DES ALPINISTES FINANCES PAR LE PNUE CONFIRMENT L'IMPACT DU RECHAUFFEMENT PLANETAIRE SUR LES MONTAGNES
Communiqué de presse PNUE/61 |
DES ALPINISTES FINANCES PAR LE PNUE CONFIRMENT L'IMPACT DU RECHAUFFEMENT PLANETAIRE SUR LES MONTAGNES
SHENZHEN/GENEVE, le 5 juin 2002 -- Dans l'Himalaya pour y établir la chronique de la santé écologique d'une des chaînes de montagnes les plus connues du monde, une expédition recueille des preuves saisissantes des effets des changements climatiques.
L'équipe, financée par le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), a appris que le glacier d'où Sir Edmund Hillary et Tenzing Norgay étaient partis à la conquête de l'Everest il y a une cinquantaine d'années a rétréci de près de 5 kilomètres.
Roger Payne, directeur des sports et du développement de l'Union internationale des associations d'alpinisme (UIAA), un des leaders de l'expédition, déclare : "Le réchauffement planétaire est à l'évidence une des plus graves menaces pour les montagnes, voire la plus grave d'entre toutes. Nous en avons eu la preuve tout autour de nous, avec les énormes balafres creusées dans le paysage par les soudaines inondations en provenance des glaciers ou les lacs grossis par leur fonte. Mais ce qui nous a vraiment convaincus, c'est ce que nous ont dit les gens que nous avons rencontrés, dont beaucoup ont vécu là toute leur vie".
Les sept membres de l'expédition partis de Katmandu le 16 mai y sont revenus le 1er juin après avoir escaladé Island Peak, qui s'élève jusqu'à 6189 mètres au-dessus du niveau de la mer et se trouve au Népal, dans la région de Khumbu. L'expédition, dont le rapport sort à l'occasion de la Journée internationale de l'environnement, s'est rendue au monastère de Thyagboche et s'est entretenue avec des experts, dont ceux du Parc national de Sagarmatha (l'Everest).
Un entretien avec le sherpa Tashi Jangbu, président de l'Association népalaise d'alpinisme, a révélé à l'équipe combien les populations locales s'inquiètent de l'impact du réchauffement planétaire.
Ian McNaught-Davis, président de l'UIAA, qui dirigeait aussi l'expédition, explique : "Il nous a dit qu'il avait vu des changements rapides et significatifs des champs de glace ces 20 dernières années, ajoutant que ces changements semblaient s'accélérer. Selon lui, Hillary et Tenzing auraient maintenant dû marcher deux heures avant d'atteindre le bord du glacier à la lisière duquel ils avaient installé leur premier camp de base en 1953, ce qui signifie que le glacier a reculé de quatre à six kilomètres".
"Il nous a raconté que Island Peak avait été ainsi nommé parce que le pic ressemblait jadis à une île dans une mer de glace et qu'il était alors entouré d'une série de petits étangs. Mais la fonte des glaciers les a transformés aujourd'hui en un grand lac de plusieurs kilomètres de longueur. M. Jangbu s'inquiète beaucoup parce que si le glacier continue de rétrécir sa fonte risque de provoquer des inondations avec d'énormes quantités d'eau, de débris et de boues déboulant dans les vallées," ajoute M. McNaught-Davis, ancien homme d'affaires et présentateur d'une série scientifique populaire à la télévision anglaise.
Au monastère de Thyangboche, où habite une soixantaine de moines bouddhistes, l'expédition a rencontré le lama Rinpoche qui y vit depuis plus de 30 ans et qui a assisté à deux grandes inondations, lorsque la fonte des glaciers a fait déborder des lacs proches. Récemment, une inondation a détruit de vieux ponts de bois en aval. On les a remplacés par de nouveaux ponts métalliques plus hauts et longs de 100 mètres au lieu des 50 mètres des précédents pour essayer d'empêcher qu'une nouvelle inondation ait les mêmes effets dévastateurs.
"Le lama a l'impression que ces catastrophes se produisent de plus en plus souvent, surtout depuis ces huit ou neuf dernières années," dit M. McNaught-Davis, dont l'équipe est parvenue à ces conclusions en cette année déclarée par les Nations Unies Année internationale de la montagne et Année internationale de l'écotourisme.
Des chercheurs du PNUE travaillant de concert avec des experts du Centre international de mise en valeur intégrée des montagnes (ICIMOD) dont le siège est à Katmandu ont repéré, à l'aide de relevés par satellites et d'études de terrain, 44 lacs de glaciers du Népal et du Bhoutan déjà tellement en crue qu'ils risquent de déborder dans à peine cinq ans.
On s'inquiète du fait que les touristes de plus en plus nombreux et les changements climatiques risquent aussi d'avoir un impact sur la végétation de la région. Alton Byers, du Mountain Institute des Etats-Unis, a déclaré au Sommet mondial de l'écotourisme réuni au Québec le mois dernier qu'on estime à 27000 le nombre de personnes se rendant chaque année en visite dans cette région, au lieu d'une poignée au début des années soixante. Cela fait plus de touristes que la population locale de sherpas qui ne sont que 3000 dans la région de Khumbu du district népalais de Solu Khumbu.
Selon Julia-Ann Clyma, néo-zélandaise également membre de l'expédition, juste au-dessous de Thyangboche des villageois cultivent un jardin où ils essayent de préserver les plantes médicinales locales et les connaissances à leur sujet.
"Les gens du cru s'efforcent vraiment de dépendre le moins possible des importations alimentaires," déclare-t-elle, "notamment avec des cultures en serres et des vergers".
L'équipe a aussi été impressionnée par les nombreux programmes de reboisement en cours afin de satisfaire les besoins des villageois et des touristes en bois de chauffage tout en maintenant des forêts saines.
Ceci semble confirmer les recherches du Mountain Institute dont il ressort que la couverture boisée en aval de la limite des neiges et glaces éternelles "est restée plus ou moins constante depuis les années 50. Il semble que la régénération naturelle des forêts soit en augmentation dans de nombreux endroits et que la croissance arborée aux alentours de Namche Bazar et d'autres villages ait augmenté grâce à la réussite d'efforts de plantations déployés ces 15 dernières années".
Cependant, l'Institut conclut aussi qu'au-dessus de 4000 mètres le ramassage excessif, surtout par les touristes, des arbustes de genévriers de haute altitude et des plantes pulviniformes a un grave impact sur l'environnement, notamment sous forme d'érosion et de disparition d'une partie de la faune.
Mais des groupes d'action communautaire locaux se sont mis en place pour restaurer ces habitats endommagés. Ils ont notamment l'intention d'interdire le ramassage des arbustes alpins et d'offrir des subventions pour encourager l'exploitation durable d'arbres tels que les quantités de bouleaux et de rhododendrons des plus faibles altitudes.
Ils envisagent aussi de construire dans les principaux villages de trekking des abris pour les porteurs qui dorment pour le moment en plein air et n'ont que des feux de bois pour se réchauffer.
Le sherpa Pemba Geljen, guide de l'expédition qui a passé toute sa vie dans cette région, dit y avoir vu de nombreux changements spectaculaires : les costumes nationaux et les coutumes locales disparaissent rapidement, mais il pense que c'est là une conséquence inévitable de la modernisation.
"Tout change," dit-il, "on ne voit plus les danses traditionnelles et on n'entend plus les chansons du temps de mes parents".
Mais le guide sherpa n'accepte pas la suggestion de réduire le tourisme: "Nous avons plutôt besoin de plus de touristes pour améliorer l'économie et pour que les gens aient du travail, de l'argent et de l'éducation. Je crois que nous pouvons faire en sorte que ce soit un bon tourisme qui respecte les gens du cru et les paysages d'ici. Mais ce à quoi nous ne pouvons rien, c'est le réchauffement planétaire, d'autres en sont responsables. Ici, au Népal, nous ne produisons qu'une part infime des gaz responsables du réchauffement mondial. Ce sont les grands pays industrialisés de l'Europe, de l'Amérique du Nord et le Japon qui doivent agir pour sauver nos montagnes et le milieu dont nous dépendons pour vivre".
À l'attention des rédacteurs : la Journée mondiale de l'environnement est une manifestation annuelle célébrée le 5 juin et dans les jours suivants. C'est Shenzhen en Chine qui en sera l'hôte cette année et elle sera célébrée dans plus d'une centaine de pays. Voir : www.unep.org
Le film de l'expédition par Slackjaw Film peut être obtenu en appelant Richard Heap tél. : 44 (0) 114 2014 261, info@slackjaw.co.uk
L'expédition tient à remercier de leur aide l'Association népalaise
d'alpinisme : www.nma.com.np et Himalaya Expeditions, himalaya@mos.com.np
Pour de plus amples informations, veuillez contacter: Nick Nuttall, responsable des médias au PNUE, tél. : 254 2 623084, portable : 254 733 632755, email : nick.nuttall@unep.org ou Michael Williams, responsable de l'information à Genève, tél. :+41 22 917 8242/8244/8196, email : Michael.Williams@unep.ch ou Roger Payne, directeur des sports et du développement de l'UIAA, tél.: 41 (0) 24 494 1440, 41 (0) 31 370 1828, portable : 41 (0) 79 574 7409, email: roger.payne@uiaa.ch ou Ian McNaught-Davis, président de l'UIAA, tél. : 44 207 937 6559, email : macdavis@compuserve.com
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