En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/9201

IL FAUT UN CONSENSUS MONDIAL SUR LES MENACES LES PLUS GRAVES QUI PESENT SUR LA PLANETE ET LES MOYENS DE LES ECARTER, DECLARE KOFI ANNAN A NEW YORK

24/03/2004
Communiqué de presse
SG/SM/9201


Il faut un consensus mondial sur les menaces les plus graves qui pesent sur la planete et les moyens de les ecarter, declare Kofi Annan a New York


On trouvera ci-après la transcription des observations faites par le Secrétaire général avant de s’entretenir publiquement avec Richard N. Haass, Président du Conseil des relations extérieures, lors d’une conférence donnée à la mémoire de David A. Morse le 16 mars à New York, sur le thème « L’ONU et la sécurité mondiale au XXIe siècle ».


Merci beaucoup Richard.  Permettez-moi de dire tout d’abord combien je suis honoré d’être invité à prendre part, en présence de son épouse Mildred, à cette conférence organisée en hommage à David Morse.  Aimé et respecté dans toute la famille des Nations Unies, figure de proue de l’Organisation internationale du Travail, David Morse restera dans notre mémoire quelqu’un qui savait concilier idéalisme et action.


J’espère que personne, ce soir, n’attendait de moi un discours.  Je préfère presque toujours un échange d’idées entre deux personnes à un long soliloque.  Vous pouvez du reste compter sur Richard pour m’empêcher de digresser.


Je voudrais commencer par répéter, ce que j’ai dit à l’Assemblée générale en septembre dernier: je nous crois aujourd’hui à la croisée des chemins, dans l’histoire de l’ONU certes, mais aussi dans l’histoire du monde depuis 1945.


Personne ne prétend, certes, que tout allait pour le mieux jusqu’aux toutes dernières années; toutefois, la communauté internationale s’accordait au moins sur un certain nombre de principes énoncés dans la Charte des Nations Unies.  Les pays étaient censés ne recourir à la force que dans l’exercice de leur droit de légitime défense ou en vertu d’une décision collective suivant laquelle le maintien de la paix ne pouvait être assuré qu’à ce prix.


Ceux qui recourent à la force dans d’autres cas s’exposaient à l’opprobre générale, ou au moins se sentaient tenus de se justifier en insistant sur le caractère exceptionnel de leur action.


La situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui est tout autre.  Un certain nombre de pays, les États-Unis, en tête, soutiennent que certaines menaces, en particulier le terrorisme et les armes de destruction massive, font peser un tel danger qu’ils ne peuvent pas se permettre d’attendre, pour agir, qu’une agression ait été commise à leur encontre, ou que les membres du Conseil de sécurité se soient mis d’accord.  D’autres pays considèrent en revanche qu’il est plus dangereux encore qu’un État s’arroge le droit de recourir à la force, et qu’en tout état de cause, ces menaces ne sont pas perçues comme les plus graves par la majorité des habitants de la planète.  Ceux-ci se sentent beaucoup plus directement menacés par l’extrême pauvreté, la famine, la maladie, la dégradation de l’environnement, ou encore la violence qui, si rudimentaire que soient les armes, se déchaîne en temps de guerre civile ou d’effondrement de l’ordre public.  Nous avons vu ce qui s’est passé en Somalie, au Rwanda, et nous savons ce qu’il y a lieu de craindre en Haïti.


C’est pourquoi, en novembre dernier, j’ai chargé un Groupe de personnalités éminentes de nous aider à forger un nouveau consensus, d’une part, sur la nature des menaces les plus graves qui pèsent sur l’humanité en ce nouveau siècle et, de l’autre, sur les moyens de transformer et d’améliorer les politiques et les institutions en vue d’écarter de tels dangers.


J’espère que les travaux de ce groupe faciliteront un consensus mondial sur la nature de ces menaces, et que l’on cessera de croire que certains dangers, comme le terrorisme et les armes de destruction massive, ne concernent que le « Nord » tandis que seul le « Sud » serait exposé aux menaces liées notamment à la pauvreté et à la faim.  Il faut que l’ensemble de la communauté internationale se fasse une idée claire des menaces auxquelles elle doit faire face et des défis qu’elle doit relever collectivement, car en négliger ne fut-ce qu’un seul pourrait anéantir tous ses efforts.


Mais j’espère aussi que le Groupe ira plus loin et recommandera un certain nombre de changements concrets à apporter à nos politiques et à nos institutions, y compris l’ONU, pour que nous puissions réagir collectivement et efficacement.


L’un des membres de ce groupe est quelqu’un que vous connaissez bien: il s’agit de Brent Scowcroft.  Les autres, originaires de toutes les régions du monde, sont tout aussi éminents, compétents et expérimentés que lui.  Ils me soumettront leur rapport d’ici à la fin de l’année, pour que je puisse présenter mes recommandations aux États Membres.


C’est évidemment aux gouvernements des États Membres qu’il appartiendra de prendre les décisions finales, mais des gens comme vous, des institutions comme le Conseil des relations extérieures, peuvent néanmoins jouer un rôle essentiel.  Vous pouvez en effet contribuer aux travaux du Groupe en lui soumettant vos idées et suggestions; lorsque ses recommandations seront rendues publiques, vous pourrez aider à les faire connaître et à mobiliser le soutien voulu pour que les décideurs, dans ce pays et ailleurs, les prennent au sérieux et cherchent vraiment à s’entendre sur les changements qui s’imposent.


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