SIX PAYS PRENNENT LA PAROLE A LA CONFERENCE DU DESARMEMENT
Communiqué de presse CD/G/593 |
SIX PAYS PRENNENT LA PAROLE A LA CONFERENCE DU DESARMEMENT
Genève, 19 juin – Les représentants de la Pologne, de la Suisse, de la Roumanie, de la République de Corée, des Pays-Bas et de la France ont pris la parole ce matin à la Conférence du désarmement et ont notamment abordé les thèmes suivants: les six années écoulées sans que la Conférence parvienne à un accord sur un programme de travail; la lutte contre les transferts illicites d’armes légères; les garanties que des armes nucléaires ne seront pas employées contre des États qui n’en possèdent pas; la négociation éventuelle d’un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires; les résultats de la treizième Réunion plénière du Groupe des fournisseurs nucléaires; les efforts visant à empêcher des groupes terroristes d’acquérir des armes de destruction massive.
Les représentants de la Pologne et de la Roumanie ont appuyé la proposition de programme de travail de la Conférence présentée par les «cinq Ambassadeurs». La Pologne a appelé à l’ouverture de négociations relatives à un traité sur l’arrêt de la production de matières fissiles et la Roumanie a présenté ses activités touchant le contrôle des armes légères et déclaré qu’elle appuyait les efforts faits dans ce domaine à l’échelle internationale.
Le représentant de la Suisse a rendu compte de l’état des «garanties négatives de sécurité» en faveur des États non dotés d’armes nucléaires et a demandé instamment que des progrès soient faits pour aboutir à des garanties juridiquement contraignantes notamment par la voie de négociations à mener dans le cadre de la Conférence.
Le représentant de la République de Corée a indiqué que la treizième Réunion plénière du Groupe des fournisseurs nucléaires, tenue à Busan (République de Corée) du 19 au 23 mai, avait pour objet de contribuer à la prévention de la prolifération des armes nucléaires par le biais de contrôles des exportations de matières, d’équipements, de logiciels et de technologies ayant un rapport avec le domaine nucléaire sans entraver la coopération internationale sur les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire.
Le représentant des Pays-Bas, évoquant les efforts visant à empêcher des groupes terroristes d’acquérir des armes de destruction massive, a dit notamment que la méthode la plus efficace consistait à mieux appliquer les instruments en vigueur ainsi qu’à renforcer et mieux utiliser les institutions existantes qui participaient au contrôle des armes de destruction massive et des technologies, produits et matières ayant un rapport avec ces armes.
Le représentant de la France, sur le point de quitter Genève pour exercer de nouvelles fonctions, a dit que le désarmement, la non-prolifération et le contrôle des armements étaient des tâches nobles et que, pour examiner l’état actuel de la Conférence, il fallait se pencher sur son histoire et sur le balancement entre de longues périodes de préparation et d’attente et de courtes périodes de mise au point active de nouveaux traités ou de nouvelles conventions.
Arrivé au terme de son mandat de Président de la Conférence, M. Yaakov Levy, représentant d’Israël, a indiqué notamment qu’il avait poursuivi les efforts faits par ses prédécesseurs en tenant des consultations intensives pour tenter de sortir la conférence de l’impasse. Il a aussi dit que certaines mesures pourraient être bientôt arrêtées pour la coopération entre la société civile et les États membres de la Conférence.
La prochaine séance plénière de la Conférence se tiendra le mardi 26 juin à 10 heures.
Déclarations
M. KRZYSZTOF JAKUBOWSKI (Pologne) a dit que la Conférence arrivait au milieu d’une nouvelle année sans avoir beaucoup progressé vers un accord sur un programme de travail. De ce fait, elle mettait une fois de plus en danger sa crédibilité aux yeux du public. La Pologne appuyait la proposition de programme de travail de la Conférence présentée par les «cinq Ambassadeurs» et les efforts faits par la plupart des délégations pour appliquer celle-ci.
La Pologne a réaffirmé ce qu’elle disait depuis longtemps, à savoir qu’elle était prête à engager des négociations concernant un sujet sur lequel les conditions étaient maintenant pleinement réunies pour tenir des négociations, celui d’un traité sur l’arrêt de la production de matières fissiles à des fins militaires.
M. CHRISTIAN FAESSLER (Suisse) a dit que son pays estimait que les parties au Traité sur la non-prolifération nucléaire (TNP) qui ne possédaient pas d’armes nucléaires pouvaient juridiquement se prévaloir du droit de recevoir de la part des États dotés d’armes nucléaires des garanties ayant force obligatoire selon lesquelles de telles armes ne seraient pas utilisées contre elles. De telles garanties renforceraient la sécurité internationale et le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. La question des garanties de sécurité devait être abordée en priorité par les parties au TNP.
Lors de la session, tenue il y a quelques semaines, du Comité préparatoire de la Conférence d’examen du TNP, les pays de la Coalition pour un nouvel ordre du jour avaient présenté un document de travail qui contenait un projet très intéressant d’instrument international sur les garanties de sécurité dans le cadre du TNP. Il fallait espérer qu’à sa prochaine session, qui se tiendrait à New York en 2004, le Comité préparatoire serait en mesure de formuler des recommandations concrètes à ce sujet.
Jusqu’ici, les garanties de sécurité étaient généralement de réserves que les États dotés d’armes nucléaires avaient formulées et qui leur permettaient en certaines circonstances de recourir à de telles armes. Ceci voulait dire que ces États n’interdisaient pas complètement l’emploi de ces armes contre des États qui n’en possédaient pas. Il était aussi préoccupant de constater que des pays comme la Suisse, qui se trouvaient en dehors de zones exemptes d’armes nucléaires, ne pouvaient pas bénéficier de tels arrangements régionaux en matière de sécurité et étaient donc soumis à un traitement inégal. Troisièmement, la question délicate se posait des garanties de sécurité données par des États qui n’étaient pas parties au TNP mais dont on présumait qu’ils possédaient des armes nucléaires. La tenue de négociations sur des garanties ayant force obligatoire dans le cadre de la Conférence n’empêcherait nullement des négociations dans d’autres instances, dans le contexte du TNP par exemple. La Suisse souhaitait que les autres délégations lui fassent part des réactions que leur inspirait sa déclaration.
MME ANDREA FILIP (Roumanie) s’est félicitée de ce que la première semaine de juin ait été dans plus de 40 pays une semaine d’action pour le renforcement de la sensibilisation aux conséquences dangereuses de l’emploi d’armes légères. Des progrès avaient été réalisés jusqu’ici aux niveaux mondial, régional et national. Cependant, de nombreuses questions touchant ces armes restaient à examiner et devaient encore donner lieu à des accords. Les orientations nationales et les règles de conduite concernant le contrôle des armements, la non-prolifération et le désarmement constituaient un pilier important de la politique de la Roumanie en matière de sécurité et de défense. La Roumanie était partie à de nombreux accords sur la maîtrise des armements, notamment le document de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur les armes légères et était membre fondateur de l’Arrangement de Wassenaar sur la réglementation des exportations d’armes classiques et de matières et technologies à double usage.
L’année dernière, le Ministère de la défense nationale avait lancé le premier programme national pour la destruction des armes légères et munitions excédentaires. La Roumanie a remercié les Gouvernements des États-Unis, de la Norvège et du Royaume-Uni pour l’aide financière qu’ils avaient apportée pour l’exécution de ce programme. Le programme était presque achevé et aurait pour résultat la destruction de 195 510 armes légères et de 36 millions de pièces de munitions. De nouvelles mesures devaient être prises en attendant les évaluations internes du Ministère de la défense nationale et du Ministère de l’intérieur. En ce qui concerne la production, le Ministère de l’industrie, en coopération avec l’Association roumaine de normalisation, avait élaboré une norme nationale pour les armes légères fabriquées et commercialisées en Roumanie, conformément aux recommandations de l’OSCE.
La Roumanie était bien consciente du fait que les mesures nationales devaient être complétées par des efforts internationaux et était disposée à poursuivre avec tous ses partenaires des discussions bilatérales et multilatérales sur les armes légères. La Roumanie savait très bien que la question des armes légères n’était pas traitée directement à la Commission du désarmement, mais elle considérait que les débats actuels à ce sujet étaient le prolongement naturel, approfondi, de ceux qui avaient eu lieu quelques années auparavant à la Conférence à propos de la transparence dans le domaine des armements. La transparence renforçait la confiance et, comme la Conférence était dans l’impasse depuis six ans, le renforcement de la confiance était peut-être justement ce dont la Conférence avait le plus
besoin et pouvait être un moyen pour les pays de montrer leur attachement à cette instance. La Roumanie continuait d’appuyer l’initiative des «cinq Ambassadeurs» concernant le programme de travail de la Conférence du désarmement.
M. CHUNG EUI-YONG (République de Corée) a rendu compte de la treizième Réunion plénière du Groupe des fournisseurs nucléaires, tenue à Busan (République de Corée) du 19 au 23 mai 2003. Des délégations de 40 gouvernements et de la Commission européenne y ont participé. L’objectif du Groupe était de contribuer à la prévention de la prolifération des armes nucléaires par le biais de contrôles des exportations de matières, d’équipements, de logiciels et de technologies ayant un rapport avec le domaine nucléaire sans entraver la coopération internationale sur les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire. Les gouvernements participant à la Réunion ont promis une nouvelle fois d’intensifier la coopération internationale pour renforcer la prévention de la prolifération nucléaire.
Le Groupe a souligné la nécessité de veiller à ce que les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire ne soient pas entravées et a considéré que les problèmes rencontrés dans le cadre du régime mondial de non-prolifération exigeaient une réaction concertée. Il a été confirmé que l’inaction n’était pas une solution. Les pays membres ont décidé de poursuivre le dialogue avec les pays n’appartenant pas au Groupe pour empêcher des agents de prolifération d’acquérir des matières et des équipements pour fabriquer des armes nucléaires. Soulignant son attachement à la transparence dans ses activités, le Groupe a décidé de mettre à jour son site Web (www.nuclearsuppliersgroup.org). La prochaine Réunion plénière du Groupe se tiendra en Suède en mai 2004.
M. CHRIS C. SANDERS (Pays-Bas) a dit qu’il y avait consensus sur la nécessité d’empêcher les armes de destruction massive de tomber entre les mains de groupes terroristes. La Conférence tenait à mettre au point des mesures efficaces contre ce risque. Les Pays-Bas avaient présenté à l’Assemblée générale un projet de résolution sur l’établissement de législations nationales pour contrôler les transferts d’armes et de biens à double usage, lequel avait été adopté par consensus. Il existait divers moyens d’aborder la question des armes de destruction massive et du terrorisme. Certaines délégations souhaitaient commencer par revendiquer un rôle pour la Conférence dans ce domaine. Il était prématuré de tirer de quelconques conclusions sur ce que pourrait être ce rôle. Avant d’aborder les aspects institutionnels, il fallait débattre des aspects essentiels des méthodes qui pourraient être les meilleures et les plus efficaces pour empêcher les terroristes d’acquérir des armes de destruction massive. Il serait légitime que ce débat ait lieu à la Conférence, sans préjudice des résultats qui pourraient être obtenus.
M. Sanders a dit qu’une méthode pour intensifier les efforts de la Conférence dans le domaine des armes de destruction massive et du terrorisme pourrait consister à créer de nouveaux instruments multilatéraux. Les Pays-Bas étaient cependant favorables à une méthode plus pragmatique. Le manque d’instruments multilatéraux n’était pas un problème. Les instruments juridiques existants, avec peut-être quelques petites exceptions, suffisaient pour prendre les mesures requises. Les traités existaient: le TNP, la Convention sur la protection physique des matières nucléaires, le Protocole additionnel, la Convention sur les armes chimiques et la Convention sur les armes biologiques. La méthode la plus efficace pour lutter contre les armes de destruction massive et le terrorisme consistait à mieux appliquer les instruments existants et à renforcer et mieux utiliser les institutions existantes qui participaient au contrôle des armes de destruction massive et des technologies, produits et matières ayant un rapport avec ces armes.
M. HUBERT FORQUENOT DE LA FORTELLE (France), sur le point de quitter ses fonctions d’Ambassadeur et de Représentant permanent de la France auprès de la Conférence du désarmement, a déclaré qu’il considérait, aujourd’hui comme quatre ans plus tôt, que le désarmement, la non-prolifération et le contrôle des armements étaient des tâches nobles, primordiales par principe, et donc extraordinairement intéressantes. Vu la complexité et le poids des dossiers du désarmement, on ne pouvait pas trop espérer, à court terme, des succès spectaculaires. Il fallait se pencher sur l’histoire de la Conférence et sur le balancement entre de longues périodes de préparation et d’attente et de courtes périodes de mise au point active de nouveaux traités ou conventions. Pendant un certain nombre d’années, la Conférence n’avait rien établi à l’exception d’un programme de travail. Pendant les cinq ans durant lesquels l’orateur avait participé aux travaux de la Conférence, il y avait eu peu de réalisations concrètes. Il y avait eu cependant des débats et des dialogues d’un grand intérêt. La question du désarmement, qui était examinée à Genève et à New York, pouvait être considérée comme une sorte de constellation multiforme dont la Conférence occupait le centre, mais aussi, malheureusement, comme un astre qui risquait de s’éteindre.
M. de la Fortelle a dit que son pays était très conscient de ses responsabilités en tant que puissance nucléaire et connaissait ses droits et devoirs en tant que membre du Conseil de sécurité. La France avait participé très activement au processus de négociation concernant les armes biologiques. Elle avait aussi essayé d’être active sur d’autres aspects du désarmement. En ce qui concerne les armes nucléaires, ses positions de principe étaient fondées sur ses intérêts essentiels de sa sécurité nationale. Le représentant de la France était cependant convaincu qu’avec ses plus proches alliés la France trouverait un jour des terrains d’entente sur les questions en suspens.
M. KJETIL PAULSEN (Norvège) a déclaré que c’était pour son pays un honneur de recevoir un représentant aussi distingué que M. de la Fortelle comme nouvel Ambassadeur de la France. Il ne faisait aucun doute que les relations entre la Norvège et le nouvel Ambassadeur seraient fructueuses et efficaces.
M. YAAKOV LEVY (Israël), Président de la Conférence, a formulé quelques remarques au moment où il arrivait au terme de son mandat de Président. Il avait suivi les traces de ses prédécesseurs qui avaient fait le maximum pour faciliter un échange de vues serein et de haut niveau sur les moyens de sortir la Conférence de l’impasse. La possibilité de consacrer une ou plusieurs séances plénières informelles au thème général des travaux de la Conférence et de l’avenir du désarmement et du contrôle des armements avait été étudiée et la plupart des délégations avaient encouragé un tel débat. Cependant, plusieurs délégations avaient formulé des réserves quant à l’opportunité de passer à un mode de fonctionnement informel sans la présence de tous les membres et il avait donc été décidé de ne pas engager ce débat.
Il semblait pourtant évident que l’avenir du désarmement et du contrôle des armements et plus précisément certains sujets nouveaux tels que le terrorisme et les armes de destruction massive, ainsi que la question de l’exécution des obligations, continuaient à intéresser vivement les délégations et qu’il serait bon de trouver un moyen approprié de réfléchir à l’avenir sur ces questions. Des efforts constants avaient été faits pour donner suite aux travaux de l’Ambassadeur de l’Irlande dans le domaine de la participation de la société civile et des contributions de celle-ci aux travaux de la Conférence et certains progrès avaient été enregistrés à cet égard. M. Levy a formulé avec prudence l’espoir que l’on pourrait au cours des prochains mois, au plus tard dans la première partie de la session de 2004, déterminer les modes de coopération possibles entre la société civile et les membres de la Conférence.
C’était la première fois qu’Israël assumait la présidence de la Conférence du désarmement ou d’un quelconque organisme multilatéral. Certaines délégations avaient peut-être discerné divers niveaux de participation aux travaux de la Conférence pendant cette présidence. Cependant, Israël s’était efforcé de tenir compte des vœux de tous les États membres et d’assumer la présidence et de tenir ses consultations dans cet état d’esprit. M. Levy estimait qu’Israël avait clairement démontré qu’il pouvait présider la Conférence, comme n’importe quel autre État, sur la base du principe fondamental de l’égalité souveraine des États consacré dans la Charte des Nations Unies.
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