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FEM/1297

LE CEDAW ENGAGE UN DIALOGUE AVEC LES ONG EN VUE D’ÉLABORER UNE RECOMMANDATION GÉNÉRALE SUR L’INTERPRÉTATION DE L’ARTICLE 2 DE LA CONVENTION SUR LES MESURES POLITIQUES

21/07/2004
Communiqué de presse
FEM/1297


Comité pour l’élimination de la

discrimination à l’égard des femmes

664e séance – matin


LE CEDAW ENGAGE UN DIALOGUE AVEC LES ONG EN VUE D’ÉLABORER UNE RECOMMANDATION GÉNÉRALE SUR L’INTERPRÉTATION DE L’ARTICLE 2 DE LA CONVENTION SUR LES MESURES POLITIQUES


Le Comité pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes a engagé ce matin la première phase de l’élaboration de sa 26 recommandation générale par une discussion avec des organisations non gouvernementales sur les moyens de préciser les obligations des États parties en vertu de l’article 2 de la Convention, relatif aux mesures politiques et juridiques tendant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes.

Clef de voûte de la Convention, l’article 2 régit l’interprétation de tous les articles suivants.  Or, il semblerait qu’un certain nombre d’États parties n’envisagent la « poursuite par tous les moyens appropriés et sans retard d’une politique tendant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes » que sous l’angle législatif ou ne prennent pas conscience de la portée des obligations qui leur incombent pour assurer la pleine mise en oeuvre des droits des femmes et parvenir à l’égalité entre les sexes.  Comme l’a souligné la représentante du Fonds de développement des Nations Unies pour les femmes, qui s’exprimait au nom de plusieurs institutions spécialisées des Nations Unies, par « mesures appropriées », il convient d’entendre les mesures accompagnant les dispositifs législatifs et les politiques et programmes.  La Convention condamnant de jure et de facto toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, a-t-elle souligné, les États doivent procéder à l’allocation de ressources budgétaires appropriées, à la réorganisation des institutions, à la formation des personnels de la fonction publique, et en particulier ceux chargés de l’application des lois et de l’administration de la justice, ainsi qu’à la sensibilisation de tous les groupes de la société.

Trois points principaux se sont dégagés des interventions des organisations non gouvernementales invitées à la discussion.  Il est ainsi apparu nécessaire de souligner le caractère contraignant de la Convention dans les contextes de conflits armés, y compris dans les conflits internes.  Deux organisations ont fait remarquer l’absence de mesures répressives contre les discriminations fondées sur le sexe perpétrées en période de conflit, qui revêtent essentiellement la forme de violences sexuelles.  Faisant référence aux cas des 300 femmes violées lors des émeutes dans l’État du Gujarat, en Inde, en 2002, la représentante de IWRAW Asia Pacific and Partners for Law and Development, ONG indienne, a fait remarquer que le viol des femmes servait très souvent d’arme de guerre.  Comme sa collègue de la section du Sri Lanka de IWRAW Asia Pacific, elle a dénoncé l’absence de recours appropriés pour ces femmes qui sont stigmatisées par la société à la suite des sévices sexuels qu’elles ont subis.  Une telle situation vise non seulement à causer du tort à la victime mais également à tous les membres de la communauté à laquelle elle appartient.  Ces violations flagrantes des droits des femmes, a-t-elle estimé, constituent de véritables tentatives de crimes contre l’humanité et de génocide.  C’est pourquoi, elle a appelé les experts à encourager, dans la recommandation générale, l’application des normes du droit international et la pénalisation des cas de violences sexuelles perpétrées en temps de guerre. 

Les discriminations en matière de santé sexuelle et reproductive constituent, de l’avis des ONG, un autre domaine qui mérite l’attention particulière des experts.  La représentante du Center for Reproductive Rights a notamment dénoncé les discriminations dont sont victimes les femmes du fait de la passivité ou de l’inefficacité des gouvernements face à des taux élevés de mortalité maternelle.  La majorité du demi million de décès causés chaque année par des complications pendant la grossesse ou l’accouchement enregistrés, a-t-elle dénoncé, en ajoutant que les femmes faisaient aussi l’objet de discriminations du fait de leur vulnérabilité spécifique au virus du VIH/sida.  À cet égard, elle a déploré le manque d’agressivité des politiques de prévention et d’éducation publique.  La vulnérabilité disproportionnée des femmes et des petites filles, a-t-elle poursuivi, est aggravée par certaines pratiques sexistes, culturelles ou religieuses comme les mutilations génitales et le mariage forcé, qui nient l’égalité des adolescentes en matière de protection et de jouissance des droits humains.  Elle a également dénoncé les législations restrictives, parfois répressives, de certains gouvernements en matière de planification familiale et d’avortement, estimant qu’elles violaient le droit des femmes à gérer leur fertilité et les forçaient à mettre en danger leur vie et leur santé. 

La nécessité de rendre la Convention directement applicable en droit interne et la possibilité pour les magistrats d’invoquer les dispositions de la Convention dans des affaires concernant des discriminations fondées sur le sexe comptait également parmi les préoccupations des ONG.

Au-delà de son mandat de suivi de l’application de la Convention par chaque État partie, le Comité formule des recommandations générales fondées ayant vocation à faciliter aux États parties l’interprétation des dispositions de la Convention et leur application.  À ce jour, 25recommandations générales ont été formulées sur des sujets tels que les femmes et le pouvoir économique; l'impact des ajustements structurels; les congés de maternité; la violence à l'égard des femmes; la conciliation de la maternité et du travail; la diffusion du texte de la Convention, le degré de participation des organisations non gouvernementales (ONG) à l'élaboration des rapports nationaux, sur les mesures temporaires spéciales visant à accélérer l’instauration d'une égalité de facto entre les hommes et les femmes.  Depuis 1997, l’élaboration des recommandations générales est un processus en trois parties.  Le premier stade, celui auquel s’est prêté le Comité aujourd’hui, consiste en un dialogue interactif avec les organisations non gouvernementales et d’autres organisations, dont des agences de l’ONU.  À la suite de ce dialogue, un expert est chargé de rédiger un projet de texte qui sera débattu à la prochaine session du Comité par un de ses Groupes de travail.  À la session suivante, les membres du Comité adoptent la recommandation générale.

Outre les 23 experts du Comité, les représentants des organisations non gouvernementales, organes des Nations Unies et agences spécialisées suivants ont participé au dialogue: Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM), au nom du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), de l’Organisation mondiale de la santé (WHO), et du Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA); Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP); International Women’s Rights Action Watch Asia-Pacific (Malaisie); Partners for Law and Development (Inde); Center for Human Rights, Faculté de droit, Université de Colombo (Sri Lanka); Equality Now (États-Unis); Kharkic Center for Women’s Studies (Ukraine); etCenter for Reproductive Rights (États-Unis).

La prochaine réunion du Comité sera annoncée dans le Journal.


APPLICATION DE L’ARTICLE 21 DE LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES


Discussion générale sur la recommandation générale nº 26 sur l’Article 2


Intervenant au nom du Fonds de développement des Nations Unies pour les femmes (UNIFEM), du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), de l’Organisation mondiale de la santé (WHO), et du Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA), Mme LEE WALDORF a souligné l’importance de clarifier les obligations découlant de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination, instrument contraignant.  L’application de la Convention incombe à l’État partie et à toutes les instances gouvernementales.  Si les mécanismes nationaux de promotion des femmes jouent un rôle clef dans la mise en oeuvre de la Convention, ils ne sont pas en mesure de répondre à l’ampleur des engagements au titre de la Convention.  En vertu de l’article 2, l’État doit mettre en oeuvre une stratégie globale pour éliminer toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes et non pas seulement adopter des mesures spéciales.  L’application de la Convention, a-t-elle poursuivi, doit impliquer tous les secteurs de la société, tant dans le domaine privé que dans le domaine public.  Elle a souligné combien il était important d’assurer la participation du plus grand nombre d’instances et organisations, y compris de la société civile, dans le processus d’examen de la législation visant à identifier les dispositions discriminatoires ainsi que dans l’évaluation de l’impact des mesures prises pour éliminer les discriminations.


Elle a estimé que la recommandation générale sur l’article 2 devrait fournir des directives concrètes sur les différents types de mesures non législatives qui doivent être prises pour accompagner l’incorporation de la Convention dans le droit interne.  La recommandation devrait comporter des directives sur les mesures concrètes que l’État partie doit prendre en matière de lutte contre la violence à l’égard des femmes et d’égalité entre les sexes en matière de soins de santé.  La représentante du Fonds de développement des Nations Unies pour la femme a par ailleurs souligné que la Convention ne distinguait pas citoyens et non-citoyens et a insisté sur la nécessité de prendre des mesures pour éliminer les discriminations dont sont victimes les femmes tout au long du cycle de vie.  Une attention particulière, a-t-elle dit, devrait être accordée aux formes de discriminations particulières affectant les femmes âgées, les veuves et les femmes seules.  Il est important de souligner dans la recommandation générale que les différences culturelles ou religieuses ne peuvent en aucun cas justifier la non-application de la Convention et que l’application de la Convention devait être garantie dans un contexte culturel et religieux.  Il faut, a-t-elle dit, insister sur l’obligation d’explorer les complémentarités entre les différentes normes culturelles et religieuses et d’identifier les moyens de réaliser l’égalité entre les sexes dans les différents contextes culturels et religieux.  S’agissant des mesures macroéconomiques, elle a fait observer que les politiques de réduction de la pauvreté, les modalités de paiement de la dette et les accords commerciaux prenaient que très rarement en compte la problématique de l’égalité entre les sexes et leur impact sur les droits des femmes.  Elle a pris à son compte la recommandation faite par le Rapporteur spécial pour le droit à la santé à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de prendre en compte les obligations des États en matière de droits de l’homme et de coopération pour la promotion des droits de l’homme lors de la formulation de politiques commerciales. 


Intervenant au nom de International Women’s Rights Action Watch, M. RITA RAJ a rappelé que le droit interne ne peut être en aucun cas invoqué par un État partie comme excuse pour ne pas appliquer la Convention.  Dans les pays où il existe un système fédéraliste ou des communautés autonomes, l’État central doit agir de manière responsable pour l’application des dispositions de la Convention.  L’article 2 de la Convention exige en effet l’élimination des discriminations sous toutes leurs formes et ne doit pas se limiter aux seules citoyennes: il s’applique à toutes les femmes, quelle que soit leur nationalité.  À cette fin, l’État partie est par ailleurs tenu de mettre en place certaines formes de mesures temporaires spéciales, a-t-elle rappelé.  L’article 2 demande aussi l’élimination de telles discriminations sans retard et enjoint de protéger les droits des violations commises par un tiers.  Si l’État n’agit pas rapidement, il pourrait être jugé de complice, a-t-elle prévenu, ajoutant qu’au titre de ses obligations, il doit en outre éliminer tous les obstacles existants, notamment dans le cadre juridique, au sein duquel la Convention doit être incorporée.  L’État partie doit s’assurer que des mécanismes sont bien en place pour enquêter sur les violations et tenir compte de situations particulières telles que les conflits, les catastrophes naturelles ou les crises économiques.  Il faut aussi que l’État partie adopte des dates butoirs appropriées, s’agissant en particulier des obligations de présentation des rapports.  L’État partie doit enfin former tous les organes nécessaires pour sensibiliser la société à la question des droits des femmes et favoriser la création d’un environnement où les ONG peuvent intervenir indirectement.


Intervenant à son tour, Mme MADHU MEHRA, représentante de l’ONG indienne Asia Pacific and Partners for Law and Development (IWRAW), a souligné la nécessité de prendre des mesures particulières et précises pour appliquer la Convention dans le contexte des conflits armés, en particulier les conflits internes, en tenant compte de la vulnérabilité aggravée de certains groupes de femmes comme les femmes rurales.  Elle a dénoncé la pratique des violences et blessures sexuelles qui servent d’armes dans les conflits.  Elle a souligné le caractère fondamental de la lutte contre les stéréotypes sociaux et culturels discriminatoires à l’égard des femmes qui aboutissent à faire des femmes des outils.  Elle a indiqué qu’au-delà du traumatisme que leur causent les viols, les femmes sont également victimes d’une stigmatisation dans leur communauté et ne disposent que de rares voies de recours ou d’indemnisation.


Elle a insisté sur la nécessité de combler le vide juridique qui existe dans de nombreux systèmes internes en matière de sanctions contre les violences dont sont victimes les femmes dans le contexte des conflits armés, et en particulier de conflits internes.  Soulignant que ces actes sont des violations flagrantes du droit des femmes, elle a estimé qu’il fallait lutter contre l’impunité et obliger les États à rendre des comptes au niveau international.  Prenant l’exemple des émeutes qui ont eu lieu au Gujarat en Inde en 2002, elle a déploré l’impunité pour les viols, enlèvements et autres violences commis au cours des conflits internes.  Ces violences visent non seulement à porter atteinte aux droits d’une personne mais également à causer du tort à une communauté tout entière.  Ce sont des crimes contre l’humanité et une tentative de génocide, a-t-elle affirmé en indiquant que 300 femmes avaient été violées et tuées et en précisant que quelques-unes des survivantes avaient présenté des recours devant la Cour suprême indienne.  Celle-ci, a-t-elle déploré, a reconnu qu’il n’y avait pas de recours approprié prévu en droit interne.  Mme Mehra a donc invité les experts à tenir compte de ce vide juridique et à s’atteler à y remédier, indiquant que c’était une réalité en Inde mais aussi le cas dans d’autres pays dans le monde. 


S’exprimant au nom de International Women’s Rights Action Watch, Mme DEEPIKA UDAGAMA a rappelé qu’aujourd’hui les conflits armés se déroulent plus souvent à l’intérieur des États plutôt qu’entre les États eux-mêmes.  Or, dans ce contexte, la violation des principes du droit international humanitaire revêt souvent, en ce qui concerne les femmes, la forme de violences sexuelles telles que le viol, le mariage forcé, l’insémination forcée, l’esclavage sexuel et la traite.  Il faut aussi mentionner les difficultés auxquelles elles sont confrontées pour accéder à l’eau, aux soins de santé et à l’éducation.  Comme le stipule la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, il faut tenir compte des menaces qui privent les femmes d’exercer leurs droits sociaux, économiques et culturels.  Ainsi, les femmes sont souvent privées du droit de participer à la reconstruction du pays au lendemain des conflits, ce qui est une exclusion de fait, qui a abouti à l’adoption de la résolution 1325 par le Conseil de sécurité.  Par ailleurs, la représentante a fait remarquer que très peu d’affaires sont soumises par le truchement des autorités nationales compétentes, aux juridictions internationales, pourtant mieux habilitées à réprimer l’impunité.  Suivant la recommandation faite au titre de l’article 2 de la Convention, la discrimination basée sur le sexe exige l’adoption de toutes les mesures nécessaires pour la réprimer: ainsi, des lois doivent être promulguées en vue d’incriminer les violences perpétrées dans les situations de conflits armés et les codes militaires doivent inclure la reconnaissance et la sanction de tels crimes.  L’État partie doit aussi faire en sorte que des tribunaux militaires appropriés soient mis en place afin de juger les coupables.  En outre, une formation adéquate doit être dispensée aux forces de police, aux juges et aux procureurs afin de les sensibiliser à ce problème.  Par ailleurs, toutes les mesures appropriées devraient être prises à l’encontre des acteurs non étatiques.  Enfin, la représentante a affirmé que la Convention doit tenir compte des situations d’embargo alimentaire, qui a souvent eu des conséquences négatives sur les femmes.


Mme CATHERINE MacKinnon, représentante d’Equality Now (États-Unis), a souligné le caractère essentiel de l’article 2.  Si l’État partie ne prend pas toutes les mesures appropriées pour éliminer les discriminations, il n’applique pas la Convention.  C’est pourquoi, il faut demander aux États de procéder à une analyse critique de l’application de chacun des articles de la Convention en y incluant une évaluation de l’impact des mesures prises sur le traitement des femmes.  Les États devraient identifier les bonnes pratiques et les échanger.  Ils devraient également tenir des consultations constantes avec la société civile et, en particulier, avec les organisations de femmes.  Toutes ces mesures permettraient d’améliorer l’interaction entre les experts du CEDAW et les États parties.  Concluant, elle a insisté sur le fait que même les meilleurs principes n’avaient aucune valeur ni aucune signification s’ils n’étaient pas appliqués et a dit tout l’intérêt de son organisation à établir un dialogue permanent avec le Comité. 


Mme OLEKSANDRA RUDNEVA, représentante du Kharkiv Center for Women’s Studies, a rappelé que l’obligation des États parties en matière d’application de la CEDAW ne saurait se limiter à l’article 2.  Elle a ensuite souligné que même si l’État est le premier responsable de sa mise en oeuvre, tous les organes gouvernementaux sont tenus d’y participer.  Les États doivent en outre inclure le principe de l’égalité sous la forme d’une disposition législative appropriée, incluse soit à la Constitution, soit dans une loi séparée et ce, afin que le pouvoir judiciaire puisse en tenir compte.  Les États parties doivent en effet comprendre qu’en ratifiant la Convention, leurs tribunaux peuvent en invoquer les dispositions.  Par ailleurs, a rappelé la représentante de l’ONG, une disposition importante spécifie que les États parties doivent tenir compte de l’impact des conventions internationales, dont la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.  S’agissant enfin des violences familiales, elle a rappelé que les États parties devaient veiller à trouver un équilibre entre respect de la vie privée et obligation de légiférer.


Intervenant au nom du Center for Reproductive Rights et de l’IPAS, Mme PARDISS KEBRIAEI a souligné que dans le domaine de la santé reproductive, les femmes sont parfois l’objet de discriminations en raison de leurs besoins spécifiques.  Il y a des procédures et des traitements discriminatoires de la mortalité infantile, l’avortement, le VIH/sida, et les mutilations génitales.  Elle a estimé que lorsque les gouvernements maintenaient des lois restrictives en matière d’avortement, ils forçaient les femmes qui cherchent à gérer leur fertilité à mettre en danger leur vie et leur santé, faisant remarquer que les moyens contraceptifs ne suffisaient pas à eux seuls et devaient être complétés par l’avortement sans risque.  Les soins liés à une procédure d’avortement, a-t-elle insisté, doivent être couverts par l’assurance maladie, en particulier pour les femmes les plus pauvres.  S’agissant du VIH/sida, elle a appelé les experts du CEDAW à clarifier les droits des femmes touchées par le virus et à réaffirmer leurs droits en matière de procréation et à interdire toute pression ou obligation d’avortement ou de stérilisation.  Elle a mis en garde les experts sur la tendance actuelle à multiplier les centres de soins dirigés par l’Église et les hôpitaux publics et sur les atteintes que ces soins peuvent causer aux droits sexuels et reproductifs des femmes.  Elle a dénoncé l’application dans certains pays de sanctions pénales contre les femmes et les professionnels de santé impliqués dans des cas d’avortements.  Concernant les avortements pratiqués sur des adolescentes, elle a indiqué qu’en El Salvador, des petites filles de 9 ans donnaient naissance à des enfants.  


Mme HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, a rappelé qu’il est nécessaire de reconnaître l’approche globale de la Convention.  Elle a ajouté que l’adoption de mesures sans retard ne signifie pas forcément obtenir des résultats immédiats, notamment en ce qui concerne l’article 5.  M. CORNELIUS FLINTERMAN, expert des Pays-Bas, a affirmé que la recommandation devrait avoir un effet interne aux niveaux national et international et que les pays les plus avancés devaient aider ceux qui ont des difficultés à appliquer la Convention.  Il serait en outre important que la Convention préserve sa validité en cas de conflits armés, a-t-il poursuivi, avant de questionner en conclusion la différence entre égalité négative et égalité positive.  Poursuivant, Mme NAELA GABR, experte de l’Égypte, a déclaré que les États se dérobaient souvent à l’obligation d’appliquer les dispositions de la Convention en invoquant les modèles de fédéralisme ou de gouvernorat.  Elle est ensuite revenue sur la question des violences commises contre les femmes en situation de conflits internes et sur la responsabilité incombant aux États en matière de traités sur le commerce international.  Pour sa part, Mme KRISZTINA MORVAI, experte de la Hongrie, a rappelé que la Convention ne se milite pas à couvrir des discriminations spécifiques, mais bien toutes les formes de discriminations.  Par ailleurs, a-t-elle demandé, peut-on vraiment parler d’une relation sexuelle consensuelle entre adolescents?  Et dans quelle mesure une relation sexuelle entre une jeune fille et un homme beaucoup plus âgé devient-elle abusive?  Les réponses à ces questions devraient permettre de cibler plus précisément les problèmes concernant les jeunes filles.  Mme AIDA GONZALEZ MARTINEZ, experte du Mexique, a rappelé que l’article 2 restait l’épine dorsale de la Convention et a affirmé que son interprétation ne devrait pas chercher à élargir le sens des autres articles.  Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIC, experte de la Croatie, a demandé si la disposition 2a) devait conserver l’expression « principe de l’égalité des hommes et des femmes » tandis que Mme HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a souhaité que soit éclaircie la différence entre « égalité » et « équité », ce dernier terme étant souvent utilisé par les pays hispaniques au moment de la présentation de leurs rapports.  S’agissant de l’article g), qui vise à abroger toutes les dispositions pénales constituant une discrimination à l’égard des femmes, l’experte s’est élevée contre le fait que les victimes de la violence domestique, lorsqu’elles sont jugées pour avoir tué leur mari, ne puissent invoquer le principe de la légitime défense, alors qu’elles avaient subi des sévices pendant des années.  Concluant l’intervention des experts, Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, a déclaré qu’en vertu de la Convention et dans le cadre des travaux du Comité, il faudrait être pouvoir recommander et intervenir dans les situations de conflits internes, comme en Palestine et en Iraq, et ce, afin de faire appliquer la Convention et en particulier son préambule, qui devrait être repris dans l’article 2.


Reprenant la parole, la représentante d’Equality Now a précisé que l’expression « discrimination positive » signifiait qu’il fallait prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme à toutes les discriminations commises à l’égard des femmes.  La représentante du Kharkiv Center for Women’s Studies a ensuite recommandé que l’article 2 soit rédigé de façon aussi précise que possible, sans toutefois inclure des aspects thématiques.  Reconnaissant que la Convention était un document progressif, elle a cependant attiré l’attention sur la confusion portant sur la catégorie de « gender », qui peut permettre à des hommes de présenter des recours individuels au titre de la CEDAW, alors que la Convention a été conçue à l’intention des femmes.  Elle a insisté sur la nécessité d’éliminer la discrimination à leur égard alors qu’à l’article 2, il est question d’égalité entre hommes et femmes.  Mme DEEPIKA UDAGAMA, représentante d’International Women’s Rights Action Watch Asia-Pacific, est revenue pour sa part sur l’application de la Convention en situation de conflits armés, considérant que l’article 2 doit être interprété au sens le plus large possible.  Il faudrait également insister dans la recommandation générale sur les obligations qui incombent aux États partie en cas de conflit, a-t-elle ajouté.


Mme Esther KISMODI, représentante de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a souligné la nécessité de travailler de concert avec les gouvernements et les différents acteurs internationaux dans l’application de la Convention.  Or, l’expérience prouve qu’il est très utile d’avoir des exemples concrets pour pouvoir y parvenir, notamment s’agissant du problème de la sexualité des adolescentes.  Elle a été rejointe sur ce dernier point par Mme ADEL IMAM, représentante du FNUAP, qui a par ailleurs indiqué qu’il fallait prendre en compte les droits économiques des femmes et que le FNUAP pouvait contribuer à la redéfinition du droit au développement.  Concluant, la représentante du Centre des droits en matière de reproduction a rappelé que des recommandations ont mis en évidence des besoins de planification pour les adolescentes.  Elle a enfin appelé à enquêter sur l’exploitation sexuelle impliquant des adolescentes et sur ses effets dévastateurs.


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