PARTENARIAT ET COORDINATION IDENTIFIES COMME LES MOTS D’ORDRE D’UNE RELATION FRUCTUEUSE ENTRE SOCIETE CIVILE, ONU ET ETATS MEMBRES DANS LA PREVENTION DES CONFLITS
Communiqué de presse AG/1401 |
Réunion publique organisée par le Président
de l’Assemblée générale sur le rôle
de la société civile dans la prévention des conflits
PARTENARIAT ET COORDINATION IDENTIFIES COMME LES MOTS D’ORDRE D’UNE RELATION FRUCTUEUSE ENTRE SOCIETE CIVILE, ONU ET ETATS MEMBRES DANS LA PREVENTION DES CONFLITS
L’Assemblée générale de l’ONU ayant adopté, le 3 juillet dernier, une résolution relative à la prévention des conflits armés, son Président, Jan Kavan, a invité, ce matin, des « spécialistes de la paix » à réfléchir, aux côtés des Etats Membres, au rôle de la société civile dans ce domaine. Le Président de l’Assemblée a, en effet, rappelé que par cette résolution, les Etats Membres avaient reconnu le rôle d’appui important de la société civile, et lançant quelques pistes de réflexion, il a soulevé la question du lien entre les efforts de la société civile, de l’ONU et des Etats Membres. Cette question sera au centre de la Conférence internationale prévue pour 2005.
A l’unanimité, les intervenants ont reconnu que la complexité des conflits actuels est telle qu’aucune entité ne peut seule les prévenir ou les résoudre. La nécessité d’impliquer les différents acteurs étant acquise, le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, Danilo Turk, et le Sous Secrétaire général aux affaires humanitaires, Jan Engeland, ont jaugé le niveau de coopération entre l’ONU et la société civile. Cette collaboration a d’ailleurs été jugée insuffisante par la Présidente de la Fondation pour la tolérance impliquée en Asie centrale. Pour leur part, Raya Kadyrova et Andres Serbin de la « Coordinadora Regional de Investigaciones Economicas y Sociales (CRIES) » ont été parmi ceux qui ont le plus insisté sur une véritable coopération avec l’ONU mais surtout avec les structures étatiques afin « de s’accorder sur le nœud du problème et sur la manière de le résoudre ».
La question du type et de la nature des ONG à impliquer dans une situation donnée a été particulièrement commentée par le Directeur exécutif du Centre européen pour la prévention des conflits, Paul van Tongeren, et la Présidente de « Collaborative for Development Action », Mary B. Anderson. Les ONG concernées, ont-ils argué, appuyés en cela par Emmanuel Bombande du « West African Network for Peace-Building (WANEP) », doivent être celles qui sont à même de mieux comprendre le contexte politique, social et culturel d’un conflit et d’y adapter leur action.
Les déclarations liminaires ont été suivies d’une discussion avec les Etats Membres sur des questions telles que la création de réseaux régionaux de groupes de la société civile; leur rôle dans les conflits intra-Etats et inter-Etats et leur coopération avec le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale. Par ailleurs, les questions du traitement à réserver aux groupes impliqués dans les conflits armés; du respect de la souveraineté nationale dans l’aide à apporter à la société civile; ou encore de l’impact de l’assistance humanitaire sur la pérennisation des conflits ont également été abordées. En prévision de la Conférence de 2005, les intervenants ont convenu de la nécessité absolue de faire du partenariat et de la coordination les mots d’ordre d’une relation fructueuse entre la société civile, l’ONU et les Etats Membres.
DEBAT INTERACTIFSUR LE ROLE DE LA SOCIETECIVILE DANS LA PREVENTION DES CONFLITS
M. IAN KAVAN, Président de l’Assemblée générale, a souligné la référence que constitue la résolution adoptée par l’Assemblée générale sur la prévention des conflits armés, résolution qui, en consacrant le rôle d’appui de la société civile dans la prévention des conflits armés, invite cette dernière à contribuer à la mise en place d’un environnement de paix. Il a souhaité que cette réunion publique permette aux Etats Membres de se concentrer sur le rôle que peut jouer la société civile en matière de prévention des conflits et la façon de mieux associer la contribution de cette dernière aux efforts des Nations Unies, pour mieux comprendre nos possibilités et mieux concrétiser nos travaux futurs.
M. Kavan a invité les délégations à se concentrer sur les questions suivantes: Quels sont résultats et expériences de la société civile qui peuvent nous servir? La société civile doit-elle modifier ses activités? Si oui, comment doit-elle s’adapter pour nous aider à atteindre les objectifs des Nations Unies tels qu’énoncés dans la résolution pertinente de l’Assemblée générale? Comment les Etats Membres peuvent-ils répondre aux attentes du Secrétaire général, notamment dans le contexte de la conférence de 2005? Même s’il peut y avoir des différences de point de vue, a-t-il ajouté, ces débats devraient faciliter la formulation de recommandations efficaces en matière de prévention des conflits.
M. DANILO TURK, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, a d’abord reconnu le caractère difficile et délicat de tout débat sur la prévention des conflits armés. Il a ensuite rappelé que le rapport du Secrétaire général de 2001 avait réaffirmé le principe de responsabilité première des Etats Membres des Nations Unies en la matière, tout en mettant l’accent sur le rôle des Nations Unies et de leurs partenaires. En fait, a-t-il dit, l’historique de la question montre que la communauté internationale a mis en place toute une série de mécanismes, de normes et d’activités qui ont permis de concrétiser les idées en matière de prévention des conflits. Il ne s’agit donc pas d’un nouveau sujet pour les Nations Unies et la communauté internationale. Ce qui est nouveau, en revanche, c’est la réflexion entamée sur le rôle de la société civile.
Aujourd’hui, a expliqué le Sous-Secrétaire général, l’ONU dispose d’une certaine expérience en matière de coopération avec les ONG, les universités et les fondations. Il a rappelé la recommandation du Secrétaire général visant l’organisation d’une conférence internationale des ONG pour définir la meilleure manière dont celles-ci pourraient travailler entre elles et avec les Nations Unies. Au niveau du Secrétariat, a-t-il affirmé, cette initiative est prise au sérieux et le nom même du projet « Partenariat mondial » suscite l’intérêt. Le partenariat est, en effet, le maître mot si l’on veut s’assurer le succès. Toutefois, partenariat ne veut pas dire disparition des divergences de vues et cette réunion doit servir à faire des critiques et à défendre de nouvelles idées, a conclu le Sous-Secrétaire général.
M. JAN EGELAND, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, a déclaré qu’aucun processus de paix ne peut aboutir sans la contribution concertée des trois échelons que constituent les gouvernements, les ONG et les organisations intergouvernementale. Il a ensuite exposé les leçons tirées d’une dizaine de processus de paix auxquels il a participé, et notamment celles tirées des échecs.
Tout d’abord, a-t-il insisté, il ne peut y avoir de paix sans participation des parties et de la population, car la paix ne peut être imposée de l’extérieur; d’où le rôle déterminant de la société civile. Mais, inversement, aucune paix totale ne peut être obtenue avec la seule participation des parties concernées, car il faut une participation et un soutien des acteurs internationaux, a-t-il prévenu.
En outre, il a invité à ne jamais sous-estimer les intérêts réels des parties concernés, car certains groupes ont parfois intérêt à ce que le conflit se prolonge, pour exploiter des diamants par exemple, ou pour poursuivre un trafic de drogue; il faut également instaurer dès que possible des mesures de confiance comme la libération des prisonniers, la libre circulation des réfugiés, la vaccination des enfants afin de susciter la confiance.
Par ailleurs, M. Egeland a souligné la nécessité de voir les alliances qui travaillent pour la paix œuvrer de manière très hétérogène en associant à leurs efforts les ONG et le secteur économique. Il a également insisté sur la nécessité de voir les participants au processus de paix bien définir leur contribution, qu’ils soient facilitateurs, médiateurs ou techniciens afin qu’ils soient bien identifiés. Enfin, il a souligné le besoin de prévoir soigneusement la manière de traiter les parties au conflit en général, car des efforts de paix mal conçus risquent de donner une légitimité aux groupes criminels.
M. PAUL VAN TONGEREN, Directeur exécutif du Centre européen pour la prévention des conflits, a expliqué que la première fonction de son Centre, créé il y a six ans, est d’établir un réseau européen pour identifier les différents acteurs de la prévention des conflits. Aujourd’hui, une centaine de membres existent en Europe qui se réunissent régulièrement. Le Centre, a-t-il aussi indiqué, a comme autre fonction de faciliter les divers efforts de prévention des conflits. Un des programmes mis en place consiste d’ailleurs à décrire le cadre et la dynamique des conflits dans le monde. Il est extrêmement important, a insisté le Directeur exécutif, de donner aux protagonistes locaux une voix. Le Centre organise enfin des conférences internationales notamment sur les enseignements tirés de l’expérience.
Le Directeur exécutif a ensuite commenté le rapport du Secrétaire général de 2001 en soulignant qu’il a d’emblée adhéré à l’idée d’une conférence internationale pour, a-t-il précisé, rendre plus visible le rôle de la société civile. Pourquoi est-il important de faire participer les femmes, les jeunes, les groupes religieux ou la presse dès la mise en place d’un processus de paix, telle doit être la question clé de la conférence, a estimé le Directeur exécutif.
Le Directeur exécutif a par ailleurs expliqué que son Centre venait de terminer une phase préparatoire consistant à mener des consultations avec les ONG pour identifier celles qui sont les plus adaptées au processus de prévention des conflits. La phase suivante constitura à organiser des conférences régionales. Dans ce cadre, il est important qu’au niveau régional, les enseignements tirés de l’expérience soient dûment étudiés pour permettre la mise en place de programmes régionaux qui seront à leur tour la base d’un programme international. Il est apparu, a reconnu le Directeur exécutif, que dans plusieurs régions, les réseaux ne sont pas assez forts. Il a donc espéré que ce processus permettra de les renforcer avec l’aide des gouvernements, des organisations régionales et de l’ONU.
M. ANDRES SERBIN, Coordonnateur régional de Investigaciones Economicas y Sociales (CRIES), a présenté la contribution de la société civile dans la prévention des conflits en Amérique latine et dans les Caraïbes. Il a expliqué que son ONG s’est donnée un rôle d’enquête économique sur la base régionale en prônant l’articulation de la société civile avec les programmes de recherches visant la mise en place de politiques régionales. Nous collaborons avec différents gouvernements, notamment dans la région des Grandes Caraïbes avec comme base, l’Argentine, la Colombie ou encore Panama, Cuba et Venezuela. Il a regretté que les processus de paix se limitent souvent à la démocratisation d’un pays sans aborder la question de la sécurité au niveau régional.
Il a souligné la contribution du Conseil américain pour la paix qui a produit des bases de travail très utiles avec des conclusions montrant que la tendance au conflit interétatique tend à baisser dans la région, alors que les conflits de nature transfrontalière avec la participation de groupes non étatiques tendent à se multiplier. Il a précisé qu’une accumulation d’expériences est née de la collaboration entre la société civile et les instances gouvernementales. Dans ce contexte, la société civile a montré une préoccupation croissante dans la prévention des conflits et a accru sa participation et donc sa contribution.
Mme RAYA KADYRORA de la Fondation pour la tolérance du Kirghizistan a expliqué que son ONG consacre ses efforts à la prévention et au règlement des conflits interethniques dans la région de l’Asie centrale. La particularité de l’ONG, a-t-elle souligné, est qu’elle exécute ses projets en collaboration avec les représentants des structures étatiques. La Fondation est la plus grande organisation non gouvernementale de l’espace post-soviétique et la première qui s’occupe concrètement des problèmes liés aux conflits. La politique de l’ONG, a-t-elle encore expliqué, est de donner la priorité au recrutement du personnel local des régions concernées. La représentante de la Fondation a ensuite énuméré les facteurs de déstabilisation dans la région d’Asie centrale, qui sont l’insuffisance des ressources naturelles et leur utilisation inefficace; les contentieux territoriaux; le terrorisme international et l’extrémisme religieux; la circulation des armes illicites, le trafic des stupéfiants, la pauvreté et la tension interethnique.
Devant la complexité de ces problèmes, la représentante de la Fondation a indiqué que son ONG avait mis en place 13 projets. En la matière, elle a insisté sur l’importance de concevoir les projets de concert avec les représentants des Etats pour s’assurer d’un consensus sur le coeur du problème et la manière de le résoudre. Elle a aussi indiqué que son ONG fournit des services « de diplomatie passive » qui consistent à offrir ses bureaux comme zone neutre pour y organiser des tables rondes et des négociations. Elle a ainsi affirmé qu’il est parfois plus facile pour la société civile de rapprocher les parties au conflit que pour les gouvernements. Toutefois, a-t-elle mis en garde, la société civile ne peut en aucun cas se substituer aux structures étatiques mais de compléter leurs efforts. En ce qui concerne l’ONU, la représentante de la Fonction a déploré son faible niveau de coopération; les Nations Unies préférant travailler avec les structures étatiques, a-t-elle dit.
M. EMMANUEL BOMBANDE de West African Network for Peace-Building (WANEP) a présenté la contribution de son organisation régionale basée au Ghana, pour que l’Afrique occidentale devienne une région de paix ou chacun puisse prendre en main son destin. Il a déclaré que le rôle de la société civile a été fondamental pour comprendre les dynamiques sous-tendant les différents conflits. Le réseau WANEP a pour objectif d’arriver à une véritable coordination entre les 300 organisations qui travaillent dans ce domaine au niveau de la CEDEAO. Son objectif est de renforcer les capacités de la société civile afin de répondre aux défis que posent les conflits mais aussi leur prévention. Parmi les conclusions tirées des expériences de terrain, il a observé que la société civile est la mieux placée pour comprendre les sources de conflits, d’où la nécessité de l’associer à tout processus de paix, en collaboration avec les Nations Unies qui fournissent une légitimité à tout processus. Citant le Libéria, il a souligné le besoin d’impliquer des éléments moraux et notamment les femmes, dans le souci de reconstituer les structures de gouvernance qui ont disparu. Enfin, il a affirmé que même des Etats dynamiques risquent d’être fragilisés par des différences claniques. C’est le cas du Ghana qui voit deux clans s’opposer dans le nord du pays depuis des années. Heureusement, a-t-il dit, le dynamisme du Ghana permet à la société civile de contribuer à favoriser le dialogue entre ces deux parties.
Mme MARY B. ANDERSON, Présidente de « Collaborative for Development Action », a souligné la nécessité de changer les approches selon la nature de chaque conflit. Il est important, a-t-elle dit, d’identifier les causes fondamentales de chaque conflit et l’impact des éléments extérieurs. Il faut savoir avec précision, a-t-elle insisté, pourquoi un conflit naît et quels en sont les acteurs. Il faut déterminer avec la même précision les personnes susceptibles d’assurer une médiation efficace, notamment parmi les ONG locaux. En poursuivant, Mary Anderson a insisté sur les « Cinq mécanismes » permettant à l’aide humanitaire de désamorcer les conflits.
L’expérience, a-t-elle encore dit, a montré qu’il faut travailler au niveau personnel mais aussi au niveau sociopolitique. Ces deux aspects sont importants en ce qu’ils permettent de s’attaquer aux causes réelles des conflits. En la matière, la société civile peut jouer un rôle si elle collabore effectivement avec les autres acteurs. Les maîtres mots doivent être la coordination et les liens.
Le représentant de l’Australie a proposé la publication d’un recueil d’expériences sur la contribution de la société civile au processus de prévention des conflits. A cet égard, il a rappelé les expériences très intéressantes que constituent les Iles Salomon et Bougainville.
Intervenant au nom de l’Union européenne, le représentant de l’Italie a estimé que l’action préventive efficace passe par la protection et la promotion des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il a précisé que l’importance de la contribution de la société civile a été soulevée lors du Conseil européen de Göteborg en juin 2001 et des réunions régulières se tiennent à ce sujet au sein de l’Union européenne. Parmi les réponses à donner, il s’est tout particulièrement félicité de la préparation d’une conférence internationale des ONG sur la prévention des conflits qui se tiendra au Siège des Nations Unies en 2005 et a salué la coopération croissante du Centre européen pour la prévention des conflits avec le Secrétariat des Nations Unies.
Le représentant de la Norvège a souhaité savoir ce que les Nations Unies entendent entreprendre afin de stimuler la coopération entre la société civile, les gouvernements et les Nations Unies.
Répondant à cette première série de questions, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. EGELIN, a expliqué que l’Organisation des Nations Unies fait beaucoup dans le domaine de l’accumulation et du partage d’informations et d’expériences par le biais de l’Université pour la paix à Tokyo et au Costa Rica, ainsi que par le biais de l’UNITAR. Il s’est félicité que l’Organisation des Nations Unies ait connu une sorte de révolution culturelle interne ces dix dernières années en matière de collaboration avec la société civile. Mais nous devons être plus novateur et plus créatif, a-t-il insisté.
Répondant à son tour aux questions, le Directeur exécutif du Centre européen pour la prévention des conflits, M. VAN TONGEREN, a expliqué qu’un document a été rédigé dans le souci de publier la liste des acteurs de la société civile en matière de prévention des conflits. En ce qui concerne précisément la situation dans les Iles Salomon et à Bougainville, il a affirmé que ces régions faisaient l’objet d’une attention particulière dans un recueil consacré aux conflits en Asie du Sud-Est, qui a été rédigé à l’attention de la communauté internationale.
Poursuivant la discussion, le représentant du Pakistan a attiré l’attention sur les conflits intra-Etats et inter-Etats pour affirmer que dans le premier cas, le rôle de la société civile est reconnu par tous. Dans la deuxième catégorie des conflits, toutefois, la société civile ne joue pas le rôle qui est le sien. De même, s’agissant des deux types de prévention des conflits – consolidation de la paix et prévention des conflits non éclatés-, le représentant a regretté que dans le deuxième cas, la société civile ne joue aucun rôle. Il a donc appelé les gouvernements à prendre les mesures appropriées pour aider la société civile à faire entendre sa voix. Faisant écho à la question sur les conflits intra-Etats, le représentant du Chili s’est interrogé sur la manière de prévenir un conflit quand la société civile y est partie prenante. Estimant que le Conseil de sécurité ne joue pas son rôle dans la prévention des conflits, il a invité ses collègues à réfléchir à la manière de créer une coopération entre le Conseil et la société civile. Toujours sur la question des conflits intra-Etats, le représentant du Canada s’est interrogé sur la manière d’agir lorsque des acteurs gouvernementaux sont parties au conflit. Comment, a-t-il précisé, renforcer le rôle de la société civile sans créer un problème de souveraineté?
Répondant d’abord à l’Australie, le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques s’est dit impressionné par le travail effectué par l’Institut japonais des relations internationales qui a publié un recueil « fondamental ». S’adressant ensuite au Chili, l’orateur a proposé aux Etats Membres d’aider le Secrétaire général à rédiger le rapport exhaustif que l’Assemblée générale lui a demandé en complément du rapport de 2001. Les Etats Membres doivent lui faire part de leurs idées sur l’implication de la société civile, a-t-il affirmé. Il s’est par ailleurs dit surpris par la facilité avec laquelle le Conseil a pu négocier une déclaration présidentielle sur la prévention des conflits, soulignant toutefois la nécessité de développer des mécanismes pour assurer une véritable communication entre le Conseil et la société civile. Le Sous-Secrétaire général a également préconisé l’implication de la société civile dans les processus de négociations des conflits armés.
Le représentant de la Guinée a soumis l’exemple de son pays, limitrophe de plusieurs pays en conflits ou sortant de conflits, qui a profité de la contribution active de plusieurs organisations internationales. Celles-ci ont renforcé les capacités de la société civile guinéenne à mieux préparer son pays à la bonne gouvernance et à désamorcer les crises en clarifiant le dialogue entre les parties en conflit et le gouvernement. Il a également souligné la nécessité de bien définir ce qu’est la société civile. Parmi les exemples de contribution de la société civile, il a cité en particulier le rôle des femmes qui ont su rapprocher les Présidents du Libéria et de la Guinée et favoriser des réseaux de communication au moment le plus fort de la crise entre ces deux pays.
Le représentant de la Suède a déclaré que la Conférence de 2005 constituerait une occasion idéale pour la société civile pour se faire entendre et s’affirmer comme un partenaire incontournable de la promotion de la paix et de la prévention des conflits. Il a formé l’espoir que cette conférence permettrait d’aboutir à un véritable réseau mondial des sociétés civiles.
Le représentant du Japon a jugé fondamental de parler de la sécurité humaine et de la nécessité de respecter la dignité des populations humaines. Il a estime que, dans ce domaine, les Nations Unies devraient renforcer les liens entre les gouvernements, la société civile et les ONG en se basant sur le concept indispensable de sécurité humaine. La coordination, qui est essentielle, passe par la création d’un réseau entre les différents acteurs de la société civile. S’agissant des petites armes, il a souhaité avoir des informations sur la contribution de la société civile en matière de lutte contre ce fléau.
Le représentant du Sierra Leone a estimé que la prolifération des ONG risque de nuire à l’homogénéité de la société civile et donc à la qualité de sa contribution. Il s’est inquiété de ce que certaines organisations peuvent légitimer des mouvements rebelles par la contribution qu’elles leur apportent.
Le représentant de l’Allemagne a souhaité avoir des informations sur les difficultés que rencontrent les ONG dans leur coopération avec les Nations Unies et sur la nature de leurs attentes pour améliorer ces relations.
Répondant à cette série de questions, Mme ANDERSON, Présidente de la Collaborative for Development Action, s’est dit consciente des problèmes liés au détournement de l’aide humanitaire à des fins militaires ou à des buts violents.
De son côté, M. VAN TONGEREN, Directeur exécutif du Centre européen pour la prévention de conflits, a précisé que son organisation a commencé à constituer, il y a un an, une liste d’organisations clés en matière de prévention et de maintien de la paix. Le succès ne se mesurera pas uniquement à la coopération des principales ONG, mais aussi à la participation des gouvernements concernés, a-t-il précisé. Dans ce contexte, il a rappelé l’importance de la coopération entre tous les acteurs de la prévention des conflits.
Mme RAYA KADYROVA de la Fondation pour la tolérance (Kirghizistan) a expliqué que son association a fait une enquête sur les sources d’approvisionnement en petites armes, les motivations qui poussent la population à en acquérir, et les mesures nécessaires pour l’en décourager. Les conclusions de ces enquêtes indiquent la nécessité d’un dialogue avec la population et les parties concernées, a-t-elle dit. Des pièces de théâtre pour enfants ont été créées pour les sensibiliser aux conséquences désastreuses des conflits. Pour ce qui est de la contribution des ONG aux travaux des Nations Unies, l’exemple du Kirghizistan montre que le PNUD effectue des activités qui pourraient être menées par des acteurs de la société civile kirghizes. Par conséquent, elle a invité le PNUD à se concentrer sur des activités qu’il est seul en mesure d’entreprendre. En outre, elle a invité l’ONU à être un intermédiaire entre les associations civiles et les gouvernements dans une région où celles-ci sont encore parfois considérées comme une menace pour le pouvoir.
Lançant la dernière série de questions, le représentant de la Croatie s’est interrogé sur la manière d’assurer un équilibre entre l’implication locale et régionale, d’une part, et l’implication internationale, d’autre part, dans la prévention des conflits. Soulignant l’importance de garder à l’esprit les besoins des populations locales, le représentant a affirmé que les solutions pour le rétablissement de la confiance de ces populations sont souvent bien meilleures que celles concoctées dans les laboratoires internationaux. Le représentant du Mexique a quant à lui reproché à l’Assemblée générale d’avoir très mal géré la question de la prévention des conflits. Attirant l’attention sur les deux ans de négociations qui ont été nécessaires à l’élaboration de la résolution du 3 juillet, il a appelé à la mise en place d’un groupe de travail pour que la question de la prévention des conflits y soit systématiquement étudiée.
Au nombre des ONG, le représentant de la Communauté de Sant’Egidio a salué cette réunion comme une occasion de consolider les acquis réalisés par la résolution du 3 juillet. L’étape suivante, a-t-il estimé, est de déterminer le rôle de chacun dans la prévention des conflits. L’engagement de la société civile est réel et les Etats Membres doivent en tirer parti. A son tour, le représentant de Safer World a jugé utile que les représentants du Centre européen pour la prévention des conflits et du Groupe de travail ONG/ONU créent un partenariat efficace. La société civile souhaite une véritable interaction dès lors que le processus préparatoire de la Conférence de 2005 est lancé, a-t-il dit.
Répondant aux dernières questions, le représentant de West African Network for Peace-building (WANEP) est revenu sur la légitimité et la crédibilité de la société civile en estimant qu’elles ne peuvent venir que d’une dissociation entre le monde de la société civile et le monde politique.
M. SERBIN a souligné la nécessité de mettre en place, outre un lien entre la société civile, les ONG et les gouvernements, de véritables espaces institutionnels et interactifs entre les Nations Unies et la société civile.
Mme MARY B. ANDERSON, Présidente de la Collaborative for Development Action, a formé le vœu que les sessions et rencontres à venir soient l’occasion de nous entendre sur les voies et priorités à suivre. Elle a également souligné la nécessité de nous assurer de la légitimité et représentativité des organisations. Notre succès, a-t-elle ajouté, dépendra de notre capacité de tenir compte des expériences qui ont fonctionné et de celles qui ont été un échec.
Le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. DANILO TÜRK, répondant à une question du représentant du Mexique, a précisé que l’Assemblée générale avait le pouvoir de soulever toute question de son choix, quelle qu’en soit la nature, et de faire les recommandations qu’elle estimait nécessaires à la résolution des questions soulevées.
Le Président KAVAN s’est félicité du dialogue engagé aujourd’hui et s’est dit persuadé que son successeur persisterait dans la voie du dialogue durant la prochaine Assemblée générale. Même s’il y a des divergences et des controverses, a-t-il ajouté, il ne faut pas que nous ayons peur des débats interactifs, car ils sont le meilleur moyen de mieux comprendre les problèmes et d’y répondre de la façon la plus efficace. Il a formé le vœu que la conférence de 2005 soit l’occasion d’aboutir à un véritable partenariat mondial entre les acteurs de la société civile en matière de prévention des conflits. En conclusion, il a salué le rôle déterminant de la société civile dans la sensibilisation de la conscience internationale et ses efforts pour remplir les vides institutionnels lorsque les gouvernements sont défaillants.
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