L’OUGANDA, CONFRONTE AUX NOMBREUSES QUESTIONS DES EXPERTS SUR SES MECANISMES DE PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME
Communiqué de presse DH/365 |
Comité des droits de l’homme
Quatre-vingtième session
2177e séance – après-midi
L’OUGANDA, CONFRONTé AUX NOMBREUSES QUESTIONS DES EXPERTS SUR SES MéCANISMES DE PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME
A la tête d’une délégation de 12 personnes dont l’importance a été unanimement saluée, le Ministre des affaires étrangères de l’Ouganda, M. Tom Butime, a présenté, cet après-midi, au Comité des droits de l’homme, le rapport initial de son pays sur l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Les 18 experts du Comité se sont félicités d’un rapport qui, comme l’ont résumé les experts du Bénin, des Etats-Unis ou encore du Japon, ne manque pas de reconnaître avec franchise les problèmes actuels, dont la lenteur du système judiciaire. Ils se sont attardés, en conséquence, sur le mandat et le fonctionnement de la Commission nationale des droits de l’homme qui, décrite comme « dotée de pouvoirs quasi judiciaires », apparaît dans les faits comme un simple organe consultatif. Les experts ont émis des doutes sur le degré d’indépendance d’une Commission dont les membres sont nommés par le Président et qui compte parmi eux le Procureur général.
Créée par la Constitution de 1995 sur recommandation de la Commission chargée d’enquêter sur les violations des droits commises entre 1962 et 1986, la Commission comprend une composante « juridictionnelle » et une composante « médiation et conciliation » qui lui permet de traiter tous les cas de violations des droits de l’homme, a répondu la délégation. Elle a attiré l’attention du Comité sur le rapport de l’ONG « Human Rights Watch » qui, en 2001, a qualifié la Commission d’une des institutions africaines les plus efficaces en matière de droits de l’homme. La délégation a rejeté toute idée de conflit de compétences entre la Commission et les tribunaux ordinaires. En effet, selon l’article 50 de la Constitution, les tribunaux sont aussi habilités à connaître des violations des droits de l’homme.
Outre les questions concernant les violations commises par les forces armées et de police, et la lutte contre le VIH/sida, les experts en ont posé de nombreuses sur les dispositions juridiques relatives à la lutte contre la violence faite aux femmes, en particulier les mutilations génitales. La délégation a reconnu la contradiction de la Constitution dont l’article 36 prévoit l’abolition de toute loi contraire à l’intégrité de la femme et l’article 37, la libre jouissance pour chaque citoyen de sa culture. Selon les tribus concernées, les mutilations génitales relèvent de la culture. Le Gouvernement a contourné l’impasse en se concentrant, dans un premier temps, sur les campagnes de sensibilisation, a répondu la délégation qui a souligné, dans ce contexte, l’inutilité de promulguer des lois difficiles, voire impossibles à faire appliquer.
La délégation poursuivra son dialogue avec les membres du Comité, demain mardi 23 mars à partir de 10 heures.
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE INTERNATIONAL RELATIF AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES
Examen du rapport initial de l’Ouganda (CCPR/C/UGA/2003/1)
Présentation du rapport
Etat partie du Pacte international depuis 1996, l’Ouganda, indique le rapport, a incorporé dans son droit interne bon nombre des obligations imposées par cet instrument. Le rapport souligne d’ailleurs que la Constitution impose à l’Etat l’obligation d’aligner la législation nationale sur les dispositions du droit international.
Le rapport passe ensuite en revue les dispositions prises pour mettre en œuvre chaque article du Pacte international et explique, dans ce cadre, le mandat et les pouvoirs « quasi-judiciaires » de la Commission des droits de l’homme. En Ouganda, est-il encore souligné, l’approbation par le Parlement d’un instrument international n’est nécessaire que lorsque son adoption exige une révision de la Constitution.
S’agissant de l’article 3 relatif à l’égalité des droits entre les hommes et les femmes, le rapport indique que sur le front politique, des mesures sont prises pour réserver un certain nombre de sièges aux femmes dans les districts en plus de ceux qu’elles obtiennent aux élections. En 1999, les femmes occupaient 52 des 280 postes de responsabilité nationaux aux niveaux de l’exécutif et du législatif, soit 19%. Les principaux obstacles à la participation des femmes à la vie politique sont le manque relatif de moyens financiers, d’expérience ou de formation nécessaires, l’attitude négative de la population et les processus de socialisation.
Concernant l’article 4 relatif à l’état d’urgence, le rapport indique qu’en vertu de la Constitution, le Président n’est pas obligé de consulter son exécutif avant de proclamer l’état d’urgence, mais qu’il est tenu de solliciter l’approbation du Parlement. L’état d’urgence ne peut rester en vigueur plus de 90 jours et peut être prolongé exclusivement par le Parlement pour des périodes ne pouvant pas excéder plus de 90 jours chaque fois. Une personne privée de liberté en vertu de l’état d’urgence peut saisir la Commission ougandaise des droits de l’homme.
Pour ce qui est de l’article 22 relatif à la liberté d’association, le rapport convient que c’est le droit le plus controversé depuis la mise en place du « système du Mouvement » et ce, en dépit des dispositions constitutionnelles. Le droit à la liberté d’association a été restreint de plus de trois façons, en limitant certaines des activités des partis politiques; en limitante la liberté de circulation d’un des opposants politiques et en soumettant un projet de loi sur la suppression du terrorisme.
Présentation orale de l’État partie
M. TOM BITUME, Ministre des affaires étrangères de l’Ouganda, a d’abord rappelé que pendant plus de 30 ans, son pays a connu diverses violations des droits de l’homme et que ce n’est qu’en 1986, que le Mouvement national de résistance (MNR) a inauguré une nouvelle ère caractérisée par les tentatives de réparer tous les préjudices causés par les régimes antérieurs. La tâche consistant à instaurer une nouvelle gouvernance soucieuse des droits de l’homme est ardue, a reconnu le Ministre, tout en soulignant que la promotion et la protection des droits de l’homme est une priorité du Gouvernement actuel. Dans cet esprit, ce Gouvernement a créé une Commission d’enquête sur les divers aspects des violations des droits de l’homme commises entre 1962 et 1985. Le Parlement, la Commission des droits de l’homme, le pouvoir judiciaire et la société civile contribuent de concert à la surveillance du respect des droits de l’homme. A l’occasion de la ratification du Pacte, l’Ouganda a promulgué la nouvelle Constitution qui reprend les articles 1, 22, 23, 24, 25 et 28 du Pacte international. Le Ministre s’est excusé de la présentation tardive du rapport initial, qu’il a imputé à l’absence de connaissances spécialisées.
Réponses aux questions écrites des experts
Répondant d’abord à une question sur le statut du Pacte dans le droit interne ougandais,la délégation a indiqué que 98% des dispositions du Pacte ont été incorporés dans le droit national et notamment au chapitre 4 de la Constitution du pays. Le Pacte a donc force de loi en Ouganda. Quant à la lutte contre l’impunité des agents de l’Etat qui auraient commis des violations du Pacte, la délégation a invoqué l’efficacité de son « système judiciaire » et le mandat de la Commission des droits de l’homme qui peut se prononcer contre les violations des droits de l’homme. Cette Commission a mis en place un tribunal auquel peuvent s’adresser la plupart des victimes dont la grande majorité a été indemnisée. En outre, une loi de 2002 prévoit que tous les avocats doivent prendre en charge de cas pro bono comme condition indispensable à leur inscription au Barreau. D’autres secteurs ougandais ont, par ailleurs, mis en place un certain nombre d’organisations et de services juridiques gratuits. Une autre initiative réunissant un certain nombre d’institutions gravitant autour des tribunaux est très active. Par ailleurs, le service de protection de la mère et de l’enfant s’occupe plus précisément des mères qui ne peuvent s’offrir des services juridiques.
Quant à la composition et le fonctionnement de la Commission d’enquête sur les différents aspects des violations des droits de l’homme, la délégation a indiqué qu’elle est composée d’un Président et de cinq autres membres. Elle est chargée d’examiner toutes les infractions et les abus de pouvoir des Gouvernements successifs pendant la période de 1962 à 1986. Les recommandations principales par la Commission d’enquête ont été reprises dans la Constitution, dont la création d’une Commission permanente des droits de l’homme. Cette Commission est composée de « personnalités connues pour leur intégrité et compétentes » en matière de lois et d’administration. Outre l’instruction des violations des droits de l’homme, la Commission peut conseiller le Gouvernement sur la ratification des instruments des droits de l’homme et veiller par la suite à son application. La Commission est financée par le budget national mais peut également recevoir les contributions des bailleurs de fonds extérieurs. Concernant la compatibilité des mesures antiterroristes avec le Pacte, la délégation a indiqué que la loi contre le terrorisme a été promulguée en 2002 et a depuis contribué à réduire le taux des activités terroristes dans le pays.
Répondant à la question sur les progrès accomplis pour assurer une meilleure participation des femmes à la vie politique et un meilleur accès de celles-ci aux postes de responsabilités, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, la délégation ougandaise a expliqué que depuis 1995, la Constitution garantit une participation active des femmes dans la vie du pays. Les organes constitutionnels recherchent avant tout la parité et l’équilibre, a dit le représentant, évoquant notamment des critères de participation au Parlement tandis qu’un tiers des sièges des conseils municipaux et locaux doivent être occupés par des femmes. Dans le privé, des fonds ont été consacrés au développement du microcrédit et dans la vie publique, une démarche reposant sur la discrimination positive est privilégiée.
Pour ce qui est des pratiques traditionnelles, historiques et religieuses qui empêcheraient l’application du Pacte, la délégation a reconnu que certaines coutumes telles que la polygamie, des mutilations sexuelles et d’autres pratiques contraires aux objectifs du Pacte sont toujours en vigueur dans le pays. Il a toutefois expliqué que les lois avaient pour objectif d’infléchir ces coutumes sans pour autant les interdire de manière brutale dans la mesure où il faut avant tout que les gens intègrent les valeurs contenues dans le Pacte. Une nouvelle loi en cours d’examen au Parlement prévoit que la dot ne soit plus considérée comme une condition préalable à la validité du mariage tandis que la polygamie sera limitée à la religion musulmane sur la base de conditions précises. La polygamie est assortie de conditions, les biens fonciers peuvent être hérités tant par les hommes que par les femmes, et le mariage repose sur le libre consentement.
Concernant les mesures visant à faire face aux violences contre les femmes, la délégation ougandaise a indiqué qu’une nouvelle loi devrait être présentée au Gouvernement puis au Parlement sur la protection des femmes et la prévention de la violence domestique. La police est, quant à elle, dotée d’une unité chargée de recueillir et de traiter les plaintes déposées par les femmes, a-t-il ajouté.
Poursuivant sur la question relative aux mesures prises pour éradiquer la pratique des mutilations sexuelles en Ouganda, la délégation a expliqué que le Ministère chargé de la parité entre les sexes dispose d’un programme de sensibilisation à cette question. Un programme est également mis en œuvre par une ONG pour permettre aux exciseuses de trouver d’autres sources de revenus, tandis que la mutilation génitale féminine est considérée par les lois ougandaises comme une forme de torture.
Pour ce qui est de l’accès à l’éducation des enfants en âge d’être scolarisés, la délégation a annoncé qu’une initiative a été lancée en 1991 pour généraliser l’enseignement primaire et élargir l’accès à l’université, en particulier pour les filles. Le taux de fréquentation du secondaire par les filles est passé de 35% en 1991 à 49,5% en 2003, tandis que dans le primaire, 3,6 millions de filles sont scolarisées contre 3,7 millions de garçons.
Passant à une question sur la peine de mort, la délégation a répondu que cette sentence ne peut être prononcée que pour les crimes les plus graves comme les crimes sexuels, y compris l’avilissement, compte tenu de leur rôle dans la propagation du VIH/sida. Aucun des accusés n’a été exécuté ou condamné à mort, a-t-elle souligné. S’agissant du vol à main armée également passible de la peine de mort, on estime que 57,5% des détenus dans les quartiers des condamnés à mort s’y trouvent pour vol. Quant aux mesures d’abolition de la peine de mort, le Gouvernement a créé une Commission pour consulter la population qui, dans sa grande majorité, s’est prononcée pour le maintien de cette peine pour les crimes sexuels. Par ailleurs, de nombreux Ougandais ont fait parvenir une pétition sur le bureau du Procureur général, en arguant de l’anticonstitutionnalité de cette peine. La délégation a ensuite rejeté toute allégation d’exécutions extrajudiciaires dans le nord de l’Ouganda, en affirmant que les Forces armées sont soumises à des lois très strictes qui ne permettent aucune impunité.
Questions supplémentaires des experts
Lançant cette partie des travaux, M. IVAN SHEARER de l’Australie a voulu disposer de la liste des affaires pour lesquelles le Pacte international a servi de fondement aux jugements. Qu’en est-il du rôle des tribunaux ordinaires? Ont-ils suffisamment connaissance des dispositions du Pacte? a encore demandé l’expert en avouant, dans ce contexte, ne pas comprendre exactement le mandat de la Commission qui, selon le rapport, « peut agir comme un tribunal » alors qu’en toute vraisemblance, il s’agit plutôt d’un organe consultatif. L’expert s’est aussi inquiété du statut de la Commission chargée d’enquêter sur les circonstances de la mort du Révérend-père O’Toole. Il a, par ailleurs, demandé les statistiques concernant les condamnations à mort prononcées par les tribunaux militaires ainsi que des renseignements supplémentaires sur l’assistance juridique offerte aux personnes qui ne peuvent s’offrir les services d’un avocat.
A son tour, M. MARTIN SHEININ de la Finlande est revenu sur le mandat de la Commission nationale des droits de l’homme pour demander des précisions sur son degré d’indépendance, étant donné que ses membres sont nommés par le Président et que le Procureur général en fait partie. Abordant la question des mesures antiterroristes, l’expert a voulu savoir si la loi de 2002 définit de manière précise les infractions, en particulier la définition d’une organisation terroriste et de la notion d’appartenance à une telle organisation. Les questions relatives aux femmes figurent parmi celles qu’a posées l’expert. Il a notamment voulu savoir pourquoi le projet de loi en examen n’adopte pas une approche plus ferme à l’égard de la polygamie. Est-ce que le droit pénal prévoit des dispositions pour lutter contre les mutilations génitales? a-t-il demandé. Saluant les statistiques sur le recours à la peine de mort, l’expert a néanmoins souligné que, selon les ONG ougandaises, le pays voit plutôt une augmentation des procès qui se terminent par la prononciation de la peine capitale. Il a aussi souhaité des renseignements détaillés sur l’existence de crimes pour lesquels la peine de mort est la seule peine envisageable. De même sur les exécutions extrajudiciaires, l’expert a invoqué plusieurs témoignages qui lui permettent de douter de la position de la délégation. L’expert a conclu sur une question concernant l’accès aux traitements du VIH/sida.
La question du mandat et du fonctionnement de la Commission des droits de l’homme est revenue dans la bouche de M. MAURICE GLEGLE AHANHANZO du Bénin qui s’est interrogé sur le nombre de plaintes que la Commission a reçues ainsi que du domaine et du type de violations dont elle a été saisie. L’expert s’est aussi inquiété du statut et du mode de fonctionnement des ONG. Il a par ailleurs demandé des informations supplémentaires sur la Commission d’amnistie et sur l’Armée de résistance du Seigneur. Combien de décisions de justice ont été prononcées contre des membres de cette Armée?
Poursuivant la série de questions, M. NATWARLAL BHAGWATI de l’Inde a noté que plusieurs questions ont été posées concernant la fonction et la composition de la Commission nationale des droits de l’homme. Il a voulu connaître plus concrètement le nombre de plaintes qu’elle a reçues et celui des plaintes qu’elle a examinées. Est-ce un organe exécutoire ou simplement consultatif? A-t-elle le pouvoir de déterminer une réparation et peut-elle connaître des plaintes visant des représentants de l’État? Par ailleurs, l’expert a demandé des précisions sur les mesures visant à abolir la torture, ainsi que sur les mesures concernant les traitements contre le VIH/sida à disposition des malades. M. Bhagwati a ensuite demandé quelle était la durée moyenne de détention dans le quartier des condamnés à mort et, observant qu’aucune condamnation à mort n’avait été exécutée depuis cinq ans, il a demandé s’il ne serait pas plus simple de supprimer la peine de mort. Qui a le pouvoir de désigner les juges, quel est leur mandat, tant dans la durée que dans les prérogatives? a demandé également l’expert de l’Inde, avant de questionner la délégation ougandaise sur le nombre de femmes qui travaillent dans le domaine de la justice.
Commentant le rapport, M. MAXWELL YALDEN du Canada a salué la franchise du Gouvernement, notamment en ce qui concerne les conditions de détention dramatiques. Néanmoins, il a demandé des précisions sur les plaintes examinées par la Commission nationale des droits de l’homme et ce qu’il est advenu de ces plaintes. Son homologue, Mme RUTH WEDGWOOD des Etats-Unis, a partagé l’avis de M. Yalden pour les détails et la franchise du rapport, avant de demander des précisions sur les poursuites engagées contre le harcèlement des femmes, les mutilations sexuelles et autres actes contraires à la Constitution et à la loi. Se tournant vers les problèmes posés par les exactions de l’armée nationale dans la partie orientale de l’Ouganda, elle a demandé d’indiquer les mécanismes d’enquête en vigueur et d’expliquer pourquoi de tels crimes ont pu être commis localement.
Revenant sur le contenu du rapport, M. NISUKE ANDO du Japon a rappelé que l’objectif du Comité n’était pas de critiquer et d’attaquer tel ou tel gouvernement mais de souligner les voies pouvant permettre au pays de progresser. S’agissant plus spécifiquement de la condition féminine -et des sources de violences domestiques-, M. Ando a admis que la pauvreté pouvait expliquer de telles violences avant de demander comment les médias et la cohabitation pouvaient être considérés comme des causes justifiant la violence domestique. La police est-elle habilitée à intervenir dans les cas de violence domestique, a demandé ensuite l’expert du Japon, avant d’interroger la délégation ougandaise sur les mesures prises pour pénaliser les mutilations sexuelles.
M. NIGEL RODLEY du Royaume-Uni, revenant sur la question de la Commission d’enquête sur les personnes accusées du meurtre du Révérend-père O’Toole, a rappelé que le paragraphe 4 du Pacte énonce que toute personnes condamnée a droit de recourir en grâce et a le droit de voir sa peine révisée par une instance supérieure. Comment justifier que les cours martiales militaires ne soient pas soumises aux dispositions de ce paragraphe du Pacte, a demandé M. Rodley.
Réponses de la délégation
La délégation a d’abord souligné qu’un rapport de l’ONG « Human Rights Watch » avait qualifié, en 2001, la Commission nationale des droits de l’homme d’une des institutions en la matière la plus efficace sur le continent africain. La Commission n’est pas un organe purement consultatif. Elle connaît et traite les cas et jusqu’ici, elle a surtout été saisie des plaintes concernant des actes de torture. La Commission est un organe totalement indépendant et si le Président en désigne les membres pour un mandat de six ans, il doit avoir l’approbation du Parlement. Aucune ingérence n’a jamais eu lieu et la Commission n’a jamais hésité à faire comparaître des membres de l’exécutif. La délégation a aussi rejeté les allégations sur le conflit de compétence entre la Commission et les tribunaux. Tout citoyen, a affirmé la délégation, a le droit de faire appel des décisions de la Commission auprès de la Cour suprême. La Commission, a-t-elle encore précisé, comprend une composante « juridictionnelle » et une autre « médiation et conciliation»; cette dernière étant la plus populaire auprès des Ougandais.
Répondant à la question de savoir si les tribunaux ordinaires invoquent le Pacte dans leurs décisions, la délégation a précisé qu’en vertu de l’article 50 de la Constitution, les tribunaux sont habilités à connaître des violations des droits de l’homme et invoquent, ce faisant, le Pacte. Pour ce qui est de la lutte contre les mutilations génitales, la délégation a attiré l’attention sur l’article 37 de la Constitution qui garantit le droit de toute personne de jouir de sa culture, sa croyance et sa religion. Or, selon les tribus concernées, les mutilations génitales relèvent de la culture. La Constitution, a poursuivi la délégation, comporte deux dispositions contradictoires en ce sens que l’article 36 prévoit l’abolition de toute loi qui va à l’encontre de l’intérêt de la femme. Compte tenu de l’inutilité d’adopter une loi dont l’application sera difficile voire impossible, le Gouvernement a choisi, dans un premier temps, de concentrer les efforts sur les campagnes de sensibilisation.
Concernant les actes de torture perpétrés par la police, la délégation a indiqué que dans ces cas, les responsables sont systématiquement traduits devant les tribunaux. La délégation a aussi répondu à la question relative à la polygamie, en indiquant que l’autorisation se fonde sur quatre critères concernant les moyens financiers dont dispose le futur époux, sa faculté à mettre à la disposition de la future épouse un domicile privé, son intention à bien la traiter et l’accord préalable de l’épouse actuelle. Tous ces critères rendent la polygamie pratiquement impossible, a affirmé la délégation. Quant à l’accès aux traitements du VIH/sida, elle a indiqué que le Gouvernement a pris le parti d’acquérir une licence auprès des laboratoires concernés. Répondant aussi à la déclaration de l’état d’urgence, la délégation a réitéré le fait qu’une telle déclaration n’a jamais été en vigueur ces dernières années.
Composition de la délégation de l’Etat partie
M. Tom Butime, Ministre des affaires étrangères; M. Francis K. Butagira, Représentant permanent de l’Ouganda auprès des Nations Unies; M. Joseph M. N. Kakooza, président de la Commission pour la réforme du droit ougandais; M. Beekunda Geoerge Kacwa, Commissaire du Gouvernement pour la parité entre les sexes, le travail et le développement social; Mme Olive Zaale, Commissaire du Gouvernement pour les affaires juridiques; M. John Kamya, commissaire de police; M. David Sekabembe Nsalasatta, fonctionnaire des services pénitentiaires; Mme Victoria Tindifa Mirembe, Inspecteur en chef; Mme Catherine Otiti, Première Secrétaire à la mission permanente auprès des Nations Unies; Mme Eunice Kisembo, juriste; M. John Paul Ssonko, juriste; M. Nathan Byamukama, membre de la Commission nationale des droits de l’homme; Mme Margaret Awino, Troisième Secrétaire au Ministre des affaires étrangères.
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