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ECOSOC/6140-AG/10287-CS/8227

L’ONU TIENT UNE RÉUNION SOLENNELLE POUR MARQUER LA PUBLICATION DU RAPPORT FINAL DE LA COMMISSION VÉRITÉ ET RÉCONCILIATION EN SIERRA LEONE

27/10/2004
Communiqué de presse
ECOSOC/6140
AG/10287
CS/8227


L’ONU TIENT UNE RÉUNION SOLENNELLE POUR MARQUER LA PUBLICATION DU RAPPORT FINAL DE LA COMMISSION VÉRITÉ ET RÉCONCILIATION EN SIERRA LEONE


Ce document constitue un travail fondamental

pour la consolidation de la paix, estiment les intervenants


Les Présidents de l’Assemblée générale, du Conseil de sécurité et du Conseil économique et social, ont coprésidé, cet après-midi, une « réunion solennelle » pour marquer la publication du rapport final de la Commission vérité et réconciliation en Sierra Leone, en présence du Vice-Ministre sierra-léonais des affaires étrangères, de la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), du représentant du Ghana, au nom de la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de celui du Nigéria, au nom de l’Union africaine (UA).


Créée en 2000, cette Commission a été chargée de répertorier, de manière impartiale, toutes les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire qui ont été commises entre le début du conflit en 1991 et la signature de l’Accord de Lomé, en 1999.  La Commission a eu aussi pour mandat de formuler des recommandations pour lutter contre l’impunité, répondre aux besoins des victimes, promouvoir un processus de cicatrisation et prévenir la répétition des actes incriminés. 


Ce document de 5 000 pages et de 7 000 témoignages, également produit en vidéo et en une version simplifiée à l’intention des enfants, a été salué par les intervenants comme un « travail fondamental » pour le processus de consolidation de la paix dans un pays qui sort d’un conflit où « il est difficile de trouver un seul instrument international des droits de l’homme qui n’ait pas fait l’objet de violations massives ».  Rappelant ces « 10 années de cauchemar », le Vice-Ministre sierra-léonais des affaires étrangères a indiqué que pour son pays et son peuple, la difficulté est maintenant de mettre en œuvre les recommandations de la Commission.  Je vous demande, a-t-il dit en s’adressant à la communauté internationale et aux pays amis, de faire plus encore pour que les énormes sacrifices qui ont été consentis n’aient pas été vains.


Ces propos ont été relayés par le représentant ghanéen qui a souligné que, dans son rapport, la Commission vérité et réconciliation rappelle qu’à l’exception de la CEDEAO, la communauté internationale avait évité d’intervenir aux premières heures du conflit.  Ce commentaire serait véritablement tragique, a-t-il estimé, car si le Gouvernement et le peuple de la Sierra Leone, la CEDEAO, mais aussi les partenaires au développement et le système des Nations Unies ne s’attaquaient pas à la situation qui prévaut dans le pays, ils risqueraient d’encourager la résurgence du conflit.  Le représentant a ainsi regretté que seulement 10% des 60 millions de dollars demandés par le dernier appel consolidé des institutions des Nations Unies en faveur de la Sierra Leone aient été mobilisés.


Les recommandations sont présentées à la suite des 12 chapitres du rapport final consacrés respectivement au contexte historique, à la gouvernance, à l’histoire militaire et politique, à la nature du conflit, à l’impact des ressources minières sur le conflit, aux femmes, aux enfants, aux jeunes, aux relations entres la Commission et le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, à la réconciliation, aux dédommagements, et à la vision nationale pour le pays.



RAPPORT FINAL DE LA COMMISSION VÉRITÉ ET RÉCONCILIATION EN SIERRA LEONE


Déclarations


M. JEAN PING (Gabon), Président de la cinquante-neuvième session de l’Assemblée générale, a estimé que la publication du rapport final de la Commission vérité et réconciliation est un événement important pour le peuple sierra-léonais mais aussi pour le monde.  Après une décennie de guerre sanglante marquée par des violations massives des droits de l’homme, les efforts de la communauté internationale ont contribué à rétablir la paix dans ce pays, a-t-il dit en expliquant que l’Accord de Lomé a mis fin à une des guerres les plus cruelles de l’Afrique et a ouvert la voie au dialogue et à la tolérance par le biais d’une Commission vérité et réconciliation.  Il s’est dit convaincu que les recommandations de la Commission reflètent la volonté et la détermination de ce pays de reconstruire son unité et de lutter contre l’impunité.  Il a félicité les membres de la Commission ainsi que le Gouvernement et le peuple sierra-léonais du courage dont ils ont ait preuve pour faire prévaloir la primauté du droit et la dignité humaine.  Il a invité la communauté internationale à appuyer la Sierra Leone et les victimes du conflit afin d’assurer une paix et un développement durables. 


Mme MARJATTA RASI (Finlande), Présidente du Conseil économique et social, s’est dit encouragée de voir que la Sierra Leone ait adopté une politique nationale pour la promotion de la femme afin de cultiver une meilleure compréhension des questions sexospécifiques.  Elle s’est aussi félicitée de la création au sein de la police d’unités d’appui à la famille qui ont permis à des femmes plus nombreuses de porter plainte pour mauvais traitements.  La Commission vérité et réconciliation a été nécessaire à la justice car elle s’est assurée que la protection des victimes soit au cœur du processus de paix.  Le rapport de cette Commission aidera le peuple de la Sierra Leone à comprendre et à tourner la page sur le passé.  Une version du rapport à l’intention des enfants permet à ces derniers de rompre le cycle de la violence.  Le Conseil économique et social, a dit sa Présidente, fait sienne la résolution de la Commission des droits de l’homme qui se félicite du travail « fondamental » de la Commission vérité et réconciliation et demande au Gouvernement concerné de promouvoir et de défendre les droits de l’homme avec l’appui de la communauté internationale. 


M. LAMIN KAMARA,Vice-Ministre des affaires étrangères de la Sierra Leone, a rappelé que le 23 mars 1991, les premiers coups de feu d’une escarmouche, qui est devenu un véritable conflit, ont été tirés à la frontière du pays avec le Libéria.  Ce fut un cauchemar, a-t-il dit, car la guerre s’est caractérisée par une violence primitive de la sorte la plus épouvantable.  Il est aujourd’hui difficile de trouver un instrument des droits de l’homme qui n’ait pas fait l’objet de violations massives.  Le Vice-Ministre a félicité les membres de la Commission et  tous ceux qui les ont soutenus dont les Nations Unies, en particulier le Bureau du Haut Commissaire aux droits de l’homme.  Le rapport, s’est-il réjoui, est un document qui fait autorité sur les horreurs du passé et contribue à mieux tracer la voie vers l’avenir.  C’est la raison pour laquelle le Gouvernement et le peuple sierra-léonais prennent les recommandations très au sérieux.  Le pays n’a qu’un choix, celui de tirer les leçons des circonstances qui ont mené à ce conflit et


examiner sa nature.  Il s’agit de créer un environnement qui garantisse que ce passé ne se reproduira pas.  La difficulté est maintenant de mettre en œuvre ces recommandations.  La détermination est là et le désir d’aller vite aussi, a affirmé le Vice-Ministre en faisant néanmoins remarquer que sortant d’un conflit meurtrier qui a paralysé son économie, le pays a besoin d’une assistance.  Il a donc sollicité les Nations Unies et les pays amis, en ces termes: « Je vous demande de faire plus encore pour que les énormes sacrifices qui ont été ne l’aient pas été en vain ».


Mme CAROL BELLAMY, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance, a souligné qu’au cours de ces dernières décennies, de nombreuses commissions vérité et réconciliation avaient été mises en place et avaient examiné l’expérience vécue par les enfants.  Cependant, pour la première fois, les enfants ont été au cœur du rapport de la Commission vérité et réconciliation en Sierra Leone, les traitant à la fois en tant que victimes et acteurs du processus de réconciliation.  La réalisation d’une version simplifiée du rapport à l’intention des enfants est une première dans le monde, a-t-elle expliqué.


Durant les 10 années de guerre en Sierra Leone, près de 10 000 enfants ont été victimes d’abus et enrôlés de force.  Ces enfants ont été arrachés à leurs foyers, drogués, menacés de mort et forcés à tuer.  Des milliers d’enfants ont été contraints à l’esclavage sexuel, tandis que des milliers d’autres ont été massacrés, violés et mutilés.  Le rapport contient les histoires éprouvantes racontées par ces enfants à la Commission vérité et réconciliation, mais également les recommandations qu’ils ont formulées en vue d’éviter une reprise du conflit.  Tout au long du processus, les enfants ont été appuyés par l’UNICEF et la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL), a-t-elle précisé, ajoutant que les enfants voulaient jouer un rôle et donner forme à un rapport qui aurait une action positive.  Ils souhaitaient avoir à leur disposition une version courte et simple du rapport, qu’ils pourraient lire et comprendre.  Ils ont contribué à la rédaction du rapport en souhaitant que la version qui leur était destinée ne fasse pas l’objet de censure.  Ils voulaient qu’on raconte l’histoire telle qu’ils s’en souviennent, a expliqué la Directrice exécutive de l’UNICEF.  


Les enfants ont été impliqués dans les travaux de la Commission vérité et réconciliation, depuis la préparation initiale à la planification des travaux ainsi que dans les recherches et les enquêtes qui ont été menées et, ce, jusqu’à la rédaction du rapport final.  Le défi était de taille, a-t-elle poursuivi, car il fallait prévenir tout risque de représailles ou de nouveaux traumatismes chez les enfants, notamment pour les filles qui avaient été victimes de violences et d’abus sexuels.  Les enfants qui ont participé aux audiences de la Commission ont indiqué qu’ils s’étaient sentis soulagés d’avoir témoigné et d’avoir joué un rôle.  « Les enfants sont toujours impatients à l’égard de l’avenir.  Pour eux, il n’y a pas un moment à perdre », a conclu Mme Bellamy, tout en invitant la communauté internationale à faire en sorte que cette vision qu’ils ont de l’avenir devienne réalité.


M. NANA EFFAH-APENTENG (Ghana), s’exprimant au nom de la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a salué les membres de la Commission vérité et réconciliation pour la publication de ce rapport et, ce, malgré les limitations financières auxquelles ils ont dû faire face, a-t-il ajouté.  Soulignant que la Commission propose un certain nombre de recommandations en vue d’éviter la répétition des sévices et des abus, il a souhaité que celles-ci soient mises en œuvre.  Les causes de ce conflit semblent ne pas encore avoir été réglées, a-t-il regretté.  À cet égard, les recommandations énoncées dans le rapport dressent des priorités qui seraient utiles pour l’Afrique de l’Ouest et ailleurs, a-t-il estimé.  Appelant la communauté internationale à poursuivre son soutien à la mise en œuvre de ces recommandations, il a indiqué que la responsabilité de leur mise en œuvre incombait en premier au Gouvernement de la Sierra Leone.  Toutefois, celui-ci ne peut supporter seul ce lourd fardeau, a ajouté le représentant, qui a déclaré que l’histoire des Nations Unies est malheureusement ponctuée de gestion de crises qui font d’abord la une des journaux, avant d’être oubliées.


La CEDEAO et la communauté internationale devraient prendre des mesures pour contribuer à la réhabilitation du pays dans son ensemble, a estimé M. Effah-Apenteng, indiquant que les problèmes de chômage sont encore récurrents en Sierra Leone.  Dans ce contexte, a-t-il conclu, le rapport doit encourager la communauté internationale à assister financièrement le pays.  M. Effah-Apenteng a cependant regretté que l’appel de fonds pour la réhabilitation de la Sierra Leone n’ait permis de réunir que 10% du budget estimé à 60 millions de dollars.


M. AMINU BASHIR WALI (Nigéria), dont le pays exerce actuellement la présidence de l’Union africaine (UA), a rappelé que la Commission vérité et réconciliation avait été établie sur la base de l’Accord de Lomé de juillet 1999 et le Nigéria avait fermement appuyé sa création.  Il n’y a pas une famille en Sierra Leone qui n’ait été atteinte dans sa dignité par le conflit, a-t-il ajouté.  Mais grâce aux conclusions de la Commission, les auteurs des violations seront identifiés.  Cela contribuera à rétablir la réconciliation avec les victimes.  Le représentant s’est déclaré convaincu que ce rapport aidera le pays à se remettre sur la voie d’une démocratie complète, qui aura un effet salutaire sur la région de l’Afrique de l’Ouest et le continent africain dans son ensemble.  Il a également salué le Conseil de sécurité pour son attitude progressive dans le cadre du retrait de la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL).  Il a en outre réaffirmé l’engagement de son pays en faveur de la paix en Sierra Leone, invitant le peuple sierra-léonais à œuvrer en faveur d’un avenir plus prometteur.


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