LE COMMERCE DE TROIS PESTICIDES TRES DANGEREUX ET DE L'AMIANTE BIENTOT REGLEMENTE
Communiqué de presse PNUE/49 |
LE COMMERCE DE TROIS PESTICIDES TRES DANGEREUX ET DE L'AMIANTE BIENTOT REGLEMENTE
GENEVE 21 février 2002 -- Un comité composé d'experts nommés par des gouvernements a recommandé d'inscrire trois pesticides d'un usage très répandu, ainsi que toutes les formes d'amiante, à la liste internationale des substances chimiques dont le commerce est réglementé.
Le premier d'entre eux est le monocrotophos. Cet insecticide est utilisé dans de nombreux pays en développement, particulièrement en Asie, pour lutter contre les insectes, les mites du coton, des citrus, du riz, du maïs et encore d'autres cultures. Il fait l'objet d'un commerce florissant et plus d'une douzaine d'entreprises, essentiellement asiatiques, le fabriquent.
Comme les autres insecticides composés d'organophosphates, le monocrotophos met en grand danger des centaines de milliers d'agriculteurs, particulièrement dans les pays en développement où l'absence de vêtements protecteurs et d'équipement mécanique font que les utilisateurs sont en contact direct avec les produits chimiques. Il est notamment la cause de nausées, de diarrhées, de troubles de la vision et, dans les cas les plus graves, de complications respiratoires pouvant entraîner des convulsions et la mort.
Le monocrotophos est également très toxique pour les oiseaux et les mammifères. Des études indiquent qu'en plus de 25 ans, le monocrotophos utilisé en Hongrie a causé plus de dommages aux oiseaux sauvages que tout autre pesticide.
Il existe, à l'heure actuelle, des solutions alternatives pour toutes ses applications connues. Les experts ont fait des recommandations pour que la décision finale puisse être prise au niveau politique, lors de la réunion qui aura lieu en septembre prochain lorsqu'il s'agira de décider si le monocrotophos doit être ajouté à la liste des produits chimiques et des pesticides dont l'importation peut être légitimement et unilatéralement interdite.
La réglementation de ce pesticide est déjà une victoire, mais il attire l'attention sur le problème plus général des organophosphates à bas prix. Elaborés en général par de grandes multinationales, ces pesticides sont souvent fabriqués en grandes quantités dès qu'ils ne sont plus protégés par un brevet, et ils sont toujours utilisés même si l'on sait qu'ils sont cause de maladies et de décès. Les experts réaffirment le droit de prendre une décision ayant une incidence sur les échanges commerciaux en se fondant sur la façon dont un pesticide est utilisé sur le terrain plutôt que sur les instructions du fabriquant.
La recommandation du Comité provisoire d'étude des produits chimiques (ICRC) va au-delà de la position du Comité intergouvernemental de négociation de la Convention de Rotterdam sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause (PIC) applicable dans le cas de certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l'objet du commerce international, qui se réunira à Bonn, du 30 septembre au 4 octobre. Si elle y est adoptée, le monocrotophos sera soumis à la procédure de consentement préalable en connaissance de cause (PIC).
La recommandation consistant à ajouter les cinq autres formes d'amiante à la liste PIC (une y est déjà enregistrée) met en marche un dispositif qui s'achèvera en 2003. C'est leur interdiction au sein de l'UE et au Chili qui a fait que le Comité d'examen s'intéresse à l'amiante (au titre de la Convention, lorsque deux pays de deux régions différentes interdisent ou réglementent strictement un produit chimique, celui-ci est mis en examen; la mise en examen du monocrotophos est intervenue lorsqu'il a été interdit par l'Australie et la Hongrie).
L'amiante est un produit très intéressant parce que sa nature fibreuse le rend très résistant à la traction. Il présente une excellente résistance au feu et reste inerte face aux produits chimiques. Après avoir été très utiliséee pour isoler les immeubles et les équipements spéciaux, l'amiante a été éliminé dans de nombreux pays qui ont compris que ses fibres, inhalées par les ouvriers et les habitants, provoquaient notamment des cancers, et étaient cause de décès. On continue à utiliser l'amiante dans les scellements au plomb, les joints de culasse, les joints, les freins, l'armement, et dans d'autres applications, bien que l'on trouve maintenant des produits de substitution à un prix compétitif pour la plupart d'entre elles.
"Cette décision du Comité est un grand pas en direction d'une élimination des dangers présentés par l'amiante et les produits qui en contiennent. Même dans des pays comme le mien, ces produits sont longtemps restés un problème majeur après qu'ils aient été interdits parce qu'il a fallu décontaminer les immeubles et faire face aux coûts considérables du traitement des malades de l'amiante," a déclaré le président de l'ICRC, l'Allemand Reiner Arndt.
Le Comité a également mis en branle le processus visant à inscrire sur la liste le Granox TBC et le Spinox T, mélange de fongicides et de carbofurane, insecticide d'une très haute toxicité. Ce processus a été initié par le Sénégal (pour "les préparations pesticides dangereuses", il suffit d'un pays pour mettre en marche le processus d'inscription). Ayant constaté de plus en plus de décès et de maladies, le gouvernement sénégalais a répertorié géographiquement les cas d'intoxication.
Ses conclusions ont mis en cause le Granox TBC/Spinox T qui est utilisé sous forme de poudre dans les exploitations d'arachides. Dans les pays développés, les graines sont souvent traitées et plantées mécaniquement, ce qui protège les agriculteurs de tout contact. Dans de nombreux pays en développement, cependant, les agriculteurs travaillent sans vêtements protecteurs. En outre, ils ouvrent les arachides d'un coup de dent pour en extraire les noix. L'utilisation de ce pesticide dans de telles conditions a intoxiqué des centaines de personnes qui ont souffert de fièvre, de douleurs abdominales et de poitrine, de vomissements, d'insomnies - et sont même décèdées. Par ailleurs, les préparations carbofuranes en poudre ne sont pas acceptées dans les registres officiels de 25 pays et de l'UE.
Le quatrième produit chimique, le DNOC, est un insecticide, un désherbant et un fongicide. Il est hautement toxique pour les êtres humains et très dangereux pour tous les êtres vivants. Sa mise en examen a été décidée après qu'il ait été interdit par le Pérou et l'UE. Alors que son usage est encore trés répandu, le DNOC devrait être bientôt soumis à la procédure PIC afin de décourager ses utilisations actuelles.
Il existe quelque 70000 produits chimiques sur le marché et 1500 vient s'y ajouter chaque année. Surveiller et gérer ces substances potentiellement dangereuses constitue un grand défi pour de nombreux gouvernements. Beaucoup de pesticides dont l'usage est proscrit ou rigoureusement limité dans les pays industrialisés sont encore commercialisés et utilisés dans les pays en développement.
Les scientifiques ont une meilleure connaissance des risques pour la santé et l'environnement que fait courrir une longue exposition à certains produits chimiques. Ceci, ainsi que la prise de conscience des dangers provoqués par le mauvais état des stocks de produits chimiques dangereux entreposés dans des décharges non sécurisées, ont conduit la communauté internationale à adopter, en 1998, la Convention de Rotterdam, sous les auspices du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) et de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).
La Convention de Rotterdam donne aux pays importateurs les outils et les renseignements nécessaires pour identifier les produits chimiques potentiellement dangereux et pour exclure ceux qu'ils ne sont pas en mesure de gérer dans des conditions de sécurité satisfaisantes. Lorsque leur commerce est autorisé, des exigences en matière d'étiquetage et de renseignements sur les conséquences possibles de cette exportation sur le plan de la santé et de l'environnement favorise l'usage sécuritaire de ces produits.
La Convention a été signée par 72 pays (plus la CE) et a été ratifiée par 18 pays; elle entrera en vigueur 90 jours après la 50e ratification. Les pays ayant ratifié sont convenus d'appliquer volontairement la procédure de consentement préalable en connaissance de cause prévue par la Convention. La liste originale de la Convention compte 22 pesticides et 5 produits chimiques industriels(*). Quatre autres pesticides y ont déjà été ajoutés. Les quatre autres produits chimiques dont il est question ici seront également soumis au processus juridiquement contraignant de la procédure PIC.
A l'attention des journalistes: Pour des interviews et de plus amples informations, veuillez contacter Michael Williams du PNUE, à Genève, tél. (+41 22) 9178 242/244/196, fax 797 3460, portable: +41 79 40 91 528, e-mail michael.williams@unep.ch, ou Erwin Northoff de la FAO, à Rome, tél. (+39 06) 5705 3105, fax 5705 4974, e-mail erwin.northoff@fao.org. Les documents officiels de la réunion (ICRC 3) et d'autres informations sont disponibles au www.pic.int.
(*) La Convention s'applique aux 22 pesticides dangereux suivants : 2,4,5-T, aldrine, captafol, chlordane, chlordiméforme, chlorobenzilate, DDT, 1,2-dibromoéthane, dieldrine, dinosèbe, fluoroacétamide, HCH, heptachlore, hexachlorobenzène, lindane, composés de mercure, pentachlorophénol, plus certaines préparations de méthamidophos, méthylparathion, monocrotophos, parathion et phosphamidon.
Elle porte aussi sur cinq produits chimiques industriels : crocidolite, polybromobiphényles (PBB), diphényles polychlorés (PCB), terphényles polychlorés (PCT) et phosphate de tris (2,3-dibromopropyle).
* *** *