LES PRODUITS DE BASE ONT UN LIEN DIRECT AVEC LES NEGOCIATIONS COMMERCIALES ET LE REGLEMENT DE LA DETTE, ESTIME LE GROUPE D’EXPERTS
Communiqué de presse AG/1435 |
LES PRODUITS DE BASE ONT UN LIEN DIRECT AVEC LES NEGOCIATIONS COMMERCIALES ET LE REGLEMENT DE LA DETTE, ESTIME LE GROUPE D’EXPERTS
Il propose l’introduction de la question dans l’agenda de l’OMC et la création d’un Fonds pour la diversification de la production dans les pays en développement
L’impact de la fluctuation du prix des produits de base sur la capacité des pays en développement à financer leur développement économique et social a été cet après-midi le sujet d’une table ronde au cours de laquelle les experts du «Groupe de personnalités éminentes sur la question des produits de base» ont présenté le rapport contenant leurs recommandations.
Ouvrant le débat, le Président de l'Assemblée générale, M. Julian R. Hunte, a rappelé que les économies de plus de 50 Etats dépendaient essentiellement des produits de base, qui représentent plus de 50% du total de leurs exportations. Il a lié la question des produits de base à celle du commerce, mais aussi à celle de la dette, et d’une manière plus générale, à celle de la lutte contre la pauvreté.
M. Iftekhar Chowdhury, Président de la Deuxième Commission, et le Secrétaire général de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), M. Rubens Ricupero, ont placé cette table ronde dans le contexte du prochain Dialogue de haut niveau sur le financement du développement, prévu les 29 et 30 octobre au Siège, et dans celui de la XIème CNUCED qui doit se tenir à Sao Paulo, au Brésil, en juin 2004.
Les experts suivants sont intervenus au nom du Groupe de personnalités éminentes: M. Martin Khor, Directeur du Secrétariat international du réseau du Tiers monde; M. Irfanul Haque, Professeur d’économie à l’Université de Cambridge; M. Jorio Dauster, ancien Président du Groupe des pays producteurs de l’Organisation internationale du café (1979 à 1985); M. Roman Grynberg, représentant de la Division des affaires économiques du Secrétariat du Commonwealth; M. Mark Ritchie, ancien Consultant de la CNUCED.
Appels urgents à une solution «fondée sur un ferme engagement de trouver les idées novatrices à appliquer avec audace»
Pour illustrer les conséquences des fluctuations des prix des produits de base, M. Martin Khor a attiré l’attention sur un rapport des Nations Unies qui, dès 1991 indiquait que ce phénomène entraînait une perte annuelle de 16% du PNB des pays en développement. Compte tenu de la détérioration continue des termes de l’échange, les pays en développement ont tout à gagner d’un système multilatéral susceptible de redresser cette situation, qui découle des fluctuations des prix
des produits de base et des autres distorsions commerciales, a souligné le Président de la Deuxième Commission, M. Anwarul Chowdhury. Après l’échec de la cinquième Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancùn, a dit le Secrétaire général de la Conférence des Nations Unies sur le
commerce et le développement (CNUCED), M. Rubens Ricupero, la communauté internationale doit se montrer disposée à débattre de la question des produits de base, si elle veut éviter une radicalisation de la position des pays en développement et un accroissement de leur scepticisme quant à la volonté politique des pays du Nord de mettre en œuvre le Cycle du développement adopté en 2001 lors de la quatrième Conférence ministérielle de l’OMC à Doha.
M. Ricupero est allé plus loin et a imputé «l’échec» de l’Initiative pour les pays pauvres très endettés (HIPC) à la crise des prix des produits de base. En raison de l’effondrement des prix de certains de ces produits, a-t-il expliqué, les pays qui ont atteint le point d’achèvement de l’Initiative HIPC ne parviennent toujours pas à s’extirper du cercle vicieux de l’endettement. Au cours des 25 dernières années, a-t-il encore fait remarquer, les prix des produits de base ont connu une fluctuation annuelle négative de 10%. L’incapacité de certains pays à diversifier leur production et à se positionner dans les segments les plus rentables des produits de base a aggravé le problème. Malgré ces problèmes, la communauté internationale poursuit sa «conspiration du silence», a dénoncé le Secrétaire général de la CNUCED en paraphrasant le Président de la France, M. Jacques Chirac. Il a conclu son intervention en rappelant la prochaine session de la CNUCED à Sao Paolo en juin 2004 (CNUCED XI), et en résumant les conclusions du Groupe de personnalités éminentes sur la question des produits de base en ces termes: «il faut une solution fondée sur le ferme engagement politique de trouver des idées novatrices à appliquer avec audace».
Recommandations du Groupe de personnalités éminentes
M. Martin Khor, économiste et Directeur du Secrétariat international du Réseau du Tiers monde, a estimé que les produits de base constituaient le principal problème commercial pour la majorité des pays en développement. Il a indiqué que la baisse du prix du café, de 70% en 20 ans, a entraîné l’appauvrissement de millions de producteurs. Il a précisé que le Groupe d’experts essayait de montrer comment l’économie internationale est fautive, parce qu’elle ne peut assurer des prix justes et rémunérateurs aux pays en développement. En 1991, un rapport des Nations Unies a montré que 16% du PNB de ces pays était chaque année perdus à cause de la chute des produits de base. En l’absence de coopération entre producteurs et consommateurs, il est indispensable que les producteurs se concertent et s’alignent pour s’adapter à la demande et éviter la chute des cours. A titre d’illustration, il a cité l’exemple des accords conclus entre la Malaisie, l’Indonésie et la Thaïlande, qui se sont entendus pour limiter la production de caoutchouc afin d’entraîner une hausse des prix.
A son tour, M. Irfan Ul Haque, Professeur à l’Université de Cambridge et créateur du réseau d’experts-conseils «Voix du Sud», a estimé que la crise des prix de produits de base est née de la capacité qu’ont eu les pays du Nord de réduire leur dépendance envers ces produits, et de l’émergence d’une nouvelle idéologie marquée par un fondamentalisme libéral prêchant l’économie du marché. La prééminence de la thèse selon laquelle les marchés se régulent eux-mêmes pour le bien-être de tous leurs acteurs a fait que les appels au contrôle des prix des produits de base sont restés vains. Ainsi, a affirmé l’orateur, les cibles de la libéralisation économique ont été les accords internationaux et les conseils relatifs aux produits de base qui, s’ils n’étaient pas efficaces, fournissaient au moins un certain appui aux politiques mises en place. De cette situation, a-t-il conclu, est née non pas une situation de libre-échange mais bien un monopole des multinationales. Nous sommes dans une situation où ni le producteur local ni le consommateur ne trouvent leur compte. Le Professeur d’économie a donc prôné une augmentation des ressources pour donner à la CNUCED, à la Banque mondiale, et au FMI les moyens de prodiguer des conseils pertinents aux pays en développement dans le domaine des politiques liées aux produits de base.
M. Jorio Dauser, ancien Président du Groupe de producteurs de l’Organisation internationale du café (1979 à 1985), a souligné l’exemple d’accords conclus dans les années 60 en matière de production de café et du sucre qui ont permis le maintien des prix. Cet accord avait été possible, a-t-il dit, à cause d’une décision politique prise par le Président des Etats-Unis, John F. Kennedy. M. Dauser a suggéré la création d’une taxe à l’exportation du café qui financerait la diversification des activités des producteurs actuels de café.
Enfin, le Représentant de la Division des affaires économiques du Secrétariat du Commonwealth, M. Roman Grynberg, a élaboré sur la recommandation du Groupe visant à créer un Fonds pour la diversification de la production dans les pays en développement. Le Fonds servirait à financer le renforcement de la capacité du secteur privé, ainsi que les ressources humaines et institutionnelles; la mise en place d’associations de producteurs; le développement des infrastructures clefs, et la stimulation des investissements. Ecartant l’idée d’alimenter le Fonds par une partie de l’aide publique au développement (APD), compte tenu de son déclin continu, le représentant s’est plutôt prononcé pour une formule semblable à l’objectif fixé aux pays donateurs d’octroyer 0,7% de leur PIB à l’APD. La diversification, a-t-il prévenu, sera une entreprise vaine si elle ne s’accompagne pas d’un environnement commercial favorable, aux niveaux national et international.
De son coté, M. Mark Ritchie, Ancien Consultant de la CNUCED, a insisté sur la nécessité de mettre en œuvre des règles de lutte contre le dumping. En ce qui concerne le problème de la dégradation des termes de l’échange, il a proposé que les prix ne soient pas chiffrés en une seule monnaie. En outre, il a estimé indispensable d’agir de manière solidaire et de concevoir un moyen de trouver un équilibre entre l’offre et la demande afin d’éviter la chute des prix.
Commentaires des délégations
Prenant la parole en premier, le Représentant de la Commission européennea mis l’accent sur la responsabilité des gouvernements qui, a-t-il convenu, doivent être appuyés par la communauté internationale. Il a aussi reconnu la responsabilité sociale des multinationales, en saluant le Pacte mondial de l’ONU. Défendant la reprise des négociations de l’OMC, il a fait état des mesures prises par l’Union européenne dans le domaine agricole. A son tour, la représentante des Etats-Unis a réitéré l’appui de son pays à tout effort visant à éliminer les subventions et les mesures de nature à fausser les mécanismes d’exportation et d’importation des produits agricoles. Les représentants de l’Ethiopie et du Kenya ont appuyé les recommandations faites par le Groupe d’éminentes personnalités. La représentante du Kenya a attiré l’attention de la Commission sur l’initiative importante prise par son pays en matière de produits de base.
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