ECOSOC/6052

PLAIDOYERS POUR UNE PLUS GRANDE COHERENCE DES ACTIONS ET UNE REFORME DU SYSTEME DE FINANCEMENT DU DEVELOPPEMENT

03/07/03
Communiqué de presse
ECOSOC/6052


Conseil économique et social


PLAIDOYERS POUR UNE PLUS GRANDE COHERENCE DES ACTIONS ET UNE REFORME DU SYSTEME DE FINANCEMENT DU DEVELOPPEMENT


GENEVE, 3 juillet -- Le Conseil économique et social a entamé ce matin son examen des activités opérationnelles du système des Nations Unies au service de la coopération et du développement sous la forme d'une réunion-débat sur le financement du développement avec huit intervenants, dont M. Nitin Desai, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, était le modérateur.


La contribution des organismes de l'ONU au développement est une réussite qui passe bien souvent inaperçue, a-t-il notamment été souligné.  Depuis des décennies ces organismes sauvent des millions de vies, contribuent à l'amélioration des conditions sociales et accroissent les moyens de lutte contre la pauvreté et la maladie.  Toutefois, leurs activités de développement sont à un tournant et connaissent des difficultés croissantes de financement.  À cet égard, le Vice-Président de l'ECOSOC, M. Abdul Mejid Hussein, a fait valoir qu'il importe désormais de résoudre le problème de l'insuffisance et de la baisse des ressources dont disposent les institutions chargées de promouvoir le développement.


Le Directeur général de la Direction du développement et de la coopération de la Suisse a recommandé d'éviter les doublons et a préconisé une profonde révision du système actuel de financement, notamment en envisageant de nouvelles contributions, en élargissant la base des bailleurs de fonds, en réformant les institutions de Bretton Woods ou le fonctionnement des banques de développement.  À l'instar de l'ancien Président du Comité d'aide au développement de l'OCDE, il a demandé aux États de rechercher une plus grande cohérence dans leurs actions et de comprendre que le financement du développement est un investissement dans un partenariat à long terme.  La Directrice générale du Service de la coopération internationale de la Suède a estimé que cette recherche de cohérence et de cohésion devait s'appliquer également au système des Nations Unies, car rien ne sert de multiplier les institutions spécialisées qui finissent par être en concurrence les unes avec les autres.  Comme son homologue suisse, elle a estimé que cela n'avait aucun sens de fonder les activités de développement sur des contributions volontaires.


Le Président du Groupe des vingt-quatre pour les questions monétaires internationales et le développement, s'exprimant à titre personnel, a exposé en détail les raisons pour lesquelles il est nécessaire de respecter les engagements pris lors de la Conférence de Monterrey sur le financement du développement concernant la réforme du Fonds monétaire international en vue de permettre aux pays en développement de mieux faire entendre leur voix.  Il a estimé qu'il était temps de se poser la question de savoir si le FMI respectait les normes de transparence et de gouvernance qu'il préconise.  En effet, le système actuel de calcul des quotas répond à des considérations politiques et ne reflète pas la taille des économies des pays.  On observe actuellement que c'est le Sud qui finance le Nord, a-t-il déploré lors du dialogue qui a suivi son intervention. 


Pour sa part, le Président du Conseil indien pour le développement social a demandé aux États de cesser le chantage qu'ils font subir aux institutions spécialisées et de leur donner les moyens réels de leur fonctionnement.  Il s'est déclaré favorable à un système de taxation internationale, par exemple sous la forme de la «taxe Tobin», qui pourrait sauver le système des Nations Unies.  Il a recommandé aussi que l'on donne une plus grande responsabilité aux pays dans l'application des programmes qui leur sont proposés, ce qui contribuerait, entre autres, à alléger le fonctionnement des institutions spécialisées, notamment le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  Quant à lui, le Directeur du Bureau des ressources et des partenariats stratégiques du PNUD trouve des raisons d'être optimiste dans le fait d'avoir un système de Bretton Woods fort.


Le Directeur général du Service de la coopération pour le développement du Brésil a, pour sa part, mis l'accent sur la coopération horizontale ou Sud-Sud et a rendu compte de l'expérience du Brésil dans ce domaine, notamment en ce qui concerne les transferts de technologies et les échanges de bonnes pratiques.


Dans le cadre du dialogue qui s'est engagé à la suite de ces interventions, les représentants des pays suivants sont intervenus : Chili, Guatemala, Nigéria, El Salvador, Afrique du Sud, Suède, Allemagne et Norvège.


Le Conseil poursuivra, cet après-midi à partir de 15 heures, l'examen de ces questions dans le cadre d'un dialogue avec les chefs de secrétariat des fonds et programmes des Nations Unies.


Réunion-débat de haut niveau sur le financement du développement


Pour l'examen de la question du financement du développement, le Conseil économique et social est saisi du rapport du Secrétaire général sur le financement des activités de coopération du système des Nations Unies pour le développement (E/2003/89).  Ce rapport analyse la question du financement de ces activités de coopération sous l'angle des résultats du Sommet du Millénaire et de la Conférence de Monterrey et met en lumière le rôle joué par le système des Nations Unies par l'intermédiaire de ses structures opérationnelles.  La collaboration des organismes de l'ONU au développement est une réussite qui passe bien souvent inaperçue.  Certes, il y a encore beaucoup à faire pour accroître l'efficacité et l'utilité de ces organismes mais on note certains succès qui illustrent leur fonction première.  Les pays en développement y voient une source essentielle d'aide et d'avis.  Depuis des décennies ces organismes sauvent des millions de vies, contribuent à l'amélioration des conditions sociales et accroissent les moyens de lutte contre la pauvreté et la maladie.  Cependant leurs activités de développement sont à un tournant: elles doivent accomplir de nouvelles tâches, mener de nouvelles actions et réaliser de nouveaux objectifs alors qu'on a sensiblement affaibli leur potentiel. 


Le rapport passe en revue la structure, les tendances et les modalités actuelles du financement du développement au sein du système de l'ONU.  Il présente les sources traditionnelles de financement public, ainsi que les initiatives privées et les ressources nationales.  Il explique l'incidence des relations avec les institutions de Bretton Woods et les conséquences de la pénurie de ressources de base.  Il recommande en conclusion de donner un nouveau souffle au dialogue entre les États Membres, afin de parvenir à un accord, lors de l'examen triennal des activités triennal en 2004, sur le renforcement des ressources allouées aux activités opérationnelles du système.  Ainsi l'ECOSCOC est invité à prier le Secrétaire général d'approfondir ses travaux d'analyse à ce sujet afin de nourrir ce débat avec des éléments supplémentaires, de présenter les résultats au Conseil à ses sessions de fond de 2004 et de soumettre des recommandations à l'Assemblée générale à l'occasion de l'examen triennal d'ensemble des activités opérationnelles. 


Déclarations


M. WALTER FUST, Directeur général de la Direction du développement et de la coopération au Ministère des affaires étrangères de la Suisse, a relevé qu'au vu des besoins, l'aide publique au développement (APD) devrait être au moins le double de ce qu'elle est aujourd'hui pour que puissent être atteints les Objectifs de développement du millénaire.  On parle souvent de partenariat mais l'écart ne cesse de se creuser entre les montants déclarés d'APD - les engagements - et ce qui est effectivement dépensé dans le cadre de cette aide, a-t-il ajouté.  De nouveaux moyens de financement de l'APD devraient donc être recherchés, a-t-il affirmé.  Si l'on n’examine pas soigneusement l'ensemble des transformations que subit actuellement l'architecture du système de financement des activités de développement, on risque de se retrouver rapidement face à des disparités qui seront difficiles à aplanir, a par ailleurs averti M. Fust.  Il convient donc aujourd'hui de s'efforcer d'éviter toute rupture qui pourrait avoir des conséquences négatives sur l'ensemble du système.  Il convient en outre de repenser le rôle des institutions de financement, a poursuivi M. Fust.  Il a aussi invité chacun à réfléchir à la question politique consistant à savoir s'il faut que les pays développés s'endettent pour respecter leurs engagements en matière de coopération pour le développement à travers le monde.  Si l'on réduisait de 10% les dépenses d'armement dans le monde, on disposerait d'un seul coup de 80 milliards de dollars par an, a d'autre part fait observer M. Fust.  Parmi les autres moyens de financement envisageables, figure la «taxe Tobin», a-t-il également suggéré.


M. Fust a estimé que dans certains types d'investissements, l'élément «dons» devrait être renforcé.  Il a par ailleurs relevé qu'il arrive parfois que les banques de développement financent des projets qui pourraient en fait être financés dans un cadre purement commercial.


M. MARCO CÉSAR NASLAUSKY, Directeur général du Service de la coopération pour le développement au Ministère des affaires étrangères du Brésil, a rappelé que les Objectifs de développement du millénaire demandent un renforcement de la coopération pour le développement.  Il a jouté que la certitude que la plupart des pays en développement ne disposent pas, à eux seuls, des ressources suffisantes pour surmonter les obstacles à leur développement accroissait d'autant la responsabilité des pays développés.  À cet égard, il a rappelé les propos tenus par le Président Luiz Inácio «Lula» da Silva à la Banque mondiale, qui s'articulent autour de trois axes: égalité des chances, cohérence, définition des responsabilités.  Dans un contexte du déclin de l'aide publique au développement, il a estimé qu'il était indispensable de raviver la flamme de la solidarité, puisque, aujourd'hui, seuls cinq pays (le Danemark, les Pays-Bas, le Luxembourg, la Norvège et la Suède) ont atteint ou dépassé le volume promis d'aide publique au développement, soit 0,7 % de leur produit intérieur brut.  Dans un contexte aussi désolant, il a néanmoins fait valoir que, selon les estimations de la Banque mondiale, on observe certains progrès en ce qui concerne l'éducation, l'espérance de vie, et même les revenus.  Cela étant, le défi à relever reste énorme puisque 20 % de la population mondiale, soit 1,2 milliard de personnes environ, vivent toujours avec moins d'un dollar par jour.


M. Naslausky a ensuite expliqué que le Brésil ne figurait pas au rang des donateurs et comptait encore parmi les bénéficiaires de la coopération.  Il a précisé que son pays avait tiré grand bénéfice de cette coopération et se tenait prêt à partager son expérience et son savoir avec des pays moins développés.  Ainsi, le Timor oriental a pu bénéficier de la coopération du Brésil pour le développement.  L'agence brésilienne de coopération continue d'ailleurs d'augmenter les ressources financières qu'elle destine à la coopération en faveur du développement; ses programmes visant à combattre les maladies sexuellement transmissibles et à lutter contre l'illettrisme ont été exportés vers divers pays intéressés.  M. Naslausky a indiqué que le Brésil s'emploie depuis deux décennies à développer la coopération horizontale que le Président Lula considère comme un impératif moral.  C'est dans cet esprit que le Brésil entend multiplier les transferts de technologies et les échanges de bonnes pratiques, a-t-il poursuivi.  C'est pourquoi, l'agence brésilienne s'emploie à réfléchir aux modalités de la coopération triangulaire et aux moyens de renforcer la solidarité entre les États, a-t-il conclu.


MME RUTH JACOBY, Directrice générale du Service de la coopération internationale au Ministère des affaires étrangères des Pays-Bas, a déclaré être personnellement convaincue de l'importance et de la pertinence du thème retenu pour cette réunion-débat consacrée au financement du développement.  Elle a rappelé que l'on sait exactement et même plus que jamais à quoi doivent désormais servir les fonds destinés au développement.  Le rôle que l'aide publique au développement peut jouer dans ce contexte est également mieux connu que jamais.  Mme Jacoby a mis l'accent sur la nécessité de nouer des partenariats en mettant les ressources en commun.


Chacun sait que les Objectifs du millénaire ne seront pas atteints si rien n'est fait et si l'on n'agit pas de manière différente, a poursuivi la représentante néerlandaise.  Après Monterrey, les ressources consacrées au développement devraient augmenter, a-t-elle souligné.  Il conviendra alors de les mettre à profit au plus vite.  Aujourd'hui, plus que jamais, toutes ces questions revêtent une importance capitale, a insisté Mme Jacoby.  Elle a toutefois rappelé qu'il y a 15 ou 20 ans, les mêmes questions étaient déjà débattues et que rien n'a été fait pour que le système des Nations Unies dispose d'une base de financement du développement qui soit viable.  Il convient par conséquent, tant pour les bailleurs que pour les pays en développement, de se demander si la question du financement du système est abordée avec assez de sérieux, a par ailleurs suggéré Mme Jacoby.  Elle s'est interrogée sur l'opportunité de disposer d'une soixantaine d'institutions ou d'organismes des Nations Unies qui soient en concurrence les uns avec les autres pour ce qui est d'obtenir des crédits auprès des donateurs de l'OCDE.  En tout état de cause, chacun est d'accord pour dire que cela n'a aucun sens de fonder les activités de développement sur des contributions volontaires annuelles, a déclaré Mme Jacoby.  Elle a mis l'accent sur la nécessité d'élargir la base des donateurs.  Elle a fait état d'une étude qui est parvenue à la conclusion que la part des contributions des pays non membres de l'OCDE devrait à long terme représenter 30% du total.


Précisant d'emblée qu'il s'exprimait à titre personnel, M. ARIEL BUIRA, Président du  Groupe intergouvernemental des vingt-quatre pour les questions monétaires internationales et le développement, s'est référé aux résultats de la Conférence de Monterrey pour mettre l'accent sur la volonté politique de faire les choses et de respecter les engagements pris dans les grandes conférences des Nations Unies.  En effet, l'idée du Consensus de Monterrey était de mettre sur pied de nouveaux partenariats en vue de financer le développement et de renforcer le dialogue international, notamment avec les institutions financières, afin de tenir réellement compte des besoins des pays en développement et d'accroître leur participation aux prises de décision dans ce domaine.  Il a d'ailleurs déploré les récentes déclarations des États-Unis qui ont modifié leur position sur ce point et estiment désormais qu'il n'est plus nécessaire de réformer le Fonds monétaire international.  Face à cette position, il a posé deux questions concernant la gouvernance du FMI, demandant si le Fonds atteint les normes qu'il impose aux États en matière de gouvernance et de transparence, et la question de trouver le moyen d'accroître la participation de tous les membres aux prises de décision.  Il a ensuite expliqué en détail le processus de prise de décision du Fonds qui dépend du volume de contributions des États et doit tenir compte du régime de scrutin, notamment des vetos de facto, à cause des majorités qualifiées pour certains sujets.  Par exemple, sur 18 sujets, il faut une majorité de 85 %, avec les États-Unis disposant de 17,1 % du fait de leur contribution ont un droit de veto.  De même, les décisions sur 21 sujets demandent une majorité de 70 % et le G-5 détient pour sa part 39,6 %.


S'agissant de la formule de calcul des quotas, M. Buira a expliqué qu'elle était le fruit de considérations politiques.  Par exemple, les États-Unis ont le plus large quota, soit un tiers du total, alors que l'Union soviétique avait un quota équivalent à la moitié de celui du Royaume-Uni qui est la moitié de celui des États-Unis.  Il a précisé que le calcul des quotas manquait de transparence et qu'ils n'étaient pas représentatifs.  Ainsi, il convient que les États posent de réelles questions sur la transparence de la prise de décision au sein du FMI, car la structure actuelle donne le pouvoir à un groupe restreint de pays.  M. Buira s'est déclaré choqué que, dans un tel contexte, certains pays choisissent de revenir sur leurs engagements.


Répondant à une question concernant le financement du FMI, M. Buira a expliqué que les pays développés ne souhaitent pas augmenter la taille du Fonds, puisque aucun pays industrialisé n'a eu recours au Fonds depuis 25 ans.  En outre, toute décision relative à la taille du FMI demande une majorité de 85 %.  Il a indiqué que certains pays pourraient souhaiter augmenter leurs contributions, mais n'en ont pas la possibilité car leurs quotas n'augmentent pas.


M. RON KELLER, Directeur général du Service de la coopération internationale au Ministère des affaires étrangères des Pays-Bas, a rappelé que Winston Churchill, dans l'une des interventions les plus brèves de sa carrière, avait souligné la nécessité de ne jamais, jamais, abandonner la question du financement du système des Nations Unies.  M. Keller a mis l'accent sur la nécessité pour les donateurs de mieux s'harmoniser afin de mieux travailler ensemble.  Il faut dire non à un financement qui ne soit pas un financement de base, a déclaré M. Keller.  Certes, cela est plus facile à dire qu'à faire en ces temps de déclin des ressources de base, a-t-il reconnu.  Mais si l'on améliore la qualité, il est fort probable que les donateurs financeront les programmes de base, a-t-il estimé.  M. Keller a fait observer que la Banque mondiale bénéficie d'une certaine unité dans son fonctionnement, ce qui explique probablement pour une bonne partie son succès.  Il a invité chacun à se demander pourquoi les Nations Unies ne connaissent pas le même succès.  M. Keller a par ailleurs suggéré d'envisager un cadre juridique contraignant qui imposerait des obligations aux donateurs.


M. MUCHKUND DUBEY, Président du Conseil indien pour le développement social, a remarqué que l'on observe actuellement une baisse des contributions obligatoires et une augmentation des contributions volontaires au budget des institutions spécialisées, déplorant en outre une fragmentation extrême des programmes.  Il a expliqué que le système de programmation de l'assistance était devenu extrêmement technique et compliqué.  Il semble que le système actuel ne peut pas répondre aux besoins des pays en développement du fait de la baisse des contributions et des modalités de programmation.  En fait, le système actuel, qui repose de plus en plus sur des contributions volontaires, répond aux priorités des bailleurs de fonds et non à celles des pays en développement.  Il a estimé que cette évolution reflétait le déclin des Nations Unies depuis les années 1980, car le rôle des institutions intergouvernementales est devenu moins important.  En outre, les pays en développement sont pour leur part confrontés à des crises de plus en plus nombreuses comme, par exemple, la crise de la dette.  Il s'est déclaré d'avis que l'intrusion de la politique dans les affaires économiques avait grandement contribué à créer l'impasse actuelle.  Ainsi, on remarque que le système des Nations Unies est maintenant utilisé pour imposer des considérations politiques comme en atteste le conditionnement de l'aide à des restructurations et des réformes dans les pays bénéficiaires.  Il a relevé de nombreuses contradictions dans le système de contributions, qu'elles soient volontaires ou pluriannuelles.  Il a demandé aux États de «cesser le chantage qu'ils font subir aux institutions spécialisées» et de leur donner les moyens réels de leur fonctionnement.  Il s'est déclaré favorable à un système de taxation internationale, qui est réapparu sous la forme de «taxe Tobin» par exemple, et qui pourrait notamment sauver le système des Nations Unies.  Il a demandé aussi que l'on donne une plus grande responsabilité aux pays dans l'application des programmes qui leur sont proposés, cela contribuerait à alléger le fonctionnement des institutions spécialisées, notamment du Programme des Nations Unies pour le développement.  En outre, il a insisté pour que l'on établisse un lien entre la réduction des dépenses militaires au niveau national et la contribution au développement.


M. JEAN-CLAUDE FAURE, ancien Président du Comité d'aide au développement de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a jugé essentielle la façon dont le Conseil économique et social des Nations Unies ouvre la discussion sur des sujets fondamentaux.  Il a admis que le problème du financement du développement est un vieux problème dont est saisie la communauté internationale mais a souligné que ce vieux problème appelle désormais de nouvelles solutions.  Il a mis l'accent sur la nécessité de poser clairement la question fondamentale de la cohérence entre les activités opérationnelles du système des Nations Unies et les stratégies de développement adoptées au niveau national.  L'allocation de l'aide doit s'articuler autour de la stratégie de développement adoptée au niveau national par le pays bénéficiaire, a souligné M. Faure.


Si l'on veut engager un processus dynamique et durable susceptible d'aboutir aux résultats fixés par les Objectifs de développement du millénaire, il convient de se poser les questions de la bonne gouvernance et de la performance de chacun, a par ailleurs estimé M. Faure.  On ne peut ici, à l'ECOSOC, réfléchir à la meilleure manière d'assurer le financement des activités opérationnelles sans promouvoir parallèlement l'harmonisation de l'aide, a-t-il insisté.


M. BRUCE JENKS, Administrateur associé et Directeur du Bureau des ressources et des partenariats stratégiques du Programme des Nations Unies pour le développement, a trouvé quelques raisons d'être optimiste dans le fait d'avoir un système de Bretton Woods fort.  Il a estimé que la question n'était pas de savoir si l'on avait besoin d'institutions financières solides, mais si la communauté internationale voulait que l'ONU soit forte.  S'agissant plus précisément du PNUD, il a déclaré que la situation générale n'était si mauvaise puisque les ressources complémentaires perçues par le PNUD l'année dernière avaient atteint leur taux le plus élevé.  Toutefois, du côté des ressources de base, il a indiqué qu'en dépit d'une légère augmentation, il y avait un réel problème, notamment si l'on veut que l'ONU soit solide.  Il a fait savoir que certains États avaient gelé leur financement et qu'il y avait de nombreux retards de paiements.  Il a regretté que le financement reçu par les institutions spécialisées est un financement résiduel qui passe après que les États aient honoré toutes leurs autres contraintes financières.  En outre, il a considéré que ce problème structure de financement tient aussi au manque d'interlocuteur dans les gouvernements: les institutions spécialisées doivent-elles s'adresser aux ministères des finances, des affaires étrangères, ou autre?


Par ailleurs, M. Jenks a expliqué qu'il fallait se pencher très sérieusement sur les chiffres pour comprendre comment était partagé la charge du financement.  En effet, on observe alors des aberrations dans la répartition qui permettent de comprendre que le système actuel n'est pas durable, car il repose sur une architecture instable.  Il a déclaré que la réflexion engagée depuis quelques années allait dans le bon sens, mais que la solution aux problèmes structurels de financement résidait dans la volonté politique des États.  Il a espéré que les institutions spécialisées parviendront à sortir de la situation actuelle qui les obligent à mendier les fonds dont elles ont besoin pour accomplir leur mission.


Échange de vues


Le représentant du Chili a déclaré que, si l'on veut avancer sur la stratégie à suivre aux Nations Unies en matière d'activités opérationnelles aux fins du développement, il ne faudra pas perdre de vue les idées avancées lors de la réunion-débat de ce matin.  Aussi, serait-il souhaitable de disposer d'un non-document qui constituerait un carnet de route et serait fondé sur les idées avancées ce matin.


Le représentant du Guatemala et par ailleurs Président du Conseil économique et social, M. Gert Rosenthal, a souligné que l'ONU joue efficacement son rôle de sensibilisation de l'opinion publique.  En revanche, nous ne sommes pas très bons lorsqu'il s'agit d'agir directement, a-t-il relevé.  Il faudrait donc que les Nations Unies puissent disposer de davantage de ressources de base pour pouvoir jouer un rôle de chef de file dans ce domaine particulier où elles jouissent d'un avantage comparatif, à savoir la création de capacités.


M. Nitin Desai, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a notamment souligné que pour la première fois depuis dix ans, la question des activités opérationnelles aux fins du développement est abordée dans un contexte différent puisque le budget de l'aide est en augmentation.  Selon M. Desai, la concurrence ne sévit pas entre les différentes organisations ou institutions mais plutôt entre les différents objectifs poursuivis.


En réponse à une intervention du représentant du Nigéria, M. Dubey a souligné que l'idée de lier l'aide à des projets particuliers (préaffectation de l'aide) n'est pas nouvelle dans le système des Nations Unies.  Il a ajouté que certains pays en développement pourraient décider d'augmenter leurs contributions si elle devait être affectée à des projets précis, a-t-il ajouté.


M. Faure a souligné que l'efficacité ne doit pas être considérée comme un critère pour la répartition globale des ressources.  Les bons critères sont ceux qui tiennent compte d'éléments tels que les avantages comparatifs, a-t-il précisé.


Le représentant de l'Afrique du Sud a souligné qu'il faut veiller à aborder la question de l'efficacité tant du point de vue du bénéficiaire que du point de vue du donateur.


Le représentant d'El Salvador a souhaité en savoir davantage sur le système de vote au sein des institutions financières internationales.  Il a par ailleurs rappelé que les États doivent faire preuve de volonté politique s'ils veulent améliorer la coordination et l'efficacité des politiques d'aide au développement.  Il s'est néanmoins demandé quelle est l'instance au sein de laquelle cette volonté politique peut effectivement se concrétiser.  M. Keller a reconnu qu'il existe effectivement une question de gouvernance mondiale qu'il convient d'examiner plus avant.


Mme Jacoby a dit partager l'idée déjà avancée par Mme Nafis Sadiq selon laquelle tout devrait passer par les Nations Unies, y compris l'aide bilatérale.


La représentante de la Suède a déclaré qu'il convient de rechercher dans toute la mesure du possible des modalités de financement pluriannuel et des modes de programmation conjointe.


M. Dubey a jugé amusante l'intervention de la Suède, soulignant que ce pays ne consentira pas à fournir des ressources d'assistance technique à une institution autre que le PNUD et qu'elle a toujours été partisane des affectations par pays.  Il a ajouté que la Charte des Nations Unies ne prévoit pas de contributions volontaires.


M. Fust a dit souhaiter que les Nations Unies imitent la Banque mondiale en adoptant un cadre de financement pluriannuel.


M. Jenks a affirmé que la seule erreur que l'on puisse commettre au stade où en sont les choses serait de ne pas être assez ambitieux.  Il faut aujourd'hui être à la hauteur de la situation et garder à l'esprit que les montants nécessaires pour permettre d'aller de l'avant sont assez modestes.


Le représentant de l'Allemagne a relevé qu'un large consensus semble se dégager quant à l'analyse des problèmes qui se posent en matière de financement des activités opérationnelles du système des Nations Unies.


Le représentant de la Norvège a mis l'accent sur le rôle crucial que joue le PNUD dans le domaine du développement.


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