LA CONFERENCE DU DESARMEMENT ENTAME LA TROISIEME ET DERNIERE PARTIE DE SA SESSION DE 2002
Communiqué de presse CD/G/539 |
CD/G/539
31 juillet 2002
LA CONFERENCE DU DESARMEMENT ENTAME LA TROISIEME ET DERNIERE PARTIE DE SA SESSION DE 2002
Les membres de la Conférence saluent une initiative informelle présentée
par un groupe de cinq ambassadeurs visant à sortir la Conférence de l'impasse
GENÈVE, le 31 juillet -- La Conférence du désarmement a repris les travaux de sa session de 2002, tenant ce matin la première séance publique de la troisième et dernière partie de la session, qui durera jusqu'au 13 septembre. Elle a notamment entendu l'Algérie qui, au nom de quatre autres délégations, a indiqué qu'un document informel contenant les propositions du «groupe des cinq ambassadeurs» concernant le programme de travail de la Conférence avait été circulé afin d'être examiné par les membres de la Conférence. Sont également intervenus le Commissaire fédéral pour le désarmement et la limitation des armements de l'Allemagne, ainsi que les représentants du Japon, de la République de Corée, de l'Afrique du Sud, de la Malaisie, de la République islamique d'Iran et du Bélarus.
M. Hans-Joachim Daerr, Commissaire fédéral pour le désarmement et la limitation des armements de l'Allemagne a souligné que les événements terrifiants du 11 septembre 2001 ont fait prendre conscience, dans le monde entier, de la dimension mondiale de la menace terroriste et de ses liens évidents avec la prolifération d'armes de destruction massive. Il a jugé prioritaire la négociation d'un traité interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d'armes et a souligné que la Conférence ne devait pas ignorer la menace que représentent les informations récentes selon lesquelles des terroristes tenteraient d'obtenir les moyens de fabriquer des «bombes sales» permettant de disséminer du matériel radiologique. M. Daerr a déploré l'impasse actuelle sur les questions de désarmement nucléaire, de la prévention d'une course aux armements dans l'espace, de l'interdiction de la production de matières fissiles et des garanties négatives de sécurité. L'Allemagne n'épargnera aucun effort pour aider la Conférence à sortir de cette impasse.
Le Président de la Conférence, l'ambassadeur d'Allemagne, M. Volker Heinsberg, a souligné qu'il fallait que les positions évoluent pour arriver à un terrain d'entente sur le programme de travail. Pour sa part, la présidence allemande continuerait à déployer tous ses efforts pour permettre à la Conférence de reprendre ses travaux de fond. Il a salué à cet égard l'initiative du groupe des cinq ambassadeurs présentée ce matin par l'Algérie.
La prochaine séance plénière de la Conférence du désarmement aura lieu le jeudi 8 août 2002, à 10 heures.
(à suivre)
Déclarations
M. HANS-JOACHIM DAERR, Commissaire fédéral pour le désarmement et la limitation des armements de l'Allemagne, a déclaré que, depuis plus d'une décennie maintenant, le «centre de gravité» s'agissant du contrôle des armements, en raison de changements du contexte international, s'est nettement déplacé vers la prévention de la prolifération des armes de destruction massive et le contrôle des armements au niveau des conflits locaux. Les événements terrifiants du 11 septembre 2001 ont également fait prendre conscience, dans le monde entier, de la dimension mondiale de la menace terroriste et de ses liens évidents avec la prolifération d'armes de destruction massive et l'aggravation de nombreux conflits locaux. C'est pourquoi le contrôle des armements et le désarmement s'inscrivent dans un processus permanent de réévaluation et d'adaptation à de nouveaux défis et à des conditions changeantes du contexte international. S'agissant de la limitation des armements, deux pierres d'achoppement entravent tout progrès. L'une est liée à la question de savoir quels résultats pourraient être atteints par la négociation et des accords multilatéraux plutôt que par des mesures prises, sans doute de façon coordonnée, au niveau national. L'autre obstacle est constitué par la pratique traditionnelle d'établir des liens entre des questions qui sont arrivées à un «degré de maturité» différent ou qui ont un rang de priorité différent pour les différentes parties dans la négociation. À cet égard également, il convient d'adopter une approche équilibrée et se demander si des progrès partiels ne sont pas préférables à pas de progrès du tout.
M. Daerr a déclaré que l'Allemagne reste attachée à l'objectif commun de renforcer le régime de non-prolifération existant. La non-prolifération et le désarmement nucléaire vont de pair et le Traité sur la non-prolifération nucléaire demeure la pierre angulaire de la non-prolifération nucléaire. La négociation, au sein de la Conférence, d'un traité non-discriminatoire, multilatéral et internationalement et efficacement vérifiable interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d'armes et autres dispositifs explosifs nucléaires, est une question prioritaire pour l'Allemagne. Des informations récentes selon lesquelles des terroristes tenteraient d'obtenir les moyens de fabriquer des «bombes sales» permettant de disséminer du matériel radiologique par explosion sont alarmantes. La Conférence ne doit pas ignorer ce nouvel aspect de problèmes anciens.
Pour l'Allemagne, il est en outre urgent de disposer d'un instrument multilatéral pour limiter la prolifération de missiles. L'Allemagne estime aussi que la question du contrôle des armements dans l'espace est importante et doit être traitée par la Conférence dans le cadre d'un débat positif. Les armes de petit calibre et les armes légères, les débris de guerre explosifs et les mines terrestres continuent de poser un problème humanitaire grave, particulièrement pendant et après des conflits régionaux.
Pour conclure, M. Daerr a déploré l'impasse actuelle sur les questions de désarmement nucléaire, de la prévention d'une course aux armements dans l'espace, de l'interdiction de la production de matières fissiles et des garanties négatives de sécurité. Ces quatre domaines ont une importance particulière et il est à la fois réaliste et souhaitable de réaliser des progrès, ne serait-ce que pas à pas. L'Allemagne n'épargnera aucun effort en ce sens et salue toute initiative permettant de sortir de l'impasse actuelle.
M. MOHAMED-SALAH DEMBRI (Algérie) a informé la Conférence que, pendant l'intersession, un groupe de cinq ambassadeurs appartenant à des groupes géographiques différents s'est rencontré pour réfléchir ensemble sur les voies et les moyens qui permettraient à la Conférence de sortir de l'impasse où elle se trouve depuis de nombreux mois : ils ont rassemblé sur un document informel et fait circuler quelques idées sous forme d'ébauche d'un programme de travail.
Intervenant au nom de ce groupe d'ambassadeurs, M. Dembri a déclaré que cette initiative se situait dans la continuité des efforts de ces dernières années et entretient avec toutes les propositions précédentes un lien de parenté.
M. Dembri a tenu à préciser que cette initiative ne prétend pas offrir une approche textuelle figée ni assujettie à une quelconque conditionnalité. Par sa nature même, le texte qui circule demande à être corrigé, amendé, enrichi par toutes les délégations pour qu'il puisse, en dernier lieu, évoluer et subir les modifications de fond et de forme qui en feront alors «un texte élu par tous et pour tous».
Le groupe de cinq ambassadeurs a depuis reçu des propositions d'amendement fort utiles et, à cet égard, il souhaiterait que ce travail de corrections et d'amendements connaisse sa plus grande amplification dans les dix jours à venir, afin qu'une version modifiée et révisée de l'avant-projet initial soit arrêtée et circulée à tous les membres avant la fin du mois d'août.
MME KUNIKO INOGUCHI (Japon), constatant que la Conférence du désarmement se trouvait toujours dans l'impasse, a souligné que les efforts communs de ses membres doivent se poursuivre pour en sortir. À cet égard, l'initiative que vient de présenter l'Algérie au nom de cinq ambassadeurs offre une occasion historique de commencer des travaux sur le fond sur les quatre questions clé d'importance primordiale pour de nombreux États membres, à savoir, les garanties de sécurité négatives, le désarmement nucléaire, un traité interdisant la production future de matières fissiles et la prévention d'une course aux armements dans l'espace.
Tout en étant disposé à participer activement aux débats sur les autres questions, le Japon accorde une importance de premier plan à des négociations sur un traité interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d'armes et autres dispositifs explosifs nucléaires, qui contribuerait grandement à la non-prolifération nucléaire et constituerait un élément essentiel du désarmement nucléaire.
Mme Inoguchi a souhaité proposer trois «suggestions modestes» s'agissant de l'«initiative des cinq ambassadeurs». S'agissant d'abord des méthodes de travail, l'initiative s'appuie sur l'historique de la Conférence, qui a négocié avec succès des instruments de désarmement sur la base de convergences de vues recueillant l'assentiment de tous et permettant à la Conférence est de promouvoir la sécurité et la paix internationales sans porter atteinte à la sécurité de chacun. La représentante japonaise a toutefois souligné que l'articulation de cette idée dans un texte requiert un examen attentif afin d'éviter toute confusion. S'agissant
ensuite d'un traité sur les matières fissiles, le Japon est attaché au mandat d'un Comité spécial tel que défini par le Coordonnateur spécial sur la question (document CD/1299), qui représente la seule approche réaliste pour la négociation d'un tel traité. Enfin, le Japon estime que la proposition de modifier l'article 28 du règlement intérieur se heurte à des divergences au sein de la Conférence et suggère plutôt que la décision sur le programme de travail soit prise «nonobstant» l'article 28.
Mme Inoguchi a tenu à souligner que l'initiative des cinq ambassadeurs était encore dans une phase évolutive et a estimé qu'il était impérieux que la Conférence saisisse cette occasion pour répondre à la volonté collective des citoyens du monde entier en reprenant ses travaux de fond de promotion de la paix et de la sécurité internationales.
M. EUI-YONG CHUNG (République de Corée) a déclaré que depuis l'ouverture de la session de cette année, au mois de janvier, il avait écouté attentivement toutes les déclarations faites par les membres de la Conférence et d'autres orateurs de haut niveau qui ont présenté diverses approches concernant un large éventail de sujets d'intérêt commun. En dépit de différences dans ces approches, M. Chung a noté certains points communs. Il a notamment relevé la conviction largement partagée que le climat mondial de sécurité avait subi des changements importants suite aux événements récents, en particulier les attaques terroristes du 11 septembre contre les États-Unis et les accords entre les États-Unis et la Fédération de Russie pour réduire des armes nucléaires offensives. Dans ces circonstances, le multilatéralisme, au lieu de perdre du terrain, s'est réaffirmé comme principe fondamental pour le désarmement et la non-prolifération. En même temps, des efforts multilatéraux doivent aller de pair avec les efforts régionaux, bilatéraux et plurilatéraux.
M. Chung a déclaré que la Conférence du désarmement, en tant qu'unique instance multilatérale pour la négociation dans le domaine du désarmement, doit sortir de l'impasse dans laquelle elle se trouve depuis longtemps et commencer d'urgence ses travaux de fond. Aujourd'hui, il faut une direction et une volonté communes pour placer le monde à l'abri de la menace réelle que représentent les armes de destruction massive, telles que la maladie du charbon et les «bombes sales», et réduire le danger de prolifération non seulement vers les États qui peuvent causer des préoccupations, mais aussi vers les acteurs non étatiques.
M. THOMAS MARKRAM (Afrique du Sud) a fait part de l'appui de son pays pour l'initiative de la Chine et de la Fédération de Russie sur la prévention d'une course aux armements dans l'espace présentée le 27 juin sous la forme d'un document de travail. L'Afrique du Sud considère la prévention d'une course aux armements comme une des questions prioritaires dans le domaine de la paix internationale et de la sécurité. L'Afrique du Sud a eu l'occasion de commenter cette initiative s'agissant en particulier des conditions d'entrée en vigueur, et souhaite vivement examiner la question plus avant dans le cadre d'un Comité spécial.
M. Markram a déclaré que l'Afrique du Sud avait présenté, le 23 mai, un document de travail sur la portée et les conditions de mise en œuvre d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles (CD/1671). Un additif à ce document explicite la proposition sud-africaine sous la forme d'un diagramme.
M. RAJA REZA (Malaisie) a également salué le document de travail présenté conjointement par la Chine et la Fédération de Russie le 27 juin dernier s'agissant d'«éléments possibles pour un futur instrument juridique international sur la prévention du déploiement d'armes dans l'espace, la menace ou l'utilisation de force contre des objets spatiaux». En effet, la Malaisie est préoccupée par la question de la mise au point et d'essais de systèmes d'armes dans l'espace et l'utilisation de systèmes spatiaux à des fins militaires. Si on n'y met pas un frein, cette intensification des activités militaires pourrait déclencher une course aux armements dans l'espace. La Malaisie estime que seul un instrument juridique interdisant le déploiement d'armes dans l'espace et la prévention de la menace ou l'utilisation de force contre des objets spatiaux pourrait éliminer la menace croissante de militarisation de l'espace. En tant qu'unique instance multilatérale de négociation sur le désarmement, la Conférence du désarmement est le lieu approprié pour négocier un tel traité. À cet égard, la Malaisie appuie la création d'un comité spécial sur la prévention de la course aux armements dans l'espace.
En conclusion, M. Reza a lancé un appel à tous les États, en particulier à ceux qui possèdent des capacités spatiales avancées, pour qu'ils contribuent activement à l'objectif de l'utilisation pacifique de l'espace et de la prévention d'une course aux armements dans l'espace, et qu'ils s'abstiennent de prendre des mesures contraires à cet objectif et aux traités existants, dans l'intérêt du maintien de la paix et la sécurité internationales. En ce qui concerne le traité qui est proposé, la Malaisie estime que la coopération et l'assistance pour des utilisations pacifiques de l'espace doivent constituer des éléments prédominants d'un tel traité. Il a été suggéré qu'une nouvelle mesure de renforcement de la confiance pourrait être la déclaration d'un moratoire sur les essais et le déploiement d'armes dans l'espace.
M. ALI ASGHAR SOLTANIEH (République islamique d'Iran), intervenant au sujet de l'initiative des cinq ambassadeurs annoncée par l'ambassadeur d'Algérie, a relevé des éléments positifs visant à sortir la Conférence de l'impasse et lui permettre de jouer un rôle plus actif. L'initiative tient compte des positions des diverses délégations et le représentant iranien a estimé que la Conférence était sur la bonne voie. M. Soltanieh a déclaré que l'Iran présenterait des observations plus détaillées ultérieurement.
M. VLADIMIR MALEVICH (Bélarus) a indiqué que, comme il n'avait pas reçu le texte de l'initiative des cinq ambassadeurs, il se limiterait aujourd'hui à quelques commentaires. Il a déclaré que tout initiative visant à sortir la Conférence de l'impasse dans laquelle elle se trouve mérite d'être saluée et doit recevoir un examen approfondi de la part des membres de la Conférence.
M. Malevitch a souhaité également informer la Conférence que le Président du Bélarus avait signé, le 15 juillet 2002, un décret sur la question des armes à feu légères, le pays s'acquittant ainsi de ses obligations au titre du document adopté sur la question le 24 décembre 2000 par l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). L'adoption de ce décret permettra de renforcer la sécurité européenne grâce à une série de mesures sur les armes à feu légères.
M. VOLKER HEINSBERG, Président de la Conférence, a souligné que depuis la dernière plénière de la Conférence, le 27 juin, la Présidence avait tenu des consultations pour recueillir les positions des délégations et parvenir à un accord sur les quatre questions en suspens. Il a toutefois pu constater qu'il fallait que les positions évoluent pour arriver à un terrain d'entente. Pour sa part, la présidence allemande continuerait à déployer tous ses efforts pour permettre à la Conférence de reprendre ses travaux de fond. M. Heinsberg a déclaré qu'il avait fait appel aux délégations, le 27 juin, afin qu'elles présentent de nouvelles propositions. Il a salué à cet égard l'initiative du groupe des cinq ambassadeurs présentée ce matin par M. Dembri.
S'agissant de la question des armes radiologiques dont a parlé aujourd'hui le Commissaire fédéral pour le désarmement et la limitation des armements de l'Allemagne, le Président a regretté que les efforts dans ce domaine n'aient pas encore été couronnés de succès et il se propose d'examiner la question de savoir si des tentatives nouvelles doivent être faites dans cette voie. M. Heinsberg a souligné que le risque de voir tomber de telles armes entre certaines mains justifie que la Conférence s'occupe de ces questions. Il a invité les délégations à participer aux consultations qu'il mènera la semaine prochaine concernant le programme de travail de la Conférence.
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