LE CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL TIENT UNE REUNION D'INFORMATION SUR LE RELEVEMENT ET LA RECONSTRUCTION DE L'AFGHANISTAN
Communiqué de presse ECOSOC/6000 |
Conseil économique et social
Réunion d’information
LE CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL TIENT UNE REUNION D'INFORMATION SUR LE RELEVEMENT ET LA RECONSTRUCTION DE L'AFGHANISTAN
Il entend les exposés de l’Administrateur
et de l’Administratrice associée, chargée de la prévention des crises et du relèvement
Le Conseil économique et social, réuni ce matin sous la présidence de M. Ivan Simonovic (Croatie), a tenu une séance d’information au cours de laquelle il a entendu M. Mark Malloch Brown, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) dans le cadre de la mission qui lui a été confiée au nom du Secrétaire général, de mener les efforts des Nations Unies pour le relèvement et la reconstruction de l'Afghanistan. M. Mark Malloch Brown était accompagné de Mme Julia Taft, Administratrice associée et Directrice du Bureau du PNUD pour la prévention des crises et du relèvement, qui a participé la semaine dernière à Kaboul, à la première Réunion de suivi de la mise en oeuvre de la Conférence internationale pour l’assistance à la reconstruction de l’Afghanistan qui s’était tenue à Tokyo les 21 et 22 janvier 2002.
Au cours de sa présentation, M. Malloch Brown a précisé que de nombreux obstacles continuent de se poser à la reconstruction de l’Afghanistan, en citant particulièrement le problème de la sécurité, qui a un impact critique sur la capacité des organisations d’aide à travailler efficacement. Il a néanmoins évoqué quatre points de satisfaction dans la mise en place de l’assistance à l’Afghanistan. Tout d’abord le travail réalisé par l’Autorité intérimaire, qui a créé un sens réel, bien que fragile, de paix et d’unité nationale dans le pays, puis la coordination exemplaire du système des Nations Unies, qui permet au Représentant spécial du Secrétaire général, M. Lakhdar Brahimi, et à son adjoint chargé des questions de développement et humanitaires, M. Nigel Fisher, d’apporter un soutien efficace aux autorités, par la rationalisation et l’harmonisation sur le terrain des ressources, personnels et actions derrière une stratégie commune de reconstruction du pays. Le troisième point de satisfaction est le bon partenariat qui s’est établi en Afghanistan entre les Nations Unies et les institutions de Bretton Woods, grâce aux leçons apprises au Timor oriental et dans d’autres cas d’intervention dans des zones sortant de conflits. Enfin, il a souligné l’appui généreux et soutenu apporté par la communauté internationale lors de la Conférence internationale qui s’était tenue à Tokyo les 21 et 22 janvier 2002, au cours de laquelle les donateurs ont promis 1,8 milliard de dollars pour la première année et 4,5 milliards de dollars pour les 30 mois qui suivront la mise en place d’un gouvernement élu à Kaboul.
Par ailleurs, L’Administrateur du PNUD et la Directrice du Bureau du PNUD pour la prévention des crises et du relèvement ont répondu aux questions des délégations concernant notamment les moyens mis en place pour le retour des réfugiés, le financement de la Loya jirga, le financement du programme «Retour à l’école», le problème du développement de la culture du pavot, les menaces que posent les chefs de guerre à la stabilité et à la sécurité, l’état des relations avec les pays voisins, la réintégration des anciens combattants, ou encore la préservation du patrimoine culturel afghan et la promotion des droits de la femme.
Exposés
M. MARK MALLOCH BROWN, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a déclaré que la première réunion du Groupe de mise en oeuvre et de suivi des engagements de la Conférence des donateurs pour le relèvement et la reconstruction de l’Afghanistan, organisée à Tokyo au mois de janvier dernier, s’est tenue la semaine dernière à Kaboul. De nombreux obstacles continuent de se poser à la reconstruction de l’Afghanistan, a dit M. Malloch Brown en citant particulièrement le problème de la sécurité, qui a un impact critique sur la capacité des organisations d’assistance à travailler efficacement. Le leadership du Chef de l’Autorité intérimaire de l’Afghanistan (AIA), M. Hamid Karzaï, et le travail que fait son Gouvernement, ont créé un sens réel, bien que fragile, de paix et d’unité nationale dans le pays. Ces progrès sont favorables à la reconstruction, ce qui est assez rare dans la plupart des zones sortant de conflits armés, a dit M. Malloch Brown. Le programme et la campagne lancés en faveur du retour des enfants dans les écoles, lancés au lendemain du Nouvel An afghan par M. Karzaï, ont permis, avec le soutien de l’UNICEF et d’autres partenaires comme le Comité Suède-Afghanistan, de faire reprendre le chemin de l’école à 1,7 million de garçons et de filles. Les femmes sont représentées aujourd’hui, au plus haut niveau, au sein du Gouvernement. Les fonctionnaires sont régulièrement payés dans 13 des provinces du pays, et un budget national a été préparé et approuvé, alors qu’un projet de cadre national de développement sera bientôt finalisé.
Ensuite, a dit M. Malloch Brown, nous pouvons nous féliciter de l’assistance bien coordonnée du système des Nations Unies à l’Autorité intérimaire de l’Afghanistan (AIA), qui permet au Représentant spécial du Secrétaire général, M. Lakhdar Brahimi, et à son adjoint chargé des questions de développement et humanitaires, M. Nigel Fisher, d’apporter un soutien efficace aux autorités. Comme recommandé dans le rapport Brahimi, nous avons réussi, sur le terrain, à rationaliser et harmoniser nos ressources, nos personnels et nos actions derrière une stratégie commune de reconstruction d’un pays. Le troisième point de satisfaction est le bon partenariat qui s’est établi en Afghanistan entre les Nations Unies et les institutions de Bretton Woods. Les leçons que nous avons apprises au Timor oriental et, dans d’autres cas d’intervention dans des zones de conflits, sont mises à profit en Afghanistan. Sur le terrain, le PNUD a pu fournir une aide logistique, comprenant entre autres, des bureaux, des outils de communication et un certain nombre d’autres facilités à de nombreux organismes d’intervention humanitaire et économique installés à Kaboul, dont la Banque mondiale. Le PNUD travaille d’autre part avec la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement pour faire une évaluation des besoins qui sera transmise aux donateurs de la Conférence de Tokyo.
Agissant au nom du Groupe de développement du système de l’ONU, le PNUD a aussi joué un rôle central dans la création du Fonds d’affectation spéciale pour la reconstruction de l’Afghanistan. Enfin, le quatrième point remarquable dans le programme de relèvement et de reconstruction de ce pays et dont il faut se féliciter, est l’appui généreux et soutenu qu’apporte la communauté internationale à l’AIA. Lors de la Conférence de Tokyo, les donateurs ont promis 1,8 milliard de dollars pour la première année et 4,5 milliards de dollars pour les 30 mois qui suivront la mise en place d’un gouvernement élu à Kaboul. A ce jour, 300 millions de dollars ont été déboursés, et l’AIA a dû réduire ses besoins pour la première année. La Loya jirga devant déboucher sur la formation d’un gouvernement démocratiquement choisi, nous espérons que le versement des fonds va s’accélérer.
Avec l’aide de M. Brahimi, le PNUD a mobilisé une somme de 65,8 millions de dollars destinés au Fonds de l’AIA, pour permettre à l’Autorité intérimaire de verser les émoluments de ses fonctionnaires et faire face à ses besoins les plus immédiats. Nous travaillons d’arrache-pied pour favoriser le versement de ressources stables en faveur de la reconstruction, les versements de la communauté internationale étant quelque peu insuffisants. Placée à la croisée des chemins en Asie centrale, l’Afghanistan est un exemple de lieu où la communauté internationale et les grandes puissances devraient essayer de réparer les torts et les erreurs du passé. Nous essayons de transformer les engagements pris à Tokyo en réalité. Nous allons aider l’Inde à organiser une réunion de coordination Sud-Sud sur l’Afghanistan, qui aura lieu les 23 et 24 mai prochain et qui devrait permettre aux pays en développement d’échanger leurs expériences en matière de reconstruction et de voir comment ils peuvent aider l’Afghanistan. Avant cela, nous assisterons à la réunion ministérielle conjointe qui aura lieu à Téhéran les 18 et 19 mai, et qui réunira le Pakistan, l’Iran et l’Afghanistan.
Parlant ensuite des actions spécifiques lancées par le PNUD, M. Malloch Brown a rappelé que le PNUD avait aidé à la création du Fonds en faveur de l’AIA qui a permis à l’Autorité intérimaire de faire face à ses responsabilités essentielles au cours de ses six premiers mois d’existence. Le PNUD a aussi fourni une assistance technique à l’AIA, comme la mise à sa disposition d’experts pour créer la Commission de la fonction publique. Le PNUD a, d’autre part, lancé une série de projets à impact rapide, dont le programme de relèvement et d’emploi, qui a permis à 9 600 personnes de trouver un emploi. Le PNUD facilite le transfert de technologies de l’information et de la communication dans le pays et y favorise le retour de membres qualifiés de la communauté afghane exilée à l’étranger. Les prochaines étapes à accomplir seront, premièrement, le lancement d’un programme de coordination des aides humanitaires et des actions de reconstruction et de développement dans chaque domaine entrant dans le cadre des priorités de reconstruction socioéconomique que définira le Gouvernement afghan. Ensuite, le PNUD lancera un programme de renforcement des capacités en faveur de la mise sur pied d’une administration publique efficace et opérationnelle. Nous appuierons le Gouvernement en fournissant des services essentiels à la Loya jirga et à la Commission de la fonction publique. Enfin, le PNUD aidera le Gouvernement afghan dans le domaine de la création de structures de justice et de sécurité. Nous serons aussi aux côtés des autorités afghanes pour le règlement des questions touchant à la démobilisation des ex-combattants et la création d’une police nationale.
Mme JULIA TAFT, Administratrice associée et Directrice du Bureau du PNUD pour la prévention des crises et du relèvement, présentant les résultats de la première Réunion de suivi de la mise en oeuvre de la Conférence internationale de Tokyo pour l’assistance à la reconstruction de l’Afghanistan, a déclaré qu’il régnait une réelle effervescence à Kaboul, qui s’est engagée dans la reconstruction après avoir subi une destruction massive. Dans ce contexte, elle s’est félicitée de la reprise des activités économiques dans la capitale afghane, notamment grâce au financement par le PNUD de divers programmes d’activités, mais aussi au soutien de la communauté internationale. Elle a également salué le succès de la mise en place du Fonds d’affectation spéciale qui a permis le
règlement des émoluments de plus de 90 000 fonctionnaires avec tous les avantages que cela crée sur l’économie locale mais aussi sur le fonctionnement et l’efficacité de ces administrations. Pour la première fois depuis longtemps, a-t-elle ajouté, la population afghane a confiance en son administration. En ce qui concerne tout particulièrement la tenue la semaine dernière de la première Réunion de suivi de la mise en oeuvre de la Conférence internationale de Tokyo sur l’assistance à la reconstruction, elle a salué la motivation et la fierté avec laquelle les Afghans ont organisé cette première grande conférence internationale. Elle a précisé que les responsables afghans ont présenté aux donateurs et aux participants leurs engagements à l’égard de la transparence de la coordination de l’aide au processus.
Mme Julia Taft a insisté sur le fait que cet engagement afghan est une condition incontournable et préalable pour voir les donateurs continuer à se mobiliser, et s’est félicitée du bon fonctionnement de la direction afghane qui n’a été établie qu’il y a quatre mois. Un élan qui s’est constitué, a-t-elle ajouté, pour essayer de profiter des dividendes de la paix, et le programme “Retour à l’école” est un exemple de programme à destination de la population. En ce qui concerne la Loya jirga, elle a rappelé que le processus par lequel les 350 communautés vont choisir leurs délégués, est un processus démocratique apprécié et reconnu par tous les Afghans et qu’il devra aboutir, entre le 10 et 16 juin 2002, à la nomination d’un gouvernement de transition. En conclusion, elle a formé le voeu, que grâce aux donateurs internationaux, des formations puissent être assurées le plus rapidement possible à destination de la police et de l’armée, dans le souci de voir la sécurité garantie dans toutes les villes afghanes.
Répondant aux questions posées par les représentants du Royaume-Uni, de l’Allemagne, des Pays-Bas, des Etats-Unis, de l’Iran, du Cameroun, du Pakistan, du Bhoutan, de la Fédération de Russie, de l’Inde, de la France, du Japon et de l’UNESCO, M. MARK MALLOCH BROWN a déclaré qu’en matière de soutien financier en faveur de l’Afghanistan, le modèle idéal est un fonds multilatéral pour les questions d’ordre général appuyé par des fonds bilatéraux à destination de programmes précis et complémentaires, insistant sur la cohérence du programme de reconstruction du pays. Trop de donateurs risquent de créer une industrie en soi, a-t-il prévenu. Il faut veiller à ce que les 1,8 milliard plus les 700 millions demandés pour le fonctionnement du gouvernement soient effectivement versés au cours de la première année, a-t-il encore ajouté. Il a également précisé que 300 millions de dollars avaient déjà été versés. Nous avons mieux démarré que prévu, a-t-il déclaré, mais il s’agit maintenant d’entretenir une dynamique qui risque de s’essouffler, car je suis d’un optimisme prudent. En ce qui concerne la sécurité, il a déclaré qu’elle est liée aux aspects de développement durable et de l’avenir que l’on pourra proposer aux Afghans. Evoquant le problème des stupéfiants, il l’a défini comme une illustration de l’absence de l’Autorité intérimaire, dans certains domaines et dans certaines régions, et a souligné la nécessité de mettre en place une autorité nationale en matière de lutte contre les stupéfiants.
M. Malloch Brown a dit que le système de l’ONU mettait un accent particulier sur l’amélioration du statut des femmes afghanes. Concernant les remarques de la Fédération de Russie, il serait plus simple à long terme de parvenir à créer un seul système de coordination basé sur une structure légère et simplifiée, a dit M. Malloch Brown. Répondant aux soucis exprimés par le Japon concernant l’information, le PNUD les partage et fera son possible pour avoir des rencontres d’information régulière avec l’ECOSOC. Quant aux remarques de l’Inde, une approche plus intégrée permettra de parvenir à une meilleure coordination et à une
participation accrue des Afghans à la reconstruction de leur pays. Nous sommes d’autre part d’accord avec le représentant de la France: il ne pourra y avoir de reconstruction sans sécurité. C’est pourquoi le PNUD se soucie de la création d’un cadre législatif national et de celle d’une police. La paix a besoin d’être encouragée, mais les actions favorables à son soutien requièrent aussi des moyens et des ressources. Au cours des débats du Conseil de sécurité, on a parlé de la question de la distribution des ressources d’aide à toutes les couches et les franges de la population afghane. Le système de l’ONU peut facilement suivre les recommandations formulées à cet égard par le Conseil, mais les institutions de Bretton Woods, de part la spécificité de leur mandat respectif auront beaucoup plus de mal à le faire, leur fonctionnement étant moins souple sur le plan politique.
Répondant à son tour à cette série de questions, Mme JULIA TAFT a donné des précisions supplémentaires sur les versements des émoluments. Dans ce contexte, elle a rappelé que 350 000 fiches de paie ont été réglées, mais que cela ne touchait pas toutes les provinces. En ce qui concerne l’éducation, elle a précisé que 15 000 nouveaux enseignants ont été recrutés dans le cadre de la mise en oeuvre du programme “Retour à l’école” et qu’il s’agissait maintenant d’identifier ces personnes. Elle a également précisé que l’Administration intérimaire ne paye les salaires de ces enseignants que pendant la période de transition, et que c’est le fonds d’affection spécial qui devra ensuite prendre le relais. Evoquant les problèmes humanitaires, elle a regretté que les offres de contributions ne couvrent que 40% des besoins humanitaires, alors que la spécificité des institutions humanitaires est justement qu’elles ont besoin d’énormes sommes maintenant, en particulier dans une période qui est marquée par le retour de nombreux réfugiés et personnes déplacées qu’il faut réintégrer.
Mme Julia Taft a indiqué que des réunions se tiendront tous les six mois en vue de faire participer toutes les parties prenantes et les groupes de mise en oeuvre des opérations de reconstruction de l’Afghanistan à la définition d’un cadre de coordination de leurs actions. Des opportunités existent cependant, a-t-elle ajouté, pour les Etats qui voudraient intervenir de manière bilatérale. Concernant la situation de femmes afghanes, elles ont besoin qu’on les aide à réaliser ce qu’elles choisissent elles-mêmes de faire. Nous ne pouvons pas aller plus vite que les intéressées elles-mêmes, et nous nous devons de respecter les actions lancées par le Ministère afghan de la promotion de la femme, a estimé Mme Taft.
Par ailleurs, Mme Taft a précisé que le budget de la Loya jirga est de 16 millions de dollars qui sont couverts par le Fonds de l’Autorité intérimaire. Ce budget servira également, a-t-elle précisé, à couvrir les frais des observateurs, que les dirigeants afghans ont demandé, pour surveiller le scrutin de cette instance dans les différentes régions afghanes. S’agissant des problèmes posés par la culture du pavot, elle a regretté que ces plants n’aient pas été arrachés avant la récolte. C’est un travail difficile, a-t-elle ajoutée, mais il faut trouver des marchés et débouchés pour les cultures de substitution. Elle a également évoqué la sécurité des femmes qui ont toujours peur de se promener sans “burqa”, mais s’est félicité de la nomination de plusieurs femmes au sein de la Loya jirga comme le signe d’une certaine évolution de mentalités.
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