UNE NOUVELLE ETUDE SCIENTIFIQUE REVELE L'AMPLEUR DES IMPACTS D'UN ENORME NUAGE DE POLLUTION SUR L'ENVIRONNEMENT A L'ECHELLE REGIONALE ET MONDIALE
Communiqué de presse PNUE/65 |
PNUE/65
12 août 2002
UNE NOUVELLE ETUDE SCIENTIFIQUE REVELE L'AMPLEUR DES IMPACTS D'UN ENORME NUAGE DE POLLUTION SUR L'ENVIRONNEMENT A L'ECHELLE REGIONALE ET MONDIALE
30 ans du PNUE : L'Environnement pour
le développement Planète, peuples et prospérité
LONDRES/NAIROBI, 12 août 2002 (PNUE) -- Une nouvelle étude scientifique vient de démontrer qu'un énorme nuage de pollution recouvre actuellement toute l'Asie du sud. Ce nuage est en train de nuire à l'agriculture, de modifier le régime des précipitations, y compris celui de la mousson, et met ainsi la vie de centaines de milliers de personnes en danger.
Ces recherches, menées par des scientifiques qui travaillent avec le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), révèlent que la spectaculaire croissance économique qu'a connu cette région du monde au cours des dix dernières années pourrait donc bientôt prendre fin en raison de ce voile atmosphérique au-dessus de l'Asie.
Par conséquent, des études complémentaires s'imposent afin de voir le rôle précis que cette couche de pollution, épaisse de trois kilomètres, pourrait jouer sur le climat de la région et, plus généralement, sur les climats à l'échelle du globe.
Néanmoins, ces résultats préliminaires indiquent que la formation de ce voile, véritable masse de cendres, d'acides, d'aérosols et autres particules, perturbe déjà les systèmes météorologiques, notamment les régimes de précipitations et des vents, et provoque des périodes de sécheresse dans les régions occidentales du continent asiatique.
La situation est très inquiétante car les impacts de ce voile atmosphérique à l'échelle régionale et mondiale risquent de s'accentuer dans les trente prochaines années, période à laquelle la population du continent asiatique devrait atteindre les cinq milliards d'habitants.
Klaus Toepfer, le directeur exécutif du PNUE, a déclaré lors d'une conférence de presse à Londres (où le rapport a été publié), qu'il était urgent d'agir afin de mieux comprendre les recherches scientifiques et de prendre les mesures nécessaires pour réduire ce voile.
Il a expliqué que le voile résulte des feux de forêts, de la combustion des déchets agricoles, de l'augmentation spectaculaire du nombre de véhicules brûlant des combustibles fossiles, des industries, des centrales électriques et des émissions de millions de fourneaux inefficaces qui brûlent du bois, des déjections animales et autres «combustibles biologiques».
«Les recherches doivent continuer, mais ces premières découvertes indiquent déjà clairement que cette masse de suie, de particules, d'aérosols et autres polluants ne cesse de s'agrandir. Elle représente donc un danger majeur pour l'environnement en Asie et une réelle menace pour la planète tout entière. On estime en effet qu'une couche de pollution comme celle-ci, de trois kilomètres d'épaisseur, peut parcourir la moitié de la surface du globe en une semaine», a ajouté Monsieur Toepfer.
«Nous sommes à la veille du Sommet mondial du développement durable (SMDD) qui commencera le 26 août, dix ans après le Sommet de la Terre à Rio en 1992. Les problèmes de pollution, de plus en plus sérieux en Asie, englobent toutes les menaces et les défis auxquels les participants au Sommet doivent s'attaquer de toute urgence pour que le monde puisse jouir de la croissance économique sans pour autant sacrifier la santé et la richesse naturelle de la planète à long-terme. Nous disposons, au-delà de ces premières découvertes, de ressources technologiques et financières; nous devons donc favoriser les progrès scientifiques et trouver la volonté politique et morale pour sauver l'Asie et le monde de ces dangers», a-t-il déclaré.
Les recherches menées sur le voile atmosphérique au-dessus de l'Asie sont le résultat des observations de 200 scientifiques qui ont travaillé sur le projet Indian Ocean Experiment (INDOEX), des nouvelles données satellitales et des nouveaux systèmes de modélisation par ordinateur.
Le Comité scientifique du PNUE, à l'origine de ce nouveau rapport, est formé d'universitaires de grand renom dans le domaine, dont le Professeur V. Ramanathan (Scripps Institute of Oceanography, Etats-Unis), du Prix Nobel Paul Crutzen (Max-Planck Institute for Chemistry, Allemagne), et A. P. Mitra (National Physical Laboratory, Inde).
Ces chercheurs ont tout particulièrement étudié les impacts du voile sur le climat, les précipitations, la santé de l'homme et l'agriculture dans la région. Ils ont également tenté de découvrir les liens qui existent entre le voile et ses conséquences sur le réchauffement de la planète.
Les principales découvertes
Le voile semble avoir des impacts significatifs sur les systèmes climatiques et météorologiques de la région. Cette couche de pollution réduit la quantité de lumière solaire ou d'énergie solaire reçue par la surface de la Terre de 10 à 15%, voire plus.
Cependant, il semble que ses propriétés d'absorption de chaleur chauffent l'atmosphère inférieure de manière considérable.
L'association du refroidissement de la surface et du réchauffement de la l'atmosphère inférieure semble modifier la mousson d'hiver, entraînant ainsi une réduction sensible des précipitations dans les régions du nord-ouest de l'Asie et une augmentation des précipitations le long de la côte est de l'Asie. En revanche, les données qui prévoient des changements dans la région doivent être vérifiées à l'aide de modèles plus détaillés et d'observations sur les climats et les aérosols à l'échelle régionale.
Les modèles internationaux présentés dans le rapport révèlent que le voile atmosphérique pourrait réduire les précipitations dans le nord-ouest de l'Inde, au Pakistan, en Afghanistan, en Chine occidentale et dans la région voisine du centre-ouest asiatique de 20 à 40%.
D'après le rapport, «il faut se pencher les événements récents: d'un côté, il y a eu les deux sécheresses consécutives en 1999 et 2000 au Pakistan et dans les régions du nord-ouest de l'Inde, et de l'autre, des inondations de plus en plus importantes dans les régions très pluvieuses du Bangladesh, du Népal et des Etats du nord-est de l'Inde».
Il rappelle aussi que «le Bangladesh a connu de sévères inondations avec des intervalles allant de sept à dix ans, les deux plus récentes datant de 1988 et 1998. Lors de l'inondation de 1998, les deux tiers de la surface émergée de la Terre ont été inondés et presque 1.6 million d'hectares de terres cultivables a été endommagé».
Les aérosols et les particules présentes dans le voile atmosphérique affectent également les précipitations, entre autres par le fait que les gouttes de pluie sont de plus en plus petites et de plus en plus nombreuses, ce qui se traduit par des précipitations moins fréquentes et des nuages à durée de vie plus longue. Les précipitations risqueraient donc de disparaître des régions habitées.
Une réduction de 10% de la quantité d'énergie solaire reçue par les océans de la région accélère, quant à elle, l'évaporation de l'humidité qui contrôle les précipitations estivales.
Le rapport du PNUE met également en évidence que la réduction de la lumière solaire pourrait avoir des impacts significatifs sur l'agriculture.
Les recherches menées en Inde indiquent que le voile atmosphérique pourrait réduire les récoltes de riz en hiver d'au moins 10%.
Il semble que les acides présents dans le voile, en tombant sous forme de pluie acide, pourraient endommager les cultures et les arbres. Les cendres qui tombent sur les feuilles peuvent, elles, aggraver les impacts de la réduction de la lumière solaire sur la surface de la Terre.
D'après le rapport, la pollution résultant du voile atmosphérique pourrait provoquer «plusieurs centaines de milliers» de morts prématurées du fait de l'augmentation de maladies respiratoires.
Des études montrent également que le taux de mortalité augmente proportionnellement au taux de pollution.
Dans le cas de l'Inde, des résultats obtenus dans sept villes du pays, notamment Ahmedabad, Kolkata, Delhi and Mumbai, montrent que certaines formes de pollution atmosphérique étaient responsables de 24 000 morts prématurées par an au début des années 1990, contre 37 000 vers le milieu des années 1990.
Tandis que cette étude porte surtout sur les impacts au sud de l'Asie, il s'avère que le problème du voile atmosphérique est aussi grave, voire plus grave, dans le sud-est et l'est asiatique, Chine comprise.
Les scientifiques demandent la mise en œuvre d'un plan d'action pour s'attaquer de manière globale aux menaces dont la Chine est victime. Le projet Asian Brown Cloud a pour objectif d'établir des observatoires pour étudier ce voile et d'en examiner les conséquences sur le budget de l'agriculture, de la santé et de l'eau.
Un tel projet devrait donc non seulement éclaircir les liens scientifiques entre les voiles de pollution dans la région et les problèmes tels que le réchauffement de la planète, mais aussi aider les décisionnaires à mettre au point des stratégies pour réduire la pollution et garantir la durabilité des taux de croissance économique impressionnants dans la région.
Notes aux rédacteurs
La région sud-asiatique comprend l'Afghanistan, le Bangladesh, le Bhoutan, l'Inde, les Maldives, le Népal, le Pakistan, et le Sri Lanka.
«Asian Brown Cloud: Climate and Other Environmental Impacts» est un rapport d'évaluation du PNUE.
Ce rapport a été commandé par le PNUE et mis au point par le Center for Clouds, Chemistry and Climate. Il a été financé par le PNUE, la National Science Foundation américaine, la Fondation G.Unger Vetlesen et le Fonds Alderson Chair de la Scripps Institution of Oceanography, Université de Californie à San Diego.
Vous pouvez obtenir le rapport ou le consulter sur: www.rrcap.unep.org/abc/impactstudy
Pour de plus amples informations, veuillez contacter Nick Nuttall, directeur adjoint de la Division de la communication et de l'information du public du PNUE et chef des médias du PNUE, Tél.: (254) 2-623084, Portable: (254) 733-632755, email : nick.nuttall@unep.org.
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