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ENV/DEV/610

L'EAU ET LE ROLE DES FEMMES ET DES PEUPLES AUTOCHTONES SUR LES RESSOURCES AU CENTRE DES APPROCHES INTEGREES DU DEVELOPPEMENT DURABLE

30/01/02
Communiqué de presse
ENV/DEV/610


Commission du développement durable

constituée en Comité préparatoire du Sommet mondial

pour le développement durable

Deuxième session préparatoire

Dialogue multipartite – Groupe de discussion I

matin/après-midi


L'EAU ET LE ROLE DES FEMMES ET DES PEUPLES AUTOCHTONES SUR LES RESSOURCES

AU CENTRE DES APPROCHES INTEGREES DU DEVELOPPEMENT DURABLE


La reconnaissance de l'eau potable comme ressource la plus critique à gérer par les politiques de développement durable a dominé les travaux de la Commission du développement durable constituée en Comité préparatoire du Sommet mondial pour le développement durable.  Les travaux d’aujourd'hui représentent un dialogue multipartite: "Progrès réalisés dans l'application des approches intégrées des objectifs sectoriels du développement durable".  Prenaient part à cette discussion les grands groupes organisés de la société civile, du monde des affaires, et des secteurs scientifique et technique: agriculteurs, universitaires, femmes, jeunes, autorités locales, représentants des travailleurs et des syndicats, et organisations non gouvernementales (ONG).  Prenant la parole à tour de rôle en ouverture de ce dialogue multipartite, les représentants de ces différents groupes ont fait des exposés sur les actions et réflexions menées par leurs organisations dans le cadre des préparatifs du Sommet mondial pour le développement durable de Johannesburg. 


A l'issue des échanges, il est apparu que le partage des informations, le renforcement des capacités, la participation de tous les groupes, la coordination et la cohérence des programmes, l'amélioration de la gouvernance, la disponibilité de ressources adéquates et le choix de politiques mieux adaptées par chaque pays faciliteraient l'élaboration d'approches intégrées en matière de développement durable.  Seule une meilleure participation des peuples autochtones, des femmes et des sociétés civiles concernées à la gestion des ressources naturelles, des terres et des modes de consommation, pourra permettre de trouver et de mettre en oeuvre les approches intégrées qui permettront d'atteindre les objectifs du développement durable, ont conclu les participants


Dialogue multipartite


A l'ouverture du dialogue, la représentante de l'industrie du pétrole et hydrocarbures a indiqué que depuis le Sommet de Rio, les opérateurs de ce secteur économique étaient devenus plus sensibles aux problèmes de pollution de l'eau, des sols et de l'air, et de préservation de l'environnement.  Souvent accusés de porter atteinte aux équilibres écologiques, les industriels du pétrole souhaitent travailler en partenariat avec les organes chargés de la coordination de la mise en oeuvre du plan "Action 21", a-t-elle dit.  Les compagnies pétrolières et celles qui travaillent dans le domaine de la chimie sont parmi les plus importants investisseurs dans les économies des pays en développement, a dit la représentante en estimant que les investissements étrangers directs (IED) de ce secteur représentaient parfois les 3/4 des montants d'IED que reçoivent certaines régions du monde.  Mais, cet aspect a été critiqué par les représentants des populations autochtones qui ont souhaité que les IED s'orientent plutôt vers des secteurs plus durables, l'exploitation pétrolière et minière étant selon eux une activité "purement spéculative et non durable" créatrice de conflits politiques et sociaux au niveaux national et international.


La possibilité de négocier un code d'éthique des affaires ayant été évoquée par les milieux industriels, la représentante des syndicats et des organisations de travailleurs s'en est félicitée tout en évoquant certains doutes sur l'efficacité de ce genre d'outil dans la promotion d'un développement durable.  Les travailleurs des pays en développement souhaiteraient plutôt des mesures concrètes et contraignantes.  Par exemple, que soient intégrées dans les programmes de privatisation des mesures qui assureraient un minimum de protection sociale aux travailleurs des entreprises à privatiser et à leurs familles.  De plus, a-t-elle poursuivi, pourquoi les biens et services publics de base comme l'eau et l'électricité, que fournissent les entreprises étatiques deviennent-ils subitement plus chers dès que ces entreprises sont privatisées?  La mondialisation et les privatisations devraient s'accompagner d'une forme de contrat social incluant et garantissant l'accès à ces biens et la préservation des ressources naturelles dont dépend la vie des populations les plus défavorisées, a estimé la représentante.


Les associations d'autorités locales sont le meilleur forum de promotion du développement durable, a déclaré pour sa part le représentant de ce groupe, en faisant remarquer que les autorités locales jouent un rôle essentiel dans la gestion quotidienne des biens sociaux -eau, électricité, logement, structures d'éducation et de santé- de la vie des populations.  Les contrôles de pollution, la collecte et le recyclage des ordures et des déchets industriels échoient souvent aux autorités locales qui sont aussi le relais indispensable entre les gouvernements et les populations.  "Le processus de mondialisation accéléré exige que les gouvernements donnent plus de place aux ONG, notamment en matière de gouvernance, de protection du droit d'accès des populations à l'eau, de protection du droit à la sécurité et de promotion d'une justice environnementale", a déclaré la représentante des ONG.  "La lutte contre la pauvreté suppose la protection des droits des pauvres, et la lutte contre la pauvreté et la promotion d'un développement durable supposent la remise en cause du modèle occidental de développement libéral imposé par les institutions internationales", a-t-elle estimé.  Les ONG demandent aux Nations Unies de soutenir l'élaboration d'un modèle alternatif, plus réaliste et plus équitable de développement.  La privatisation de l'eau ne devrait pas être imposée aux pays en développement dont les populations n'ont pas les moyens de s'intégrer à court ou moyen terme dans une économie de marché, leur mode de vie n'étant pas construit sur un modèle monétarisé.  Il est donc injuste que la Banque mondiale, le FMI et l'OMC imposent un modèle économique libéral comme conditionnalité d'aide aux pays en développement, a dit la représentante dont le point de vue a reçu le soutien des représentants de la jeunesse, des femmes et des peuples autochtones.


"La santé physique, mentale et spirituelle des peuples suppose une approche intégrée du développement qui met l'être humain au centre de tout", a déclaré le représentant des peuples autochtones qui a plaidé pour que le savoir traditionnel de ces peuples soit reconnu, protégé et utilisé dans la promotion du développement durable.  Prenant la parole après lui, les organisations de jeunesse se sont plaintes de l'exclusion dont se sentent victimes les jeunes dans les prises de décision.  Le Sommet mondial de Johannesburg devrait cautionner la convention de l'Organisation internationale du travail relative au droit au travail.  Il est anormal que les jeunes soient de plus en plus frappés par le chômage et que les structures d'éducation et d'enseignement soient négligées dans de nombreuses régions du monde, privant la jeunesse du savoir.  Les jeunes sont en faveur de processus de production et de consommation qui protègent les ressources non renouvelables de la planète.  "Représentant la moitié de l'humanité, les femmes sont incontournables dans la promotion du développement durable et demandent que l'équité entre les sexes devienne une réalité", a déclaré la représentante de ce groupe.  Elles souhaitent que leur rôle soit reconnu, et que leur participation à la vie économique et sociale soit assurée.  Elles demandent un accès égal aux ressources et à leur contrôle, et réclament le respect de leurs droits à l'éducation et au travail.  La santé et la sécurité des femmes doivent aussi être assurés et la pauvreté ne devrait pas les frappe de manière disproportionnée. Il est essentiel, a estimé la représentante du groupe des organisations féminines, que les résultats du Sommet de Johannesburg reflètent les stratégies qui seront proposées au Comité préparatoire par les femmes, qui demandent par exemple que le montant de 0,1% des budgets nationaux soit alloué à l'éducation des femmes et des filles, et que toutes les politiques élaborées aux niveaux national et mondial tiennent compte de données sexospécifiques.  Les femmes dénoncent d'autre part les conditions dans lesquelles est accordée l'aide publique au développement qui est généralement une aide liée dont les bénéfices ne vont pas aux populations du pays dit "récepteur", a dit la représentante des femmes, en souhaitant que les fonds d'aide ne soient pas automatiquement reversés aux entreprises des pays riches qui sont choisies par leurs Etats comme fournisseurs de biens et services aux pays du Sud.  L'APD devrait plutôt servir au renforcement des entreprises locales en leur permettant de fournir ces biens et services et en stimulant le marché national de l'emploi.


Premier représentant gouvernemental à intervenir dans le débat, le représentant de la Suède a exprimé son soutien au rôle que peuvent jouer les autorités et les gouvernements locaux dans la mise en oeuvre du plan "Action 21".  La Suède souhaiterait que les mesures qui seront adoptées à Johannesburg soient centrées sur la bonne gouvernance et l'utilisation judicieuse des ressources.  Concernant les conditions de travail que génère la mondialisation, la Suède est d'avis qu'il faudrait renforcer le mandat de l'OIT.  La délégation suédoise à Johannesburg sera dirigée par le Premier ministre qui sera entouré de cinq ministres, a précisé le représentant.  "Les petits pays pensent que seules des démarches intégrées et la participation de tous les secteurs sociaux et parties prenantes à ses préparatifs pourront assurer la réussite du Sommet mondial sur le développement durable", a estimé le représentant de Samoa.  Le réchauffement du climat mondial reste le problème le plus urgent pour des pays comme le nôtre, a-t-il dit, en demandant que le protocole de Kyoto soit mis en oeuvre sur une durée courte et déterminée, et que l'exploitation des ressources marines soit plus étroitement régulée.  La représentante de l'Autriche a apporté le soutien de sa délégation au rôle que les femmes doivent jouer dans l'utilisation et le contrôle des ressources naturelles de la planète.  Etant responsables des choix de consommation des ménages et des familles elles sont le facteur le plus puissant qui pourrait changer les modes de consommation qui actuellement ne sont pas soutenables.  D'autres délégations, dont celles des Pays-Bas et de l'Allemagne ont estimé qu'une participation substantielle des organisations de consommateurs au Sommet de Johannesburg pourrait permettre d'aborder efficacement la question des modes de consommation non durables.  Pour sa part, le Brésil a déclaré qu'il comptait travailler avec la délégation du groupe scientifique et technologique, qui représente un secteur dont les apports sont indispensables aux pays en développement pour une meilleure maîtrise du développement et de nouveaux modes de production propres.  Le représentant de la Finlande a estimé que la création de partenariats était indispensable pour une mise en oeuvre harmonieuse d'Action 21.  Les partenariats permettraient d'être sensibles aux intérêts des différentes parties prenantes et permettraient d'impliquer les femmes, les jeunes, les populations autochtones et les travailleurs dans la réflexion et la mise en oeuvre des programmes de développement et dans leur suivi et contrôle.


Revenant sur la question de l'utilisation de l'eau, le représentant des milieux d'affaires et des industries a dit que la plupart des industries ont, depuis un certain nombre d'années, pris des mesures pour limiter la quantité d'eau qu'elles utilisent dans leurs processus de production.  Les industriels reconnaissent que l'eau est une des ressources essentielles à préserver.  Mais ils demandent qu'on reconnaisse le coût élevé des mécanismes de préservation que l'on exige d'eux.  Les gouvernements devraient assumer la principale responsabilité de la fourniture d'eau douce aux populations.  Le secteur privé peut jouer un rôle d'appoint en la matière en aidant à la conception de systèmes et à la formation et au renforcement des capacités.  Il peut même investir dans les systèmes de production et de distribution d'eau potable, quand certains gouvernements n'en ont pas les moyens, mais il faut que ce processus soit rentable, a estimé le représentant.  "Reconnaissant la place centrale de l'eau dans le développement durable, la communauté scientifique soutient une approche intégrée pour la gestion et l'exploitation des ressources en eau douce de la planète", a dit le représentant de ce groupe.  Tous les partenaires au développement devraient donc faire partie des discussions qui auront lieu sur l'eau douce à Johannesburg, et les scientifiques reconnaissent l'importance des connaissances que détiennent les peuples autochtones sur les questions touchant à l'eau et aux écosystèmes.


La majorité des pauvres sont agriculteurs ou pêcheurs, a relevé un représentant des agriculteurs, en estimant que les accusations de pollution des nappes souterraines et des sources aquifères qui sont souvent portées contre les agriculteurs sont en partie injustifiées.  Ces pollutions doivent d'abord être imputées aux technologies et aux produits agricoles produits par l'industrie, a estimé le représentant en proposant que le Sommet de Johannesburg soit le début d'un dialogue fructueux entre agriculteurs, scientifiques et industriels en faveur de la création de nouveaux modes de production plus propres.  Pour le représentant des agriculteurs européens, "les agriculteurs ne peuvent seuls porter le poids des responsabilités et des conséquences de l'exploitation de la terre ou des pollutions occasionnées par leurs activités de production".  Les agriculteurs européens défendent le rôle interventionniste de leurs Etats à travers la "Politique agricole commune" pratiquée par l'Union européenne.  Cette politique est efficace dans la protection de l'environnement et la sauvegarde des terres.  L'amélioration des pratiques agricoles a un coût qui ne peut être supporté par les agriculteurs eux-mêmes ou par les consommateurs et qui par conséquent doit être pris en charge par les gouvernements, a estimé le représentant.  Après cette intervention, des critiques ont été portées par les ONG contre le système de subventions que versent les pays du Nord à l'agriculture, et aux secteurs des transports aériens et de l'énergie, et qui, selon les ONG "portent atteinte aux échanges internationaux et créent la pauvreté au Sud, ayant ainsi un impact direct sur l'état de l'environnement, celui-ci étant toujours affecté par les besoins créés par pauvreté".  Le Sommet de Johannesburg, ont estimé les ONG, devra envoyer un message fort sur cette question à l'Organisation mondiale du commerce.


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