UN MONDE OU, EN DEPIT D’UNE PROSPERITE CROISSANTE, DES MILLIONS DE GENS VIVENT DANS DES CONDITIONS DESESPEREES NE SAURAIT ETRE EN PAIX, SELON KOFI ANNAN
Communiqué de presse SG/SM/9018 IHA/829 |
UN MONDE OU, EN DEPIT D’UNE PROSPERITE CROISSANTE, DES MILLIONS DE GENS VIVENT DANS DES CONDITIONS DESESPEREES NE SAURAIT ETRE EN PAIX, SELON KOFI ANNAN
Vous trouverez ci-après le texte de l’allocution du Secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, prononcée à l’occasion de l’Appel humanitaire pour 2004:
Je suis heureux d’être parmi vous aujourd’hui, pour lancer cet appel annuel au nom des agences humanitaires des Nations Unies et des organisations partenaires – organisations non gouvernementales et Croix-Rouge. Nous demandons aux donateurs trois milliards de dollars pour 21 pays.
Pourquoi? Parce que quelque 45 millions de civils ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence. Ils luttent pour survivre au déplacement, aux pertes qu’ils ont subies et au bouleversement total de leur vie du fait de guerres, de conflits et de catastrophes naturelles. Quarante-cinq millions, ce n’est pas seulement un chiffre, ce sont des êtres humains réels, ayant des besoins réels. Ce sont, pour la plupart, des enfants, des femmes et des personnes âgées.
Ce qu’ils espèrent et ce dont ils ont besoin, ce n’est pas notre pitié mais notre soutien. Ils ont été contraints de fuir leurs foyers et leurs communautés, ils ont perdu pratiquement tout ce qu’ils possédaient. Mais ils n’attendent pas notre aide en victimes impuissantes. Ils n’attendent pas de nous que nous répondions à tous leurs besoins. La plupart d’entre eux travaillent dur, faisant tout ce qu’ils peuvent pour survivre, mobilisant toutes leurs capacités et leurs ressources pour remonter la pente et reprendre une vie normale.
Nous sommes ici aujourd’hui pour faire preuve de solidarité à leur égard. Nous devons les soutenir dans leur lutte. Nous devons les aider à survivre jusqu’à ce qu’ils puissent reconstruire leurs communautés et se prendre en charge plus complètement.
Qu’il soit bien entendu que l’aide que nous leur donnons, ce n’est pas de la charité, c’est leur droit. Les victimes de catastrophes naturelles ou de fléaux causés par l’homme ont droit à la satisfaction de leurs besoins fondamentaux. Et les donateurs et citoyens qui peuvent le faire ont non seulement le devoir moral de leur apporter une aide d’urgence et de pourvoir à leurs besoins vitaux, mais également l’obligation de le faire en vertu du droit international humanitaire et des instruments relatifs aux droits de l’homme.
Je suis convaincu que chacun de nous compterait sur une telle l’aide et la considèrerait comme un droit, s’il se trouvait dans la même détresse que ceux dont je me fais le porte-parole aujourd’hui.
Personne ne devrait mourir par manque de nourriture et de médicaments alors qu’il y en a en excédent ailleurs.
Comme nous l’avons constaté maintes et maintes fois, les gens donnent généreusement lorsqu’ils voient sur leur écran de télévision un enfant affamé, une mère à l’agonie, un père désespéré. Mais n’oublions pas que bon nombre des crises les plus graves qui sévissent dans le monde se déroulent loin des caméras, et qu’après être sortis d’une crise ou d’un conflit, les pays ont encore besoin de soutien pendant la période critique de la transition qui mène à la paix et au développement.
Je sais que les nations riches sont conscientes qu’elles ont la responsabilité d’aider ceux qui sont dans le besoin et de faire prévaloir le droit des individus. Elles estiment à juste titre que l’aide qu’elles fournissent est en même temps un investissement dans la sécurité. Un monde où, au milieu d’une prospérité générale croissante, des millions de gens vivent encore dans des conditions désespérées ne saurait être en paix. Il est évident qu’une aide fournie en temps voulu à ceux qui en ont le plus besoin peut contribuer à prévenir un conflit.
Pourtant, malgré de généreuses contributions, le financement de l’aide humanitaire reste trop souvent insuffisant et difficile à prévoir. Les fonds reçus jusqu’ici au titre de la procédure d’appel global pour cette année ne représentent que 66% du montant requis. Et encore, le chiffre est trompeur car les pourcentages de financement sont inégaux. Ainsi, l’appel lancé en faveur de l’Iraq – qui constitue plus du tiers du montant total – a été financé à 91%, mais le Burundi, par exemple, n’a reçu que 28% et le Libéria 24%.
Nous devons faire mieux, et nous ne devons oublier personne parmi ceux qui attendent de nous aide et espoir. Si nous avons pu recueillir près de trois milliards de dollars rien que pour l’Iraq, nous pouvons sûrement rassembler les trois milliards que nous demandons pour l’année prochaine pour le reste du monde. Cela ne représente guère plus de trois dollars par habitant dans les pays donateurs – soit le prix d’un magazine ou de deux tasses de café. Avec cette somme, nous pouvons contribuer à sauver des vies dans 21 des crises les plus graves qui sévissent dans le monde – de la Tchétchénie (Fédération de Russie) à la République démocratique du Congo, en passant par de nombreux pays et régions d’Afrique.
La procédure d’appel global a été conçue pour soulager les souffrances à court terme mais aussi pour mettre en évidence des besoins plus profonds et plus durables. Il va sans dire qu’elle ne peut pas apporter et n’apporte pas de solutions aux crises proprement dites. Il nous incombe à tous de redoubler d’efforts pour éliminer les causes profondes de ces crises et prévenir d’autres crises avant qu’il ne soit trop tard.
Ensemble, nous pouvons changer les choses. C’est pourquoi je vous demande d’écouter les voix des victimes de ces crises, où qu’elles soient et qui qu’elles soient, et d’assumer vos obligations à leur égard en répondant rapidement et généreusement à nos appels. Tendons-leur la main, aidons-les à s’aider elles-mêmes. Je vous remercie.
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