ECOSOC/6067

LE PRÉSIDENT DU BÉNIN APPELLE À UNE « CROISADE MONDIALE » CONTRE LA PAUVRETÉ DANS LES PMA DONT LE DESTIN EST INDISSOCIABLE DE CELUI DES PAYS DÉVELOPPÉS

28/06/2004
Communiqué de presse
ECOSOC/6067


Conseil économique et social

Session de fond de 2004

16e et 17e séance - matin & après-midi


LE PRÉSIDENT DU BÉNIN APPELLE À UNE « CROISADE MONDIALE » CONTRE LA PAUVRETÉ DANS LES PMA DONT LE DESTIN EST INDISSOCIABLE DE CELUI DES PAYS DÉVELOPPÉS


Le Conseil économique et social démarre sa session 2004 par

une concertation politique sur les faits nouveaux de l’économie mondiale


Le Conseil économique et social a donné, aujourd’hui, le coup d’envoi des travaux de sa session de fond 2004* qui, devant s’achever le 23 juillet prochain, sont placés sous le signe de « la mobilisation des ressources et la promotion d’un environnement propice à l’éradication de la pauvreté dans les pays les moins avancés (PMA) ».  Trois ans après l’adoption, à Bruxelles, du Programme d’action en faveur de cette catégorie de 50 pays, l’urgence qu’il y a à améliorer leur situation économique et sociale a été démontrée par la présence, ce matin, de nombreux ministres mais surtout par celle du Président du Bénin, Mathieu Kérékou, en sa qualité de Président du Bureau de coordination des PMA. 


Après avoir entendu la Présidente du Conseil économique et social, l’Ambassadeur Marjatta Rasi de la Finlande, et la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Louise Fréchette, le Président béninois a souhaité que les réflexions engagées sur le thème de la session soient « profondes et exhaustives » et que les analyses identifient clairement les problèmes auxquels sont confrontés les PMA et les moyens d’y faire face avec efficacité.  Tout en reconnaissant ce que les PMA ont encore à accomplir dans les domaines de la bonne gouvernance, de la lutte contre la corruption et de la participation des populations au développement national, Mathieu Kérékou a appelé à une « croisade mondiale » contre la pauvreté dans les PMA dont le destin est indissociable de celui des pays développés. 


Cet appel a été appuyé, lors de la concertation politique sur les faits nouveaux de l’économie mondiale, par le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, José Antonio Ocampo, et le Secrétaire général de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), Rubens Ricupero, qui a fait une description sans concession de « la face cachée de la lune ».  Les PMA, a fait remarquer ce dernier, ne peuvent consacrer que 0,15 dollar par jour à la formation de capitaux privés, à l’investissement public et aux services sociaux de base.  En matière de santé, ils ne dépensent, par an, que 4,60 dollars par habitant contre 1 456 dollars dans les pays, membres de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE).  Sans aide extérieure, ces pays ne pourront échapper à la pauvreté, a-t-il prévenu en soulignant, à son tour, le caractère incontournable de l’aide publique au développement (APD), de la facilitation des envois de fonds par les émigrants, de l’allègement de la dette et de l’ouverture des marchés. 


Compte tenu de la reconnaissance du commerce comme moteur du développement, le Secrétaire général de la CNUCED a détaillé les mesures à prendre pour mettre en place une stratégie de développement capable d’intégrer le commerce et le développement dans la lutte contre la pauvreté, pour améliorer le régime commercial international afin d’atténuer la dépendance des PMA aux produits de base, et pour renforcer l’appui financier et technique à la promotion de la capacité de production des PMA. 


Le Vice-Président de la Banque mondiale, Ian Goldin, le Directeur général adjoint pour les affaires extérieures, les communications et les affaires des Nations Unies du Fonds monétaire international, Augustin Carstens, le Directeur général adjoint de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Kpkorir Aly Azad Rana, et le Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), Juan Somavia, ont, à partir de leur propre perspective, étayé les propos du Secrétaire général de la CNUCED.  Les ministres et autres personnalités présentes aujourd’hui se sont ensuite livrés à un échange de vues, illustrant par-là « la vivacité du véritable forum de discussions politiques sur les questions de portée mondiale » qu’est devenu le Conseil économique et social. 


Auteur de ces mots, la Présidente du Conseil a attiré l’attention sur les progrès effectués dans cinq domaines dont la création de divers mécanismes pour rassembler les principaux acteurs économiques et sociaux, tels que le Forum pour la promotion des investissements nationaux et étrangers.  Rappelés aujourd’hui, les chiffres des investissements parlent d’eux-mêmes.  Dans les PMA, le ratio investissements-Produit intérieur brut (PIB) stagne à 22% alors que le Programme d’action de Bruxelles fixe le taux requis à 25%.  D’une valeur totale de 5,2 milliards de dollars en 2002, les investissements étrangers directs (IED) se dirigent, pour l’essentiel, dans quelques pays-cibles.  La même année, les cinq PMA exportateurs de pétrole, ou sur le point de l’être, ont reçu à eux seuls 63% des IED. 


Le Forum, qui a été lancé par la Présidente du Conseil économique et social, le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, et le Haut Représentant pour les PMA, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement, Anwarul K. Chowdhury, s’est tenu, cet après-midi, sous la forme de cinq tables rondes parallèles.  Présidées respectivement par le Président du Bénin et les ministres concernés de l’Ouganda, de la République-Unie de Tanzanie, de la Sierra Leone ainsi que par le Commissaire européen au développement et à l’aide humanitaire, les tables rondes seront consignées dans un résumé qui sera distribué demain aux délégations. 


Ces rencontres ont été consacrées aux questions relatives au microfinancement, aux IED, au lien entre préférences commerciales et investissements, au rôle des partenariats dans la mobilisation des ressources, et à l’investissement dans le développement des établissements humains.


En début de séance, le Conseil avait accordé le statut d’observateur à « Fondation des déserts du monde ». 


Le Conseil se réunira demain, mardi 29 juin à partir de 10 heures pour entamer son débat ministériel sur le thème principal de sa session.


* Voir communiqué de presse du 24 juin 2004 (ECOSOC/6066).


DEBAT DE HAUT NIVEAU


La situation économique et sociale dans le monde: concertation sur les politiques et débat sur les faits nouveaux


Mobilisation des ressources et promotion d’un environnement propice à l’éradication de la pauvreté dans le contexte de l’application du Programme d’action en faveur des PMA


La Présidente du Conseil économique et social, l’Ambassadeur MARJATTA RASI (Finlande), a souligné que l’ECOSOC a évolué pour devenir maintenant un véritable forum politique consacré aux questions économiques et sociales de portée mondiale.  Le Conseil, a-t-elle précisé, a progressé dans cinq domaines principaux.  Elle a d’abord cité les avancées dans les « questions de pointe » comme les nouvelles technologies de l’information et des communications (TIC) ou encore le développement rural intégré.  Le thème de cette année, a-t-elle dit dans ce cadre, est particulièrement d’actualité puisque son examen intervient avant l’examen, par l’Assemblée générale, des résultats des grandes conférences et sommets de l’ONU.  Au titre d’autres progrès, la Présidente s’est attardée sur la question de la participation des ONG aux travaux du Conseil.  Elle s’est particulière félicitée du fait qu’au cours de cette session, 60 conseils économiques et sociaux nationaux feront rapport au Conseil.  La Présidente de l’ECOSOC a aussi attiré l’attention sur les progrès accomplis dans la mise en place de divers mécanismes pour rassembler les différents acteurs concernés en pointant du doigt l’Équipe spéciale sur les TIC ou encore le Forum des investissements qui se réunira dès cet après-midi. 


Elle a souligné que l’ECOSOC a évolué en un forum de coordination assurant la cohérence des politiques internationales.  Elle a cité en exemple les réunions de haut niveau avec les institutions de Bretton Woods et l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui sont devenues, dans le cadre du processus sur le financement du développement, un forum politique entre les gouvernements et les institutions de Bretton Woods.  Parmi les progrès, elle a aussi cité le dialogue politique de haut niveau sur l’évolution de la situation économique mondiale qui permet d’identifier régulièrement les problèmes émergents.  Enfin, la Présidente a insisté sur l’implication accrue du Conseil auprès des pays sortant des conflits.  Elle a attiré, dans ce cadre, l’attention sur les deux Groupes consultatifs spéciaux sur le Burundi et la Guinée-Bissau.  Le Conseil économique et social, a-t-elle conclu, couvre désormais un large éventail d’activités « onusiennes ».  Pour la première fois, a-t-elle dit pour illustrer ses propos, le Conseil économique et social examinera les questions liées à la transition des activités de secours à celles du développement.


Mme LOUISE FRÉCHETTE, Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, a déclaré que pour la majorité des peuples du monde et pour l’ONU, aucune question n’était plus importante à l’heure actuelle que la réalisation des Objectifs de développement du Millénaire (ODM).  La communauté internationale, qui a pris des engagements, doit y travailler en vue de réaliser ces objectifs, conformément à la Charte des Nations Unies.  Une croissance économique soutenue est l’un des impératifs nécessaires à la réalisation des ODM, a dit Mme Fréchette en notant que les 4% de croissance mondiale prévus cette année étaient encourageants.  Cependant, l’environnement économique international demeure incertain, a-t-elle fait remarquer, notamment en raison de l’augmentation des coûts de l’énergie.  En outre,a-t-elle ajouté, de grandes disparités existent entre pays en développement, et nous ne sommes pas sûrs que la croissance observée dans certains de ces pays soit durable.  Ceci est surtout vrai pour les pays dont l’économie dépend essentiellement du secteur agricole.  Les promesses de la croissance ne se concrétiseront pas  si les pauvres ne bénéficient pas de leurs retombées.


La grande pauvreté qui affecte les pays les moins avancés (PMA) est non seulement le résultat de la stagnation économique, mais elle en est aussi la cause, a estimé Mme Fréchette.  Les pays pauvres doivent faire tout leur possible pour renforcer l’efficacité, la transparence et la gouvernance dans toutes les mesures qu’ils prennent.  Il est essentiel qu’ils investissent beaucoup plus dans la santé, l’éducation et les infrastructures de base.  Ils doivent tout faire pour apporter un meilleur soutien aux entrepreneurs locaux et pour créer un meilleur cadre d’accueil des investissements étrangers directs (IED).  Le Programme d’action de Bruxelles contient des promesses que les pays riches devraient tenir.  Quant au Consensus de Monterrey, a rappelé Mme Fréchette, il faut que les donateurs, dans son cadre, assurent la durabilité de l’aide publique au développement à long terme.  Concernant la dette, certains progrès ont été réalisés à travers l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE).  Mais ses mécanismes ne répondent pas encore totalement aux besoins des pays endettés.  Nous reconnaissons l’importance de certaines initiatives prises par les pays du Nord, comme l’initiative « Tout sauf les armes » de l’Union européenne en faveur des PMA, a dit Mme Fréchette en notant cependant qu’il ne faudrait pas reprendre d’une main ce que l’on a donné de l’autre.  À cet égard, elle a également attiré l’attention sur la question des subventions versées par les pays riches à leurs secteurs agricoles, qui déstabilisent les cours mondiaux et appauvrissent les agriculteurs des pays du Sud.  C’est pourquoi, une meilleure coopération Sud-Sud sur le plan commercial est indispensable, a dit Mme Fréchette en soulignant que cette coopération ne pouvait se substituer à la revitalisation de l’agenda de développement de Doha.  Sans l’aboutissement du cycle des négociations de Doha, une bonne approche en faveur du développement ne pourra se traduire en faits, comme cela a été justement souligné par la onzième session de la CNUCED, a déclaré la Vice-Secrétaire générale.


Le Président de la République du Bénin, M. MATHIEU KÉRÉKOU, dont le pays assure la présidence du Bureau de coordination des pays les moins avancés (PMA) s’est fait l’écho des attentes de centaines de millions de personnes qui vivent dans une pauvreté prolongée, faute d’un partage équitable des fruits du développement, de la science et de la technologie.  Il a rappelé qu’au terme des travaux de la 3ème Conférence des Nations Unies sur les PMA, la communauté internationale, en adoptant le programme d’action pour la décennie 2001-2010, s’étaient fixée comme but de réduire de moitié la pauvreté d’ici à 2015.  Il s’agit donc pour la communauté internationale d’envisager, selon un calendrier précis, des actions concrètes susceptibles de contribuer à inverser et à enrayer la paupérisation et la marginalisation sociale et économique des PMA.  M. Kérékou a estimé que le défi majeur était qu’une volonté politique réelle sous-tende nos professions de foi.


À la lumière de la précarité de la situation concrète qui prévaut dans le monde et surtout dans les PMA, a-t-il ajouté, il y a lieu de reconnaître que les résultats obtenus ne sont pas encourageants.  En effet, l’aide publique au développement n’a pas connu l’augmentation annoncée.  De plus, les subventions à l’exportation accordées par certains partenaires nantis influencent négativement la présence des PMA sur les marchés mondiaux.  Par ailleurs, les rares préférences accordées aux PMA pour l’accès aux marchés de leurs produits demeurent sous-exploitées, du fait d’obstacles connexes tels que les critères sanitaires et phytosanitaires, les procédures complexes imposées par les législations internes des pays développés. 


C’est pourquoi, le Président du Bénin a recommandé que les réflexions engagées sur ce thème soient profondes et exhaustives et que ces analyses traduisent les réalités aux plans national et international et qu’elles identifient clairement les problèmes auxquels sont confrontés les PMA et les moyens d’y faire face avec efficacité.  Alors que 2015 avance à grands pas, des actions intégrées et globales prenant en compte les configurations sociales humaines et environnementales sont plus qu’urgentes.  Les pays développés devraient avancer dans le sens de l’accroissement de l’aide publique au développement, la promotion des investissements directs, la poursuite des remises de dettes, l’ouverture de leurs marchés aux produits des PMA, l’accès à un moindre coût aux médicaments essentiels.  Nous sommes conscients des progrès qu’il nous incombe d’accomplir dans les domaines de la bonne gouvernance, du respect de la légalité constitutionnelle, de la lutte contre la corruption, de la promotion de la décentralisation, de la participation effective des populations à la politique et au processus de développement national, sans discrimination de race, de sexe, ou de religion.  En conclusion, M. Kérékou a lancé un vibrant appel pour une « croisade mondiale » contre la faim, la misère et la pauvreté, en vue d’un meilleur avenir pour nos peuples dont le destin est indissociable de celui des pays développés. 


M. JOSE ANTONIO OCAMPO, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, s’est félicité de l’amélioration de la situation économique mondiale qui devrait se traduire cette année par une croissance de 3,75%, soit le taux le plus élevé depuis 2000.  Le groupe qui connaît la croissance la plus importante est celui des pays en transition tandis que la Chine et l’Inde se sont affirmées comme deux véritables forces motrices de la croissance économique mondiale.  Ceci a des implications non seulement pour les pauvres de ces pays, mais aussi pour le reste du monde, puisque cette situation contribue à limiter la dépendance des plus démunis à une seule puissance économique, à savoir les États-Unis.  La reprise de la croissance s’est traduite par une reprise des flux du commerce international et celle des cours internationaux de matières premières, même si ses effets bénéfiques ont été atténués par la dévaluation du dollar.  M. Ocampo a noté par ailleurs que les flux de capitaux en direction des pays en développement a atteint des niveaux inégalés depuis la crise financière asiatique de 1997, alors que les coûts des financements extérieurs sont relativement bas. 


Le Secrétaire général adjoint s’est félicité de la décision de la session de fond du Conseil économique et social de se concentrer cette année sur les pays les moins avancés (PMA), alors que l’on constate que ces pays ont connu une croissance plus importante depuis l’an 2000 que les autres pays en développement.  Il a également précisé que ces pays avaient en quelque sorte bénéficier de leur handicap.  Ils ont moins subi les conséquences de la récession étant donné qu’ils ne sont intégrés que de façon limitée à l’économie mondiale.  Il a souligné la bonne santé économique du Bangladesh qui explique en grande partie la croissance du groupe des PMA.  Parce que les situations de croissance économique ne sont pas forcément durables, il est urgent de tirer les meilleurs bénéfices de cette période d’accélération.  Il faut trouver un moyen de faire durer dans le temps les bénéfices de cette croissance, car nous courons le risque de faire face aux conséquences négatives de surabondance ou de surchauffe tôt ou tard, a mis en garde l’intervenant.  Les mesures actuelles ne sont pas à la hauteur de nos engagements en faveur des PMA, a-t-il conclu, et nous devons renforcer notre soutien en direction de leurs initiatives sur les trois fronts de l’aide, du commerce et de la dette.  


M. RUBENS RICUPERO, Secrétaire général de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a estimé que si les tendances actuelles sont maintenues, les PMA ne pourront atteindre aucun des neuf Objectifs du développement.  Aujourd’hui, après les dépenses de subsistance quotidiennes, les PMA ne peuvent consacrer que 0,15 dollar par jour à la formation de capitaux privés, à l’investissement public et aux services sociaux de base.  En matière de santé, les PMA ne peuvent dépenser chaque année que 4,60 dollars par habitant contre 1 456 dollars dans les pays de l’OCDE.  La démonstration est claire, a insisté le Secrétaire général de la CNUCED; les PMA ne pourront se soustraire à la pauvreté s’ils ne bénéficient pas d’une aide extérieure.  En l’occurrence, l’aide publique au développement, les envois de fonds des émigrants, le commerce et l’allègement de la dette sont les solutions qui s’imposent.  Or, très peu de progrès ont été accomplis.  Après une baisse soudaine, l’APD a connu une reprise partielle de 36% entre 2000 et 2002.  Les investissements étrangers directs (IED) ont augmenté en 2001 mais ont baissé l’année suivante.  Les pays pétroliers reçoivent à eux seuls 63% des IED.  S’agissant de la dette, a indiqué M. Ricupero, les prêts ont augmenté de 27% par an.  En dépit des mesures d’exemption, le total de la dette représentait 145 milliards de dollars en 2002 alors que les remboursements atteignaient un niveau record de 5,1 milliards de dollars.  La dette a augmenté pour 43 des 46 PMA.  S’agissant du commerce, les chiffres semblent plus encourageants avec une nouvelle hausse de 37,8 milliards de dollars en 2002 contre 26,1 milliards, l’année précédente.  Cette  augmentation de 45% s’explique en grande partie par les exportations de pétrole.  Les gains à l’exportation sont inégaux.  Entre 2001 et 2002, 56% des exportations venaient des cinq pays exportateurs de pétrole, plus le Bangladesh.  Alors que les exportations de produits manufacturés ont augmenté de 43% et celles du pétrole de 134%, les exportations ont baissé de 6% dans le domaine de l’agriculture et de 6% concernant les produits minéraux.  Ceci a eu des répercussions sur le PNB réel par habitant qui est passé à 33% dans 14 PMA mais a stagné dans 24 autres.  Sept PMA seulement ont atteint le taux de croissance de 7% prévu dans le Programme d’action de Bruxelles.   


Le Secrétaire général de la CNUCED a précisé que pour établir une performance plus équilibrée et éliminer la pauvreté dans les PMA, il faut s’attaquer à la mise en place d’une stratégie de développement capable non seulement d’intégrer le commerce dans la lutte contre la pauvreté mais d’intégrer également le commerce et le développement dans cette lutte.  Cela exige un développement fondé sur la croissance de la productivité agricole, une industrialisation des produits agricoles orientée vers l’exportation, une diversification par la gestion des ressources minérales et une utilisation de technologies génératrice d’emplois.  Il faut aussi, a-t-il souligné, s’attaquer à l’amélioration du régime commercial international pour atténuer la dépendance des PMA sur les produits de base.  En la matière, il a cité trois priorités, à savoir l’élimination des subventions agricoles pratiquées dans les pays de l’OCDE, une transparence accrue dans les revenus provenant du pétrole, du gaz et de l’exploitation minérale, et la réduction de la vulnérabilité aux chocs des prix.  Enfin, M. Ricupero a proposé de s’attaquer à la question de l’appui financier et technique pour promouvoir la production et la capacité de production des PMA.  Aujourd’hui, a-t-il précisé, l’aide aux PMA est passée de la production et de l’infrastructure aux besoins sociaux de base.  C’est une tendance qu’il faut corriger, a-t-il dit en prônant aussi que l’aide découlant de l’Initiative PPTE se dirige vers les secteurs productifs. 


M. AGUSTIN CARSTENS, Directeur général adjoint du Fonds monétaire  international (FMI), a déclaré que la mobilisation des ressources pour le développement posait d’énormes défis.  Il est clair que la plupart des pays en développement ne pourront réaliser les ODM dans les délais prescrits, a-t-il estimé en notant qu’en dehors de la Chine et de l’Inde, rares sont ceux qui pourront réellement jeter les bases d’un développement durable.  L’Afrique reste le continent où les conditions de la croissance durable sont les plus mauvaises, a noté M. Carstens.  Le FMI est prêt à contribuer au cycle de négociations de Doha ainsi qu’à aider les pays, notamment les PMA, à lutter contre la pauvreté en leur proposant des plans de réformes macroéconomiques, a ensuite déclaré le représentant.  Le cadre opérationnel le plus important à cet égard est celui défini dans les Documents de stratégies de réduction de la pauvreté (DSRP).  La communauté internationale devrait aider les pays en faveur desquels ont été élaborées ces stratégies à les mener à terme.  Concernant la gestion nationale, le FMI, a dit le représentant, pense que les fonds publics devraient être mieux utilisés et mis en priorité au service des populations les plus pauvres.


Le FMI aide également les pays à mieux absorber l’aide qui leur est fournie.  À cet égard, la stabilité économique doit être maintenue, et les gouvernements doivent être conscients du caractère instable des montants de l’aide, a-t-il recommandé.  Dans les DSRP, le FMI d’autre part introduit des mesures relatives au commerce, du fait de l’importance de ce secteur sur les recettes potentielles des pays.  Le FMI, a poursuivi son représentant, continuera à déployer des efforts dans les domaines relevant de son mandat.  Les agences et institutions internationales doivent en effet collaborer dans les pays où elles interviennent tout en respectant les besoins et les particularités de ces pays.


M. IAN GOLDIN, Vice-Président pour les affaires extérieures, les communications et les affaires des Nations Unies de la Banque mondiale, présentant la contribution de la Banque mondiale aux efforts de développement des PMA, a indiqué que celle-ci concentrait ses efforts sur les sept domaines du Programme d’action de Bruxelles.  Au cours de cette année fiscale, a-t-il précisé, 141 nouvelles opérations ont été lancées dans 56 pays.  51% des nouveaux engagements financiers sont allés à l’Afrique sub-saharienne, 28% à l’Asie du Sud, 8% à l’Asie de l’Est et au Pacifique, 8% à l’Europe orientale et l’Asie occidentale et le reste aux pays pauvres de l’Afrique du Nord et d’Amérique latine.  Il a prévenu que ne pas assister les PMA reviendrait à condamner 500 millions de personnes à vivre dans la pauvreté chronique et mettrait en danger la réalisation des Objectifs de développement du Millénaire et porterait atteinte à la stabilité régionale et mondiale.  Il a souligné le caractère inégal de la situation de la pauvreté à travers le monde.  Il s’est félicité du fait que la proportion de personnes vivant dans l’extrême pauvreté (moins d’un dollar par jour) a presque diminué de moitié entre 1981 et 2001, pour passer de 40% de la population mondiale à 21%.  Mais alors qu’une croissance économique rapide a permis de sortir 500 millions de personnes de la pauvreté en Asie de l’Est et du Sud, le nombre des pauvres a plus que doublé en Afrique sub-saharienne pour passer de 164 à 314 millions entre 1981 et 2001, ce qui représente 47% de la population de cette région, a-t-il relevé. 


Par ailleurs, il s’est tout particulièrement inquiété du sort des pays sortant d’un conflit ou encore en conflit.  Nous essayons de soutenir les PMA par l’entremise d’une aide technique.  Lorsque l’on analyse en détail les statistiques, a-t-il poursuivi, on se rend compte que les progrès sont inégaux au sein de pays ou des régions.  Nous savons que la croissance économique n’est pas une garantie de développement social.  Il a donc souligné la nécessité d’investissements sociaux afin d’atteindre les Objectifs de développement du Millénaire en notant que plus de 840 millions de personnes étaient mal nourries dans les pays à faible revenu.  De plus 10 millions d’enfants y meurent chaque année alors que le taux de mortalité maternelle atteint 6,57 pour 1 000 naissances vivantes.  C’est pourquoi, il a insisté sur les deux piliers que sont la promotion d’un climat favorable aux investissements dans les pays en développement et l’inclusion sociale caractérisée par l’investissement dans les êtres humains.  


Nous savons que l’instabilité des prix des matières premières est aggravée par le protectionnisme.  Et nous sommes témoins du fait que les dépenses militaires sont parfois 10 fois plus élevées que les dépenses d’aide au développement dans certains pays.  Il nous faut tirer les leçons des expériences passées pour que les générations futures ne demeurent pas dans la pauvreté  Nous devons pour cela placer la lutte contre la pauvreté au centre de notre ordre du jour politique.  La formule actuelle, avec des dépenses d’armements atteignant 1 000 milliards de dollars, des subventions agricoles se chiffrant à 300 milliards de dollars -contre seulement 60 milliards en aide au développement- n’est pas viable et est celle d’un monde voué à l’échec a-t-il averti. 


M. KIPKORIR ALY AZAD RANA, Directeur général adjoint de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a précisé que le système commercial international concerne plus que la libéralisation des échanges.  Il vise désormais le rétablissement de règles, la stabilité, la prévisibilité et la sécurité pour tous.  Ce système, a-t-il affirmé, a connu des succès réels.  Il a cité la réduction des tarifs douaniers, le fait que le commerce soit devenu une locomotive de la croissance et l’établissement du lien entre commerce et développement comme en atteste le cycle des négociations de Doha.  Les négociations qui se déroulent dans ce cadre, a-t-il poursuivi, ont atteint une étape cruciale qui bénéficie de l’appui des dirigeants du monde entier, PMA comme OCDE.  Espérant l’issue des négociations en juillet prochain, M. Azad Rana a appelé à une libéralisation de l’agriculture et à des progrès dans les questions prioritaires du coton.  Jamais auparavant, a—t-il estimé, des problèmes qui intéressent autant les PMA n’ont reçu une telle attention.  Aujourd’hui, tous reconnaissent la nécessité de préserver ces pays par un accès préférentiel aux marchés et une certaine souplesse quant à la réduction des tarifs douaniers.  Soulignant d’autres mesures prises en faveur des PMA, il a cité les mesures liées à l’Accord sur les droits de propriété intellectuelle touchant au commerce (TRIPS) et à la santé publique, les mesures prises par 28 membres de l’OMC pour améliorer l’accès aux marchés des PMA et les initiatives visant le renforcement des capacités et l’assistance technique, dont le Cadre intégré. 


M. JUAN SOMAVIA, Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a déclaré que la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation, placée sous le leadership des Présidents Mkapa de la Tanzanie, et Halonen de la Finlande, avait mené des consultations à travers le monde.  Le rapport remis par la Commission est critique, a noté M. Somavia, en déclarant que ce rapport annonce clairement que les bénéfices de la mondialisation ne profitent pas à tous les peuples.  Le chemin actuellement suivi n’est pas durable et ne peut pas être politiquement tenable.  Parmi ses principales recommandations, a dit le Directeur général de l’OIT, la Commission déclare que toute politique de développement doit d’abord être locale, et doit renforcer les communautés et les marchés sur les lieux où vivent et travaillent les gens.  Il ne saurait y avoir de mondialisation réussie sans localisation réussie, a-t-il souligné.  Tous les pays, qu’ils soient développés ou en développement, ont besoin de politiques nationales, et l’appropriation par les pays en développement de leur processus de développement, nécessite que les pays développés et la communauté internationale reconnaissent la diversité des peuples et des nations.


Après avoir déclaré que les pays en développement ont besoin de suffisamment d’espace politique pour définir leurs priorités et leur rythme d’intégration à l’économie mondiale, M. Somavia a dit que ces pays doivent faire des choix judicieux parmi d’autres, un État fort et efficace, des secteurs public et privé ouverts, fonctionnels et honnêtes.  Le dialogue et la participation doivent prévaloir, ainsi que le respect de la liberté et de l’équité entre les sexes.  Un cadre propice à ’investissement et à la création d’entreprises doit être mis en place, a-t-il poursuivi.  Ensuite, le rapport insiste sur la création et le respect de règles économiques justes et équitables.  Les observateurs estiment que la mondialisation s’est développée dans un vide éthique et à partir d’une mentalité du vainqueur qui s’empare de tout.  Le point de vue de la Commission renforce les conclusions de la Déclaration des PMA, adoptée à la XIe CNUCED.  Elle recommande donc une réduction substantielle des barrières injustes posées à l’accès aux marchés, notamment concernant les biens pour la production desquels les pays en développement ont un avantage comparatif évident.  Elle recommande également la création d’un cadre plus consistent et plus cohérent d’investissement étranger et d’élaboration des politiques.  Une des recommandations contenues dans le rapport a trait à la création d’un cadre équitable complété par des normes réglementant le travail et les mouvements de population à travers les frontières.  Le troisième domaine de recommandation est celui du financement du développement, a dit M. Somavia en ajoutant que les conclusions du rapport s’inspiraient du Programme d’action de Bruxelles et pouvaient être utilisées pour soutenir les demandes des PMA au-delà de celles concernant l’augmentation de l’aide publique au développement (APD) et la réduction de la dette.  Enfin, les recommandations touchent à la cohérence des politiques, à l’emploi, et aux conditions de travail, en vue de pouvoir atteindre les Objectifs de développement du Millénaire (ODM).  Il appartient aux États Membres de décider, au sein de l’ECOSOC, de l’usage qu’ils feront des conclusions de ce rapport, a déclaré Juan Somavia.


Au cours d’un échange de vues, le Ministre des affaires étrangères du Qatar, intervenant au nom du Groupe des 77, s’est interrogé sur les moyens de faire face à l’instabilité des prix des matières premières qui contribue à l’endettement des PMA.  Intervenant à son tour, au nom de l’Union européenne, le Ministre de la coopération et du développement de l’Irlande a tout particulièrement souhaité que l’on étudie les conséquences de cette instabilité sur le développement du VIH/sida de façon à ce que l’aide des pays développés ne puisse plus être annulée par les pertes occasionnées par cette pandémie. 


Si le Ministre qatari s’est particulièrement inquiété des faiblesses structurelles des PMA qui ne leur permettent pas toujours de maintenir une croissance minimale de façon durable, le Ministre irlandais de la coopération a insisté sur l’importance du développement social, en notant qu’on ne pouvait espérer de croissance sans une population active en bonne santé et bien formée. 


À l’instar de ce dernier, le représentant de la Commission européenne a souhaité que le commerce, par le biais des négociations de Doha, contribue à réduire la pauvreté.  Tout en se félicitant de l’augmentation des exportations des PMA en direction des pays européens, il a noté que l’ouverture des marchés n’était pas une réponse suffisante.  La décision des pays de l’Union européenne en faveur de l’aide au développement va se traduire, a-t-il indiqué, par une aide supplémentaire annuelle de 19 milliards de dollars. 


À la suite de ces intervenants, le représentant de l’Équateur a souligné qu’en dépit de la croissance mondiale, les pays qui dépendent de l’assistance extérieure risquent de voir leur situation s’aggraver.  Le représentant a dit avoir pris note avec intérêt et préoccupation des chiffres relatifs aux dépenses militaires dans le monde et à la dette des PMA.  L’obstacle au développement que constituent les prix très élevés du pétrole, a été relevé par le représentant du El Salvador qui a demandé une analyse détaillée à la CNUCED. 


Reconnaissant l’impact de la reprise de l’économie américaine sur l’économie mondiale, la représentante des États-Unis a estimé qu’il faut faire plus pour consolider une croissance plus équitable et éviter ainsi de miser sur une seule locomotive.  Les États-Unis, a-t-elle poursuivi, se félicitent de l’accroissement de l’APD et ont l’intention de montrer l’exemple.  La représentante a ainsi annoncé une multiplication par deux, au cours des deux prochaines années, de la contribution américaine par le biais du « Compte des défis du Millénaire ».  En contrepartie, les États-Unis exigeront le respect des droits de l’homme et de l’état de droit ainsi que des investissements dans les services sociaux de base, l’élimination des barrières commerciales et la réduction de la bureaucratie.  Aux pays du G-8, a poursuivi la représentante, les États-Unis demandent une véritable libéralisation des échanges commerciaux.  La représentante a affirmé que son pays a accepté la négociation de cadres pour le commerce des produits agricoles et d’autres biens, en rappelant la vigueur de l’African Growth Opportunity Act (AGOA) qui exige des pays africains la mise en place d’un environnement favorable à l’entreprise locale.  La représentante a conclu en promettant le soutien de son pays à toute initiative visant à faciliter les envois de fonds des émigrants


Au titre des mesures plus déterminantes pour assurer le décollage des PMA, le représentant de la Jamaïque est revenu sur l’ouverture des marchés en ajoutant une aide au renforcement des capacités de production et des infrastructures internes pour réduire les contraintes de l’offre.  Il a aussi recommandé la recherche de nouvelles sources de financement exempte de conditionnalités qui restreignent les choix politiques.  Les mesures de réduction de la dette, d’accroissement des investissements les sources d’énergie renouvelables, la participation accrue des pays en développement dans la prise de décisions internationales et la libéralisation du marché international du travail, ont également été parmi les solutions préconisées par le représentant jamaïcain.  


Le représentant du Bangladesh s’est inquiété de la manière dont sont interprétées les dernières statistiques qui indiquent que son pays est l’un des PMA qui a connu une croissance économique positive ces dernières années.  Les progrès accomplis par le Bangladesh résultent de politiques nationales bien ciblées, et notamment la généralisation du de microcrédit, a indiqué le représentant.  Le Bangladesh, a-t-il poursuivi, est fier d’avoir créé une démocratie qui fonctionne malgré les conditions de pauvreté d’une partie de sa population, et veut partager ses expériences avec les PMA d’Afrique, car leur émulation est possible.


Dans son intervention, le représentant de l’Inde a estimé que les pays en développement devraient pouvoir définir eux-mêmes leurs stratégies de croissance nationale.  Il n’existe pas de solution ou de stratégie unique pour toutes les situations, a estimé le représentant en appelant à plus de démocratie dans les processus internationaux de prise de décisions.  Que peuvent faire les différents pays pour mettre en œuvre les recommandations contenues dans le rapport présenté par M. Somavia? a-t-il ensuite demandé.


Le Conseiller spécial du Secrétaire général pour l’Afrique, M. IBRAHIM GAMBARI, a indiqué que les pays du continent avaient intégré les politiques du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) dans leurs stratégies nationales de développement et de lutte contre la pauvreté.  Le Secrétariat du NEPAD, a-t-il poursuivi, fait avancer l’ordre du jour de l’Afrique touchant au domaine agricole et aux négociations pertinentes au niveau international.  Le développement ne pouvant être garanti sans une paix durable sur le continent, l’Union africaine a créé une structure régionale pour la paix et la sécurité qui vient d’entrer en fonctions et bénéficie de l’appui de l’Union européenne, a ensuite indiqué le Conseiller spécial.  De manière générale, les pays africains cherchent, à travers le NEPAD et l’Union africaine, un soutien à leurs efforts nationaux dans les domaines du commerce, de la réduction de la dette, ainsi que d’une meilleure mobilisation et d’un bon usage de l’APD.  À cet égard, a fait remarquer M. Gambari, ce que les pays riches donnent d’une main, ils le reprennent rapidement de l’autre.  La question des subventions versées aux producteurs occidentaux de coton illustre le problème existant.  M. Gambari a indiqué que, dans le cadre de cette session de fond de l’ECOSOC, une table ronde au niveau ministérielle sur les stratégies de retrait des forces de maintien de la paix, une question qui intéresse particulièrement l’Afrique, aura lieu demain.


Répondant aux questions des intervenants, le Secrétaire général de la CNUCED a regretté l’absence d’une politique de stabilisation des prix des produits de base qu’il a considérée comme une source d’instabilité.  En matière de stabilité des prix, il a expliqué qu’on ne pouvait comparer la question du pétrole à celle des produits de base comme le café.  De son côté, le Directeur général de l’OIT a souligné la nécessité de veiller à la cohérence des politiques au niveau national. 


Dans son discours liminaire, Mme MARJATTA RASI, Présidente du Conseil économique et social, a souligné l’importance de favoriser des investissements responsables et un entreprenariat qui soit conscient de son rôle dans la promotion du développement.  Elle a salué la tendance récente qui s’est dessinée aux Nations Unies visant une ouverture au monde des affaires.  À cet égard, elle s’est félicité du rôle directeur joué par l’ECOSOC en servant de cadre pour débattre de tous les problèmes économiques et sociaux à travers le monde. 


M. JOSE ANTONIO OCAMPO, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a estimé que la mobilisation et l’utilisation appropriées des ressources pour la création d’emplois est le meilleur moyen de réduire la pauvreté.  Les investissements nationaux et internationaux dans les secteurs productifs favorisent la croissance et compte tenu des limites de l’épargne nationale dans les PMA, ces investissements sont d’une importance capitale.  Ces pays, a-t-il ajouté, ont fait des efforts soutenus pour favoriser les investissements.  Bien que quelques PMA aient réalisé ou dépassé le taux de croissance requis de 7%, il faut garder à l’esprit que nombre d’entre eux ont régressé.  Pour que tous les PMA arrivent au taux requis, toutes les parties intéressées doivent faire des efforts concertés tant il est vrai que ces pays ne peuvent faire face seuls aux défis.  Le rôle des partenaires au développement et du secteur privé est, par conséquent, déterminant.  Il faut encourager le dialogue et reconnaître aussi le rôle de la société civile dans la défense des populations pauvres.  La réalisation des Objectifs du Millénaire est à ce prix, tout comme celle du Programme d’action de Bruxelles, a souligné le Secrétaire général adjoint.  


M. ANWARUL CHOWDHURY, Secrétaire général adjoint des Nations Unies et Haut Représentant pour les pays les moins avancés (PMA), pays en développement sans littoral et petits États insulaires en développement (PEID), a fait remarquer que pour la première fois l’ECOSOC a décidé de saisir l’opportunité de son débat de haut niveau pour se concentrer sur les problèmes qu’ont en commun les 50 pays les plus pauvres du monde.  La principale allocution prononcée par le Président de la République du Bénin en début de journée a donné le ton à nos délibérations, en lançant des propositions et remarques qui pourront guider nos travaux.  Après avoir présenté l’action de son Bureau, il a formé le vœu que les résultats de ces délibérations donneront une nouvelle impulsion à la communauté internationale pour aider les pays les plus pauvres.  Il a souligné toute l’importance de la partie interactive qui va s’engager sous la forme de cinq tables rondes avec comme ambition d’apporter des éléments de réflexion à des questions comme, le microcrédit, les investissements étrangers directs, le rôle des préférences commerciales, le rôle de l’entreprise dans la mobilisation des ressources ou encore l’investissement dans les assainissements et eaux urbaines.  Le Haut Représentant a indiqué que, parmi ces tables rondes, son Bureau animera celle sur le rôle des préférences commerciales pour les PMA dans la promotion des investissements.  Le commerce international peut s’avérer être très efficace pour réduire la pauvreté dans ces pays, a-t-il dit.  Pour cela nous devons nous pencher honnêtement sur les moyens d’aider les PMA à tirer pleinement parti des opportunités en la matière, la question principale étant notamment de savoir comment les préférences commerciales qui leur sont accordées peuvent entraîner une augmentation des investissements domestiques et comment elles peuvent être utilisées pour attirer les investissements étrangers directs afin qu’ils puissent mettre à profit les privilèges d’accès accordés par leurs partenaires de développement.  


FORUM POUR LA PROMOTION DES INVESTISSEMENTS


Table ronde sur le développement du secteur privé local: le rôle de la microfinance/microcrédit


Cette table ronde s’est concentrée sur le rôle de la microfinance/microcrédit dans le développement du secteur privé local.  Présidée par le Président de la République du Bénin, Mathieu Kérékou, et animée par le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. José Antonio Ocampo; M. Annibale, Vice-Président de City Group, qui a présenté les efforts du Groupe bancaire pour promouvoir la microfinance à l’étranger dans le cadre d’accords bilatéraux; M. Bernd Balkenhol, Chef du programme Finance et solidarité du Bureau international du Travail (BIT), qui a souligné l’importance de créer au plan national un marché d’information; Mme Susan Davis, Présidente de la Fondation Gramin des États-Unis, qui a notamment souligné la nécessité de faciliter la mobilisation des épargnes en faveur des femmes pauvres; M. Tom Easton, Directeur du Bureau new-yorkais du journal « The Economist », qui s’est interrogé sur l’adaptabilité du modèle du microcrédit selon les situations et sur les problèmes liés aux taux d’intérêts, au blanchiment d’argent et à la faillite. 


Par ailleurs, M. Gilbert Medje, Président du Conseil d’administration de l’Eco Banque du Bénin, a présenté le rôle du microcrédit dans le financement des coopératives d’épargne et de crédit et des coopératives agricoles, alors que M. Foode Ndiaye, expert du microcrédit au Fond d’équipement des Nations Unies (FENU), s’est inquiété de l’insuffisance des capacités et de transparence financière des PMA qui les empêchent de tirer profit des opportunités de la microfinance.  Il a regretté que les services financiers des pays les plus pauvres ne disposent pas souvent des compétences pour estimer les risques que représente telle ou telle entreprise, alors que l’insuffisance des infrastructures entraîne des coûts des services financiers élevés. 


Présentant la situation de la microfinance au Bénin M. Medje, a expliqué que la microfinance était une réponse à une crise systémique bancaire.  Il s’est félicité de l’intervention de l’État dans la promotion du microcrédit, l’État ayant compris que cette forme de service financier représentait le principal support du secteur des petites et moyennes entreprises qui est responsable de 70% du PIB. 


Les intervenants dans leur ensemble ont souligné le problème de la disponibilité des capitaux, mais aussi l’importance de s’appuyer sur de bons réseaux pour établir des partenariats avec les institutions de microfinancement dans les marchés clefs.  Ils ont souligné la nécessité de stratégies intégrées pour pouvoir toucher le plus grand nombre de personnes alors que seulement 3% des familles disposent d’un compte en banque en Afrique sub-saharienne.


Pour répondre au principal problème qui reste d’atteindre un maximum de personnes, le Président du Bénin a invité les partenaires potentiels à s’appuyer sur les ONG qui maîtrisent les réseaux au niveau local et dispose des informations et des structures nécessaires au succès du microcrédit comme instrument de développement du secteur privé local. 


Si les banques sont hésitantes à prêter aux petites entreprises, c’est qu’elles n’ont pas suffisamment d’information sur les risques et les coûts que présentent ces entreprises, a-t-il également été entendu.  Et dans ces conditions la spécificité locale du microcrédit présente une souplesse et des avantages dont les banques ou services financiers traditionnels ne disposent pas.  Dans l’intérêt du succès du microcrédit, il a également été souligné la nécessité pour les pouvoirs locaux de créer un cadre régulateur approprié qui protège les épargnants.  Il a été suggéré d’étudier le lien entre l’allégement de la dette et la promotion de la microfinance et d’examiner comment les fonds provenant de l’émigration pourraient être mieux utilisés. 


Table ronde sur le thème « Attirer les investissements étrangers directs dans les pays les moins avancés (PMA) »


Que peuvent faire les pays hôtes, les pays d’origine, les entreprises multinationales et la communauté internationale pour réduire le risque lié aux investissements dans les PMA?  Que peuvent faire les agences d’investissements des PMA (IPA) pour attirer plus d’investissements étrangers directs (IED), et plus particulièrement ceux qui correspondent à leurs besoins?  Y a-t-il des niches que les PMA devraient explorer, notamment en ce qui concerne la délocalisation des services?  Telles sont quelques-unes des questions auxquelles s’est efforcée de répondre cet après-midi la table ronde organisée par le Conseil économique et social (ECOSOC), dans le cadre de son débat de haut niveau, et animée par Karl Sauvant, Directeur de la Division de l’investissement, de la technologie et du développement des entreprises de la CNUCED.


Notant que les IED peuvent contribuer au développement en apportant aux économies des pays hôtes des capitaux, des technologies et des compétences, et en leur facilitant l’accès aux marchés mondiaux, les participants à la table ronde ont rappelé que les flux mondiaux d’IED avaient atteint 650 milliards de dollars l’année dernière, ceux vers les pays en développement s’élevant à 160 milliards de dollars.  Le montant estimé de ces flux vers les PMA a atteint cinq milliards de dollars, ce que les participants, notamment le représentant du Bangladesh et le Directeur général adjoint de l’Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), David Harcharik, ont jugé très insuffisant compte tenu des besoins de ces pays.  Même s’il représente près de 7% de la formation brute de capital dans les PMA, et environ les trois cinquièmes de l’Aide publique au développement (APD) reçue par ces pays, ce niveau d’IED ne suffit pas à accélérer le rythme de développement des PMA et à y réduire la pauvreté.


Revenant sur les recommandations faites par la CNUCED XI qui vient de se tenir à Sao Paulo, M. Sauvant a rappelé qu’il était important d’aider les PMA à augmenter leurs capacités de production en leur donnant les moyens de renforcer leurs capacités humaines, leurs infrastructures de base, et la santé de leurs populations, ce qui leur permettrait ensuite de créer un environnement propice à l’accueil de l’IED.  Tout en partageant ce point de vue, la Secrétaire générale de la Chambre de commerce internationale, Mme Maria Livanos Cattaui, a rappelé que le secteur privé, principal promoteur de l’IED, n’avait pas de vocation philanthropique.  Son objectif étant de gagner de l’argent au bénéfice de ses actionnaires, le secteur privé a besoin de trouver dans les pays où il décide d’investir des législations et des pratiques d’affaires transparentes et propices à la création d’entreprises, a dit Mme Livanos Cattaui, en notant que ces exigences ne sont pas satisfaites dans la plupart des pays en développement, notamment les PMA.  Sur cette question, le représentant de l’Afrique du Sud a déclaré que les pays en développement, et surtout ceux du continent africain, étaient victimes d’un certain nombre de préjugés véhiculés par les médias et les agences d’évaluation de risques des pays développés.  À cet égard, il a noté que l’Afrique du Sud, dont le secteur privé est devenu le premier pourvoyeur d’IED dans les pays africains, le fait parce qu’elle croit en l’avenir de l’Afrique et ne se laisse pas influencer par de vieux clichés.


L’évaluation des risques et la prise en charge des pertes d’investissements en cas de dévaluation monétaire ou de sévère crise financière sont le principal facteur pris en compte par les investisseurs étrangers dans leurs évaluations, a estimé M. Edward Graham, Chargé de recherches principal à l’Institut d’économie internationale de Washington, DC.  Évoquant la crise financière asiatique et l’effondrement du peso argentin, il a indiqué qu’il était dangereux pour certains pays d’indexer arbitrairement de manière fixe le cours de leur monnaie à celui d’une devise étrangère.  Dans le cas de l’Argentine et de l’Indonésie, a-t-il dit, l’indexation du peso et de la roupie sur le dollar a été catastrophique à la fois pour l’investissement et pour la dette extérieure de ces pays du fait que le cours de leurs devises était artificiellement maintenu à un niveau élevé.  Leur effondrement a rendu la dette nationale insoutenable, et a appauvri les populations de ces pays tout en augmentant les risques d’investissements.  Pour ce genre de situation, la communauté internationale, ont déclaré plusieurs intervenants, devrait mettre en place des mécanismes permettant un partage équitable du fardeau du remboursement des dettes entre investisseurs étrangers et pays accueillant les IED.  Au cours de la décennie écoulée en effet, les pays en développement ont hérité des dettes dues aux crises financières et autres dévaluations forcées, alors que les investisseurs étrangers n’acceptaient que les bénéfices de leurs activités sans en assumer les risques.


Malgré ces difficultés, l’IED reste attractif.  Il est l’objet d’une compétition acharnée entre pays, ont noté les intervenants en encourageant les PMA, dont les structures et les marchés nationaux sont faibles et trop étroits, à travailler dans le cadre d’accords d’investissements et de marchés régionaux afin d’atteindre la taille critique qui leur donnerait une chance de recevoir une partie de la manne.  Ce genre de stratégie suppose l’allègement des réglementations, l’harmonisation des procédures et la création d’espaces régionaux de paix, de dialogue, de respect des droits de l’homme et d’avancés démocratiques.  Le représentant du Bangladesh a, à cet égard, cité l’exemple de son pays qui, grâce à des règles démocratiques, à la pratique du microcrédit, à une question rigoureuse et à une politique d’ouverture, a fait des progrès notables et parvient à attirer un certain montant d’IED, notamment nord-américains.


Table ronde sur le rôle des préférences commerciales pour les PMA dans la promotion de l’investissement


      Les régimes des préférences commerciales sont depuis longtemps une donnée essentielle de l’environnement commercial des PMA.  Devant l’érosion du Système généralisé de préférences (SGP) -précurseur de ces régimes- un certain nombre de pays industrialisés ont mis au point des traitements préférentiels parmi lesquels il faut citer l’« African Growth and Opportunity Act » (AGOA) des États-Unis ou encore l’Initiative « Tout sauf les armes » de l’Union européenne.  Les chiffres sont clairs.  Alors qu’elles étaient pratiquement inexistantes en 2000, les exportations africaines de textiles et de vêtements sont passées, en 2002, de 800 millions à 1,2 milliard de dollars.  Devant de telles perspectives d’accès aux marchés, les pays concernés ont connu une hausse substantielle de leurs investissements nationaux et étrangers. 


Si leur véracité n’a pas été contestée, ces chiffres n’ont pas pour autant impressionné les représentants des PMA dont le Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la Tanzanie, qui coprésidait la table ronde.  L’impression de pessimisme est restée vivace en dépit des bonnes nouvelles concernant, entre autres, l’élargissement du SGP, la prorogation de l’AGOA ou encore l’intention de l’Union européenne d’examiner les règles d’origine pour réserver les préférences aux seuls PMA, d’éliminer à terme toutes les subventions agricoles et de créer à l’intention des PMA un centre de formation censé renforcer leur capacité à produire, conformément aux normes européennes. 


Les subventions agricoles et les obstacles sanitaires et phytosanitaires sont, en effet, les arguments les plus utilisés par les PMA pour illustrer les distorsions commerciales, comme l’a rappelé le Secrétaire général adjoint et Haut Représentant pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement, Anwarul Chowdhury, qui était le modérateur de cette table ronde.  Mais, comme l’a fait observer le Ministre tanzanien des affaires étrangères, les contraintes de l’offre subsisteront.  Exporter oui, mais qu’est-ce qu’il exporte? a-t-il résumé en posant ainsi, avec l’autre Coprésidente de la table ronde, laMinistre du commerce et du développement de la Finlande, Paula Lehtomaki, la question de l’impact des régimes préférentiels pour attirer les investissements nationaux et étrangers.  Comment les partenaires bilatéraux et multilatéraux peuvent-ils promouvoir les investissements étrangers directs (IED)? a demandé Mme Lehtomaki.  En esquissant une réponse à cette question, le Ministre tanzanien des affaires étrangères a d’emblée rejeté les accusations de corruption.  Pourquoi alors, a-t-il fait remarquer, le Nigéria continue-t-il d’attirer les IED? 


Un avis catégorique est venu du représentant de la Commission européenne.  Dans les PMA, a-t-il indiqué, les flux d’IED seront proportionnels aux perspectives réelles de leur intégration aux marchés.  À l’exception du coton, du sucre et du riz, a-t-il affirmé, les portes de l’Union européenne sont ouvertes aux PMA.  Il a préconisé que le débat ne se limite pas à l’accès des PMA aux marchés du Nord mais qu’il s’étende à la question de l’intégration régionale.  L’aide extérieure ne saurait suffire, a-t-il prévenu avant de recevoir l’appui de la représentante du Département du commerce des États-Unis.  Après avoir rappelé que l’AGOA vise un appui à l’industrialisation du secteur textile et l’ouverture du marché américain aux produits manufacturés, et en conséquence, l’abandon de la progressivité des taxes, la représentante a donné quelques précisions.  Dans le cadre des campagnes d’explication sur le mécanisme prorogé, a-t-elle souligné, le Département du commerce s’emploie à démontrer aux pays africains que ce mécanisme ne vise pas seulement l’accès au marché américain mais plus largement à tous les marchés, et surtout ceux du continent.  Les PMA doivent apprendre à franchir les portes qui leur sont ouvertes, a insisté le représentant de la Commission européenne en les encourageant à adhérer à l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  Soucieuse d’une répartition équitable des responsabilités, la représentante des États-Unis a tout de même avoué que les investisseurs américains ne sont pas assez informés des opportunités commerciales de l’Afrique, en général, et des PMA, en particulier.  Le coût des investissements étant élevé, les gouvernements doivent, a-t-elle ajouté, rechercher des moyens de le réduire comme mesure d’incitation aux entrepreneurs.


Ce type de mesures a suscité les commentaires acerbes du représentant de l’ONG « LDC Watch » qui a indiqué que, dans leur course effrénée aux IED, les pays pauvres se livrent désormais à une compétition dans le domaine des exemptions fiscales au détriment des dépenses publiques.  Le Burkina Faso, a-t-il rappelé, amende pour la énième fois son Code des investissements qui, comme les précédentes révisions, n’aura aucun effet sur le niveau des IED.  Le représentant de l’ONG a aussi modéré l’optimisme ambiant concernant le bien-fondé du SGP.  Ce système étant une initiative unilatérale dont les conditions d’éligibilité sont dictées par le donateur lui-même, on peut se demander dans quelle mesure les intérêts du bénéficiaire sont pris en compte?  Le représentant de la société civile a aussi commenté les appels de la Commission européenne concernant l’adhésion des PMA à l’OMC. 


Le Burkina Faso, a-t-il rappelé, y subit en ce moment l’examen de sa politique commerciale.  L’Organisation conclut déjà que l’économie burkinabè repose sur trois piliers, à savoir le coton, les envois de fonds et l’aide publique au développement (APD).  Le fait que l’OMC reconnaisse l’importance de l’APD est un aveu d’échec quant à la place exclusive du commerce comme moteur du développement, a-t-il fait remarquer.  Quant aux envois de fonds des émigrants qui relèvent de l’Accord général sur le commerce des services de l’OMC, il a dénoncé l’incapacité de l’OMC à lever les restrictions imposées par les pays de destination qui rendent les transferts très onéreux.  Concluant sur la question du coton, il a fait observer que le Burkina Faso est un de ces pays dont l’économie dépend d’un seul produit de base.  Le pays exporte, en effet, 95% de sa production.  Or, le régime de préférence appliqué à ce produit n’a pas réussi à juguler l’impact négatif des subventions agricoles pratiquées par les pays du Nord sur la production nationale.  « Nous sommes dans une situation où les préférences nous permettent d’exporter un coton que, bientôt, nous n’aurons plus à cause des subventions agricoles ».  


Table ronde sur le thème « Libérer l’entreprenariat: le rôle des partenariats dans la mobilisation des ressources pour les PMA »


Cette table ronde s'est tenue sous la présidence de M. Poul Nielson, Commissaire au développement et à l'aide humanitaire de la Commission européenne. 


Prenant la parole en tant que modérateur, M. Mark Malloch Brown, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a insisté sur l'importance de mettre en place dans les PMA un environnement favorable aux investissements ainsi qu’un cadre de politique générale visant à faciliter la mobilisation des ressources.  Il a aussi souligné la nécessité de construire de solides partenariats.  Pour ce faire, il faut, selon lui, diffuser des appels d'offres à l'échelle mondiale afin d'éviter les situations de monopoles.  Il faut aussi tirer les leçons des succès remportés par les micro-entreprises grâce au développement du microcrédit et s'efforcer de les consolider afin qu’elles évoluent pour devenir de véritables établissements. 


De son côté, Mme Charlene Lea, Directrice générale de Home Loan Guarantee Co., a insisté sur le besoin de disposer d'un marché financier accessible aux personnes à faible revenu.  C'est ce que s'efforce de faire son organisation qui établit des partenariats avec le secteur privé, le secteur public, le secteur caritatif, le monde des assurances ou encore du bâtiment.  L'objectif est de prendre en charge les risques liés aux prêts accordés à des personnes atteintes du VIH/sida en leur assurant en parallèle un accès à des traitements afin qu’elles puissent recommencer à travailler et à subvenir à leurs besoins.  De façon générale, a estimé M. Bruce Schearer, Président de Synergos Institute, il faut impliquer toutes les parties prenantes (gouvernements, ONG, entreprises privées) afin d'établir un dialogue constructif en vue d'une rationalisation systématique des programmes définis et favoriser la synergie entre les différents secteurs de l'économie. 


Le développement du secteur privé est au cœur de la réalisation des Objectifs de développement du Millénaire, a déclaré pour sa part M. Carlos Margarinos, Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI).  Dans ce cadre, il a notamment insisté sur les objectifs de développement humains tels que l'éducation, la santé, l'espérance de vie.  Selon M. Margarinos, il est également important d'adopter une approche globale au niveau macroéconomique afin d'influencer les programmes nationaux et d’améliorer les services publics.  Cependant, il faut aussi modifier l'approche des partenaires au niveau local.  C'est dans cette optique que l'ONUDI travaille de concert avec le Programme de développement des Nations Unies (PNUD) pour améliorer l'efficacité des programmes de développement qui respectent les règles sur l'importation ou encore les règles sanitaires.  De la même manière, M. Frederick S. Tipson, Directeur de International trade and development, Microsoft Corporation, a fait savoir que des partenariats avaient été mis en place entre Microsoft et le PNUD en vue de relever de façon plus efficace les défis liés au développement des technologies de l'information et des communications (TIC). 


Plaidant à son tour en faveur d'une approche macroéconomique, M. Andrew Kwame Pianim, Directeur de New World Investment LTD, a quant à lui insisté sur l'importance du désenclavement des secteurs économiques afin que chacun d'entre eux ait un impact sur l'économie d'un pays, renforçant ainsi les capacités concurrentielles de ce dernier au niveau mondial.  Pour ce faire, il faut, à son avis, renforcer l’efficacité et la transparence de l’administration.


L'intégration régionale a enfin été considérée comme un élément important de la mobilisation des ressources.  M. Brown l'a qualifiée de pierre angulaire du développement et a insisté sur l'importance de développer les possibilités d'échange avec les pays voisins et les autres PMA et ce, afin d'assurer la diversification, de favoriser la concurrence et d'encourager la croissance.  Par ailleurs, au rang des idées avancées, M. Margarinos a évoqué la possibilité d'utiliser l'Aide publique au développement (APD) pour garantir les investissements et réduire ainsi les risques. 


Table ronde sur le thème « Investissement dans les eaux urbaines, assainissement et développement durable des établissements humains dans les PMA »


La table ronde a révélé le caractère prioritaire des investissements pour la réalisation des Objectifs de développement du Millénaire, et en particulier du Plan d’action de Bruxelles, de même que l’absolue nécessité d’y consacrer davantage de ressources.  Les modalités de gestion de ces ressources et programmes et l’implication des secteurs public et privé et des communautés locales ont également été l’objet de l’attention des participants à cette manifestation présidée par le Ministre aux affaires présidentielles et publiques de la Sierra Leone, M. Shekou M. Sesay et animée par Mme Anna Tibaijuka, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat).


M. Sessay a exprimé l’inquiétude de la communauté internationale quant au fait que nombre des PMA n’ont pas encore réussi à établir des priorités en matière d’eau, d’assainissement et d’établissements humains, ni à les intégrer comme il se doit à leur stratégie de développement durable, y compris à leur document stratégique pour la réduction de la pauvreté.  Il a également souligné la reconnaissance croissante de rôle de relais que peuvent et doivent jouer les communautés locales sur le terrain, à l’appui des efforts menés par l’État.  À ce titre, le Ministre de la Sierra Leone a insisté sur le besoin d’identifier et de partager les bonnes pratiques en matière de partenariat entre les autorités locales et la société civile. 


Insistant sur le caractère prioritaire des questions de l’eau pour le développement durable des PMA, il a regretté la baisse des investissements internationaux dans le domaine de l’eau et de l’assainissement.  Au cours des années 90, a-t-il précisé, l’investissement par habitant a baissé de plus d’un tiers dans les pays subsahariens, dont beaucoup sont des PMA, et ce, contrairement à l’objectif en matière d’aide publique au développement (APD), énoncé dans la Déclaration du Millénaire.  Dans ce contexte, comment est-il possible d’avancer vers la réalisation des objectifs de Monterrey et plus particulièrement des recommandations du Panel Camdessus de doubler le montant actuel de l’aide publique au développement afin d’être en mesure de réalisation les Objectifs du Millénaire?  Comment faire en sorte que l’APD serve de levier pour la mobilisation des capitaux privés pour la fourniture de services d’approvisionnement et d’assainissement aux pauvres des zones urbaines et rurales, a lancé M. Sesay aux participants en ajoutant que pour diminuer de moitié le nombre d’habitants des bidonvilles, il serait nécessaire de mobiliser quelque 70 à 150 milliards de dollars, soit largement plus que ce dont disposent les PMA. 


Prenant pour exemple le modèle du projet pilote développé par son pays en la matière, la Ministre d’État chargé de l’eau au Ministère chargé de l’eau, du territoire et de l’environnement de l’Ouganda, Mme Maria Mutagamba, a insisté sur le besoin d’élaborer des mécanismes novateurs de partenariat entre autorités publiques, y compris au niveau local, et secteur privé.  Pour attirer l’investissement, a-t-elle souligné, les PMA doivent générer la demande pour les services d’eau et d’assainissement afin d’attirer les investissements.  De son expérience, a-t-elle poursuivi, les États doivent veiller à assurer l’équité pour tous en matière d’accès aux services et infrastructures et à garantir la durabilité des projets en impliquant et en responsabilisant la population.  Prenant l’exemple de la mise en place de réseaux hydriques, elle a estimé qu’il était primordial de faire payer à chaque bénéficiaire une participation aux coûts de mise en place et a appuyé l’idée de taxer l’utilisation d’eau, notamment dans le domaine du tourisme, pour dégager des fonds pour la construction d’infrastructures. 


Au niveau de l’Afrique, a déclaré Mme Mutagamba en s’appuyant sur l’exemple du Conseil africain établi dans le cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), il convient d’harmoniser les plans d’actions nationaux en matière d’eau d’assainissement et d’établissements humains et de synchroniser les activités menées par chaque État.  L’enjeu est d’identifier les faiblesses et les contraintes au niveau de chaque pays pour définir les priorités au cas par cas, a-t-elle ajouté.


Évoquant l’expérience de l’Amérique latine dans la gestion de l’eau et le financement novateur des infrastructures, le Ministre chargé de l’eau, de l’aménagement, des travaux publics et de l’infrastructure pour le développement du Mexique, M. Benjamin Fournier Espinosa, a insisté sur le fait que l’eau relevait de la survie de l’humanité et de l’intérêt national de chaque pays.  Il a estimé que la crise économique avait révélé les limites des modèles argentin, chilien et brésilien où le secteur privé était prédominant en matière d’infrastructures et de services d’eau et d’assainissement.  Dès lors, les pays de la région, et notamment le Mexique, ont pris conscience de l’importance de la participation du secteur public et de la nécessité de ne pas faire de l’eau une question politique.  Évoquant la situation au Mexique, il a souligné l’importance de l’éducation pour modifier les comportements et faire prendre conscience que l’eau est une denrée limitée.  Bien rare, l’eau, son accès et son assainissement, doivent être payants, a-t-il insisté en indiquant que les tarifs institués devaient être justes et permettre de mettre fin aux subventions. 


Représentant des PMA d’Asie, M. Alounkéo Kittikhoun, Ambassadeur de la République démocratique populaire lao auprès des Nations Unies, a insisté sur le rôle de la coopération régionale dans le domaines liés à la gestion de l’eau et a expliqué que la coopération entre les pays de la Vallée du Mékong- Cambodge, Laos, et Viet Nam, se déclinait selon trois volets, à savoir le renforcement des capacités, l’identification des projets et la mobilisation des ressources.  Il a également insisté sur la vulnérabilité particulière des pays les moins avancés sans littoral pour lesquels l’accès à l’eau dépend de facteurs extérieurs tels que les infrastructures et les pratiques administratives, ou les relations politiques bilatérales et régionales.


Représentant la société civile, Mme Bilqis A. Hoque, Présidente du Centre de recherche sur la population et le développement de Dhaka au Bangladesh,  a insisté sur la qualité de l’eau et de son assainissement.  Dans mon pays, l’eau ne manque pas, mais elle contient de l’arsenic ce qui pose un grave problème de santé publique à 70 millions de personnes, a-t-elle indiqué, en insitant sur la nécessité d’élaborer des stratégies assorties d’échéances et d’objectifs en matière d’approvisionnement et d’assainissement et d’identifier les technologies les plus sûres, en collaborant avec la société civile sur la base de l’avantage comparée dont chacune dispose.


Répondant aux préoccupations qu’avait exprimées Mme Tibaijuka sur le rôle marginal du secteur privé dans la gestion de la crise de l’eau, Alain Mathys, Directeur du programme « Eau pour tous » de Suez-Environnement, a tiré à grands traits les leçons apprises de l’expérience de Suez en matière de développement d’infrastructure d’approvisionnement et d’assainissement.  Il a insisté sur le fait que s’il n’y avait pas de modèle unique, il existait un certain nombre de principes de base.  Selon lui, pour assurer le succès d’un partenariat public-privé, il est primordial d’impliquer les communautés locales et la société civiles et d’obtenir l’appui technique des institutions intergouvernementales.  La participation du secteur privé, a-t-il insisté, implique l’existence d’un cadre juridique stable et prévisible, la présence d’une volonté politique réelle exempte d’idéologie, d’un environnement économique prévisible accompagné d’une bonne gestion des risques et des coûts.  Il a affirmé qu’en la matière, il était possible d’appliquer des principes d’efficacité économiques et d’atteindre des résultats positifs pour toutes les parties prenantes, y compris les populations les plus pauvres.


Représentant le Groupe du G-8, le délégué du Japon a, pour sa part, mis l’accent sur la nécessité de briser le cercle vicieux de la pauvreté par l’accès à la santé et à l’éducation et a souligné la nécessité préalable de permettre à tous, y compris les habitants des bidonvilles, d’avoir accès à l’eau, condition essentielle de l’amélioration des conditions de vue et de santé.


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