JEAN-MARIE GUEHENNO RECOMMANDE DES AJUSTEMENTS REALISTES ET PRUDENTS POUR CONSOLIDER LES EFFORTS DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE AU TIMOR-LESTE
Communiqué de presse CS/2457 |
Conseil de sécurité
4715e séance – matin
JEAN-MARIE GUEHENNO RECOMMANDE DES AJUSTEMENTS REALISTES ET PRUDENTS POUR CONSOLIDER LES EFFORTS DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE AU TIMOR-LESTE
Moins d’un an après son indépendance célébrée le 20 mai 2002, l’évolution de la situation en matière de sécurité au Timor-Leste a été ce matin au cœur des préoccupations du Conseil de sécurité. En effet, alors qu’il présentait le rapport du Secrétaire général sur la Mission d’appui des Nations Unies au Timor oriental (MANUTO), le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Jean-Marie Guéhenno, a jugé inquiétants les récents développements intervenus ces derniers mois et a recommandé des ajustements réalistes et prudents afin de protéger durablement les investissements consentis pendant ces dernières années par la communauté internationale au Timor-Leste.
Evoquant les émeutes intervenues à Dili le 4 décembre dernier et les massacres à Ermera le 4 janvier et à Bonobaro le 24 janvier perpétrés par des groupes armés qui étaient selon lui motivés par des raisons politiques et criminelles, M. Guéhenno a jugé que les autorités timoraises ne pouvaient en l’état actuel de leurs capacités de police et d’armée faire face à de tels soulèvements. Aussi, le Secrétaire général adjoint a-t-il invité le Conseil de sécurité à reconsidérer les plans de réduction des effectifs de la MANUTO qui avaient été prévus, il y a neuf mois, à un moment où la situation était stable. Cette réduction d’effectifs ne pourrait que fragiliser les nouvelles institutions timoraises, a-t-il mis en garde, demandant que le plan consistant à réduire de 750 hommes les effectifs militaires de la MANUTO à la mi-2003, soit différé à la fin de l’année.
Les 2 580 hommes qui composent cette force actuellement doivent faire face à la menace des groupes armés dans certaines régions de Timor-Leste, a rappelé M. Guéhenno, qui a estimé que la réduction d’un tiers de ces effectifs risquait de fragiliser la capacité de réaction de la police internationale et de la MANUTO en cas de nouvelles émeutes, en août prochain par exemple. Rappelant que lors des opérations de la MANUTO visant à arrêter les auteurs du massacre commis à Bobonaro, les Casques bleus avaient découvert un camp d’entraînement militaire et des stocks d’équipements militaires, d’armes et de munitions, M. Guéhenno a déclaré que la communauté internationale était confrontée à un choix entre une solution minimaliste et une solution de prudence et d’efficacité sur la base des recommandations contenues dans le rapport. Pour sa part, le représentant de Timor-Leste a déclaré que les propositions du Secrétaire général apportent une réponse proportionnelle et équilibrée aux menaces qui visent à déstabiliser son pays avant d’indiquer que le Premier Ministre timorais s’était engagé à trouver, auprès des pays donateurs, les moyens d’équiper, de former et de recruter 500 personnes supplémentaires au sein des forces de police.
Toutefois, si dans leur ensemble, les membres du Conseil de sécurité ont, à l’instar de la Fédération de Russie, de la Chine ou de l’Espagne, considéré que les recommandations du Secrétaire général devaient être mises en œuvre pour consolider les investissements consentis au Timor-Leste depuis plus de trois ans, l’Allemagne, les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni n’ont pas jugé nécessaire de remettre en cause le rythme prévu de réduction des effectifs militaires de la MANUTO d’ici à la fin de l’année. Ces incidents ne sont pas de grande envergure, a observé le représentant des Etats-Unis qui souligne que la responsabilité de gérer ce type d’incidents incombe à la police et non au personnel de la MANUTO. La présence d’un peu moins de 2 000 agents de la paix devrait suffire pour aider la police à neutraliser des groupes de criminels et contrer des cas isolés de violence et d’incidents, a-t-il dit, en s’interrogeant sur les arguments qui pourraient être utilisés à la fin de l’année si, après un gel des effectifs, des incidents surviennent. Son homologue de l’Allemagne a demandé à M. Guéhenno d’axer tous les efforts des Nations Unies sur le renforcement de la capacité de la police de Timor-Leste et s’est dit prêt, dans ce contexte, à étudier toute proposition raisonnable visant à observer une pause dans le retrait du contingent de police tout en souhaitant en connaître le prix à payer.
Outre ceux déjà cités, les représentants des pays suivants se sont exprimés au cours du débat: Chili, République arabe syrienne, Bulgarie, Pakistan, Mexique, Cameroun, Angola, Guinée, Portugal, Australie, Indonésie et Japon.
LA SITUATION AU TIMOR-LESTE
Le rapport du Secrétaire général sur la Mission d’appui des Nations Unies au Timor oriental (MANUTO) (S/2003/243)
Ce rapport, présenté en application de la résolution 1410 (2002) du Conseil de sécurité en date du 17 mai 2002, rend compte de changements importants qui se sont produits sur le terrain depuis son rapport du 6 novembre 2002 et qui font apparaître la nécessité de réexaminer le plan de réduction des effectifs de la Mission d’appui des Nations Unies au Timor oriental (MANUTO). Le rapport contient des propositions concrètes de réaménagement qui devraient permettre à la Mission de mener à bien, d’ici à juin 2004, les tâches qui lui ont été assignées.
Faisant la lumière sur le contexte en matière de politique et de sécurité au cours de la période à l’examen, le Secrétaire général note la forte augmentation du nombre et de la gravité d’incidents touchant à la sécurité: les émeutes du 4 décembre à Dili et les différents dégâts matériels qu’ils ont causés; l’assaut lancé le 4 janvier dernier par un groupe de 20 à 30 hommes armés contre des villages à Atsabe; l’attaque contre un bus le 24 février qui a fait deux morts et cinq blessés. Le rapport indique que la découverte de caches d’armes dans les zones rurales et l’augmentation des vols de nourriture et de bétail sembleraient confirmer la thèse de l’existence d’un appui extérieur dont bénéficieraient ces groupes armés dans le but de déstabiliser le pays. L’inachèvement du processus de réinstallation des anciens réfugiés est-timorais vivant en Indonésie, ainsi que le report de la démarcation de la frontière ne contribuent pas à améliorer le climat de sécurité.
Le rapport souligne en outre que ces événements ont fait apparaître de graves insuffisances qui s’aggraveront si la MANUTO poursuit l’exécution du plan actuel de réduction de ses effectifs. Par conséquent, pour faire face aux problèmes de sécurité, et consolider les acquis des trois années, le Secrétaire général recommande d’abord d’attendre au moins une année supplémentaire avant que la police est-timoraise ne soit en mesure de faire face aux problèmes les plus graves, et opérer des aménagements pour que la MANUTO puisse mieux assurer efficacement la sécurité et assumer pleinement leurs responsabilités à plus long terme.
Les propositions concrètes contenues dans le rapport sont axées sur la révision de la stratégie militaire et celle du maintien de l’ordre et sur les incidences financières du plan de réajustement. Elles prévoient notamment la structuration de la composante militaire à travers l’établissement, au sein d’une vaste zone attenante à la ligne de coordination tactique, d’une présence militaire suffisante pour prévenir les incursions et les incidents; le maintien d’une présence des forces de sécurité dans d’autres zones du pays; l’amélioration de la capacité à exploiter les informations et le renforcement de la coordination de l’échange d’information de la police de la MANUTO et les organismes de sécurité du Timor oriental; l’accroissement de la mobilité aérienne et terrestre; la promotion des relations avec le public et le renforcement des moyens d’information.
Le rapport précise que ces ajustements proposés seraient adoptés en deux phases dans le cadre d’un plan simplifié de déploiement de la composante militaire jusqu’au terme de son mandat. Outre la restructuration visant à renforcer les capacités dans les domaines clefs tels que la mobilité aérienne et la mobilité terrestre, le plan prévoit notamment de maintenir les effectifs militaires actuels jusqu’à la fin de la première phase qui se termine en décembre 2003, et de les réduire au cours de la deuxième phase qui va de fin septembre à mai 2004.
Pour ce qui est de la composante police, le plan prévoit notamment le déploiement, pendant une année, d’une force de police formée par la communauté internationale; le réajustement des capacités de formation; et le déploiement de 200 conseillers auprès de la police du Timor oriental dans les districts où les responsabilités ont été transférées.
En soumettant à l’approbation des membres du Conseil ces réajustements essentiels au plan de réduction des effectifs des forces de maintien de la paix et de la police des Nations Unies, le Secrétaire général précise que les ressources supplémentaires que nécessitent ces ajustements sont modestes par rapport aux dépenses qui ont été engagées au cours des trois dernières années. Un budget révisé, qui reflètera les prévisions de dépenses ajustées pour la même période, sera soumis à l’Assemblée générale au cours de la partie principale de sa cinquante-huitième session de, sous réserve de la décision que prendra le Conseil de sécurité au sujet du plan de reconfiguration de la mission. Le Secrétaire général souligne en outre que ces plans révisés seraient gardés constamment à l’étude et toute amélioration ou détérioration sensible du climat de sécurité ferait l’objet d’un rapport au Conseil de sécurité avec des recommandations appropriées concernant les mesures à prendre.
Le ferme engagement politique des dirigeants du Timor oriental ainsi que la collaboration continue avec l’Indonésie seront également indispensables, indique le Secrétaire général, pour compléter l’action menée par la MANUO, notamment dans les domaines cruciaux de la défense, de la police, de la justice et de la répression de la délinquance, ainsi que dans celui du développement économique et social. Soulignant qu’une assistance complémentaire après l’achèvement du mandat de la Mission serait probablement nécessaire, il recommande aux Etats d’envisager plusieurs possibilités, notamment le déploiement de policiers internationaux compétents qui exerceraient des fonctions de conseil dans des postes stratégiques au sein de la police nationale dans le cadre d’arrangements opérationnels bilatéraux conclu avec le Gouvernement est-timorais.
Le Secrétaire général conclut qu’avant d’atteindre un stade où l’on ne pourra plus faire marche arrière dans la réduction des effectifs, il serait bon de rappeler que les résultats qui ont été obtenus assez rapidement après la mise en œuvre de la MANUTO restent fragiles.
Déclarations
M. JEAN-MARIE GUEHENNO, Secrétaire général adjoint chargé des opérations de maintien de la paix, présentant le rapport du Secrétaire général sur la Mission d’appui des Nations Unies au Timor oriental (MANUTO), a rendu hommage aux cinq Casques bleus originairees de la République de Corée qui ont perdu la vie la semaine dernière, emportés par un torrent dans la zone d’Oecussi, au Timor-Leste. Il a ensuite rappelé les succès enregistrés au Timor oriental, puis au Timor-Leste, au cours des trois années et demie passées, notamment la mise en place d’une administration publique, la tenue de deux élections qui se sont bien déroulées et enfin, l’indépendance le 20 mai dernier. Malheureusement, a-t-il poursuivi, le présent rapport du Secrétaire général entend sonner l’alarme à un moment critique, informer le Conseil de sécurité des développements inquiétants intervenus ces derniers mois, et recommander des ajustements réalistes et prudents dans la réduction des troupes de la MANUTO afin de protéger durablement les investissements consentis ces dernières années par la communauté internationale au Timor-Leste.
S’agissant des faits nouveaux troublants, M. Guéhenno a fait état des menaces de troubles civils, comme l’ont démontré les émeutes à Dili le 4 décembre dernier, et s’est inquiété ensuite du soulèvement de groupes armés dans l’ouest du pays où les massacres à Ermera le 4 janvier et à Bonobaro le 24 janvier avaient, selon lui, des mobiles politiques et criminels. Le rapport souligne ensuite les obstacles auxquels sont confrontées les autorités timoraises qui ne peuvent à l’heure actuelle faire face à ces soulèvements, a-t-il ajouté. La police timoraise ne peut assurer un rôle important au stade actuel et chercher à reposer trop tôt sur ces institutions nuirait à leur formation et à leur mise en place. Aussi, les plans de réduction de la MANUTO prévus il y a neuf mois, à un moment où la situation était stable, ne pourraient, s’ils étaient mis en œuvre, contribuer à aider les institutions timoraises à se développer, a observé M. Guéhenno.
Les plans prévus prévoient une nouvelle réduction de 750 hommes au milieu de cette année, a-t-il poursuivi, soit le tiers des 2 580 hommes qui composent cette force actuellement, au moment où elle doit faire face à la menace des groupes armés. M. Guéhenno a indiqué que la police internationale ne disposait pas de capacités de contrôle des foules alors que d’autres manifestations et émeutes peuvent intervenir en août prochain par exemple. Aussi, le rapport du Secrétaire général propose-t-il le renforcement de la capacité de la MANUTO dans la formation d’une force de police timoraise, notamment en procédant au recrutement d’instructeurs dans les domaines du contrôle des foules, de l’administration de la police, des finances, de la logistique, de la sécurité aux frontières ou des droits de l’homme. Il a également mis en avant la nécessité de renforcer à court terme la capacité opérationnelle de la police de la MANUTO et recommandé un délai dans la réduction de la composante militaire pour lui donner une plus grande mobilité. Le rapport ne propose pas de reporter la date de retrait de la MANUTO, a-t-il indiqué ensuite, ni même la transformation de la stratégie globale mais nous considérons qu’une réduction prématurée des effectifs de la MANUTO risque d’avoir des conséquences sur le développement des capacités timoraises.
M. Guéhenno a ensuite souligné la conclusion récente d’accords entre Timor-Leste et l’Australie concernant la mise en valeur des ressources maritimes de la mer de Timor qui est importante pour le développement de Timor-Leste. Cependant, l’une des premières tâches consiste avant tout à sécuriser le pays, a-t-il dit, avant de faire part au Conseil de sécurité de son inquiétude quant à la capacité de nuisance des groupes armés que la police timoraise n’est pas en mesure de neutraliser. Les informations que nous continuons de recevoir ne peuvent qu’accentuer nos inquiétudes, a dit M. Guéhenno, soulignant que lors des opérations de la MANUTO visant à arrêter les attaquants de Bobonaro, les Casques bleus sont tombés sur un camp d’entraînement militaire où ils ont trouvé des équipements militaires, des armes et près de 1 000 munitions. Aussi, face à une situation incertaine et en tenant compte des expériences du passé, a-t-il dit, la communauté internationale a le choix entre une solution minimaliste ou une solution de prudence et d’efficacité pour consentir aux efforts nécessaires afin de mettre en œuvre les recommandations contenues dans le rapport.
M. JUAN GABRIEL VALDES (Chili) a estimé que la situation avait commencé à changer radicalement à partir du 4 décembre 2002, avec l’irruption de graves troubles civils et de violences qui ont modifié les perspectives de sécurité au Timor-Leste. Le représentant s’est particulièrement inquiété du retour manifeste de milices et groupes armés qui auraient établi leurs bases à l’intérieur même du pays. En outre, la présence de 28 000 réfugiés en Indonésie est un autre facteur d’instabilité. Aussi, convient-il de définir au plus vite le tracé de la frontière entre le Timor-Leste et l’Indonésie, a-t-il indiqué.
Par ailleurs, la police nationale, avec un effectif de 2 530 personnes, n’est pas à l’heure actuelle de contrer les menaces qui se présentent, a poursuivi le représentant qui a suggéré de lui adjoindre une force de police internationale pour un an; de poursuivre le renforcement et la formation d’une force de police; de renforcer la protection des droits de l’homme. Au plan militaire, considérant les limites actuelles des forces de défense, leurs faibles effectifs, leur absence dans les secteurs occidentaux du pays et la nécessité d’améliorer leur mobilité, le représentant a souhaité que l’on parvienne au plus vite à ajuster leurs moyens aux propositions émises par la MANUTO. Il est donc très important que le Conseil de sécurité débatte de toutes ces questions de façon à convenir de mécanismes de consensus, a-t-il souligné. Il faut continuer de tenir le Conseil au courant de toute amélioration ou dégradation de la situation. Enfin, tout en réitérant son inquiétude face à la situation, le représentant chilien a tenu à souligner le travail effectué par le Président de Timor-Leste et les progrès accomplis; il a demandé à M. Guéhenno d’indiquer les progrès enregistrés dans la mise en œuvre du Plan de développement.
M. FAYSSAL MEKDAD (République arabe syrienne) a souligné la responsabilité de la communauté internationale à préserver les succès enregistrés au Timor oriental au cours des trois dernières années. Il s’est inquiété ensuite du contenu du rapport du Secrétaire général sur la MANUTO et de l’évolution du contexte militaire et sécuritaire de Timor-Leste et a partagé les vues du Secrétaire général. Aussi, a-t-il jugé important de suivre les recommandations du Secrétaire général visant à reconsidérer la réduction des effectifs de la MANUTO ainsi que les propositions relatives à la police internationale. Il s’est félicité ensuite de l’évolution positive des relations entre Timor-Leste et l’Indonésie et a souhaité que le tracé de la frontière soit achevé durant la seconde moitié de 2003. La délégation syrienne insiste sur la nécessité pour la communauté internationale de contribuer de manière concrète au développement économique de Timor-Leste.
M. STEFAN TAFROV (Bulgarie) a estimé que la situation au Timor-Leste suscitait certaines inquiétudes. Les événements des derniers mois concernant la situation sécuritaire dans ce jeune pays ont tempéré l’optimisme, a-t-il relevé, et le Conseil de sécurité doit considérer cette situation avec prudence. Les incidents de Dili intervenus en décembre dernier sont de nature à compromettre le rôle de la MANUTO et les efforts de normalisation en cours. C’est pourquoi, il est important que ces incidents fassent l’objet d’une enquête et que leurs auteurs soient traduits en justice. Des mesures doivent être prises à l’encontre des ex-combattants, des groupes armés et dans le cadre de la lutte contre la criminalité, a-t-il poursuivi en appuyant les recommandations du Secrétaire général. Au plan bilatéral, a indiqué le représentant, la Bulgarie entend apporter son aide à ce jeune pays et envisage un programme d’aide dans le domaine de l’armement, l’armée de Timor-Leste ayant un urgent besoin d’équipement. Enfin, M. Tafrov a appelé la communauté des donateurs à poursuivre ses efforts en faveur de Timor-Leste.
M. MUNIR AKRAM (Pakistan), rappelant les propos enthousiastes du Secrétaire général des Nations Unies le jour de l’indépendance de Timor-Leste le 20 mai dernier, a salué le rôle clé des Nations Unies, et du Pakistan, dans le processus d’accession à l’indépendance de ce pays. Il s’est inquiété cependant de certaines promesses du Conseil de sécurité qui n’ont pas été respectées en matière d’accès à l’indépendance et a pris l’exemple de Jammu-et-Cachemire avant d’inviter les Nations Unies à faciliter un plébiscite sur cette question.
Revenant à la question de Timor-Leste, il a jugé que la situation sécuritaire ne permet pas d’envisager la réduction des effectifs militaires avant décembre 2003 et a proposé également la poursuite des ajustements au niveau des personnels civils et de police que propose le Secrétaire général. Il a encouragé la poursuite des efforts déployés par l’Indonésie et le Timor-Leste pour intensifier leur coopération dans les domaines économique, politique et sécuritaire. Il a enfin rappelé à la communauté internationale les engagements pris le 20 mai dernier à Dili par l’ensemble des personnalités présentes quant au soutien à apporter dans le cadre de la transition de Timor-Leste.
M. ADAM THOMPSON (Royaume-Uni) a estimé qu’il était juste que le Secrétariat lance une mise en garde lorsqu’il le juge nécessaire, mais qu’il n’est pas pour autant automatique de partager ses conclusions. Pour le représentant, il faut faire en sorte que les investissements consentis par la communauté internationale et les réalisations du peuple timorais ne soient pas sapés. Il a convenu avec le Secrétaire général que les incidents graves survenus au Timor-Leste et la façon dont ils avaient été traités montrent qu’il faut réaménager la MANUTO; aussi, a-t-il appuyé les mesures proposées par le Secrétaire général. Mais nous ne sommes toujours pas convaincus que les problèmes liés à la sécurité au Timor-Leste méritent que l’on maintienne les effectifs de la MANUTO au niveau actuel jusqu’en décembre 2003, a-t-il indiqué. De l’avis du représentant, le plan actuel de réduction des effectifs doit mainternir des troupes suffisantes pour faire face aux groupes armés qui portent atteinte à la sécurité. Néanmoins, a-t-il poursuivi, nous sommes prêts à un réaménagement moins draconien que celui proposé par le Secrétaire général.
Sur la proposition d’une nouvelle stratégie de police, le représentant a estimé que cette tâche devrait être une préoccupation prioritaire et il faut donc, a-t-il souligné, continuer d’étudier le réaménagement des forces de police suggérées par le Secrétaire général, sous réserve de quelques éclaircissements qui seront demandés ultérieurement. Enfin, le représentant a demandé au Secrétariat de lui fournir de nouvelles informations sur les incidences budgétaires qu’auraient les recommandations du Secrétaire général.
M. CARLOS PUJALTE (Mexique) a souhaité que la sécurité soit raffermie sur tout le territoire de Timor-Leste, jugeant nécessaire de renforcer les forces armées et la police ainsi que tous les organismes sécuritaires en mesure de faire face aux troubles civils. Il est important de renforcer la sécurité pour assurer un climat propice pour le développement du pays, a-t-il insisté, car le chômage et l’absence d’espoir et de formation facilitent le recrutement de jeunes gens pour des actes de violence. Le représentant a donc réaffirmé la nécessité de constituer une force de police locale, mais aussi de renforcer l’état de droit, de promouvoir la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de pacifier les relations avec tous les voisins notamment l’Indonésie; à cet égard, il a jugé prioritaire de parachever le tracé de la frontière. Il s’agit par ailleurs, pour le représentant, de savoir si ces actes de violence commis ont des motifs politiques, s’ils ont des liens entre eux, ou s’il s’agit plutôt d’actes désespérés de personnes qui cherchent à reconquérir une position et des privilèges perdus.
M. Pujalte a assuré que le Mexique examinera en temps voulu les suggestions émises pour renforcer les capacités de sécurité du nouvel Etat. Il a également exprimé sa préoccupation face aux menaces terroristes qui pèsent sur Timor-Leste évoquées par le rapport et sur les moyens à envisager pour protéger ce pays. Enfin, le représentant a estimé que la communauté internationale devait maintenir et tenir ses engagements en faveur de Timor-Leste. Il convient de définir les compétences entre la police et l’armée, mais il est aussi important que les Nations Unies réaffirment leur engagement en faveur du système judiciaire de Timor-Leste, a-t-il conclu.
M. RICHARD WILLIAMSON (Etats-Unis) a déclaré que les négociations sur l’accord relatif au partage des revenus entre l’Australie et Timor-Leste dans la mer de Timor est un pas important dans le développement économique. Il s’est félicité des efforts de Timor-Leste pour devenir un Etat à part entière de la communauté internationale grâce à l’aide internationale qui doit lui permettre de réussir sa transition, rappelant que les Etats-Unis ont déjà déployé 82 millions de dollars depuis l’indépendance. Il s’est félicité également de l’évolution des relations entre Timor-Leste et l’Indonésie avant de s’inquiéter de la situation en matière de sécurité qui a connu des revers au cours des trois derniers mois. Toutefois, ces incidents ne sont pas de grande envergure, a-t-il dit, ajoutant que la responsabilité de gérer ce genre d’incidents incombe à la police et non pas au personnel militaire de la MANUTO. Il a estimé que ce personnel ne peut prétendre avoir des prérogatives ni exiger des effectifs supplémentaires et a jugé que 2 000 agents de la composante militaire suffisent pour venir en aide à la police afin de neutraliser des groupes de bandits et contrer des cas isolés de violence et d’incidents.
Il n’y a aucune raison de croire que le maintien du niveau de troupes aura un impact sur la diminution du nombre d’incidents, a observé M. Williamson, demandant ce qui serait proposé si en décembre 2003, on constatait que ces incidents se poursuivent malgré le gel des effectifs. Il a recommandé un renforcement des capacités de la police nationale et a jugé qu’un redéploiement des troupes vers les zones les moins sûres pourrait être une solution d’ajustement. Il a demandé davantage d’informations concernant la restructuration de la police civile internationale et de la police timoraise avec des éléments chiffrés sur ce que coûteraient les mesures de renforcement de la police pour qu’elle soit mieux ciblée au regard de la situation.
M. GUNTER PLEUGER (Allemagne) s’est félicité des efforts effectués par le Chef de l’Etat timorais et par les Nations Unies, mais a remarqué qu’en dépit des réalisations des trois dernières années, beaucoup restait à faire dans les mois et années à venir. L’un des plus grands défis réside dans la construction de capacités propres dans le domaine de l’armée et de la police, a-t-il estimé, jugeant cette tâche urgente après les émeutes de Dili l’an dernier. Cependant, si la situation demeure inquiétante pour le Gouvernement et la communauté internationale, si la situation en matière de sécurité s’est détériorée depuis trois mois, ces incidents ont été d’une portée limitée, a jugé le représentant: les rumeurs de retour d’anciennes milices et groupes armés qui voudraient saper la stabilité de cette jeune nation n’ont pas été étayées par des preuves, a-t-il fait valoir.
Aussi, le représentant a-t-il rappelé, en ce qui concerne la proposition du Secrétaire général de maintenir le niveau actuel des contingents jusqu’à la fin 2003, que le mandat de la MANUTO donne à la police –et non aux contingents militaires- la principale responsabilité du maintien de la sécurité. Nous ne sommes donc pas convaincus par la proposition contenue dans le rapport du Secrétaire général, a souligné le représentant qui a souhaité qu’on s’en tienne aux arrangements adoptés. Il a demandé à M. Guéhenno s’il était possible de concentrer tous les efforts sur le renforcement de la capacité de la police de Timor-Leste. Dans ce contexte, nous sommes prêts à étudier toute proposition raisonnable visant à observer une pause dans le retrait du contingent de police, mais nous avons besoin d’en connaître le prix à payer, a-t-il expliqué. Il a également demandé si la Force de maintien de la paix pourrait être réorientée pour l’aider à mieux répondre aux besoins, plutôt que de la renforcer: serait-il possible de la redéployer vers des zones à hauts risques? Pour le représentant enfin, il n’est pas nécessaire d’abandonner si vite la voie adoptée avec la résolution 1410 (2002) et il convient d’explorer toutes les voies possibles avant de modifier et d’abandonner les choix précédents.
M. . ALEXANDER KONUZIN (Fédération de Russie) a exprimé sa préoccupation face à la recrudescence des incidents au Timor-Leste perpétrés par d’anciens miliciens reconvertis en groupes armés. Il a demandé qu’une mission d’enquête soit diligentée au plus vite qui aurait pour objectif d’identifier ces groupes avant que les composantes militaire et de police de la MANUTO ne prennent des mesures, en collaboration avec la police timoraise, pour neutraliser ces groupes armés. Il a ensuite recommandé un soutien accrû aux efforts de la nouvelle nation timoraise pour assurer son développement économique et social et a jugé positive l’évolution des relations entre l’Indonésie et Timor-Leste, souhaitant que la question des 28 000 réfugiés timorais se trouvant en Indonésie soit également abordée dans ce cadre. Il a ensuite apporté son soutien aux propositions de réajustements proposées par le Secrétaire général et a suggéré de prendre en compte la possibilité de disposer de réserves supplémentaires.
M. MARTIN BELINGA-EBOUTOU (Cameroun) a déclaré que son pays souscrit sans réserve aux recommandations contenues dans le rapport du Secrétaire général. Les mesures préconisées par le Secrétaire général, notamment celles qui visent à suspendre la réduction des effectifs de la composante militaire de la MANUTO jusqu’en décembre 2003 pour faciliter le redéploiement massif de ces forces à la frontière entre Timor-Leste et l’Indonésie, sont bienvenues. La mise en place d’une unité internationale de police anti-émeute est fort judicieuse, quand on se souvient des débordements liés aux évènements de décembre 2002, a dit M. Belinga-Eboutou. Les forces de police du Timor-Leste ayant encore besoin d’une assistance technique de haut niveau, le Cameroun soutient la proposition de porter le nombre des experts de haut niveau chargés de cette assistance, de 100 à 200. Le renforcement de la coopération en matière de sécurité entre l’Indonésie et du Timor-Leste étant un aspect important de la MANUTO, le Cameroun encourage ces pays à finaliser rapidement la démarcation de leur frontière commune. Nous appuyons le projet des autorités indonésiennes de déplacer les réfugiés timorais vers d’autres provinces éloignées de la frontière, et notre pays en appelle aux donateurs bilatéraux et multilatéraux afin qu’ils appuient sans délai cette initiative. Le Cameroun réaffirme son soutien à la MANUTO et au Représentant spécial du Secrétaire général, M. Kamalesh Sharma, ainsi qu’aux autorités de Timor-Leste, a déclaré le représentant.
M. MICHEL DUCLOS (France) a estimé que la situation demeure fragile, mais qu’il faut cerner la nature de la menace pour déterminer la réponse à y apporter. Sur les frontières extérieures, le nouvel Etat n’est pas véritablement menacé, a-t-il estimé: partant de ce constat, la meilleure réponse est sans doute de développer les capacités timoraises de maintien de l’ordre et sur ce plan, le représentant a apporté son soutien aux recommandations du Secrétaire général. De l’avis de sa délégation, il est prioritaire de développer les capacités de la police, insistant sur la nécessité pour le Secrétariat d’apporter des précisions sur les conditions de recrutement et de formation des policiers timorais.
A l’instar du Royaume-Uni, de l’Allemagne et des Etats-Unis, le représentant s’est interrogé sur la pertinence de la réduction progressive des effectifs militaires de la MANUTO d’ici à la fin de l’année. La vocation des Casques bleus n’est pas de maintenir l’ordre, a-t-il rappelé : ceci doit revenir aux policiers et de préférence à des policiers timorais. Le représentant a donc préconisé un redéploiement des effectifs des secteurs les plus calmes vers les plus sensibles, car de telles adaptations devraient permettre de préserver ce qui reste l’un des plus beaux succès des Nations Unies, a-t-il conclu.
M. ZHANG YISHAN (Chine) a jugé que les progrès enregistrés au Timor-Leste au cours des derniers mois était encourageants, saluant notamment les bonnes relations avec l’Indonésie. Il est toutefois inquiété de la gravité des incidents survenus au Timor-Leste ces derniers mois. La sécurité et la stabilité sont des éléments nécessaires à la consolidation de la paix et du développement à Timor-Leste, a-t-il dit, avant d’exhorter la communauté internationale à aider le pays à stabiliser la situation grâce à l’intervention de la MANUTO. La MANUTO joue un rôle positif, a-t-il déclaré, et si la situation l’exige, la Chine considère que l’on peut envisager une révision des programmes de réduction des effectifs ainsi que d’autres aménagements de nature à sécuriser le pays et, ce, sur la base des recommandations du Secrétaire général. La Chine appuie depuis longtemps les aspirations du peuple de Timor-Leste et nous continuerons d’œuvrer pour la sécurisation des investissements faits par la communauté internationale au Timor-Leste au cours des trois dernières années, a-t-il dit.
M. ISMAEL ABRAAO GASPAR MARTINS (Angola) s’est déclaré immensément confiant dans l’avenir du Timor-Leste malgré quelques nouvelles inquiétantes: personne ne pouvait s’attendre à ce que la situation ne connaisse aucun problème. La communauté internationale doit continuer d’aider Timor-Leste et sa population à consolider cette liberté et cette indépendance durement acquises. Le rapport du Secrétaire général sur la situation est préoccupant au plan sécuritaire, a-t-il reconnu, notamment l’incapacité de rétablir l’ordre et les activités des anciens miliciens. Les pays voisins assument une responsabilité spéciale pour mettre fin à ces activités, a-t-il estimé, appelant par ailleurs les Gouvernements du Timor-Leste et de l’Indonésie à garantir des relations de bon voisinage. Revenir sur les plans initiaux de la MANUTO doit se faire avec la plus grande prudence, a suggéré le représentant, tout en appuyant les recommandations formulées par le Secrétaire général. Sa délégation estime qu’elles permettent de donner suffisamment de temps au pays pour que ses organes chargés de la sécurité soient en mesure d’accomplir leurs tâches.
Le représentant s’est dit satisfait des progrès réalisés dans la création de la force de police et a appuyé la nécessité de renforcer celle-ci. La situation le long de la ligne de coordination tactique et l’influence qu’y ont les miliciens sont préoccupantes, a-t-il poursuivi, en appelant les Nations Unies à reloger les réfugiés qui s’y trouvent. En outre, le représentant a appelé l’Indonésie à faire tout ce qui est en son pouvoir pour réduire les activités hostiles à la frontière du Timor-Leste. En conclusion, il a appuyé la recommandation visant à reporter la réduction des effectifs de la MANUTO tant que les activités de déstabilisation n’auront pas été réduites.
Mme ANA MARIA MENENDEZ (Espagne) a regretté l’augmentation des actes de violence au cours des derniers mois au Timor-Leste et a jugé que cette situation accélérait la nécessité de prendre une série de mesures. A ce titre, elle a invité l’Indonésie et Timor-Leste à procéder, dans le cadre de leurs relations, à la signature d’un accord sur la démarcation des frontières avant le 30 juin 2003; à favoriser le retour des réfugiés se trouvant encore en Indonésie; à traduire en justice les responsables d’exactions. Pour ce qui est de la communauté internationale, a poursuivi la représentante, elle a la responsabilité d’assurer la sécurité à court terme en procédant à la révision des plans de réduction des effectifs et aux réajustements des activités de police pour permettre le renforcement des capacités. Elle a insisté sur la nécessité de ne pas entreprendre d’actions qui puissent fragiliser le processus de développement au Timor-Leste qui demeure fragile alors même que la communauté internationale a investi beaucoup dans ce pays au cours des dernières années.
M. MAMADY TRAORE (Guinée), évoquant les derniers incidents armés, a estimé que la toute première mesure à prendre est de mettre rapidement sur pied les capacités requises en matière de sécurité pour préserver et renforcer les acquis des trois dernières années. La résolution 1410 du Conseil a assigné à la MANUTO un mandat spécifique qui mérite plus que jamais d’être soutenu avec vigueur, en cette période où les menaces à la stabilité et à la sécurité du pays se précisent de plus en plus. Nous souscrivons entièrement aux recommandations du Secrétaire général, notamment pour ce qui est du plan simplifié de déploiement en deux phases de la composante militaire et le renforcement de la capacité opérationnelle de la police de la MANUTO. Cette démarche ne doit cependant pas exclure la révision des plans en fonction de l’amélioration ou de la détérioration sensible du climat général de sécurité. Il est également nécessaire que les dirigeants et la population adhèrent pleinement à ces mesures. Nous encourageons également les parties indonésienne et est-timoraise à poursuivre les négociations pour la conclusion d’un accord définitif sur le tracé de la frontière. Nous lançons également un appel aux donateurs pour qu’ils soutiennent davantage Timor-Leste dans les secteurs de la défense, de la police, de la justice et de la répression de la délinquance.
M. JOSE LUIS GUTIERREZ (Timor-Leste) a reconnu qu’il n’était pas surprenant que différents groupes de l’autre côté de la frontière continuent de provoquer des troubles et la violence au Timor-Leste: notre indépendance a été difficile et certains miliciens n’ont pas renoncé à leurs activités hostiles, a-t-il souligné. Mais il s’est dit convaincu que ces tentatives de déstabilisation n’aboutiront pas. Le représentant a rappelé que le renforcement des relations avec les pays voisins demeurait une priorité, soulignant que les relations avec l’Indonésie étaient déjà fraternelles et confiantes. Nous demeurons convaincus que la reconstruction et le renforcement de la stabilité nous permettront de continuer d’avoir de bonnes relations avec l’Indonésie.
Au plan interne, Timor-Leste continue de travailler pour renforcer le système judiciaire et pénitentiaire. Mais nous sommes confiants que la volonté démocratique du peuple nous permettra de continuer d’avancer, ainsi que grâce à l’aide de la communauté internationale. Le Secrétaire général continue d’évaluer le processus de réduction des effectifs de la MANUTO et nous pensons en particulier que le réaménagement des effectifs va permettre de mieux utiliser la capacité de la MANUTO à aider Timor-Leste à faire face aux menaces sérieuses qui se posent. Le Gouvernement travaille sérieusement à son objectif d’offrir un environnement sûr et stable favorable au développement du pays.
La contribution de la MANUTO est indispensable en attendant que les forces de sécurité du pays puissent s’épanouir. Les propositions du Secrétaire général apportent, selon le représentant, une réponse proportionnelle et équilibrée aux menaces qui visent à déstabiliser le pays. Pour sa part, le Premier Ministre a promis de trouver auprès des donateurs les moyens de renforcer et de recruter 500 personnes pour des forces de police qui ont besoin d’être mieux équipées et mieux formées. Il y a un risque que l’absence de capacités de la police et le retrait progressif des effectifs de la MANUTO ne portent les groupes armés à mettre ces capacités à l’épreuve. Il est donc indispensable de renforcer les capacités de Timor-Leste. Le représentant a donc demandé aux membres du Conseil de sécurité d’appuyer les recommandations du Secrétaire général.
M. GONÇALO SANTA CLARA GOMES (Portugal) s’est réjoui que le Secrétaire général considère que le mandat de la Mission d’appui des Nations Unies au Timor oriental (MANUTO) peut prendre fin dans les délais fixés. Cela confirme le fait que, malgré les imprévus, les efforts considérables déployés par la communauté internationale produisent les résultats escomptés. Pourtant, même s’il s’agit d’une réussite, la paix à Timor-Leste est encore fragile et malheureusement, nous enregistrons une augmentation importante de la fréquence et de l’ampleur d’incidents violents. Ce développement n’avait pas été prévu et les réductions proposées pour la Mission n’en tenaient pas compte. Tout en maintenant la date de passation de pouvoir au mois de mai 2004, le Secrétaire général propose maintenant une reconfiguration des composantes militaires de la Mission et l’adoption d’une approche graduelle révisée afin de préparer le pays à mieux faire face aux menaces existantes. Il propose également une amélioration de la capacité opérationnelle de la Mission et de la composante police. Nous soutenons ces recommandations qui visent à prévenir un retour en arrière. Nous notons que les ressources financières supplémentaires demandées sont modestes par rapport aux investissements importants auxquels nous avons consenti au cours des dernières années, a fait remarquer M. Santa Clara Gomes.
M. JOHN DAUTH (Australie) a déclaré que son pays est inquiet des récents incidents de sécurité qui se sont produits au Timor-Leste. L’Australie est convaincue que ces incidents sont mus par des motivations criminelles et par des facteurs économiques, sociaux, et de politique intérieure. Certains de ces incidents politiquement motivés se sont manifestés par l’usage de la violence en vue d’atteindre des objectifs politiques. Ces questions relèvent du maintien de l’ordre. Nous n’avons aucune évidence prouvant que ces actes ont été commandités de l’extérieur, bien que des indications montrent que certains des individus impliqués appartiennent à d’ex-milices basées au Timor occidental. Nous notons que certains hauts fonctionnaires du Gouvernement de Timor-Leste ont rejeté toute notion d’implication de forces extérieures dans ce qui s’est passé. L’Australie est, pour sa part, d’avis que la police de l’ONU (UNPOL) et le Service de police de Timor-Leste, et non pas la Force de maintien de la paix, devraient être les premiers outils de réponse aux atteintes à la sécurité intérieure.
C’est pourquoi, nous ne pensons pas que ces incidents méritent un gel du nombre des troupes de maintien de la paix à l’heure actuelle. Un gel des troupes pourrait en effet détourner l’attention de la question qui se pose à nous de la manière la plus urgente, et qui est celle du développement des capacités de police de Timor-Leste.
Nous soutenons, par conséquent, le gel temporaire du nombre des personnels de police de l’UNPOL et un amendement à la planification et au calendrier de la passation de l’autorité policière de maintien de l’ordre au Timor-Leste par l’ONU. Ceci permettrait de réorienter l’approche de l’UNPOL et de consacrer plus de ressources au renforcement des capacités du Service de police de Timor Leste. L’Australie considère aussi que le rapport final de la Mission conjointe d’évaluation de la police, publié la semaine dernière, fournit le cadre d’un effort renouvelé de l’ONU dans le développement des services de police. Nous sommes prêts à fournir une forte contribution à ces efforts, et nous encourageons les autres nations intéressées à faire de même. L’Australie ne veut pas que la communauté internationale envoie des signaux négatifs sur son engagement envers la sécurité de Timor-Leste. Nous soutenons donc une réduction plus lente de la Force de maintien de la paix de manière à ce que le soutien de la communauté internationale au Timor-Leste soit bien compris. Nous accueillerons positivement une nouvelle proposition de l’ONU comportant un ajustement moins sévère du retrait de la Force de paix tout en réitérant que cette approche ne peut réussir que si elle est accompagnée par un effort soutenu visant à remédier aux insuffisances des capacités de police de Timor-Leste.
M. DESRA PERCAYA (Indonésie) a d’abord voulu souligner les améliorations significatives des relations entre son pays et Timor-Leste depuis un an. Une réunion trilatérale entre ces deux pays et l’Australie a notamment permis de jeter les bases d’une coopération qui promet de renforcer les relations. En outre, l’ouverture d’une ambassade de Timor-Leste à Djakarta est un pas important qui permettra de favoriser les consultations entre les deux pays et l’Indonésie s’apprête à faire de même dans un avenir proche. Le représentant a exprimé son inquiétude face aux récents incidents des derniers mois qui affectent la sécurité du pays. Il est cependant essentiel, a-t-il estimé, d’éviter d’employer des termes qui ne reflètent pas correctement la situation sur le terrain ou de tirer des conclusions à partir de données incomplètes. Rappelant que le processus de réconciliation est toujours en cours, le représentant a regretté que le rapport du Secrétaire général fasse encore référence à des milices qui bénéficient de soutiens. Pour lui, c’est la MANUTO qu’il faut blâmer car elle agit en parfaite ignorance des efforts visant à protéger les populations contre des éléments criminels. Ces incidents regrettables ne doivent cependant pas entraver les relations entre Timor-Leste et ses voisins, a-t-il conclu.
M. KOICHI HARAGUCHI (Japon) a déclaré qu’il faut déployer des efforts soutenus en vue de permettre à la MANUTO de mener à bien son mandat, comme convenu, en juin 2004. Le Gouvernement du Japon est préoccupé par les incidents qui ont affecté la sécurité de Timor-Leste depuis les mois de novembre et de décembre derniers. Nous reconnaissons qu’il est nécessaire d’ajuster la configuration de la mission de maintien de la paix aux changements qui se font jour dans la situation de sécurité. Quant aux observations du Secrétaire général, le Japon partage ses évaluations, qui montrent que la police de Timor-Leste n’a pas encore la capacité de faire face aux troubles civils et aux incidents, commis par des groupes armés de la magnitude de ceux qui ont récemment été observés. Nous soutenons donc les propositions visant à renforcer la capacité opérationnelle de la police de la MANUTO et à augmenter l’assistance qui est fournie à la force de police de Timor-Leste.
Concernant la composante militaire de la MANUTO, les avis sont partagés. Si l’engagement international dans ce domaine devait être prolongé plus que nécessaire, ce serait non seulement une mesure qui serait indésirable pour la communauté internationale, mais qui serait aussi un obstacle à l’autosuffisance de Timor-Leste. Le Gouvernement du Japon espère que toute décision qui sera prise sur cette question tiendra compte de ces facteurs et sera acceptable par toutes les parties concernées. Nous soutenons les recommandations visant à ce que la MANUTO puisse promouvoir de meilleures relations avec le peuple de Timor-Leste et mette en place des capacités accrues dans le domaine de l’information. Dans ce contexte, nous notons que l’unité d’ingénierie civile japonaise a pu établir de bonnes relations avec les Est-Timorais à travers des programmes variés d’assistance civile, de formation pour la population locale, et de rencontres d’information. Nous insistons aussi, comme le Secrétaire général, sur le fait que la stabilité à long terme du pays dépendra d’un ferme engagement politique des dirigeants de Timor-Leste en faveur de l’état de droit et du renforcement de la bonne gouvernance.
M. JEAN-MARIE GUEHENNO, reprenant la parole en fin de débat pour répondre aux questions, a indiqué que le plan de reconstruction continue de fournir la feuille de route pour le développement de Timor-Leste et fait l’objet de réunions mensuelles; en dehors, des réunions spéciales se tiennent pour revoir la stratégie adoptée. La prochaine grande réunion avec les partenaires de développement se tiendra au mois de juin prochain, a-t-il annoncé en rappelant que depuis trois ans, plus de 500 millions de dollars ont été fournis par ces partenaires pour le développement de Timor-Leste. Mais ce pays demeure l’un des moins avancés et nous espérons que la mise en valeur des ressources minérales ouvrira une nouvelle ère. En attendant, les Etats Membres doivent poursuivre leur appui essentiel au développement de Timor-Leste. Une plus grande assistance des Etats Membres sera également essentielle pour renforcer les capacités de lutte contre le terrorisme et Timor-Leste a besoin de l’appui de la communauté internationale sur ce plan, a-t-il fait valoir.
Il est de notre devoir d’examiner tous les aspects de la situation y compris les mauvaises nouvelles: le Secrétaire général a donc décidé de présenter ce rapport au Conseil parce qu’il jugeait pertinent de lui présenter tous les faits. Il faut fermer une fenêtre de vulnérabilité qui s’est ouverte en raison des incidents survenus, a-t-il estimé. Il y a bel et bien un problème qui doit être traité par la police et c’est pourquoi, il faut renforcer ses capacités. Mais en même temps, les troupes de la MANUTO peuvent se trouver au milieu d’une jungle ou d’un camp abandonné dans lequel elles trouvent des armes abandonnées et il s’agit là d’incidents de nature militaire. Ces deux menaces pouvant se combiner, il faut donc prévoir le pire des scénarios, a exposé M. Guéhenno. S’agissant de la police, nous tiendrons prochainement une réunion sur le sujet et pourrons bientôt préciser nos intentions. Toutefois, a-t-il fait valoir, ce que nous faisons en ce moment est moins ambitieux que ce qui a été accompli dans les Balkans: la police timoraise a une formation de neuf mois seulement, pour laquelle la MANUTO reçoit un soutien bilatéral, notamment des Etats-Unis. Ceci n’a pas permis à ce stade de renforcer ses capacités au point que les Timorais pourront faire face à toutes les menaces. Il a sur ce point suggéré de comparer les chiffres proposés par le Secrétaire général dans son rapport à ce qui se fait ailleurs, indiquant qu’ils représentaient le sixième de la force que l’OTAN juge prudent de maintenir pour le Kosovo. Aussi, les plans et les aménagements reflètent-t-ils une démarche prudente face à cette situation. Pour le Secrétaire général adjoint, la nature de la menace et son ampleur exigeront un examen ultérieur. Il faut toutefois prévoir les cas les plus graves et procéder aux aménagements suggérés par les membres du Conseil de sécurité.
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