ECOSOC/6057

L’ECOSOC EXAMINE LES MOYENS DE MOBILISER DES RESSOURCES POUR FINANCER LA MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME D’ACTION DE BRUXELLES POUR LES PMA

17/03/2004
Communiqué de presse
ECOSOC/6057


Conseil économique et social

Réunion en vue de préparer le débat de haut

niveau de la session de fond de 2004

matin & après-midi


L’ECOSOC EXAMINE LES MOYENS DE MOBILISER DES RESSOURCES

POUR FINANCER LA MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME D’ACTION DE BRUXELLES POUR LES PMA


Dans le cadre des réunions préparatoires organisées en vue du débat de haut niveau de sa session de fond de 2004, le Conseil économique et social abordait aujourd’hui sous la présidence de Marjatta Rasi (Finlande) la thématique de la mobilisation des ressources et de la promotion de l’environnement aux fins de l’élimination de la pauvreté dans le cadre de l’application du Programme d’action en faveur des pays les moins avancés pour la décennie 2001-2010.  L’une des priorités de ce Programme, adopté en mai 2001 à Bruxelles, consiste à réduire de moitié, d’ici à 2015, le nombre de personnes vivant dans des conditions d’extrême pauvreté, a rappelé le Ministre béninois des affaires étrangères, Rogatien Biaou, également Président du Groupe des pays les moins avancés (PMA).  Pour y parvenir, les PMA doivent d’ici là maintenir un taux de croissance annuel de leur PIB de l’ordre de 7% et un taux d’investissement de 25%, a ajouté le Ministre, estimant par conséquent que le défi réside dans l’identification de nouvelles sources de financement. 


En dépit de l’adoption du Programme d’action de Bruxelles, nous ne sommes toujours pas sur la bonne voie, a constaté pour sa part le Conseiller spécial du Secrétaire général des Nations Unies, Jeffrey Sachs, pour qui les engagements souscrits ne se sont toujours pas concrétisés.  Nous disposons de solutions mais pas de ressources, a poursuivi Jeffrey Sachs, avant de prendre l’exemple des Etats-Unis dont les contributions à l’aide publique au développement sont inférieures de 17 milliards de dollars aux montants promis.  Parallèlement à l’aide publique au développement, le Haut Représentant des Nations Unies pour les pays les moins avancés, Anwarul K. Chowdhury, a prôné des mesures plus ambitieuses pour financer la réalisation des objectifs du Programme d’action de Bruxelles, telles que la mobilisation des capitaux étrangers, la gestion du fardeau de la dette et l’ouverture des marchés.


Une série de tables rondes a ensuite eu pour tâche de réfléchir aux aspects pratiques de la mobilisation des ressources en axant les échanges sur l’expérience du Timor-Leste et du Bangladesh pour la première; sur l’impact de la bonne gouvernance et de la gestion des fonds publics sur la mobilisation des ressources internes en prenant l’exemple du Bénin pour la seconde; et enfin sur les documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté comme mécanisme pour la mobilisation des ressources, en examinant le cas du Burkina Faso, pour la dernière table ronde.  La présidente de la première table ronde, Aicha Bassarewan, Vice-Ministre de la planification et des finances de Timor-Leste, prenant l’exemple de son propre pays, a plaidé lors de la présentation des conclusions des travaux pour des stratégies de sortie soucieuses de maintenir les acquis des opérations de relèvement après les conflits.


Pour éliminer la pauvreté, la mise en place d’une bonne gestion publique au niveau des pays et d’une bonne gouvernance au niveau international constituent des éléments clefs, a rappelé le Ministre béninois des affaires étrangères, Rogatien Biaou, dont le pays faisait l’objet de l’échange de vues sur la bonne gouvernance et la gestion des fonds publics sur la mobilisation des ressources internes.  A ce titre, l’importance d’une fiscalité décentralisée –les projets financés étant des projets de proximité-, du soutien à la création de microentreprises, de la mobilisation de financements dans les diaspora, ont été souligné entre autres comme sources de financement possibles pour le développement.  Enfin, la mobilisation des ressources dans le cadre des stratégies de réduction de la pauvreté a, dans le cas du Burkina Faso, ouvert des perspectives d’accès à l’aide et à des mécanismes d’allègement de la dette, a indiqué l’Ambassadeur burkinabé aux Etats-Unis, Tertius Zongo.  M. Zongo a estimé que les PRSP étaient des cadres participatifs et fédérateurs auxquels devaient adhérer les différents bailleurs de fonds, avant d’ajouter que la table ronde avait fait l’objet de propositions relatives à l’inclusion de dimensions sociale, culturelle, commerciale et environnementale dans ces stratégies. 


La Présidente du Conseil économique et social, Marjatta Rasi (Finlande), rappelant que la responsabilité première du développement incombe en priorité aux pays les moins avancés, a toutefois insisté sur le respect de leurs engagements par les bailleurs de fonds, notamment ceux agréés lors du Sommet du Millénaire, en 2000, de la Conférence de Bruxelles, en 2001, et lors de la Conférence de Monterrey, en mars 2002.


Mobilisation des ressources et promotion de l’environnement aux fins de l’élimination de la pauvreté dans le cadre de l’application du Programme d’action en faveur des pays les moins avancés pour la décennie 2001-2010


Déclarations liminaires


Mme MARJATTA RASI (Finlande), Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), a rappelé la pertinence des Objectifs de développement du Millénaire et insisté sur la définition d’une approche complète et globale du développement durable pour mobiliser les ressources nécessaires et parvenir à l’éradication de la pauvreté.  Le rôle de l’ECOSOC doit être renforcé dans la coordination des efforts internationaux pour mettre en œuvre le Programme d’action de Bruxelles et réaliser les Objectifs de développement du Millénaire, a-t-elle dit, avant de souhaiter que les travaux de ces deux jours permettent d’examiner les progrès réalisés dans des pays sortant de conflit, notamment la Guinée-Bissau et le Burundi, et de tirer des conclusions quant aux meilleures pratiques à promouvoir dans le domaine du développement.  Les travaux d’aujourd’hui seront quant à eux consacrés à la mobilisation des ressources pour la mise en œuvre du Programme d’action de Bruxelles, à la bonne gouvernance et à la mobilisation des ressources internes, et aux stratégies de réduction de la pauvreté.


M. ANWARUL K. CHOWDHURY, Secrétaire général adjoint et Haut Représentant pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits Etats insulaires en développement, a salué les efforts de l’ECOSOC dans l’examen des questions liées au développement des pays les moins avancés, avant de rappeler les grandes lignes du Programme d’action de Bruxelles pour les PMA orienté vers l’éradication de la pauvreté.  Les délibérations de l’ECOSOC lors de sa session de fond de 2004, en particulier pour le dialogue de haut niveau, porteront essentiellement sur les sept grandes orientations du Programme d’action de Bruxelles, notamment la mobilisation des ressources financières, la promotion de la bonne gouvernance et la création des conditions indispensables à la mobilisation des ressources internes, ainsi que sur la situation des PMA sortant d’un conflit.  Les activités de financement du développement se fondent traditionnellement sur l’APD, a-t-il constaté, avant de prôner des mesures plus ambitieuses, notamment la mobilisation de capitaux étrangers, la gestion du fardeau de la dette et l’ouverture des marchés, comme cela a été souligné en mars 2002 à Monterrey.  Le Fonds mondial de solidarité des Nations Unies est une initiative concrète et prometteuse créée l’an dernier, a indiqué M. Chowdhury, avant de préciser qu’il commencerait à fonctionner très prochainement en accordant la priorité aux PMA.


M. PATRIZIO CIVILI, Sous-Secrétaire général à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations (DAES), a expliqué que les défis que connaissent les PMA sont nombreux et que dans les conditions actuelles il ne serait pas possible d’atteindre les objectifs du Programme d’action de Bruxelles et des ODM.   Trop de PMA sont encore dans des situations de conflits et l’on sait qu’il ne peut pas y avoir de paix sans développement et vice-versa, a-t-il dit.  Plusieurs pays ont fait des progrès en adoptant une démarche multidimensionnelle en appui à la paix et au développement et le système des Nations Unies s’efforce de mieux coordonner ses activités, a poursuivi M. Patrizio.  Des groupes consultatifs ad hoc sur le Burundi et la Guinée-Bissau ont été mis en place, a-t-il dit par ailleurs, nous nous sommes rendus compte que la plupart des pays africains pauvres se trouvaient dépendants d’un seul produit de base et qu’il était nécessaire de favoriser la diversification des produits à l’exportation.  Malheureusement, à son avis, les mesures prises sont en deçà des engagements conclus à Bruxelles et Monterrey.  Il faudra un engagement plus marqué et des mesures ciblées pour pouvoir éliminer la pauvreté de ces pays, a conclu M. Patrizio.


M. ROGATIEN BIAOU, Ministre des affaires étrangères du Bénin et Président du groupe des PMA, a expliqué que l’objectif principal du Programme d’action pour les PMA est de parvenir en 2015 à la réduction de moitié du nombre des personnes vivant dans la pauvreté.  Pour parvenir à cet objectif, a-t-il dit, les PMA devront maintenir une croissance de 7% par an de leur PIB et un taux d’investissement de 25% par an ce qui exige de nouvelles ressources prévisibles.  Le Programme d’action reconnaît que ces objectifs ne seront pas atteints en raison de la faiblesse des économies nationales.  La promotion d’un environnement propice au développement est tributaire de ressources extérieures par le biais de l’Aide publique au développement, de l’allègement de la dette, du commerce extérieur et de l’Investissement étranger direct.  Il importe à son avis que les partenaires au développement honorent leurs engagements et que ceux qui consacrent plus de 0,20%de leur PNB à l’aide publique continuent de le faire.  Il faut également que ceux qui ont atteint l’objectif de 0,15% s’engagent à atteindre rapidement l’objectif de 0,20%.  Le Ministre a également expliqué que les partenaires au développement, en plus des facilités d’accès à leurs marchés qu’ils accordent aux PMA, assurent le renforcement de leurs capacités productives et techniques et encouragent les flux de capitaux et les courants d’investissement vers les PMA.


Mme AICHA BASSAREWAN, Vice-Ministre de la planification et des finances du Timor-Leste, rappelant que son pays a intégré le groupe des pays les moins avancés en décembre 2004, a qualifié le Programme d’action de Bruxelles de cadre crucial pour créer un environnement propice à la réduction de la pauvreté pour les PMA et mobiliser des ressources financières.  Depuis 1999, la communauté internationale a apporté un appui en plusieurs phases au Timor-Leste, du secours au relèvement en passant par la reconstruction et la mise en place d’une structure de gouvernance fonctionnelle, a-t-elle dit, pour un montant global de 750 millions de dollars.  Notre programme national de développement a été préparé de manière participative au sein de chaque district et s’inscrit également dans la réalisation des Objectifs de développement du Millénaire, a-t-il précisé.  Désormais, nous disposons d’une fonction publique avec des effectifs formés, nous avons ratifié tous les traités importants et nous avons engagé un programme de décentralisation avec l’appui du PNUD, a-t-il indiqué.  Evoquant ensuite les réalisations en matière d’infrastructures, la Vice-Ministre a tenu à souligner la complexité des problèmes que rencontrent les PMA, en particulier leur nature multidimensionnelle.  Dans le cas du Timor-Leste, nous sommes très vigilants en ce qui concerne les recettes pétrolières qui ne devraient couvrir que des dépenses de l’ordre de 55 millions de dollars par an et qui, dans d’autres pays, ont démontré les méfaits de la dépendance d’une économie nationale d’un seul produit d’exportation.  Mme Bassarewan a plaidé pour la mobilisation de partenariats multidimensionnels en faveur des PMA.


M. TERTIUS ZONGO, Ambassadeur du Burkina Faso aux Etats-Unis, a indiqué que le monde traversait aujourd’hui une période où les revenus ont été décuplés par le phénomène de la mondialisation et du développement technologique, mais dans le même temps, la marginalisation d’autres espaces s’est accélérée.  Insistant sur les notions d’équité et de bonne gouvernance, M. Zongo a observé que la dépense publique était plus efficace là où les institutions et le cadre d’action sont efficaces.  Après avoir plaidé en faveur de la redynamisation de la coresponsabilité évoquée lors de la Conférence de Monterrey, l’Ambassadeur burkinabé a appelé les pays du Sud à renforcer la bonne gouvernance et mobiliser leurs ressources internes, et les pays développés à augmenter les ressources consacrées au développement, sous la forme de l’APD, des IED ou de l’allègement de la dette. 


M. JEFFREY SACHS, Conseiller spécial du Secrétaire général, a déclaré que les taux de mortalité infantiles élevés dans les pays les plus pauvres, la pandémie du VIH/sida, l’incidence du paludisme et de la tuberculose constituent des éléments d’insécurité immenses.  Malgré la Conférence de Bruxelles nous ne sommes toujours pas sur la bonne voie, a-t-il affirmé.  Les populations de nombreux pays meurent de faim et de maladie tandis que les engagements souscrits ne se sont toujours pas concrétisés.  Le problème de fond est le manque de ressources, a souligné M. Sachs en déclarant que nous disposons de solutions mais manquons cruellement de ressources, les Etats-Unis, par exemple, étant en deçà de 17 milliards de dollars par rapport aux sommes promises.  Tous les jours plus de 10 000 Africains meurent des conséquences de la pauvreté extrême, pourtant, les pays industrialisés se sont engagés il y a 30 ans à verser 0,7% de leur PIB à l’Aide publique du développement, a rappelé M. Sachs.


TABLES RONDES


Mobilisation des ressources pour la mise en œuvre du Programme d’action de Bruxelles pour les pays les moins avancés pour la décennie 2001-2010: l’expérience du Timor-Leste et du Bangladesh


Entamant une série de trois exposés, Mme AICHA BASSAREWAN, Vice-Ministre à la planification et aux finances du Timor-Leste, a expliqué que depuis l’indépendance, tous les efforts ont été déployés pour couvrir les besoins de base du peuple qui vit bien en deçà du seuil de pauvreté.  Nous avons bénéficié d’un fort soutien de la communauté internationale mais le retrait progressif de la présence de l’ONU a eu un impact sur notre économie en crise.  Nous avons besoin de ressources financières et humaines et comptons sur votre collaboration.


Résumant la situation dans son pays, le Représentant Permanent du Bangladesh, M. IFTEKHAR CHOWDHURY, a expliqué qu’au moment de l’indépendance, 80% de la population vivait sous le seuil de pauvreté.  Depuis, la pauvreté a été réduite et la malnutrition a décliné rapidement.  Les femmes ont désormais accès au microcrédit.  Les taux de vaccination sont meilleurs que dans certains pays développés et le taux de fécondité a été ramené à 3,3.  Les succès viennent de stratégies sociales et économiques adéquates, de l’appui externe, d’une bonne gestion et de la naissance d’une classe moyenne.  Depuis Bruxelles, nous avons mis en place une commission anticorruption et une commission des droits de l’homme.  Pour mobiliser les ressources, nous avons amélioré notre assise financière avec une augmentation de 46% des recettes fiscales.  Les partenaires doivent mettre en œuvre leur engagement de verser au titre de l’aide publique au développement 0,25% de leur PNB aux pays les moins avancés.  Les capitaux privés peuvent également jouer un rôle pour accroître les capacités nationales.  Une lumière commence à poindre au bout du tunnel même si nous devons encore réaliser de nombreux progrès.


M. HAOLIANG XU, Représentant résident adjoint du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) au Timor-Leste, a  expliqué qu’en 1999, le taux de fécondité était de 7,1, l’espérance de vie était de 55 ans pour les hommes et de 59 ans pour les femmes et que 20% de la population vivait avec moins d'un dollar par jour.  Depuis le référendum et l’indépendance, un programme de développement national a été élaboré qui consacre la pertinence des Objectifs de développement du Millénaire.  L’appui de la communauté internationale de 1999 à 2003 est allé au développement des infrastructures et des services sociaux de base.  Nous entrons dans une nouvelle phase de développement marquée par une diminution de l’aide externe, par une faible production agricole et un taux de croissance démographique élevé.  Pour 2003–2004, les estimations laissent prévoir un déficit financier en raison de retard pris par le versement des ressources tirées du pétrole.  Selon le FMI, ces revenus ne pourront couvrir que 55 millions de dépenses par an. 


M. JEFFREY SACHS, Conseiller spécial du Secrétaire général, a constaté la lassitude des donateurs au Timor-Leste qui reçoit pourtant une part importante de l’aide de la communauté internationale.  Il a également expliqué qu’aucun pays ayant un taux de fécondité élevé ne pourra maintenir son taux de croissance.  Les pays pauvres sont prisonniers de leur propre pauvreté et plus nous attendons plus le coût de ces crises sera élevé.


En réponse aux questions posées par les représentants d’Etats membres, M. Chowdhury , a expliqué que les initiatives de lutte contre la pauvreté au Bangladesh, comme le microcrédit, ne permettent pas de mobiliser des ressources importantes.  De son côté, Mme Bassarewan, a indiqué que depuis 1999, le Timor-Leste a fonctionné sur la base d’un soutien budgétaire direct et de programmes multilatéraux sur trois ans ce qui explique l’affaissement des ressources en 2003. 


Le Représentant spécial de la Banque mondiale auprès des Nations Unies, M. Eduardo Doryan, a expliqué aux Etats Membres que les quatre premières années qui suivent un conflit sont des phases de croissance cruciales qui doivent être soutenues par la communauté internationale.  Celle-ci doit s’engager sur une période de 10 ans au moins.  Sans cela, le pays risque de retomber dans le sous-développement et dans le cercle vicieux de la violence. 


L’impact de la bonne gouvernance et de la gestion des fonds publics sur la mobilisation des ressources internes: l’expérience du Bénin


Depuis 1990, mon pays est engagé sur la voie de la démocratie et de la bonne gouvernance, a indiqué le Ministre des affaires étrangères du Bénin, M. Biaou, qui présidait la seconde table ronde consacrée à l’impact de la bonne gouvernance et de la gestion des fonds publics sur la mobilisation des ressources internes et axée sur l’expérience de son pays.  Cette table ronde réunissait, entre autres, la Ministre des affaires étrangères d’El Salvador, Maria Eugenia Brizuela, le Sous-Secrétaire général aux affaires économiques et sociales, Patrizio Civili, ainsi que les représentants de la Banque mondiale, de la Commission européenne, du Fonds monétaire international et de l’Italie, en présence de la Ministre burundaise de la planification et du développement, Séraphine Wakana, qui a souligné le lien étroit entre bonne gouvernance, consolidation de la paix et développement.


De nombreuses institutions ont été mises en place pour promouvoir la bonne gouvernance et lutter contre la corruption, a expliqué ensuite M. Biaou, et le Bénin est le seul pays africain à avoir emprisonné une centaine de magistrats impliqués dans des affaires de corruption et dont les procès sont en cours et s’achèveront en avril 2004.  Son homologue d’El Salvador a insisté quant à elle sur les conditions propices à la mobilisation des citoyens afin de les convaincre d’investir dans des secteurs clefs.  El Salvador est l’un des trois pays d’Amérique latine qui sont en tête des pays mobilisateurs de l’investissement domestique, a-t-elle ajouté, faisant valoir ensuite que, au-delà des lois et des cadres juridiques, il importe de renforcer le pouvoir des citoyens qui doivent pouvoir exprimer leur avis sur la gestion des affaires publiques afin de renforcer la confiance et de consolider la démocratie. 


Revenant sur l’exemple du Bénin, le représentant de l’Union européenne, a jugé que, pour renforcer la bonne gouvernance et atteindre une gestion saine des finances publiques, ce pays avait procédé à des réformes structurelles courageuses dans le domaine fiscal notamment, avant de souligner que le fait que ce pays soit membre de l’Union économique et monétaire ouest africaine avait certainement contraint le Bénin à renforcer sa discipline macroéconomique.  La bonne gouvernance est étroitement liée à la bonne gestion des finances publiques, a confirmé la représentante des Etats-Unis, avant de rappeler que cette responsabilité incombait en premier chef aux pays en développement eux-mêmes qui doivent créer l’environnement propice à la mobilisation de l’investissement intérieur et extérieur.  Premier partenaire bilatéral au développement du Bénin, les Etats-Unis ont investi dans les domaines de la santé familiale, de l’éducation des filles, de la lutte contre le VIH/sida, de l’amélioration de la gouvernance, du développement rural, mais aussi dans la formation des commissaires au compte pour combattre la corruption. 


Sur le même sujet, le représentant de l’Italie a insisté sur l’importance de la cybergouvernance par une utilisation appropriée des nouvelles technologies, tandis que l’Ambassadeur du Burkina Faso aux Etats-Unis soulignait quant à lui un nécessaire changement de perspective en matière de gouvernance qui doit être orientée vers l’échelon local.  Prenant l’exemple de la fiscalité, il a jugé que l’impôt était un instrument de justice sociale devant reposer sur les principes d’équité et de transparence et qu’à ce titre, les finances locales pouvaient jouer un rôle dans la mobilisation des ressources internes en raison de la proximité des projets à financer.  La décentralisation rentre dans le cadre de la consolidation démocratique, a-t-il dit, avant de s’interroger sur les mécanismes à mettre en œuvre pour faire en sorte que le secteur informel ne déstabilise pas les structures organisées et contribue à la collecte des ressources nationales. 


Pour la Banque mondiale, il est évident que des règles de responsabilité accroîtront sensiblement la collecte de l’impôt, son représentant estimant à ce sujet que le rôle de certaines organisations non gouvernementales impliquées dans le microcrédit devrait être appuyé dans la mesure où elles structurent le secteur informel.  Le représentant du Fonds monétaire international a souligné ensuite le cadre intégré constitué par les différentes conférences sur le développement de ces dernières années et estimé que les ressources internes et externes devaient être mobilisées parallèlement, avant de saluer le principe de bonne gouvernance observé dans le cadre du NEPAD avec la création du Mécanisme d’examen par les pairs. 


Un autre aspect du développement a été abordé par le Ministre béninois des affaires étrangères qui a souligné les initiatives prises par son Gouvernement pour défendre la cause des producteurs de coton dont les préoccupations ont été portées devant la Conférence de Cancun par quatre pays africains, dont le Burkina Faso et le Bénin.  L’objectif est de parvenir à exporter des produits finis ou semi-finis pour accroître nos ressources d’exportation, a dit M. Biaou, indiquant que le Bénin a connu en 2003 un taux de croissance de 6,7%, se rapprochant ainsi de l’objectif de 7% contenu dans le Programme d’action de Bruxelles, mais regrettant qu’une telle progression soit freinée par d’autres facteurs.  En dépit d’une croissance de la production cotonnière de 14%, les recettes d’exportation de ce produit ont chuté de 31%, a-t-il déploré.  Pour sa part, la Ministre des affaires étrangères salvadorienne a souligné les incohérences du marché et les fluctuations des cours des produits de base qui constituent un obstacle sérieux pour les pays en développement.  Prenant l’exemple des cours du café qui se sont effondrés en 30 ans, Maria Eugenia Brizuela a prôné l’élaboration de politiques publiques de soutien au monde rural, de politiques fiscales encourageant l’investissement local et de politiques de mobilisation de l’épargne intérieure. 


Il faut en outre envisager la suppression des subventions à la production dans les pays développés et la démocratisation des mécanismes de prise de décision dans les institutions financières internationales, ont estimé de leur côté les participants à la table ronde, plaidant également pour une augmentation des flux d’aide publique au développement et des investissements étrangers directs.  Enfin, la Ministre d’El Salvador a estimé que le rôle des femmes dans la mobilisation de l’épargne nationale et la création de microentreprises devait être intégré, de même que les flux financiers provenant de la diaspora, évalués chaque année à deux milliards de dollars dans le cas de son pays.  Evoquant à son tour la mobilisation des ressources, le représentant du Népal a estimé que la préoccupation première devait être la promotion d’activités créatrices de revenus.  Il est difficile d’encourager nos producteurs lorsqu’ils n’ont aucun débouché, a-t-il observé, avant de proposer une réévaluation des responsabilités des différents acteurs impliqués dans le développement, entre autres les institutions de Bretton Woods dont les lignes directrices n’ont pas toujours été bénéfiques aux PMA.


Documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté comme mécanisme pour la mobilisation des ressources: l’expérience du Burkina Faso


Coprésidée par l’Ambassadeur du Burkina Faso aux Etats-Unis, Tertius Zongo, et Jeffrey Katz, de la Banque mondiale, cette troisième table ronde examinait la pertinence des documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté comme mécanisme pour la mobilisation des ressources.  Ces documents déclinent une stratégie nationale d’ensemble définie dans le cadre d’un processus participatif qui inclut tous les partenaires, a indiqué Tertius Zongo, soulignant que ces documents devaient être fédérateurs et servir de référence aux bailleurs de fonds, aux organisations non gouvernementales et aux services publics.  Le consensus entre parties prenantes doit également porter sur le mécanisme d’évaluation et sur la possibilité d’envisager une révision des documents, a ajouté l’Ambassadeur, avant de considérer que les conditionnalités –posées par les institutions financières internationales- sont contraires à la notion d’appropriation. 


Il y a quatre ans, beaucoup de partenaires doutaient du sérieux du document de stratégie pour la réduction de la pauvreté (PRSP), a rappelé ensuite Jeffrey Katz, se félicitant du succès enregistré au cours des dernières années par ces PRSP que les donateurs ne sont pas parvenus à rédiger selon leur guise.  La lutte contre la pauvreté suppose avant tout l’investissement dans le domaine de l’éducation et de la santé, a poursuivi Bissiri Sirima, du Ministère des finances du Burkina Faso, qui a indiqué que la durée moyenne d’éducation par habitant était de six mois dans son pays.  Il a insisté ensuite sur la pertinence des indicateurs liés aux PRSP, indicateurs d’impact et de résultat. 


Soulignant le parallèle entre mobilisation des ressources et renforcement des capacités dans les PMA, Mark Plant, Directeur adjoint des politiques de développement au Fonds monétaire international, a estimé que pour utiliser l’aide à bon escient, il était important que les pays en développement disposent de capacités.  Les PRSP supposent en effet un processus participatif, a-t-il affirmé ensuite, déplorant le décalage entre réalisme et ambition et estimant que des fonds mal gérés peuvent être une arme à double tranchant.  Harris Gleckman, Chef du bureau de la Commission des Nations Unies pour le commerce et le droit (CNUCED) à New York, a plaidé quant à lui pour le renforcement de la cohérence et de la coordination dans les programmes d’ajustement structurel et de réduction de la pauvreté.  Il est important de pouvoir tirer parti des négociations commerciales et des systèmes d’échanges internationaux pour les pays en développement mais il importe qu’ils disposent des capacités pour intégrer ces éléments.


La particularité des documents de stratégie pour la lutte contre la pauvreté est qu’ils constituent un cadrage pour les PMA tels que le Bénin, a souligné le Ministre béninois des affaires étrangères, Rogatien Biaou, avant d’évoquer leur intérêt en matière d’évaluation à mi-parcours et d’appui budgétaire sans conditionnalités apporté par les bailleurs de fonds.  L’approche participative est également un élément encourageant pour garantir le succès des stratégies de lutte contre la pauvreté, a dit le Ministre, ce document n’étant plus perçu comme étant imposé de l’extérieur.  M. Biaou a ensuite fait valoir que la réduction de la pauvreté n’était pas un terme approprié dans la mesure où ce fléau n’est pas “réductible”, on peut lutter contre, réduire le nombre de personnes vivant dans la pauvreté, mais on ne peut réduire la pauvreté elle-même. 


La participation des femmes au processus de prise de décisions dans les pays en développement n’est pas suffisante, a déploré ensuite la représentante de la Suède, constatant dans un second temps que les PRSP n’ont pas permis de réduire le nombre de personnes vivant dans des conditions de pauvreté.  Comment les Nations Unies peuvent s’impliquer dans les PRSP? a demandé la représentante suédoise, alors que son homologue du Ghana s’interrogeait sur la pertinence de la notion d’engagement.  Les Etats-Unis ont, par la voie de leur représentante, souligné la pertinence des PRSP qui respectent l’intégrité des attentes et préoccupations des pays les moins avancés et ces stratégies sont le cadre le plus favorable des financements par les institutions de Bretton Woods.  Reprenant la parole, l’Ambassadeur Zongo a de nouveau souligné l’importance du processus participatif et estimé que dans les sociétés africaines, la femme était un vecteur du bien-être car le surcroît de revenu est immédiatement réinvesti pour le bien de la famille. 


D’où la nécessité de développer des activités génératrices de revenus qui permettent aux femmes de s’insérer dans le développement en soutenant le microcrédit, la création de microentreprises.  Le Burkina Faso a fait le choix de la discrimination positive et offre des bourses aux filles scolarisées, ce qui a permis de rétablir partiellement le décalage entre garçons et filles, qui est aujourd’hui de 55% et 45%.  Les deux représentants de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, à leur tour, sont revenus sur les processus d’évaluation de la mise en œuvre des PRSP et indiqué qu’il était encore tôt pour cela, avant de préciser que cette tâche serait confiée à des organismes indépendants.  En fin de réunion, l’Ambassadeur Zongo a demandé un changement concernant la conditionnalité posée par les bailleurs de fonds qui exigent que les PMA et les autres pays en développement aient au préalable un accord avec le FMI. 


*   ***   *

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.