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AG/1447

CONSENSUS DE MONTERREY: POUR TOUT PROGRES, UNE ACTION DETERMINEE S’IMPOSE EN MATIERE D’APD, DE DETTE, DE COMMERCE ET D’IED

30/10/03
Communiqué de presse
AG/1447


CONSENSUS DE MONTERREY: POUR TOUT PROGRES, UNE ACTION DETERMINEE S’IMPOSE EN MATIERE D’APD, DE DETTE, DE COMMERCE ET D’IED


Invités par le Président de l’Assemblée générale, M. Julian R. Hunte, de Sainte-Lucie, les gouvernements, les organisations multilatérales, les fonds et programmes des Nations Unies, la société civile et le secteur privé ont eu l’occasion, cet après-midi, de commenter le rapport du Secrétaire général de l’ONU sur l’application et le suivi du Consensus de Monterrey*, adopté en 2002, à l’issue de la Conférence internationale sur le financement du développement. 


Ces «parties prenantes» de la mobilisation des ressources en vue d’une réalisation effective des Objectifs de développement de la Déclaration du Millénaire (ODM) ont pu dresser ensemble un bilan «mitigé» de la mise en œuvre des engagements concernant l’aide publique au développement (APD), l’allègement de la dette, la libéralisation du commerce, l’attraction des flux d’investissements étrangers directs (IED) ou encore la cohérence entre les systèmes monétaires, financiers et commerciaux en appui au développement.  Pour les intervenants, ces points constituent les questions fondamentales dont dépendent les progrès qui devraient être accomplis dans la mise en œuvre du Consensus de Monterrey.


Le Dialogue informel de cet après-midi a été placé dans la perspective du «Sommet du développement» que l’Assemblée générale devrait organiser en 2005 pour évaluer la mise en œuvre de la Déclaration du Millénaire, du Cycle de Doha, du Consensus de Monterrey et du Programme de mise en œuvre de Johannesburg.


Aide publique au développement (APD)


En 2002, l’APD a augmenté d’environ 5% pour atteindre 57 milliards de dollars.  Or, la réalisation des Objectifs de développement du Millénaire (ODM) nécessitera un apport additionnel de 50 milliards par an par au niveau qu’avait atteint l’APD au cours de la période 2000-2001.  Comme il est admis que l’application des mesures visant à renforcer l’efficacité de l’aide ne libérerait que 7 milliards de dollars, le reste devrait être fourni sous forme de flux additionnels. 


Cette dernière constatation a conduit le représentant du Guyana à «diagnostiquer» chez les pays développés une «allergie violente» à toute idée de versement de ressources additionnelles, et ce, malgré les perspectives qu’offrent les mesures ayant trait à la coopération financière en matière fiscale.  Ce point de vue a été contredit par plusieurs intervenants, dont le Représentant de la France, qui a apporté un ferme appui à la proposition du Royaume-Uni d’engager les


donateurs à verser à un mécanisme de financement international des fonds prélevés sur les budgets de l’aide, et à émettre sur les marchés de capitaux internationaux des obligations qui seraient garanties par ces engagements.  Dans ce contexte, le représentant français a rappelé la proposition de son pays d’imposer une taxe internationale sur les flux de capitaux spéculatifs, en défendant, en outre, l’idée d’un ajustement de l’APD à la fluctuation des prix.


Le représentant de la France a indiqué que l’APD fournie par son pays, qui devrait atteindre le taux de 0,7% de son PIB en 2012, ira principalement vers l’Afrique sub-saharienne et le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).  L’APD, a-t-il prévenu, doit rester au service exclusif du développement et ne pas être réaffectée vers d’autres activités comme la reconstruction de l’Iraq.  D’autres intervenants ont fait part de leur politique en matière d’APD.  Ainsi, la représentante de la Finlande a annoncé l’adoption, par son gouvernement, d‘un calendrier visant à atteindre l’objectif du versement de 0,7% du PIB à l’APD.  Elle a aussi attiré l’attention sur la préparation d’un Livre blanc visant à assurer la cohérence entre les différentes parties prenantes nationales à la mobilisation des ressources aux fins du développement. 


Avançant ses propres chiffres, le représentant du Japon a indiqué qu’en cinq ans, son pays avait versé une somme de l’ordre de 750 millions de dollars pour répondre aux besoins fondamentaux de l’Afrique, et qu’il entendait y ajouter, dans les prochaines années, un montant d’un milliard de dollars.  Le Japon, a-t-il souligné, a l’intention d’accorder une attention particulière à la sécurité alimentaire et de veiller à l’acheminement de l’aide vers «l’homme de la rue et non pas vers les riches et puissants». 


Ces propos sur l’efficacité de l’aide ont recueilli l’aval de la représentante de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE).  Elle a ainsi attiré l’attention sur le fait que la politique de son Organisation s’articule autour de quatre axes: l’évaluation des progrès et l’harmonisation des pratiques des bailleurs de fonds; le renforcement de la capacité des pays du Sud en matière d’achat; la diversification des sources de financement; et la promotion du dialogue, comme en atteste «le processus consultatif de responsabilités mutuelles» concernant le NEPAD


Dette extérieure


Après avoir diminué au cours des deux années précédentes, l’encours total de la dette extérieure des pays en développement et des pays à économie en transition a progressé d’environ 2,2%, soit de 52 milliards de dollars.  Or, depuis sa création en 1996, l’Initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE) n’a cessé d’essuyer des critiques qui font douter aujourd’hui de sa capacité à atteindre les objectifs fixés.  Ainsi, le représentant de Guyana a qualifié de «cauchemar» le parcours d’arrivée au point d’achèvement, stade auquel un pays bénéficie de la totalité de l’allègement possible au titre de l’Initiative.  Imputant cet état de choses à la longueur et à la lourdeur des procédures, il a, comme beaucoup d’autres après lui, appelé à une plus grande souplesse dans les procédures. 


Comprenant ces inquiétudes, le représentant de la France, «premier contributeur de l’Initiative avec 10 milliards d’euros d’annulation de la dette», a plaidé pour la création d’un régime plus souple à l’intention des pays à revenu intermédiaire.  Il a, à ce propos, rappelé la mise au point de «contrats

désendettement/développement».  Compte tenu de leur lourd endettement, a estimé le représentant de l’Espagne, il serait dangereux de faire une distinction trop nette entre les besoins des pays à revenu intermédiaire et ceux des pays pauvres.  Une autre catégorie, celle des pays émergents, a été identifiée par le représentant du Chili. 


Commerce


La part des exportations des pays en développement (PED) au commerce mondial a dépassé 30% en 2001, mais un grand nombre d’entre eux, notamment les pays les moins avancés (PMA) et les pays tributaires des produits de base, continuent d’être marginalisés dans le système commercial.  Beaucoup de pays en développement dépendent encore d’un seul ou de deux produits de base pour la moitié de leurs recettes à l’exportation, ce qui les rend particulièrement dépendants de la fluctuation des cours mondiaux de ces produits.  On estime en outre que l’élimination des subventions dans les pays développés pourrait entraîner une augmentation des revenus des pays en développement de 400 milliards de dollars d’ici à 2015. 


S’agissant de la question des barrières commerciales, le représentant de la Fédération de Russie a fait valoir que son pays perdait 2,5 milliards de dollars par an à cause notamment des mesures antidumping.  Les taxes imposées aux pays en développement, notamment les tarifs douaniers, sont largement supérieures aux taxes imposées aux autres pays a déploré le représentant de l’Iran.  L’accès au marché et l’application de règles commerciales équitables ont également été jugés essentiels par la délégation de l’Indonésie, qui a insisté sur la nécessité de reprendre les négociations de Cancùn à ce sujet.  Pour sa part, le représentant des Etats-Unis s’est dit en faveur de la réduction des tarifs, des quotas et des subventions, à condition que tous les acteurs, y compris les pays en développement, travaillent ensemble pour trouver des solutions.  Il a notamment rappelé que la plupart des taxes à l’exportation étaient imposées par d’autres pays en développement, et il les a appeler à baisser, eux aussi, leurs barrières commerciales.  C’est notamment ce qu’a fait valoir le représentant de la République de Corée. 


De son côté, le représentant de la France a déclaré que son pays accorderait un traitement préférentiel à l’Afrique sub-saharienne, sans attendre la reprise de Cancùn.  Il a également soumis plusieurs propositions pour soutenir le commerce en faveur des pays en développement, parmi lesquels l’encouragement de mécanismes de couverture financière privée contre le risque de volatilité des prix, le financement des exportations à prêts garantis, ainsi qu’un moratoire sur les facteurs déstabilisateurs pour les produits essentiels comme le coton. 


Insistant par ailleurs sur le lien étroit entre le développement et les pratiques commerciales, le représentant de la Finlande a fait valoir que, pour la première fois au monde, le gouvernement de son pays avait crée un ministère unique, chargé à la fois du développement et du commerce.  Plusieurs intervenants ont également soulevé la question de la corruption, jugeant essentiel de la confronter pour que le commerce profite réellement aux pays en développement.  Des intervenants du secteur privé ont appelé leurs homologues à ne plus se considérer comme des concurrents et à améliorer leur collaboration, en Afrique notamment.  Certains domaines n’ont plus besoin de financements extérieurs pour fonctionner et c’est donc à nous, secteur privé, de reprendre le flambeau dans ces domaines, a-t-il été souligné.


Investissements étrangers directs (IED)


Si les IED demeurent l’unique source positive nette de financement étranger privé vers les pays en développement, ils ont cependant chuté brutalement, passant de 145 milliards de dollars en 2001 à 110 milliards de dollars en 2002.  En outre, les IED se concentrent principalement dans moins de 12 pays dans le monde, et la plupart des économies en développement, notamment celles des PMA ne reçoivent donc pas une part adéquate de ces flux.


Il a été souligné, notamment par le représentant de la Barbade, que les petits pays insulaires en développement voyaient baisser leurs IED alors même qu’ils étaient parmi les plus vulnérables.  Face au constat de la chute générale des IED, plusieurs délégations, dont le représentant du Kenya, ont fait valoir que leurs pays avaient élaboré une politique d’exonération fiscale destinée à favoriser les IED.  Dans le même ordre d’idées, le représentant de la Thaïlande a souligné que son pays avait mis en place un système qui permettait de canaliser les IED vers les couches les plus défavorisées de la population ainsi que vers les agriculteurs.  Prenant l’exemple de son propre pays, le représentant de la Suisse a suggéré de créer des réseaux d’investisseurs de manière à renforcer les IED, et a jugé essentiel d’améliorer la qualité de l’information sur les situations des pays en développement, afin que la perception du «risque pays» soit infléchie au profit des investisseurs.


Le représentant des Etats-Unis a quant à lui tenu à souligner que les IED augmentaient lorsque les droits de propriété intellectuelle étaient respectés, lorsque l’on disposait de bonnes ressources humaines et institutionnelles et lorsque l’on prenait en compte les droits de l’homme, en prenant à cet égard l’exemple du Mozambique, qui avait multiplié par six le montant des IED qu’il reçoit depuis 1994.  Il a également rappelé que les envois de fonds des immigrants constituaient une part essentielle des IED, soulignant que, chaque année, 25 à 30 milliards de dollars envoyés dans les PED provenaient des travailleurs vivant aux Etats-Unis.  Plusieurs intervenants, dont le représentant du Chili, ont estimé essentiel de renforcer la bonne gouvernance pour encourager les flux financiers privés.  On ne peut assurer les IED si l’on ne parvient pas à consolider les systèmes démocratiques, a renchéri le représentant de l’Espagne, qui a estimé que même si des initiatives comme celles du NEPAD incitaient à un certain optimisme en la matière, il faudrait que la communauté internationale fasse autant d’efforts sur cette question qu’elle le fait sur d’autres objectifs du Millénaire.


De même, une représentante de la société civile en Ouganda a jugé essentiel d’avoir des systèmes économiques et de sécurité sociale viables pour que les investisseurs nationaux et étrangers jouent leur rôle, et que parviennent dans les pays en développement de plus gros investissements susceptibles d’entraîner dans leur sillage le développement des PME, qui sont l’«ossature» des économies nationales.  Les flux d’investissement privés ne parviennent que dans le cadre de règles commerciales cohérentes, ont estimé plusieurs intervenants, dont le représentant de l’Union européenne, qui a déploré que beaucoup de pays en développement n’aient pas voulu élaborer des règles commerciales cohérentes destinées à favoriser les IED à l’occasion des négociations de l’OMC.


Cohérence des systèmes monétaires, financiers, commerciaux en appui au développement


Au niveau national, de nombreux pays ont fait part des efforts déployés concernant la mise en place d’un processus de prise de décisions démocratique et participatif; de politiques macroéconomiques saines et cohérentes; d’infrastructures économiques et sociales renforcées, et d’un système financier fiable.  A titre d’illustration, le représentant de l’Argentine, dont le pays sort d’une crise «due à une mauvaise gestion des affaires publiques», a indiqué que les estimations placent désormais à 7% le taux de croissance de l’Argentine, pour les prochaines années.  Nous avons tenu nos engagements, qu’en est t-il des pays développés? s’est-il alors demandé avant d’adhérer à la proposition de créer un Groupe d’experts sur les questions de la dette souveraine et de leur lien avec le développement.  


Comme d’autres, le représentant argentin a appuyé la mise en place d’un Conseil de sécurité économique et sociale, capable de corriger les problèmes de gouvernance mondiale.  Néanmoins la majorité des intervenants s’est prononcée pour le renforcement du Conseil économique et social de l’ONU.  A ce propos, certains ont jugé crucial que l’OMC soit plus intégrée aux efforts de coordination.  En la matière, un représentant du secteur privé a d’ailleurs suggéré à l’ONU de se doter d’un groupe d’experts indépendants.


Certaines propositions du Secrétaire général ont reçu le ferme appui des intervenants, notamment celles relatives à la création de groupes de travail sur les IED, la faillite et la viabilité de la dette, et les produits de base.  Quant à la situation particulière de l’Afrique, le représentant du Maroc au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a plaidé pour la mise sur pied d’une Commission sur le NEPAD.  Concernant la mobilisation de ressources additionnelles, le représentant de l’Organisation internationale du travail (OIT) a demandé une étude sur le potentiel de la coopération internationale en matière fiscale qui pourrait être menée par le Groupe de travail transformé en Comité permanent.  Les autres propositions ont concerné la création d’une Facilité de financement internationale ou le recours aux droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI.


*Le rapport du Secrétaire général est paru sous la cote A/58/216


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