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AG/PKO/183

JEAN-MARIE GUÉHENNO MET EN GARDE CONTRE LE DÉPLOIEMENT DE NOUVELLES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX ET PRÉCISE AU COMITÉ SPÉCIAL SES PRIORITÉS POUR 2005

31/01/2005
Communiqué de presse
AG/PKO/183


Comité spécial des opérations

de maintien de la paix

180e & 181e séances – matin & après-midi


JEAN-MARIE GUÉHENNO MET EN GARDE CONTRE LE DÉPLOIEMENT DE NOUVELLES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX ET PRÉCISE AU COMITÉ SPÉCIAL SES PRIORITÉS POUR 2005


Le Comité spécial des opérations de maintien de la paix a entamé aujourd’hui ses travaux dans un contexte marqué par l’augmentation considérable du nombre d’opérations déployées sur le terrain, soit 17 en cours avec des effectifs militaires et de police civile de 75 000 personnes en 2004.  Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno, a abordé le contexte général du maintien de la paix et les développements les plus importants en 2004 tout en identifiant le renforcement des capacités de police civile, la mise en place d’une force stratégique de réserve et la lutte contre les abus sexuels comme ses priorités.


Rappelant que plusieurs missions continuent d’opérer dans des environnements précaires, M. Guéhenno a souhaité que les Nations Unies n’aient pas à déployer une autre opération complexe en 2005 au-delà de ce qui a déjà été prévu.   Il a cependant précisé que 2004 a été une bonne année pour le maintien de la paix comme en atteste la situation à Timor-Leste.  « Toutefois, le chemin qui nous attend en Afghanistan, au Burundi, au Libéria, en Haïti, en République démocratique du Congo et en Côte d’Ivoire, sera périlleux.  De même, les processus politiques que nous gérons au Kosovo, Éthiopie/Érythrée et en Géorgie demeurent complexes alors que de nouvelles ressources n’ont toujours pas été fournies ».


Le Secrétaire général adjoint est également revenu sur les propositions visant à mettre en place une capacité de police civile et une force stratégique de réserve qu’une grande partie des délégations a soutenues, notamment Aminu Wali du Nigéria, qui assume également la présidence du Comité spécial des opérations de maintien de la paix.  S’exprimant au nom de l’Union européenne, le représentant du Luxembourg a appuyé l’idée de créer une capacité de police civile qui soit dotée du même statut juridique que le personnel militaire.  De nombreuses délégations ont également préconisé une meilleure coordination entre les initiatives bilatérales et multilatérales en vue de renforcer les capacités africaines de maintien de la paix.


Les allégations d’abus sexuels commis par des membres du personnel de la Mission d’observation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) ont également préoccupé les délégations qui se sont exprimées aujourd’hui, tout comme M. Guéhenno.  Celui-ci a affirmé que si les Nations Unies ne règlent pas cette question de manière énergique en 2005, c’est l’image de l’Organisation qui sera ternie de manière irréparable.  Le Secrétaire général adjoint a rappelé sa proposition de créer une unité au sein de son Département qui soit chargée des questions liées aux comportements du personnel de maintien de la paix, y compris l’exploitation et les abus sexuels.


Auparavant, le Comité a élu les membres de son Bureau, en portant à sa présidence Aminu B. Wali du Nigéria.  Alberto Pedro D’Alotto de l’Argentine, Glyn Berry du Canada, Koji Haneda du Japon et Beate Peksa-Krawiec de la Pologne ont été élus au poste de Vice-Président.  Ala Issa de l’Égypte assumera les fonctions de Rapporteur.


Le Comité spécial poursuivra demain, mardi 1er février à 10 heures son débat général.


Débat général


Concernant l’avenir du maintien de la paix, M. JEAN-MARIE GUÉHENNO, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a précisé qu’il attendait en particulier les réactions des délégations à la proposition visant à établir une capacité de police civile et une force stratégique de réserve.  Nous passons beaucoup de temps et d’argent à rectifier les erreurs commises.  Mais imaginez que nous puissions en 72 heures déployer 20 spécialistes hautement qualifiés de police civile dont la composition est équilibrée d’un point de vue géographique comme d’un point de vue du genre, des spécialistes formés ensemble qui puissent planifier et lancer un mandat de police civile des opérations de maintien de la paix.  Cet impact serait 10 fois celui que des généralistes pourraient avoir.  Imaginez si nous pouvions avoir une mission militaire prévisible et rapide.  Une force de réserve stratégique, telle qu’elle est proposée dans le rapport du Secrétaire général, serait une police d’assurance  pour les investissements substantiels que vous consentez dans le cadre de missions de maintien de la paix complexes.


Abordant le contexte général de maintien de la paix et les développements les plus importants en 2004, M. Guéhenno a estimé que trois questions dominent.  Plusieurs de nos missions ont rempli et parfois dépassé nos attentes et plusieurs d’entre elles se préparent à fermer après avoir accompli avec succès leur mandat.  Une partie importante des réformes proposées dans le rapport Brahimi ont été mises en œuvre.  Il s’est dit cependant préoccupé par le danger de vouloir trop faire, plusieurs missions continuant à opérer dans des environnements précaires, a déclaré M. Guéhenno.  Beaucoup de réformes en cours doivent être consolidées et les compromis nécessaires n’ont pas encore été faits.  Il a espéré que les Nations Unies n’auront pas à déployer une autre opération complexe en 2005 au-delà de ce qui a déjà été prévu.  Les allégations d’abus sexuels au sein de la MONUC constituent par ailleurs un sujet de préoccupation grave.  Nous devons répondre à ces allégations avec vigueur en 2005.  Nous avons un problème de fond qui n’est pas seulement une question de relations publiques.


Développant chacun de ces trois éléments, M. Guéhenno a précisé que 2004 a été une bonne année pour le maintien de la paix, notamment à Timor-Leste où les Nations Unies achèvent leur mandat.  En Sierra Leone, le Gouvernement démocratiquement élu consolide une situation fragile.  La Mission des Nations Unies au Burundi a également été déployée rapidement.  Il existe aujourd’hui 17 opérations de maintien de la paix, soit 75 000 militaires, contre 55 000 l’année dernière.  Au total 120 000 membres du personnel militaire et de police civile de 100 pays ont été mobilisés en 2004.  Nous avons négocié plus de 300 mémorandums d’accord avec les États Membres, affrété 319 aéronefs et 52 navires.  Le Secrétaire général adjoint a également précisé que la planification des missions avait elle aussi connu des transformations positives.  Par exemple, les responsables de la planification ont été présents lors de moments clefs des négociations de paix au Soudan.


Concernant la consolidation des acquis, le Secrétaire général adjoint a tenu à prévenir que le chemin qui nous attend en Afghanistan, au Burundi, au Libéria, en Haïti, en République démocratique du Congo, et en Côte d’Ivoire sera périlleux.  Les processus politique que nous gérons au Kosovo, en Éthiopie-Érythrée et en Géorgie demeurent complexes.  De plus, nous ne sommes pas équipés pour lancer de nouvelles missions.  M. Guéhenno a convenu que son Département connaissait des difficultés à mettre en place rapidement les équipes chef de file des missions qui soient adéquatement formées.  Nous connaissons donc des défis qualitatifs et quantitatifs.  Il a évoqué les différentes formes que peuvent prendre les missions de maintien de la paix, qu’elles soient des missions traditionnelles d’observation ou des missions complexes de gestion administrative de territoires.


Sur la question des allégations d’abus sexuels commis par des membres du personnel de la MONUC, M. Guéhenno a souligné que si les Nations Unies ne règlent pas cette question de manière énergique en 2005, c’est l’image des Nations Unies qui sera ternie de manière irréparable.  Le Code de conduite des Nations Unies est clair et une vingtaine de rapports, impliquant des allégations contre des membres du personnel des Nations Unies ont été transmis aux États Membres.  Jamais auparavant, les Nations Unies n’avaient été confrontées à des allégations d’une telle ampleur et jamais auparavant les Nations Unies n’avaient mené une enquête avec autant d’intensité.  Il est probable que les auteurs de tels actes s’en sont déjà rendus coupables par le passé et que nous n’avons pas abordé cette question avec l’énergie voulue.  C’est la raison pour laquelle nous formulons une série de recommandations dans ce rapport, parmi lesquelles la création d’une unité au sein du DOMP, qui soit consacrée aux comportements des Casques bleus, y compris les abus sexuels et les exploitations sexuelles.


M. AMINU WALI (Nigéria) a rendu hommage aux civils et militaires qui travaillent dans des conditions difficiles aux opérations de maintien de la paix.  Le Nigéria est un fournisseur de troupes important depuis 40 ans, a-t-il rappelé.  À l’instar de beaucoup d’autres pays fournisseurs de contingents, nous avons fait des sacrifices humains considérables, a-t-il ajouté.  M. Wali a noté avec satisfaction les différentes mesures qui ont été mises en place pour améliorer le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP).  Sa délégation appuie la proposition visant à renforcer les composantes forces de police dans les opérations de maintien de la paix.  Elle appuie également les propositions du Secrétaire général pour améliorer les capacités de déploiement rapide du DOMP.  À cet égard, M. Wali a souligné la nécessité d’une planification stratégique. En outre, il s’est félicité de la création d’une formation spécialisée par ce Département.  Le Nigéria accueillera en avril prochain un programme de formation pilote pour les responsables stratégiques de mission au Collège national militaire.  De l’avis de sa délégation, il serait possible de mieux représenter les pays qui fournissent des contingents pour les missions.  En conclusion, M. Wali a salué les efforts de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix, relevant notamment des conseils techniques qui ont été donnés pour les opérations au Burundi et au Darfour.


M. JEAN-MARC HOSCHEIT (Luxembourg), s’exprimant au nom de l’Union européenne, des pays candidats et associés, a rappelé que l’Union européenne a toujours apporté son soutien et participé activement aux missions de maintien de la paix.  L’Union européenne (UE) est le premier contributeur collectif au budget des Nations Unies consacrées au maintien de la paix, a-t-il précisé.  Il convient donc d’utiliser les fonds de manière efficace pour soutenir les opérations sur le long terme.  Évoquant les mesures prises par l’Union européenne dans le cadre de la coopération avec l’ONU, le représentant a cité notamment l’initiative visant à créer une force de gendarmerie européenne afin de la mettre à disposition en vue d’un déploiement rapide pour garantir la sécurité et l’ordre publics.  Il a ajouté qu’en avril prochain, l’Union européenne a l’intention d’organiser un séminaire UE-ONU sur la gestion des crises.  S’agissant des discussions au sein du Comité  C-34, il a suggéré que les États Membres soient mis en mesure de faire valoir leurs vues à leur propos et de soumettre au Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) leurs observations.  Par ailleurs, il a souhaité que soient poursuivis en justice les membres des opérations de maintien de la paix qui se sont rendus coupables d’abus sexuels, demandant au Secrétaire général de présenter un rapport assorti de recommandations concrètes sur cette question.


Abordant les thèmes du rapport du Secrétaire général, M. Hoscheit a assuré que l’Union européenne s’y consacrera.  S’agissant de la sûreté et de la sécurité, il a apprécié le travail de la cellule d’analyse, mais a demandé au Secrétariat de mieux définir son concept, sa structure et son rôle.  Sur la question du renforcement de la capacité opérationnelle de maintien de la paix des Nations Unies, M. Hoscheit a apprécié la proposition du Secrétaire général de constituer une »réserve stratégique» pouvant être déployée à bref délai sur demande.  Il a aussi précisé les mesures qu’il estime nécessaires pour renforcer les capacités de déploiement rapide des Nations Unies dans d’autres zones, comme celle permettant de disposer de centres de commandement militairement cohérents.  En outre, il a considéré essentiel de disposer d’une formation intégrée.  En ce qui concerne les questions de police, il a souhaité que soit adapté rapidement le statut juridique des policiers civils avec des mandats exécutifs, en leur accordant des privilèges et immunités équivalents à ceux du personnel militaire, tout en tenant compte des impératifs de transparence.  M. Hoscheit a ensuite préconisé une meilleure coordination entre les initiatives bilatérales et multilatérales en vue de renforcer les capacités africaines de maintien de la paix.  Enfin, sur le thème de la consolidation de la paix dans le contexte des opérations de maintien de la paix, le représentant a souhaité que le système de l’ONU dispose d’un mécanisme commun d’évaluation des besoins.  Les questions liées à la parité des sexes doivent être abordées de manière systématique dans tous les aspects et phases du processus de paix, a-t-il poursuivi, en prévenant les violences qui y sont liées et en prenant les mesures nécessaires pour la protection des enfants.  À cet égard, il a demandé que le DOMP crée pour chaque mission un poste d’expert de la protection de l’enfance.


Le représentant s’est félicité des progrès accomplis par le DOMP et d’autres institutions des Nations Unies dans l’élaboration de normes interorganisations en matière de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR).  Il a aussi appuyé le renforcement général des moyens dont disposent l’ONU pour promouvoir l’état de droit.  L’Union européenne encourage la coopération avec le secteur privé, compte tenu du rôle important qu’il joue dans la consolidation de la paix, a-t-il conclu.


M. MOHAMED BENNOUNA (Maroc), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non-alignés (NAM), a précisé que sa délégation fera des commentaires sur les propositions de réforme du Secrétaire général en temps voulu.  Il a indiqué dans un premier temps à quel point les pays du NAM attachent une importance particulière à la coopération entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat et les pays contributeurs de troupes.  Les pays du NAM attachent également une importance particulière à la coopération avec les organisations régionales, notamment avec les organisations régionales ou sous-régionales de maintien de la paix dont le rôle ne doit pas se substituer à celui des Nations Unies.  Compte tenu de la demande à la hausse en matière de maintien de la paix, il est essentiel que les opérations de maintien de la paix soit assorties d’un mandat clair et réaliste.


Les processus de délégation de pouvoir et les déploiements de réserves stratégiques ont renforcé les capacités des Nations Unies à fournir un soutien logistique.  Dans ce contexte, nous demandons un examen des dispositions existantes dans ces domaines.  Bien que nous soutenions le déploiement rapide, il est nécessaire de garantir une gestion efficace des aspects logistiques et financiers du maintien de la paix, aussi bien au Siège que sur le terrain.  Le représentant a par ailleurs souligné l’importance que son gouvernement attache à la sécurité du personnel de maintien de la paix qui doit revêtir un rang élevé de priorité.  Nous souhaiterions que le Secrétariat nous fournisse davantage d’informations sur les mécanismes existants sur le terrain et des détails sur les modalités de relation entre le nouveau Département de la sécurité et le Département des opérations de maintien de la paix.  Nous aimerions avoir également des éclaircissements au sujet de la Cellule conjointe d’analyse.


Insistant sur l’importance des processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR), le représentant a également appelé à davantage de financement de la part de la communauté des donateurs.  Le représentant a par ailleurs abordé la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité en précisant que les pays du NAM se ralliaient à la position selon laquelle les femmes et les enfants constituent les populations les plus vulnérables et que la communauté internationale devait se mobiliser à cet égard.   Nous sommes en faveur d’une intégration de la parité entre les sexes lors de la phase de planification et de déploiement des missions.  Dans ce contexte, la formation à la parité entre les hommes et les femmes est essentielle.  Le représentant a par ailleurs indiqué que les membres du personnel de maintien de la paix des Nations Unies devaient agir de manière à préserver l’image de l’Organisation.  Nous sommes en faveur d’un examen poussé de cette question, a indiqué le représentant.


M. ALBERTO PEDRO D’ALOTTO (Argentine), s’exprimant au nom de plusieurs autres pays d’Amérique centrale et du Sud, a réaffirmé que les mécanismes des opérations de maintien de la paix sont les plus efficaces pour répondre aux conflits armés qui menacent la paix et la sécurité internationales.  Nos pays contribuent à ces opérations, a-t-il précisé, mais celles-ci ne peuvent régler les causes profondes des conflits, soulignant l’importance de la prévention des conflits.  Évoquant la MINUSTAH, la seule mission des Nations Unies dans la région, il a indiqué que la plupart du personnel vient des pays qu’il représente, ce qui montre leur ferme engagement.  Par ailleurs, le représentant a souhaité que les États Membres présentent un plus grand nombre de candidatures de femmes pour répondre aux exigences de parité entre les sexes dans les missions.  Sa délégation, a-t-il poursuivi, appuie les propositions visant la création d’une force de réserve stratégique et d’une force de police permanente.  À cet égard, il a demandé qu’on veille à ce que tout le personnel déployé bénéficie de toutes les facilités sanitaires et de communication.


La mise en place d’un cadre juridique bien défini est essentiel avant le déploiement d’une mission, a insisté le représentant argentin.  Il a souhaité que soit mis en place un système souple de capacité complémentaire afin de renforcer la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales.  Il a par ailleurs soutenu le programme de réinsertion des anciens combattants des opérations de maintien de la paix.  Il a aussi demandé que des mesures soient prises contre les responsables actifs ou passifs des abus sexuels allégués.  La fourniture de renseignements sur les conflits doit être améliorée, a-t-il ensuite préconisé.  Pour ce qui est de l’organisation des opérations militaires, il est essentiel d’établir une structure de commandement articulé.  Pour ce qui est de la bonne gestion des opérations de maintien de la paix, le représentant a souligné l’importance de la formation du personnel et s’est félicité de la diffusion d’informations sur les opérations de maintien de la paix.


M. MAGED ABDELAZIZ (Égypte) a rappelé que le consentement du pays hôte et l’impartialité, la nécessité de disposer de mandats clairs, la nécessité de disposer d’un financement adéquat sont les principes fondamentaux qui devraient régir les opérations de maintien de la paix des Nations Unies.  Évoquant l’évolution du concept de base des relations internationales, le représentant a relevé que les opérations de maintien de la paix évoluent dans le cadre d’un mandat politique et législatif en pleine évolution.  Abordant la question de la terminologie entre maintien de la paix et appui à la paix, le représentant égyptien a estimé que le Comité spécial devra se pencher sur une question qui va au-delà des subtilités linguistiques, à savoir celle de la philosophie du maintien de la paix. 


La notion d’intégration des différents éléments des missions, comme le recommande le Secrétaire général, est toujours en chantier et l’expérience a donné lieu à des succès mitigés, a estimé le représentant.  Sa délégation a pris bonne note de la proposition sur les réserves stratégiques et sur le renforcement des capacités de la police civile.  Le représentant a également estimé que le processus de consultation entre le Conseil de sécurité et les pays contributeurs de troupes n’était pas satisfaisant, le Conseil se contentant de donner ses ordres aux pays contributeurs de troupes.  Au sujet des allégations d’abus sexuels de la part de certains membres du personnel de maintien de la paix, le représentant a demandé que cette question soit réglée dans la plus grande transparence.


M. TIM MCIVOR (Nouvelle-Zélande), s’exprimant aussi au nom du Canada et de l’Australie, a souhaité que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix prenne des mesures audacieuses et concrètes pour faire face aux défis urgents en matière de paix et de sécurité internationales.  Parmi les grands défis, il a cité le besoin immédiat de régler les cas d’abus sexuels.  Il a estimé que l’augmentation des opérations de maintien de la paix, l’amélioration de la gestion de ces opérations et la promotion d’une approche intégrée constituent également d’importantes questions à l’ordre du jour.  Comme question plus technique, il a cité la mise en place de modules de formation standardisée.  M. Mc Ivor a par ailleurs souhaité que les officiers aient le statut d’observateur militaire.  Le Comité spécial a déjà traité des problèmes de discipline au sein du personnel des missions, a-t-il relevé, mais cette question demeure d’actualité, ce qui cause un préjudice aux Nations Unies.  Les experts nationaux de nos trois pays ont fait part de leurs avis à ce sujet, a-t-il précisé.  Sa délégation salue l’initiative de présenter rapidement un rapport sur cette question.  Il incombe également aux pays fournisseurs de troupes de veiller à ce que les personnes envoyées en mission répondent à un certain nombre de normes en matière de discipline.  La parité entre les sexes constitue aussi un élément essentiel permettant d’éliminer l’exploitation sexuelle, a-t-il dit.  Abordant les recommandations du Secrétaire général sur la nécessité de déploiement rapide, M. McIvor a estimé que les États Membres n’ont pas fourni l’efficacité nécessaire dans ce domaine.  En conclusion, il a réaffirmé son soutien à l’initiative d’établir des opérations de paix en dehors des Nations Unies, citant notamment le rôle du Canada en Haïti.  Il a aussi donné l’exemple des Îles Salomon, où une mission dirigée par l’Australie et coordonnant 11 pays a aidé à remettre en place un régime politique, facilitant ensuite la mission de l’ONU.


M. SHINICHI KITAOKA (Japon) a rappelé que son pays participe activement aux opérations de maintien de la paix, tant par la fourniture de contingents que par l’aide financière et matérielle.  En ce qui concerne une mission potentielle au Soudan, il a estimé que sa création aura une conséquence sur l’ampleur des opérations de maintien de la paix et exigera une plus grande coopération des États Membres.  S’agissant du budget élevé des opérations de maintien de la paix, il a demandé que le Conseil de sécurité rende des comptes.  Pour une gestion efficace, il a jugé nécessaire de réexaminer de façon régulière les missions, tout en réduisant leur ampleur au fur et à mesure de l’accomplissement de leur mandat.  Le Gouvernement japonais est très préoccupé par les allégations d’abus sexuels commis par le personnel de la MONUC, a-t-il poursuivi.  Le représentant a appuyé la politique de tolérance zéro des Nations Unies et a souhaité qu’il soit mis fin rapidement à ces allégations et que, sur la base des conclusions de l’enquête, des mesures appropriées soient prises par les autorités compétentes.  Sa délégation soutient en outre l’idée d’assurer une formation sur la conduite du personnel des opérations de maintien de la paix.


Concernant la recommandation de déploiement rapide des opérations de maintien de la paix, le représentant japonais a considéré que la création d’une force de réserve stratégique mérite d’être étudiée plus avant.  Par ailleurs, a-t-il relevé, il existe un fossé institutionnel au sein des Nations Unies, qui empêche de traiter de nombreuses questions.  C’est pourquoi, une commission de consolidation serait utile.  Le représentant s’est félicité de la coopération qui existe déjà entre l’ONU et les organisations régionales et a souhaité qu’elle soit étendue.  Enfin, s’agissant du recrutement du personnel par le DOMP, il a demandé qu’on respecte le principe de la bonne représentation géographique des États Membres.


M. FRANCIS MUTISI (Zimbabwe) a déclaré que l’augmentation récente du nombre d’opérations de maintien de la paix est une cause de préoccupation majeure pour son pays.  L’un des défis les plus importants se pose en termes de logistique opérationnelle.  Nous nous félicitons de la coopération tripartite entre le Secrétariat, le Conseil de sécurité et les pays contributeurs de troupes.  Cette coopération est un atout dans la mesure où elle nous permet de mieux comprendre les enjeux.  Toutefois, il est devenu de plus en plus évident que les Nations Unies ne peuvent à elles seules faire face à cette augmentation de la demande.  C’est pourquoi, il est essentiel de renforcer les capacités régionales et d’y associer d’autres acteurs.  Les Nations Unies doivent être prêtes à fournir une aide plus soutenue aux organisations régionales, a encore souligné le représentant.  L’Union africaine est en train de mettre en place une force de réserve en attente qui doit être opérationnelle d’ici à 2010 et cette tâche énorme ne pourra pas être menée à bien sans la coopération de la communauté internationale et de ses partenaires. 


Tout en rendant hommage aux Nations Unies, au G-8, à l’Union européenne et aux partenaires bilatéraux, le représentant a cependant regretté la fragmentation des efforts en cours.  Il a donc préconisé une nouvelle approche qui permettrait un transfert de l’aide bilatérale vers une aide sous-régionale axée sur le soutien logistique.  L’importance des organisations régionales et des autres alliances a été démontrée dans le cadre notamment de la Mission des Nations Unies au Timor oriental, a encore souligné le représentant qui a appelé la communauté internationale à aider à explorer le plein potentiel des structures sous-régionales.


M. ROLANDO RUIZ ROSAS (Pérou) a rappelé qu’à ce jour, les Nations Unies comptent 17 opérations de maintien de la paix, faisant observer qu’elles ont surtout été mises en place pour contenir des conflits armés et non pour les prévenir.  Les missions de maintien de la paix doivent comprendre des programmes multidimensionnels d’édification de l’État, a-t-il suggéré, en encourageant le développement des capacités nationales.  Le Pérou a exprimé son soutien à la création d’une force de réserve stratégique que les États feraient volontairement, a expliqué son représentant, afin de préparer des troupes qui seraient mises à disposition des opérations de maintien de la paix.  De l’avis de sa délégation, ce type de force peut prévenir l’atteinte aux droits les plus élémentaires que la guerre civile entraîne.  Le représentant a réitéré sa demande de mécanismes qui prennent compte les restrictions financières auxquelles est confronté le déploiement des contingents.  Les abus sexuels ne doivent pas bénéficier de l’impunité, a-t-il souligné, en appuyant la publication d’un rapport exhaustif visant à prévenir de tels actes.  Enfin, le représentant a indiqué qu’il faut approfondir les relations de travail du Comité spécial pour optimiser notamment les débats qui ont lieu à la Quatrième Commission et au sein du Comité spécial.


M. HA CHAN-HO (République de Corée) a lui aussi constaté que l’augmentation du nombre d’opérations de maintien de la paix au cours des dernières années a exercé une pression énorme sur la capacité des Nations Unies et en particulier sur sa capacité de réaction rapide.  Au cours des quatre dernières années, quatre opérations de maintien de la paix complexes -en Haïti, en Côte d’Ivoire, au Burundi et en République démocratique du Congo- ont été soit lancées, déployées ou élargies.  Nous nous attendons à ce qu’une opération importante soit déployée prochainement au Soudan.  L’ampleur et la complexité de telles opérations ont quasiment épuisé les ressources des Nations Unies.  Le représentant a soutenu les propositions du Département des opérations de maintien de la paix de créer une force de réserve stratégique pour le maintien de la paix des Nations Unies qui soit divisée en unités de 1 250 troupes chacune.  Une telle capacité permettrait à l’Organisation d’intervenir rapidement dans un conflit.  Nous sommes également en faveur d’une capacité de police civile, a-t-il ajouté.  


Le représentant a également appuyé l’idée de réexaminer le processus de prise de décisions qui doivent associer tous les acteurs du maintien de la paix.  Il est également indispensable d’étudier le partage des tâches parmi les acteurs du maintien de la paix car le Département des opérations de maintien de la paix n’est pas capable de porter le fardeau de toutes les opérations de consolidation de la paix.  En outre, pour que l’on accorde un rôle accru aux organisations régionales, il faudrait continuer de renforcer la capacité de maintien de la paix de l’Union africaine.  Le représentant a aussi plaidé en faveur de la coopération entre les opérations de maintien de la paix elles-mêmes.


M. GEIR ASBJORNSEN (Norvège), évoquant la question des allégations d’exploitation et d’abus sexuels commis par certains membres du personnel de la MONUC, a soutenu la publication d’un rapport qui contiendrait des recommandations à ce sujet et qui ferait l’objet d’une session extraordinaire du Comité spécial au printemps.  Il a insisté sur le recrutement de davantage de femmes dans les opérations de maintien de paix, convaincu que leur présence pourrait contribuer à prévenir des abus dans le futur.  En ce qui concerne la Division de la police militaire et civile au Département des opérations de maintien de la paix (DOMP), M. Asbjornsen a estimé qu’elle doit être renforcée pour faire face au nombre croissant de personnel sur le terrain.  Dans le cas où on envisagerait de nouvelles missions, le représentant a suggéré qu’on examine de plus près des nouveaux modèles et concepts.  Les missions de contrôle peuvent aussi faire part de leur expérience inestimable, a-t-il ajouté.


S’agissant des changements envisagés quant au concept de commandement, M. Asbjornsen a souhaité que soit créée une unité de commandement indispensable pour toute opération militaire.  La Norvège soutient l’approche des missions intégrées pour plus de cohérence au sein des activités de l’ONU, à condition qu’elle soit pratiquée avec discernement.  Quant à la protection du personnel sur le terrain, il a souligné le besoin de renforcer la capacité de renseignement au niveau opérationnel.  Le représentant a aussi noté la proposition de créer une force de réserve stratégique pour le déploiement rapide.  Comme le suggère le Secrétaire général, le concept même de maintien de la paix doit être examiné avec un regard neuf, a-t-il conclu.


M. REGINALDO DOS SANTOS (Brésil) a également constaté que les Nations Unies se trouvaient face à une augmentation du nombre d’opérations de maintien de la paix qui semblent servir de test aux réformes mises en œuvre à la suite de la publication du rapport Brahimi.  Désormais, la sécurité, le développement et la réconciliation politique ne constituent pas des étapes successives.  Chaque opération doit faire face à des défis uniques et est caractérisée par des facteurs distincts.  Dans le cadre d’opérations multidimensionnelles, nous assistons parfois à un déséquilibre entre les éléments humanitaire, militaire, politique et de développement ou relatifs aux droits de l’homme.  Évoquant la participation du Brésil aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies, le représentant a précisé que son pays avait achevé le déploiement de son contingent en Haïti en moins de 60 jours à la suite de l’adoption de la résolution 1542 du Conseil de sécurité.  En outre, la réforme en cours de la législation brésilienne prévoit de permettre une participation plus importante des militaires aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies. 


Compte tenu des missions récentes, une capacité de déploiement rapide doit être un objectif principal du maintien de la paix et, dans ce contexte, des accords entre les Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales constitueraient un outil important, a estimé le représentant brésilien.  Il a cependant émis des doutes sur le concept de réserve stratégique, en s’interrogeant sur l’autorité qui serait responsable des coûts induits.  Quel type de mission serait impliqué? a-t-il voulu savoir.  L’idée d’une capacité de police civile est positive mais dans quelle mesure cette capacité sera-t-elle plus efficace que le système actuel mis en œuvre à la suite de la publication du rapport Brahimi, s’est-il encore demandé.


M. LOUAY FALLOUH (République arabe syrienne) a souscrit à la déclaration faite par le représentant du Maroc, au nom du Mouvement des pays non alignés.  L’ONU, grâce à ses réalisations en matière de maintien de la paix, a pu renforcer sa légitimité dans son rôle en faveur de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il considéré.  De l’avis de sa délégation, les opérations de maintien de la paix constituent un outil efficace qui permet d’apaiser les tensions et de consolider la paix.  Ces opérations ne doivent pas cependant se substituer au règlement des conflits à long terme.  Le représentant s’est félicité de l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST) en Syrie.  Dans le cas du Moyen-Orient, il a fait remarquer que des missions sont en place depuis plusieurs décennies, comme la FINUL.  Les missions de maintien de la paix, a-t-il insisté, doivent s’en tenir au mandat qui leur est confié.  Il est important à ses yeux d’améliorer les procédures appliquées au Siège et au sein de missions, afin d’améliorer la sécurité du personnel.  Enfin, abordant les concepts présentés dans le rapport du Secrétaire général, il a estimé qu’ils ne sont pas assez définis.  Il faudra cependant les examiner plus avant, au cours du débat du Comité spécial.


M. MWELWA C. MUSAMBACHIME (Zambie) a rappelé que son pays était l’un des importants contributeurs de troupes en Afrique.  Il a fait part de l’appui de sa délégation aux mesures mises en place par le Secrétaire général pour régler la question des abus sexuels par le personnel du maintien de la paix.  La Zambie se plie à ces mesures et fera en sorte que ces attitudes soient éliminées des opérations de maintien de la paix comme elle coopérera pour traduire en justice leurs auteurs.  Le représentant s’est ensuite félicité de certaines mesures prises par le Département des opérations de maintien de la paix comme l’établissement de réserves stratégiques qui ont amélioré la capacité de planification et de déploiement rapide des Nations Unies.  Le représentant s’est également félicité de l’accent mis sur la question de la parité entre les sexes en précisant que l’armée zambienne compte de plus en plus de femmes.  Passant à la capacité de maintien de la paix de l’Afrique, le représentant a estimé que l’édification d’une capacité de réaction exigeait une aide bilatérale.  De même, la communauté internationale doit accroître son aide au Fonds spécial pour la paix de l’Union africaine.  Celle-ci doit recevoir un soutien dans le domaine du recrutement et de la formation de son personnel ainsi que dans le domaine de la consolidation de la paix, tant ses ressources sont à la limite de l’épuisement. 


M. ARMIN E. ANDEREYA (Chili) a souligné la nouvelle réalité à laquelle doivent faire face l’ONU et la communauté internationale, étant donné le nombre croissant d’opérations de maintien de la paix.  Les pays fournisseurs de contingents en particulier sont sollicités et font des efforts considérables, a-t-il relevé.  Il a aussi salué les progrès récemment accomplis par le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) dans la gestion de ces opérations.  Le représentant a ensuite abordé le problème des remboursements pour les pays fournisseurs de contingents dans les cas de déploiement rapide.  Pour agir très vite, ils utilisent des méthodes non autorisées par le DOMP, ce qui les pénalisera financièrement au moment du remboursement.  Mais s’ils attendent les autorisations afin d’être mieux remboursés, le déploiement rapide ne pourra être réalisé.  Il a donc demandé qu’on accorde plus d’importance au remboursement des États qui ont envoyé d’urgence des troupes, lorsque les moyens de transport fournis par l’ONU ne permettent pas de le faire dans les délais prescrits.  Le représentant a ensuite mis l’accent sur la protection des civils par les Casques bleus lorsqu’elle est expressément prévue.  À cet égard, le représentant a évoqué la commémoration du génocide nazi et souhaité qu’on commémore un jour ceux du Cambodge, de l’ex-Yougoslavie et du Rwanda.  Pour lui, la première obligation de l’ONU dans les opérations de maintien de la paix est de protéger l’intégrité des populations civiles.  Concernant la question de la mauvaise conduite du personnel des missions, il a demandé qu’on poursuive tout type d’abus et qu’on prévoie une enquête systématique sur des faits similaires.  De même, il a souhaité qu’on élabore un code de conduite.


M. SAKDA SANGSNIT (Thaïlande) s’est félicité du rapport du Secrétaire général, bien structuré et au contenu très riche.  Il a souscrit à la déclaration du représentant du Maroc au nom du Mouvement des pays non alignés.  Les besoins en matière de ressources humaines reviennent dans les discussions de façon récurrente, a-t-il noté.  Il a estimé que les missions de maintien de la paix doivent disposer d’éléments de police civile structurés, avec des officiers aussi qualifiés que possible et des experts.  Il a ajouté que la Thaïlande appuie les efforts en vue de renforcer la capacité de réserve des Nations Unies.  Il faut tenir compte des besoins en matière de stabilisation, a-t-il poursuivi, et la constitution d’une telle réserve doit être discutée par les États Membres.  Il a ajouté que les missions de maintien de la paix doivent être planifiées à long terme, avec des mandats clairs et bien définis, ainsi qu’une stratégie de sortie.  La paix et la stabilité doivent au préalable avoir été acceptées par la population, a-t-il insisté, ce qui implique que le personnel des missions comprenne bien son rôle et soit en mesure de bien exercer sa mission.  En conclusion, le représentant a évoqué la sécurité du personnel, question qui inquiète le plus la délégation thaïlandaise.  Enfin, il faut travailler davantage sur la collecte des renseignements, a-t-il conclu.


Documentation


Rapport du Secrétaire général sur l’application des recommandations du Comité spécial des opérations de maintien de la paix A/59/608


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