorable, que les jeunes filles soient sensibilisées aux risques d’infection notamment au Viet Nam et dans plusieurs pays d’Afrique, mais aussi, comme au Swaziland, d’organiser des repas qui réunissent des enfants orphelins du sida, afin d’éviter leur isolement et compenser leur situation de dénuement.


M. PAULO SERGIO PINHEIRO, Expert indépendant chargé de l’Étude de fond du Secrétaire général sur la violence à l’égard des enfants, a expliqué comment il avait dirigé cette étude et de quel appui il avait bénéficié.  Les consultations organisées dans le monde ont créé une réelle volonté politique et des activités concrètes de suivi ont été élaborées par les gouvernements.  Par exemple le Conseil de l’Europe a organisé des consultations pour les pays d’Europe et d’Asie centrale.  Un Forum international se tiendra à la fin de ce mois à Beijing avec l’appui de l’UNICEF et des associations.  Des consultations ont eu lieu au niveau sous-régional et national et elles ont permis de procéder à des échanges d’informations et de briser le silence qui entoure la violence faite aux enfants.  Les pays visités ont également permis d’identifier les diverses formes de violence dont sont victimes les enfants.


Il existe une prise de conscience croissante mais la violence contre les enfants est commune à tous les contextes et ne connaît pas de frontières géographique, culturelle et raciale.  Les violences contre les enfants ne peuvent être tolérées sous aucune forme car les enfants sont différents des adultes.  L’objectif de cette étude vise à faire en sorte que les enfants jouissent de la même protection que les adultes.  Il s’agira de remettre en cause des normes sociales qui justifient la violence comme les châtiments corporels à la maison et à l’école ou encore les crimes d’honneur et les mutilations génitales qui ne sont aucunement justifiables.  L’approche répressive des forces de l’ordre est également contre-productive.  La violence routinière doit porter son nom et doit être reconnue comme une menace à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement.


Répondant aux questions des délégations et notamment à celle posée par le représentant du Salvador sur les enfants des rues, M. PINHEIRO s’est dit convaincu de la nécessité de privilégier la prévention et l’éducation pour contrer ce phénomène.  Les enfants doivent aller à l’école et non pas être dans la rue.  À la représentante de l’Égypte, il a en effet signalé le lien entre deux études entreprises, celle sur la violence à l’égard des enfants et celle à l’égard des femmes et des fillettes.  Il a précisé que la première étude se concentre sur la violence à la maison et que le but est non pas de criminaliser les parents mais de les aider à trouver des mesures alternatives.  Il faut inciter les pays à bannir les punitions corporelles et à inciter au dialogue entre les parents, les enfants et les enseignants.  Quant au représentant du Mali, il s’est dit convaincu que la criminalisation des mutilations génitales ne parviendrait pas à régler le problème. 


La Directrice exécutive adjointe de l’UNICEF, répondant à la question posée par le représentant de l’Iraq a précisé que le Fonds a l’intention de lutter contre la violence à l’égard des enfants iraquiens par le biais de l’éducation et de la révision de l’appareil législatif.  Il est également prévu d’organiser un mécanisme de consultations avec les représentants du gouvernement iraquien mais également au sein des familles iraquiennes.


Débat général


M. RICHARD WOOD (Royaume-Uni), au nom de l’Union européenne, s’est déclaré préoccupé par la question des enfants et des conflits armés, qu’ils soient combattants ou victimes, et a déclaré condamner fermement le recrutement d’enfants soldats, estimant qu’une action ferme des gouvernements et des groupes armés eux-mêmes était essentielle pour démobiliser, désarmer et réintégrer les enfants dans leur communauté.  Il a précisé que les directives prises par l’Union européenne sur ce sujet constituait le cadre des États Membres pour traiter des enfants dans les conflits armés, notamment dans le cadre du dialogue ordinaire que les États Membres entretiennent avec les États concernés, ainsi que de contacts spécifiques avec des gouvernements ou, parfois, des groupes armés.  Il a souligné que l’efficacité de l’action sur le terrain exigeait que les efforts soient menés de manière concertée entre les gouvernements, les missions de maintien paix, les ONG et la société civile.


Le représentant a également fait part de la préoccupation de l’Union européenne à l’égard des enfants affectés, directement ou indirectement par la pandémie du VIH/sida.  Il a souligné l’importance de cadres nationaux efficaces favorisant des approches coordonnées, participatives et responsables.  Il a fait état de la nécessité de veiller au bien-être des enfants orphelins ou dont les parents sont sidéens; de mener des actions de prévention, dont la clé est l’éducation et la diffusion d’informations; d’apporter un appui aux mères enceintes, afin de prévenir la transmission du virus à l’enfant, par le biais de soins et d’un dépistage; de s’attacher au problème de la stigmatisation des enfants malades ou dont le parent est atteint.  Il a en outre lancé un appel à l’industrie pharmaceutique pour qu’elle développe, d’ici 2010, des médicaments adaptés aux enfants de tous âges, indiquant que l’Union européenne entend contribuer à la reconstitution du fonds mondial dédié à la lutte contre le sida, la tuberculose et la malaria.


M. JAGDISH KOONJUL (Maurice), au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), a estimé que le Sommet de Haut niveau de l’Assemblée générale du mois de septembre dernier avait offert une opportunité unique de travailler en faveur des enfants dans la mesure où les Objectifs du Millénaire pour le développement les affectent directement.  La mise en œuvre de la Convention des droits de l’enfant constitue notre priorité et nous avons lancé notre propre plan dans la région de la SADC qui souligne que les droits de l’enfant doivent être intégrés à tous les plans de développement.  Quelque 10,8 millions d’enfants de moins de 5 ans meurent tous les ans de malnutrition et près de 300 millions d’enfants font l’objet de violence et d’abus dans le monde, a rappelé le représentant. 


L’Objectif 2 du Millénaire cite une éducation primaire universelle, a rappelé le Représentant, tout en précisant que la pandémie du VIH/sida a un impact énorme sur la scolarité des enfants dans la mesure où ceux-ci doivent rester à la maison pour s’occuper des malades et que les enseignants sont décimés par la pandémie.  Les fillettes sont extrêmement vulnérables à la pauvreté a-t-il encore expliqué, en ce qu’elles font également l’objet de discriminations en raison de leur sexe.  Le représentant a aussi évoqué les conséquences multiples et profondes des conflits armés sur les enfants en souhaitant qu’un Conseiller sur les enfants soit détaché au sein des opérations de maintien de la paix des Nations Unies.


M. CHNG TZE CHIA (Singapour) a déclaré qu’un comité interministériel pour les questions de l’enfant avait été mis en place par son Gouvernement, pour coordonner les efforts menés dans différents domaines en faveur des droits de l’enfant.  C’est également le principe qui se trouve au cœur de la Déclaration nationale sur l’intérêt supérieur de l’enfant, qui guide toutes les actions entreprises par les organismes chargés de la promotion et de la protection des enfants.


Le Représentant a ajouté que l’éducation était l’un des objectifs majeurs poursuivi par le Gouvernement singapourien.  Ainsi, une loi a été adoptée en 2003 pour imposer à tous les enfants une scolarité d’au moins six ans, tandis que des programmes ont été mis en place depuis deux ans pour apporter un soutien scolaire aux enfants rencontrant des difficultés.  Il a ajouté que son pays avait par ailleurs amendé en 2002 sa loi sur le travail afin de placer l’âge limite de 14 à 15 ans, conformément à la Convention de l’OIT sur l’élimination du travail des enfants, que Singapour a ratifiée en 2001.


Mme TIAN NI (Chine) a rappelé que les enfants en Chine constituaient un cinquième de la population dans le monde et que son pays avait toujours attaché une importance considérable à la protection et à la promotion des enfants comme le prouve l’adhésion aux différents instruments internationaux.  Ainsi, la Chine a ratifié en 1991 la Convention sur les droits de l’enfant et en 1995 elle a ratifié la Convention de la Haye sur la Protection des enfants et la coopération dans le contexte des adoptions transfrontalières.  Nous envisageons actuellement la ratification du Protocole facultatif sur les enfants dans les conflits armés annexé à la Convention sur les droits de l’enfant, a expliqué la représentante.  En 2001, nous avons promulgué un programme d’action en faveur des enfants qui se concentre sur les enfants, la santé, l’environnement, la protection juridique et l’éducation.  En avril 2005, nous avons présenté notre premier rapport sur la mise en œuvre du Protocole facultatif sur la traite et l’exploitation sexuelle des enfants.


M. HESHAM AFIFI (Égypte) a fait état des efforts constants déployés par son pays au niveau international pour promouvoir les droits de l’enfant, citant en particulier l’accueil, en juillet 2005, de la conférence régionale sur la violence contre les enfants pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, lors de laquelle son représentant a formulé des recommandations au Secrétaire général sur ce sujet.


De nombreuses dispositions législatives nationales visent à protéger et à promouvoir les droits de l’enfant, et ce, depuis de très nombreuses années, a-t-il souligné.  Récemment, l’Égypte a adopté une loi sur l’enfant (en 1996) et créé le Conseil national pour la maternité et l’enfance (en 2000), qui a pour mandat d’apporter son appui à la mise en œuvre effective des droits des enfants.


Le représentant égyptien a également cité plusieurs projets, qui étaient orientés, en particulier, sur les enfants des rues ou sur la lutte contre l’excision des filles.  Il a ajouté que la politique permanente mise en œuvre en faveur de la santé et de l’éducation des enfants avait permis de réduire en 40 ans la mortalité infantile, de 186 à 30 pour mille naissances, de diminuer l’excision des filles et d’augmenter le taux de scolarisation (celle des filles atteint aujourd’hui 79%). 


Mme LEYSA FAYE (Sénégal) a déclaré qu’il était évident qu’en dépit des lois adoptées et des efforts déployés, la situation des enfants dans le monde et en Afrique était très préoccupante en raison des violations trop fréquentes de leurs droits, les filles étant souvent vouées à un sort encore moins enviable que les garçons.  En milieu rural où l’enfant est souvent victime de la non-scolarisation, les filles comptent parmi elles de nombreuses analphabètes.  Cette situation est due à une faisceau de facteurs: l’exclusion des enfants et des filles du processus de prise de décisions qui les concernent et le faible développement du sens de l’autonomie.  Ainsi, ces enfants sont souvent à la merci de la rue et de ses dangers.


Assumer la survie et l’épanouissement des enfants reste avant tout une responsabilité nationale et c’est ainsi que le Président du Sénégal a mobilisé l’ensemble du gouvernement et de la société pour mettre en place un système de réalisation des objectifs fixés pour le bien-être des enfants.  Les questions de l’excision, de la mendicité et de l’exploitation sexuelle sont inscrites à l’agenda national et sont régulièrement discutées lors de nos consultations avec toutes les parties prenantes: l’État, la société civile, le Parlement, les leaders traditionnels et les collectivités locales . 


En outre, Mme Faye a rappelé que, parmi les actions entreprises par son gouvernement, figurent: la création du programme de la « case des tout-petits » accueillant les enfants de 2 à 4 ans; l’allocation de 40% du budget national à l’éducation accompagnée d’une scolarisation constante des filles; la mise au point de mesures visant à éliminer les pires formes de travail des enfants et combattre l’exploitation sexuelle et la violence faite aux enfants; et la lutte contre le VIH/sida(dont le taux de prévalence est passé de 1,7% à 0,7%) surtout au niveau des jeunes par une campagne hardie de sensibilisation.


*   ***   *

À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.