CD/G/614

LA CONFERENCE DU DESARMEMENT ENTEND DES DECLARATIONS DE LA FRANCE, DU MYANMAR, DU VENEZUELA ET DE LA MALAISIE

19/02/2004
Communiqué de presse
CD/G/614


Conférence du désarmement


LA CONFERENCE DU DESARMEMENT ENTEND DES DECLARATIONS DE LA FRANCE,

DU MYANMAR, DU VENEZUELA ET DE LA MALAISIE


GENÈVE, 19 février -- La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, des déclarations de la France, du Myanmar, du Venezuela et de la Malaisie.  Ce dernier pays, dont l'Ambassadrice, Mme Rajmah Hussain, préside la Conférence pour quatre semaines, a réagi au discours sur les armes de destruction massive prononcé le 11 février dernier par le Président Bush devant l'Université de défense nationale de Washington et dont la délégation des États-Unis avait demandé jeudi dernier la distribution en tant que document officiel de la Conférence.  Dans ce discours, a affirmé ce matin la Malaisie, le Président des États-Unis a fait plusieurs références excessives à la Malaisie et cette dernière réfute tout propos insinuant qu'une entreprise malaisienne - SCOPE - serait impliquée dans un réseau international de soutien à la fabrication illégale de centrifugeuses.


Le Myanmar a pour sa part avancé quelques propositions d'amendements à la proposition de programme de travail des Cinq Ambassadeurs, l'intention du pays étant de dissocier les deux questions que sont l'établissement des comités ad hoc et la nomination des coordinateurs spéciaux.


Le Venezuela a quant à lui fait part des progrès qu'il a enregistrés au cours de l'année écoulée en matière de désarmement et de contrôle des armements.  Il a en outre indiqué qu'il ratifierait sous peu la Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination.


La France a rappelé sa position selon laquelle la question de la participation de la société civile ne doit pas être envisagée indépendamment de la conclusion positive d'un débat d'ensemble sur la problématique générale de l'amélioration des méthodes de travail de la Conférence.


En début de séance, la Présidente de la Conférence, la Malaisienne Rajmah Hussain, a transmis ses condoléances suite aux pertes de vies tragiques dues au déraillement d'un train en Iran.  En fin de séance, elle a indiqué qu'elle devrait s'absenter de la Conférence du 23 février au 1er mars afin de participer à la réunion du Groupe des 15 à Caracas (Venezuela).  Aussi, a-t-elle précisé que, comme l'autorise le Règlement intérieur, elle serait temporairement représentée durant cette période par l'Ambassadeur Pablo Macedo du Mexique, dont le pays doit présider la Conférence après la présidence malaisienne.


Mme Rajmah Hussain a par ailleurs indiqué qu'elle avait demandé au Secrétariat de préparer, d'ici le 4 mars 2004, un document concernant le processus de sélection officielle des ONG qui pourront être autorisées à s'adresser à la Conférence, conformément à la décision prise par cette instance le 12 février dernier.  Indiquant qu'elle avait en outre l'intention de convoquer des séances officieuses sur la question du programme de travail les jeudi 4 et 11 mars, de suite après les séances officielles de ces deux journées, la Présidente a toutefois souligné qu'une délégation souhaitant encore référer de cette proposition à sa capitale, il n'y a pas de consensus sur cette proposition, de sorte qu'elle est laissée de côté pour l'instant.


La prochaine séance de la Conférence se tiendra jeudi prochain, 26 février, à 10 heures.


Déclarations


Mme RAJMAH HUSSAIN, Présidente de la Conférence, a affirmé que c'est un honneur pour son pays de présider la Conférence du désarmement pour quatre semaines (du 16 février au 14 mars).  Elle a indiqué qu'elle a l'intention de poursuivre les efforts entrepris par son prédécesseur, la Kényane Amina Mohamed, en prenant les résultats auxquelles cette dernière est parvenue à la fin de son mandat pour base des consultations qu'elle va elle-même engager avec les membres de la Conférence.  La Malaisie est un petit pays en développement épris de paix et dont l'expérience en matière de négociations multilatérales dans le domaine du désarmement reste embryonnaire, a-t-elle poursuivi.  Aussi, a-t-elle précisé que c'est avec humilité que la Malaisie, qui préside actuellement le Mouvement des Non Alignés ainsi que le Sommet de l'Organisation de la Conférence islamique (OCI), assume sa fonction de présidence de la Conférence.


Si la Conférence peut se prévaloir d'avoir négocié d'importants traités de désarmement jusqu'au milieu des années 1990, elle n'a pas été productive depuis sept ans.  Bien qu'il existe une proposition de programme de travail (celle dite des Cinq Ambassadeurs) bénéficiant d'un large soutien, certaines délégations essentielles ne se sont toujours pas prononcées sur cette proposition, a rappelé la Présidente.  Si nous ne faisons pas quelque chose pour faire progresser la Conférence, elle perdra sa pertinence, a-t-elle déclaré.  Elle a affirmé que le défi pour elle, en tant que Présidente de la Conférence, consiste donc à trouver la formule magique  qui amènera la Conférence à entamer son travail de fond.  Tout en soulignant qu'elle ne fait aucune promesse quant à sa capacité à faire surgir cette formule magique, Mme Rajmah Hussain a indiqué qu'elle ne ménagerait aucun effort pour mener les délégations à un accord consensuel sur un programme de travail équilibré et acceptable pour tous.  Le succès de la Conférence ne repose pas sur moi mais sur toutes les délégations oeuvrant de concert, a-t-elle souligné.


M. FRANCOIS RIVASSEAU (France) a réagi à la décision prise par la Conférence, le 12 février dernier, au sujet de la société civile en rappelant que cette déclaration comportait un certain nombre de points qui ne satisfaisaient pas pleinement la France, les coûts n'ayant pas été précisément évalués.  M. Rivasseau a rappelé la position de la France selon laquelle la question de la participation de la société civile ne doit pas être envisagée indépendamment de la conclusion positive d'un débat d'ensemble sur la problématique générale de l'amélioration des méthodes de travail de la Conférence.  Le débat sur ce sujet est évidemment appelé à sa poursuivre et les solutions esquissées la semaine dernière ne prendront tout leur sens que dans le cadre d'une rationalisation des méthodes de travail.  L'accord du 12 février ne doit pas nous faire oublier les autres chantiers qui demeurent devant nous, a insisté M. Rivasseau.


U MYA THAN (Myanmar) a souligné que l'environnement sécuritaire international est en pleine mutation, de sorte que le monde doit faire face à de nouvelles menaces en matière de sécurité tout en continuant d'affronter les problèmes plus anciens.  Aussi, est-il nécessaire que tous les pays de la Conférence s'engagent collectivement et individuellement dans un exercice de réflexion portant sur le présent et l'avenir des efforts multilatéraux de contrôle des armements et de désarmement.  La situation de l'après-guerre froide s'est avérée être encore plus imprévisible et complexe que ne l'était celle de la guerre froide elle-même, a affirmé U Mya Than.  Aussi puissant que soit un pays, il ne saurait faire cavalier seul lorsqu'il s'agit de traiter les problèmes de sécurité globale, a-t-il ajouté.  En témoignent les efforts internationaux déployés dans le contexte de la lutte contre le terrorisme.  Si le multilatéralisme traverse actuellement une période difficile, il ne saurait certainement pas être remplacé par l'unilatéralisme pour faire face aux problèmes de sécurité globale.  Les problèmes jumeaux de la non-prolifération nucléaire et du désarmement nucléaire doivent être traités de manière coordonnée et liée.  L'un de ces problèmes ne saurait être résolu indépendamment de l'autre et il en va de même pour les problèmes de non-prolifération et de désarmement concernant d'autres armes de destruction massive.


Cette année, la session de la Conférence a lieu dans une période difficile et délicate pour le désarmement et le contrôle multilatéral des armements, a poursuivi l'Ambassadeur du Myanmar.  Nous avons été témoins d'un affaiblissement des engagements internationaux, a-t-il précisé.  Même les engagements énoncés dans le document final de la Conférence d'examen du TNP de 2000 ont été remis en question, a-t-il insisté.  La communauté internationale a assisté à l'enterrement du Traité ABM et le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires attend toujours d'entrer en vigueur.  Quant à la Conférence du désarmement, elle s'est embourbée dans une impasse depuis sept ans.  Cette instance se trouve donc à un instant crucial de son histoire, a affirmé U Mya Than.  Sa crédibilité et sa pertinence seront encore davantage remises en question si elle perd encore une année de plus.


S'agissant du programme de travail, il faudrait donc consolider la proposition dite des Cinq Ambassadeurs et accueillir toute autre proposition ou initiative novatrice susceptible de dégager un terrain d'entente.  Aussi, U Mya Than a-t-il proposé quelques amendements à la proposition des Cinq Ambassadeurs, afin de parvenir le plus vite possible à un consensus sur un programme de travail.  Ces propositions d'amendements, dont le texte a été distribué à toutes les délégations en tant que document informel, pour référence, concernent d'une part l'établissement des comités ad hoc et, d'autre part, la nomination des coordinateurs spéciaux.  L'intention du Myanmar est de dissocier ces deux questions, a précisé l'Ambassadeur U Mya Than.  Ainsi, la Conférence est-elle appelée à se concentrer sur la question, prioritaire, de la création de quatre comités ad hoc (sur le désarmement nucléaire; sur l'interdiction des matières fissiles; sur la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique; et sur les garanties de sécurité), le projet d'amendement dans ce domaine s'attachant en particulier à coller davantage, à des fins de simplification, au langage convenu, en matière de désarmement nucléaire, employé dans le document final de la Conférence d'examen du TNP de 2000.  Pour ce qui est de la nomination des coordinateurs spéciaux, la proposition d'amendement est de moindre importance, ce sujet n'étant appelé à être abordé que si les États membres sont toujours intéressés par la nomination de ces personnes, a précisé M. U Mya Than.


L'Ambassadeur du Myanmar a par ailleurs estimé que la Conférence devrait s'ouvrir à des questions complémentaires appropriées afin que ses travaux restent pertinents au regard des besoins de notre époque.  Ainsi, selon le Myanmar, cette instance devrait notamment traiter des mesures visant à empêcher des terroristes de s'approprier des armes de destruction massive; des armes biologiques; de certains aspects liés à l'interdiction du commerce illicite de petites armes; de l'interdiction des exportations et du transfert illicite de mines antipersonnel; des questions de respect; des missiles; et de toute autre question sur laquelle les membres de la Conférence se seront mis d'accord.  La Conférence devrait traiter de ces questions complémentaires lors de séances plénières, officielles ou informelles, et pourrait, à un stade ultérieur, mettre sur pied un ou plusieurs mécanismes appropriés afin de traiter de telle ou telle de ces questions nouvelles.


M. WILLIAM SANTANA (Venezuela) a donné lecture d'une déclaration que devait faire ce matin l'Ambassadrice du Venezuela, Mme Blancanieve Portocarrero, cette dernière n'ayant pas été en mesure de se présenter devant la Conférence.  Dans cette déclaration, le Venezuela fait part des progrès qu'il a enregistrés au cours de l'année écoulée en matière de désarmement et de contrôle des armements.  Ainsi, le 24 septembre 2003, le Venezuela annonçait-il qu'il avait détruit 47 189 mines antipersonnel, assumant ainsi ses obligations en vertu de l'article IV de la Convention d'Ottawa, alors que 5 000 mines antipersonnel restent en réserve à des fins d'entraînement.  Le Venezuela est désormais un territoire exempt de tout arsenal de mines antipersonnel.  Le Venezuela a par ailleurs promulgué en 2003 la Loi sur le désarmement, qui permettra au Gouvernement d'éliminer les armes légères et de petit calibre qui se trouvent illégalement entre les mains de la population.  Cette loi permettra de mener des contrôles de légalité des ports d'armes. Cette mesure est conforme à la teneur du Plan d'action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre.  Enfin, le Venezuela ratifiera sous peu la Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination.


Le Venezuela entrevoit d'autre part avec optimisme la possibilité de parvenir à un accord sur un programme de travail au cours de cette année et invite donc tous les États qui ne l'ont pas encore fait à faire part de leurs observations sur la proposition de programme de travail dite des Cinq Ambassadeurs, qui a déjà reçu un large soutien.


Mme RAJMAH HUSSAIN, en tant qu'Ambassadrice de la Malaisie, a rappelé que la semaine dernière, la délégation des Etats-Unis a fait distribuer comme document officiel de la Conférence une copie du discours prononcé par le Président Bush devant l'Université de défense nationale de Washington le 11 février 2004.  Dans ce discours, qui portait sur les armes de destruction massive, le Président des États-Unis a fait plusieurs références excessives à la Malaisie.  La Malaisie est déçue que ce discours semble remettre en question l'engagement du Gouvernement malaisien s'agissant de la question de la non-prolifération nucléaire.  La Malaisie réfute tout propos insinuant qu'une entreprise malaisienne, SCOPE, serait impliquée dans un réseau international de soutien à la fabrication illégale de centrifugeuses.  Depuis que des allégations de participation à la fabrication de certains composants de centrifugeuse ont été portées à l'encontre de SCOPE, la Malaisie a mené des enquêtes approfondies et à apporté son entière coopération à tous ceux qui étaient concernés.  L'entreprise SCOPE a confirmé que si elle a bien fabriqué 14 composants semi-finis pour le compte de l'entreprise Gulf Technical Industries (GTI) basée à Dubaï, leur utilisation finale n'a jamais été divulguée par GTI ni par une quelconque autre partie.  Comme l'exige l'autorité de régulation boursière, le contrat liant SCOPE à GTI a été publiquement dévoilé en mai 2003, lors de l'inscription à la bourse de Kuala Lumpur de SCOMI, la maison-mère de SCOPE.  Les enquêtes menées ont montré que les composants livrés à GTI par SCOPE étaient génériques et pouvaient servir à de nombreuses utilisations.  Les investigations ont également confirmé que SCOPE n'avait pas fabriqué une centrifugeuse complète ni même la majorité des composantes nécessaires pour en assembler une, et n'était d'ailleurs pas en mesure de le faire.


Il faut souligner que la Malaisie a toujours soutenu les efforts internationaux visant à prévenir le transfert illégal de technologie nucléaire ou la production illégale de matériaux susceptibles d'être détournés à des fins de développement clandestin d'armes de destruction massive, a déclaré Mme Rajmah Hussain.  La Malaisie est engagée non seulement en faveur de la non-prolifération mais aussi en faveur de l'élimination totale et complète de toutes les armes de destruction massive.  La Malaisie déplore donc qu'un contrat commercial ordinaire passé par l'entreprise SCOPE ait été déformé, exagéré et gonflé hors de toute proportion.  En outre, il convient de relever que la Malaisie a été nommément pointée du doigt dans le discours du Président Bush qui s'est bien gardé, en revanche, de nommer les pays d'Europe, du Moyen-Orient et d'Afrique dans lesquels, selon lui, sont basés des opérateurs auprès desquels sont achetés d'autres composants nécessaires.  La Malaisie se sent offensée, elle qui ne fait pas partie des nations ayant une aspiration nucléaire.  Aussi, Mme Rajmah Hussain a-t-elle demandé que soit distribuée, en tant que document officiel de la Conférence, la déclaration de presse faite le 13 février 2004 par le Ministre des affaires étrangères de la Malaisie, M. Datuk Seri Syed Hamid Albar, en réponse aux propos du Président Bush.


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