LA RECONSTRUCTION DE L'AFGHANISTAN DOIT SE POURSUIVRE, UN AN APRÈS LA SIGNATURE DE L'ACCORD DE BONN
Communiqué de presse AG/1374 |
Assemblée générale AG/1374
68ème séance – matin 6 décembre 2002
LA RECONSTRUCTION DE L'AFGHANISTAN DOIT SE POURSUIVRE,
UN AN APRÈS LA SIGNATURE DE L'ACCORD DE BONN
La plupart des délégations s'inquiètent de
l'insécurité persistante et de la reprise de la culture du pavot
L'Assemblée générale, qui examinait aujourd'hui la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales, a adopté sans vote une résolution*, présenté par l'Allemagne, appelant à poursuivre l'assistance internationale d'urgence en faveur de la reconstruction et l'aide au développement. Au cours du débat, les délégations se sont accordées à reconnaître les progrès accomplis depuis la signature de l’Accord de Bonn il y a tout juste un an, qui a permis la mise en place, sous les auspices des Nations Unies, d’une Administration de transition représentative de la diversité ethnique et religieuse nationale. Le représentant de l’Afghanistan a fait état de la création d’institutions démocratiques à l'initiative du Président Karzaï, ainsi que d'impressionnants résultats enregistrés à la suite d'une campagne de scolarisation sans précédent. Il s’est également félicité du retour des femmes à la vie politique, sociale et économique.
Toutefois, des efforts considérables restent à fournir, ont fait valoir de nombreuses délégations, notamment dans le domaine de la sécurité, menacée par la résistance de factions armées ainsi que par les rivalités tribales et régionales. L'assassinat de l'ancien Vice-Président Haji Qadir, comme la tentative avortée sur la personne du Président Karzaï ont souligné la nécessité de mettre sur pied et de former rapidement une armée régulière et une police afghanes avec l’appui de la communauté internationale. La plupart des délégations se sont par ailleurs inquiétées du retour à la culture du pavot, alors que le trafic transnational de stupéfiants qui en découle sert à financer les activités de groupes extrémistes. Les représentants de la République islamique d'Iran et de la Fédération de Russie ont préconisé la définition et l'adoption d'une stratégie de lutte contre les narcotiques par les autorités afghanes, de même que la mise en œuvre de solutions alternatives pour les paysans.
Enfin, le représentant du Pakistan a fait part des doléances de son gouvernement au sujet de l'accueil et de la prise en charge, depuis de nombreuses années, de millions de réfugiés afghans, dont le retour à leur pays d'origine n’a été que partiel en raison de perspectives d'avenir insuffisantes. Une reconstruction durable devrait donc reposer sur une approche intégrée capable à la fois de mettre en œuvre une réforme des institutions et d'impulser un élan économique, afin que l’Afghanistan devienne le carrefour du Moyen-Orient et de l'Asie centrale.
L'Assemblée générale a par ailleurs adopté une résolution** par laquelle elle a décidé d'inscrire un point supplémentaire à l'ordre du jour de la session en cours consacré à l'Année internationale du riz 2004 (devenu le point 168 de l'ordre du jour) et qui sera examiné directement en séance plénière, a précisé le Président. Il a également annoncé que la cinquante-septième session, qui devait achever ses travaux le 11 décembre prochain, se prolongera jusqu'au mercredi 18. Enfin, le mercredi 11 décembre, l'Assemblée générale sera saisie du point 3 de l'ordre du jour, consacré à l'examen du Comité de vérification des pouvoirs.
Outre ceux déjà cités, les représentants des pays suivants ont pris la parole au cours du débat: Danemark (au nom de l'Union européenne), Etats-Unis, Ouzbékistan, Fédération de Russie, Tadjikistan, Malaisie, Ukraine, Qatar, Arabie saoudite, Egypte, Inde, République de Corée, Philippines, Mongolie, Turquie, Kazakhstan, Norvège et Japon.
L'Assemblée générale reprendra ses travaux le lundi 9 décembre à 10 heures.
*A/57/L.56
**A/57/L.250/Add.3.
ASSISTANCE INTERNATIONALE D’URGENCE POUR LE RETABLISSEMENT DE LA PAIX ET DE LA NORMALITE EN AFGHANISTAN ET POUR LA RECONSTRUCTION DE CE PAYS DEVASTE PAR LA GUERRE; LA SITUATION EN AFGHANISTAN ET SES CONSEQUENCES POUR LA PAIX ET LA SECURITE INTERNATIONALES
Assistance internationale d'urgence pour le rétablissement de la paix et de la normalité en Afghanistan et pour la reconstruction de ce pays dévasté par la guerre (A/57/410)
Dans ce rapport, le Secrétaire général décrit les problèmes humanitaires incessants auxquels fait encore face l'Afghanistan au terme d'une année de profonds changements politiques et militaires: après la chute des Taliban en novembre 2001, l'Accord de Bonn a été signé le 5 décembre, puis l'Autorité intérimaire créée le 22 décembre, à laquelle a succédé en juin 2002 l'Administration de transition. En mars dernier, le Conseil de sécurité a créé, par la résolution 1401 (2002) la Mission d'assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).
Au terme de la période considérée, l'assistance humanitaire et l'aide au redressement se sont traduites par d'importants progrès, notamment l'aide au retour de plus d'un million de réfugiés; le retour à l'école de plus de trois millions d'enfants; l'augmentation de 90 % du taux d'inscription des filles à l'école. Mais les difficultés humanitaires de grande ampleur persistent; la forte vulnérabilité socioéconomique générale, induite par le conflit prolongé, la sécheresse et les déplacements de population, se manifeste notamment par une malnutrition infantile chronique généralisée et par le retour à la culture du pavot, qui ont peu de chance de disparaître dans les dix-huit prochains mois.
Dans ce contexte, note le Secrétaire général, il importe d'agir dans un certain nombre de domaines clefs et notamment de réinsérer de façon durable les rapatriés, d'axer davantage les opérations d'assistance humanitaire sur le relèvement et d'obtenir un soutien financier interrompu des donateurs de manière à couvrir les besoins les plus urgents, mais aussi les opérations à long terme de relèvement et de reconstruction. Or le Secrétaire général déplore que les flux de ressources au profit des activités humanitaires et de relèvement se soient radicalement ralentis ces derniers mois, faisant peser une grave menace sur les programmes qui devraient permettre de répondre aux besoins les plus urgents du pays.
La situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (A/57/487)
Le troisième rapport périodique du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan rend compte des travaux que poursuit l’Administration de transition en application de l’Accord de Bonn et décrit notamment une série d’initiatives destinées à améliorer la capacité du secteur public, à encourager la croissance du secteur privé et à réformer la politique financière de manière à permettre au Gouvernement de percevoir des recettes, de les allouer et de les utiliser de manière transparente et efficace. L’élaboration par le Gouvernement afghan d’un cadre et d’un budget de développement national représente une démarche essentielle dans ce processus, souligne le rapport, qui fournit par ailleurs des informations à jour sur l’activité des diverses commissions qui ont été créées par l’Accord de Bonn (Commission de la fonction publique, Commission constitutionnelle, Commission des droits de l’homme et Commission judiciaire) ainsi que d’un certain nombre d’autres commissions créées par le Président Karzai de sa propre initiative à la Loya Jirga.
Sont également décrites les mesures prises par la communauté internationale pour apporter une assistance humanitaire et appuyer les activités de reconstruction que poursuit le Gouvernement afghan. Des progrès notables ont été réalisés dans les domaines de la santé (en particulier en ce qui concerne les vaccinations), de l’enseignement primaire et de l’assistance aux rapatriés (réfugiés et personnes déplacées à l’intérieur du pays), précise le Secrétaire général. Le rapport décrit également les mesures prises par l’Organisation des Nations Unies pour aider le Gouvernement à définir des priorités dans les secteurs clefs du relèvement et de la reconstruction. Toutefois, un obstacle majeur à l’application de l’Accord de Bonn demeure la détérioration du climat sécuritaire, déplore le rapport, indiquant que des efforts ont été faits pour mettre un terme aux conflits qui opposent les dirigeants encore puissants de certaines régions, mais regrettant que nombre d’actes de terrorisme et de violence politique ont été commis.
La Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) continue à patrouiller à Kaboul de manière efficace, assure le Secrétaire général, mais des mesures de sécurité plus vigoureuses sont nécessaires de la part de la communauté internationale en dehors de la capitale. Le rapport souligne que les efforts se poursuivent pour constituer une nouvelle force militaire et de police afghane et assurer sa formation et, simultanément, pour préparer le désarmement et la démobilisation des combattants qui ne seront pas recrutés dans les structures sécuritaires de l’État.
Dans ses recommandations, le Secrétaire général souligne que, à court terme, la communauté internationale, en collaboration avec ses partenaires afghans, peut prendre des mesures pour améliorer effectivement la situation en matière de sécurité. On ne trouvera nulle part de preuves plus concrètes de cette situation qu’à Kaboul, où la FIAS effectue des patrouilles régulières, avec d’excellents résultats, ajoute-t-il, avant de souligner qu’une expansion de la FIAS est le meilleur instrument dont nous disposons pour améliorer la sécurité dans l’ensemble de l’Afghanistan. Les Afghans de toutes les régions et de toutes les conditions sociales continuent à le demander, insiste le Secrétaire général.
Assistance internationale d’urgence pour le rétablissement de la paix et de la normalité en Afghanistan et pour la reconstruction de ce pays dévasté par la guerre; la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (A/57/L.56)
Aux termes de la résolution A intitulée «La situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales», l’Assemblée générale, réaffirmant que l’Organisation des Nations Unies doit continuer de jouer un rôle central et impartial dans les efforts déployés par la communauté internationale en vue d’aider les Afghans à consolider la paix en Afghanistan et à reconstruire leur pays et leurs institutions ainsi que dans les efforts visant à fournir une aide humanitaire, à promouvoir le relèvement et la reconstruction et à faciliter le retour en bon ordre des réfugiés, réitère son ferme appui à l’Autorité transitoire en vue de la pleine application de l’Accord de Bonn et approuve ses priorités telles qu’elles sont présentées dans le Cadre pour le développement national et dans son budget, à savoir la remise en état de l’infrastructure économique, le renforcement du Gouvernement central, la constitution d’une armée nationale et d’une force de police placées sous contrôle civil, l’exécution des activités de démobilisation/réinsertion et de déminage, le rétablissement du système judiciaire, le respect des droits de l’homme et la lutte contre la production illicite et le trafic de drogues.
L’Assemblée générale demande à tous les groupes afghans de renoncer à l’utilisation de la violence, de respecter les droits de l’homme, d’assumer leurs obligations en vertu du droit international humanitaire, de respecter l’autorité de l’Autorité transitoire et d’appliquer intégralement les dispositions de l’Accord conclu à Bonn (Allemagne), aboutissant à la convocation d’une Loya Jirga constitutionnelle et à la tenue d’élections nationales en 2004. Elle souligne qu’il importe que les femmes participent pleinement et sur un pied d’égalité à la vie politique, économique, culturelle et sociale dans tout le pays et demande à l’Autorité transitoire de protéger et promouvoir l’égalité de droits des femmes et des hommes. Elle se félicite des efforts déployés par l’Autorité transitoire pour respecter pleinement les obligations internationales de l’Afghanistan en ce qui concerne les stupéfiants, demande à l’Autorité transitoire de redoubler d’efforts pour éliminer la récolte annuelle du pavot, et à la communauté internationale d’aider l’Autorité transitoire à mettre au point et à appliquer des programmes détaillés et coordonnés visant à éliminer la culture illicite du pavot en Afghanistan.
L’Assemblée demande aux pays donateurs qui ont annoncé une aide financière à la Conférence internationale sur l’aide à la reconstruction de l’Afghanistan, tenue à Tokyo les 21 et 22 janvier 2002, d’assumer promptement les engagements qu’ils ont pris et prie tous les États Membres de fournir une assistance humanitaire et d’appuyer l’Autorité transitoire, notamment en fournissant un appui budgétaire direct ainsi qu’une assistance à long terme pour la reconstruction et le relèvement économiques et sociaux de l’Afghanistan, surtout dans les provinces, sur la base du Programme d’assistance immédiate et transitoire des Nations Unies en faveur du peuple afghan. Par ailleurs, elle demande à la communauté internationale de poursuivre son assistance au grand nombre de réfugiés afghans et de personnes déplacées pour faciliter leur retour dans des conditions de sécurité et en bon ordre et leur réinsertion durable dans la société afin de contribuer à la stabilité de tout le pays.
Aux termes de la résolution B intitulée «Assistance internationale d’urgence pour le rétablissement de la paix et de la normalité en Afghanistan et pour la reconstruction de ce pays dévasté par la guerre», se déclarant gravement préoccupée par les effets persistants de plusieurs décennies de conflit en Afghanistan et demeurant profondément préoccupée par le problème que constituent des millions de mines terrestres antipersonnel et les munitions non explosées qui représentent un grave danger pour la population civile et un obstacle majeur au retour des réfugiés et des populations déplacées, à la reprise des activités agricoles, à la fourniture de l’aide humanitaire et aux efforts de relèvement et de reconstruction, l’Assemblée générale demande à la communauté internationale d’aider l’Autorité transitoire afghane à démobiliser et à réinsérer les enfants touchés par la guerre et à fournir aux enfants afghans des services d’éducation et de santé dans toutes les régions du pays, et demande instamment à tous les groupes afghans de s’abstenir de recruter ou d’employer des enfants en violation des normes internationales.
L’Assemblée générale souligne le rôle de coordonnateur pour le système des Nations Unies du Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afghanistan en vue de permettre à ce pays de passer sans heurt de la phase des secours humanitaires à celles du relèvement puis de la reconstruction, et accueille avec satisfaction l’établissement du Fonds d’affectation spéciale pour la reconstruction de l’Afghanistan et du Fonds d’affectation spéciale pour le maintien de l’ordre public en tant que mécanismes pour la mobilisation d’un appui international à l’Afghanistan.
L’Assemblée générale encourage la communauté internationale à participer activement et à contribuer financièrement à ces efforts de relèvement et de reconstruction, et l’encourage également à fournir une assistance par l’intermédiaire du budget de développement national de l’Autorité transitoire afghane et de centrer son attention sur le renforcement des capacités des Afghans. Elle demande à l’Autorité transitoire et à la communauté internationale d’intégrer une perspective sexospécifique dans tous les programmes d’aide humanitaire, de relèvement et de reconstruction futurs, et de s’efforcer activement de promouvoir la participation entière et sur un pied d’égalité des hommes et des femmes à ces programmes et de veiller à ce qu’ils en bénéficient de la même manière.
Par ailleurs, l’Assemblée condamne vivement tous les actes de violence et d’intimidation perpétrés contre le personnel humanitaire ainsi que le personnel des Nations Unies et le personnel associé, et déplore les pertes en vies humaines et les sévices infligés à leurs membres. Elle demande instamment à l’Autorité transitoire et aux pouvoirs locaux de garantir la sûreté, la sécurité et la liberté de mouvement de tous les membres du personnel des Nations Unies et du personnel humanitaire ainsi que leur libre accès, en toute sécurité, à toutes les populations touchées et de protéger les biens de l’Organisation des Nations Unies et des organismes d’aide humanitaire, y compris ceux des organisations non gouvernementales.
Déclarations
M. CLIFFORD SIBUSISO MAMBA (Swaziland), au nom du Président de l'Assemblée générale a reconnu les progrès accomplis en Afghanistan depuis la mise en place d’une Administration de transition en application de l’Accord de Bonn. Toutefois, l’ampleur de la tâche qui reste à fournir a conduit le Groupe de travail sur l’Afghanistan à se réunir à deux reprises, des sujets tels que la reconstruction de la sécurité et des institutions ayant été évoqués. De nombreuses observations ont également permis de replacer l’Afghanistan dans son contexte régional. M. Mamba a rappelé que les aspects économiques ont fait l’objet d’une attention spéciale, en particulier celui des politiques de lutte à moyen terme contre les drogues, l’engagement des donateurs ou le problème des réfugiés. Il a souligné par ailleurs la nécessité de reconnaître le recensement national en Afghanistan. Un sommet international devrait prochainement être organisé, a-t-il annoncé, où seront abordées plusieurs questions essentielles telles que celles des bailleurs de fonds et l’amélioration de la coopération avec les forces de police pour la lutte contre la culture et le trafic de stupéfiants.
M. GUNTER PLEUGER (Allemagne), présentant le projet de résolution intitulé “Assistance internationale d’urgence pour le rétablissement de la paix et de la normalité en Afghanistan et pour la reconstruction de ce pays dévasté par la guerre; la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales» au nom de ses coauteurs, a salué les progrès réalisés en Afghanistan depuis la tenue il y a un an de la Conférence de Bonn. L’Accord de Bonn, a-t-il dit, a posé les fondations du renouveau de l’Afghanistan et depuis, la Loya Jirga d’urgence a été convoquée en juin dernier, le Président Karzai a été élu, l’Autorité de transition établie, et les différentes commissions prévues par l’Accord ont été mises sur pied. La police et l’armée afghanes ont été mises en place récemment, a indiqué ensuite le représentant qui a insisté sur l’importance de coopérer avec l’Afghanistan dans le domaine de la formation, de la police et de l’armée, et du renforcement des capacités. La présente résolution, si elle est adoptée, entend lancer un appel à la communauté internationale afin qu’elle poursuive ses efforts en appui au processus de reconstruction et de sécurisation de l’Afghanistan, a expliqué M. Pleuger, conformément à ce qui a été arrêté en début de semaine à Bonn au cours d’une rencontre entre le Président Karzai et les principaux donateurs dont le but consistait à évaluer les mesures prises au cours de l’année écoulée. L’Allemagne reste pour sa part engagée aux côtés de l’Afghanistan, a assuré le représentant, tant dans le domaine bilatéral que par le biais des Nations Unies. M. Pleuger a précisé que l’Allemagne assistait l’Afghanistan dans les domaines éducatif, des droits de l’homme et de la formation de la police, et a rappelé que dans les prochaines semaines, son pays prendrait le commandement de la Force internationale d’assistance à la sécurité de l’Afghanistan (FIAS) conjointement avec les Pays-Bas.
M. RAVAN FARHÂDI (Afghanistan) a rappelé les progrès accomplis depuis la signature l’an dernier, sous les auspices des Nations Unies, de l’Accord de Bonn: le retour à la paix et la stabilité, qui s’est traduit par le retour de 2 millions de réfugiés; la campagne d’éducation qui a vu plus de trois millions d’enfants s’inscrire à l’école, dont 30% de filles, et l’augmentation de 90% du taux de scolarisation des petites filles; la reprise du rôle des femmes dans la vie politique, sociale et économique; la création d’institutions dont la commission des droits de l’homme et celle chargée de rédiger la constitution. Il s’est également félicité de la tenue d’une Loya Jirga d’urgence, et de l’élection du Président Karzaï.
Malgré ces résultats importants, le représentant a souligné que l’opération Liberté immuable continuait dans différentes zones. Des activités terroristes ont été menées contre la population civile, dont l’assassinat tragique de l’ancien vice-Président Haji Qadir et le complot contre le Président Karzai. Les derniers Taliban et alliés extrémistes n’ont pas abandonné leur tentative d’entraver la consolidation de la paix dans le pays. M. Farhâdi a également souligné l’importance de former une armée régulière à cette intention.
Contre ces menaces, la reconstruction des institutions civiles et politiques auront un impact direct, de même que la création d’emplois, et la matérialisation de projets à impact rapide, qui permettrait de faciliter l’élimination de la culture du pavot, et de lui substituer d’autres moyens de subsistance. Le besoin d’une vaste assistance internationale se fait donc ressentir pour cette reconstruction, qui permettra l’embauche de centaines de milliers de travailleurs et privera de nombreux chefs locaux de leurs partisans, attirés par la perspective d’un emploi.
Pour l’heure, un seul projet a été financé, celui d’une autoroute entre Kabul et Kandahar, qui reste insuffisant dans un pays qui a besoin d’infrastructures routières. En effet, l’Afghanistan doit devenir un carrefour entre Sud et Nord, Est et Ouest, Moyen-Orient et Asie centrale. De même, il existe de grandes possibilités d’exploitation des minéraux et des richesses du sous-sol dans ce pays. Le projet de résolution indique clairement que la communauté internationale devrait fournir davantage de moyens a rappelé le représentant.
Mme ELLEN MARGRETHE LOJ (Danemark), s’exprimant au nom de l’Union européenne a estimé qu’en dépit des progrès réalisés depuis la signature des Accordsde Bonn (mise en place du Comité de rédaction de la constitution, de la Commission indépendante des droits de l’homme et de la Commission de la réforme judiciaire notamment), il restait encore beaucoup à faire, notamment en ce qui concerne la réforme de l’armée nationale. La représentante a également insisté sur l’enjeu essentiel que constituaient les élections de 2004, encourageant à ce titre l’Autorité de transition et la MANUA à préparer activement la tenue de ces élections, afin qu’un gouvernement représentatif de la diversité ethnique de la population puisse voir le jour. Elle a en outre souligné la nécessité pour le gouvernement d’élargir son influence au-delà de la capitale, appelant à cet égard la communauté internationale à lutter contre les forces qui s’opposent à l’autorité nationale, qu’elles se trouvent à l’intérieur ou à l’extérieur du pays. La représentante s’est par ailleurs inquiétée de l’accroissement de la culture du pavot dans le pays et a affirmé que l’Union européenne était prête à aider l’autorité de transition à élaborer des programmes pour lutter contre cette culture illégale.
La représentante a également insisté sur la dégradation du climat d’insécurité en Afghanistan et a souligné la nécessité de renforcer l’armée et la police nationales, se félicitant à ce titre du Plan de réforme sur l’armée nationale élaboré récemment. Elle a fait valoir l’importance de la coordination de l’action humanitaire à court et à long terme et a encouragé la MANUA à poursuivre son rôle de coordinateur. Enfin, la représentante a rappelé que l’Union européenne avait largement contribué aux besoins humanitaires du pays et entendait apporter une contribution substantielle à la reconstruction de l’Afghanistan, se félicitant à ce titre des engagements pris cette semaine à Petersberg.
M. JAVAD ZARIF (République islamique d'Iran) a salué les progrès considérables enregistrés en Afghanistan depuis un an, sous la direction du Président Karzai et de l'Autorité de transition qui ont permis de jeter les bases sur lesquelles le peuple afghan peut espérer reconstruire son pays et restaurer de bonnes relations avec les pays voisins. Néanmoins, a-t-il poursuivi, les ennemis de la paix n'ont pas renoncé à faire obstruction à la normalisation et à la restauration de la stabilité. Dans le domaine de la sécurité, les efforts du Gouvernement n'ont pas encore porté leurs fruits. Les groupes hostiles au processus de paix ne ménagent pas leurs efforts pour poursuivre leurs activités comme l'ont montré les tentatives d'assassinat contre le Président Karzai en septembre, l'assassinat du Vice-Président ou les attaques à la bombe à Kaboul et ailleurs. Compte tenu de l'effondrement de l'état de droit, les groupes extrémistes pourraient tirer profit des conflits en cours entre groupes rivaux dans différentes régions.
Le plus sérieux défi que l'Afghanistan doit relever aujourd'hui est donc celui de la sécurité, a insisté le représentant. A cet égard, il a jugé que la création d'une armée et d'une police afghanes était une priorité et qu'il fallait à cet effet augmenter l'aide de la communauté internationale. Le représentant s'est par ailleurs inquiété de la culture du pavot, déjà planté pour la saison prochaine: le trafic de la drogue est entre les mains de gang internationaux et de leurs complices locaux, a-t-il rappelé et il est évident que les profits de ce trafic alimentent les activités des groupes extrémistes, tout comme le trafic de drogues s'accompagne également du trafic d'armes et de personnes. Le représentant a estimé que la définition d'une stratégie de lutte contre les narcotiques devait figurer en tête de l'ordre du jour des autorités afghanes et de la communauté internationale.
Enfin, il a estimé que son pays avait montré au cours de l'année sa détermination à rétablir des relations de bon voisinage avec l'Afghanistan et, s'agissant du retour de 1,7 million de réfugiés, a expliqué que l'Iran respectait les termes de l'accord qu'il a signé avec le HCR et les autorités afghanes; mais que dans le cadre de sa lutte contre le terrorisme, il avait renforcé les contrôles à sa frontière et intercepté les Afghans et autres réfugiés sans papiers, renvoyant plusieurs centaines d'entre eux vers leurs gouvernements respectifs ces dernières années.
M. RICHARD S. WILLIAMSON (Etats-Unis) a rappelé l’ampleur de la tâche à accomplir pour la reconstruction de l’Afghanistan, et s’est félicité du succès de l’opération Liberté immuable, qui a permis à ce pays de se débarrasser d’un parasite terroriste. La tenue d’élections régulières, qui a vu l’arrivée à la direction de l’Administration de transition d’un Gouvernement représentatif de la diversité nationale, est également un succès, de même que le retour de 2 millions de réfugiés. Toutefois, il a souligné la fragilité de la situation humanitaire dans le pays, aggravée par l’instabilité politique qui ressort de la tentative d’assassinat du Président Karzaï, ainsi que des attaques contre les forces de coalition et des travailleurs humanitaires et d’une série de bombardements sur Kaboul.
La communauté internationale doit améliorer son partenariat avec l’Afghanistan en vue de faciliter la transition de l’assistance humanitaire vers la reconstruction et se concentrer sur des projets de nature à aider les Afghans à s’aider eux-mêmes, a préconisé le représentant. Il a par ailleurs recommandé de mettre un terme à la culture et à la production du pavot. Rappelant l’importance des contributions financières des Etats-Unis, comme celles de plusieurs autres bailleurs de fonds, le représentant a encouragé la communauté internationale à donner davantage, compte tenu des besoins criants de l’Afghanistan. Il a ainsi déclaré que le co-financement par les Etats-Unis, le Japon et l’Arabie saoudite de la reconstruction et la réhabilitation de l’autoroute entre Kaboul et Kandahar ne serait pas suffisant à couvrir le coût d’un tel projet, à l’heure où tant d’autres restent à réaliser.
M. ALISHER VOHIDOV (Ouzbékistan) a salué la mise en place du processus de Bonn et de la résolution 1383 du Conseil de sécurité et s’est félicité du changement radical de la situation dans le pays en un an. Cependant, il s’est dit préoccupé par la situation aux frontières notamment, en ce qui concerne le trafic de stupéfiants. Soulignant que la menace du terrorisme international était toujours présente, le représentant s’est dit particulièrement inquiet de l’augmentation de la culture du pavot et a affirmé que la production de l’opium afghan pourrait bientôt atteindre le niveau des années 80. A cet égard, il a estimé que les mesures contre la production et le commerce illicite de stupéfiants étaient piètrement coordonnées et a appelé la communauté internationale à mener cette lutte collectivement et en parallèle avec la mise en place de sources de commerce légales dans le pays. Par ailleurs, le représentant a appelé à l’élargissement des forces internationales de sécurité dans le pays de toute urgence, notamment dans les régions au-delà de Kaboul, afin que le pays ne sombre pas dans une insécurité généralisée. Il a par ailleurs estimé que l’arsenal de guerre qui s’était accumulé dans le pays en 20 ans constituait une menace pour la sécurité du pays et a jugé impératif de démilitariser l’Afghanistan au plus vite. Par ailleurs, le représentant a affirmé que l’Ouzbékistan participait de façon active à l’acheminement de l’aide humanitaire en Afghanistan et que le Ministère des situations d’urgence en Ouzbékistan coordonnait efficacement la gestion et l’acheminement de l’aide humanitaire. Enfin, le représentant a déploré que les entreprises d’un grand nombre de pays de l’Asie centrale n’aient pas encore d’informations détaillées sur les programmes et projets de reconstruction et de remise en état de l’Afghanistan.
M. GENNADY M. GATILOV (Fédération de Russie) a rappelé que depuis la signature de l'Accord de Bonn il y a un an et malgré la période courte écoulée depuis au regard de l'Histoire, beaucoup de progrès avaient été accomplis grâce à la création d'un système politique établi en Afghanistan qui fonctionne et qui reflète pleinement le caractère multiethnique de la société. Il a salué le rôle décisif des Nations Unies, du Représentant spécial du Secrétaire général, M. Brahimi et s'est félicité des décisions du Conseil de sécurité qui a créé la Mission d'assistance des Nations Unies à l'Afghanistan, la MANUA et autorisé le déploiement de la Force internationale (FIAS). Il faut continuer d'appliquer les dispositions de la feuille de route établie à Bonn, prévoyant notamment la tenue d'une Loya Jirga constitutionnelle en 2004.
Mais la sécurité demeure source de préoccupation, a-t-il relevé en estimant que les partisans des Taliban continuaient de se cacher, attendant la revanche et qu'il ne fallait pas leur laisser la moindre occasion de le faire. Aussi le représentant a-t-il appelé à la création d'une armée et d'une police afghanes fortes, seul moyen selon lui de garantir la stabilité sur l'ensemble du territoire. Il a jugé essentiel que la communauté internationale maintienne son unité et son soutien au processus de paix afghan. Le représentant a également évoqué la menace de la drogue qui sort du territoire afghan et souhaité la définition d'une stratégie globale sous les auspices des Nations Unies et avec la participation des pays voisins de l'Afghanistan.
L'année qui vient de s'écouler, a-t-il ajouté, a montré la pertinence d'intégrer l'assistance humanitaire et les perspectives de développement à long terme. Il a souhaité une coordination plus efficace entre donateurs, programmes et fonds des Nations Unies, organisations internationales et ONG. Les priorités absolues, selon le représentant, dans les domaines sociaux et économiques sont d'organiser le retour des réfugiés, d'assurer un toit et de l'eau potable à la population, de reconstruire les infrastructures et de créer des emplois, tout en contrôlant la production de pavot, en offrant des alternatives viables, en réintégrant les anciens combattants dans la société et en mettant en œuvre le programme de déminage.
M. RASHID ALIMOV (Tadjikistan) s'est félicité de la mise en place d'un système politique efficace, premier pas pour le rétablissement d'une structure socioéconomique en Afghanistan. La présence de la Force internationale a également joué un rôle important pour le rétablissement de la confiance. Les femmes et les petites filles sont revenues à la vie publique et dans la société civile, tandis que des centaines de milliers de réfugiés sont rentrés au pays, a-t-il relevé. Le représentant a également salué le rôle des Nations Unies et celui de M. Brahimi. Mais le nœud afghan complexe s'est accru au cours des vingt dernières années, a-t-il souligné et on ne peut pas se satisfaire de la situation actuelle car une pause dans les activités menacerait les acquis du processus de paix; il ne faut pas permettre aux forces destructives de relever la tête. Sans la participation de toutes les forces de la société, il est difficile de parvenir à la paix et à la stabilité. Il est donc important d'oublier les différends pour les surmonter, sinon on ne pourra parvenir à l'unité du pays, a prévenu le représentant.
Il faut que la communauté internationale continuer d'apporter son aide au Gouvernement afghan qui ne pourrait sans elle atteindre son objectif de renaissance du pays. La paix et la stabilité sont entravées par le trafic de stupéfiants: les Taliban ont un système de production et d'écoulement de l'héroïne qui passe par l'Asie centrale pour toucher l'Europe. Le représentant a ainsi signalé que les prises de stupéfiants, notamment de l'héroïne, ont été multipliées par dix au Tadjikistan ces dernières années. Il faut créer une coalition efficace contre les stupéfiants et trouver des moyens de subsistance alternatifs qui aideraient également le Gouvernement afghan à satisfaire les besoins de base des paysans.
M. HASMY AGAM (Malaisie), tout en saluant les progrès réalisés depuis la Conférence de Bonn l’an dernier, a estimé que les défis posés à la sécurité de l’Afghanistan demeurent considérables malgré la chute du régime Taliban. Les chances de succès du processus de reconstruction de l’Afghanistan dépendent de trois facteurs, a-t-il indiqué, à savoir l’établissement de la sécurité, la restauration de la bonne gouvernance et la création d’opportunités économiques. Tout échec dans l’un de ces domaines conduirait à une fragmentation du pays et à la reémergence de tensions, a mis en garde M. Agam, avant d’exhorter la communauté internationale à intensifier son appui à l’établissement de la sécurité en contribuant à la formation d’une force de police et d’une armée à même de maintenir l’ordre et la stabilité dans l’ensemble du pays. Le représentant a également souhaité, dans la mesure du possible, que l’autorité de la Force internationale d’assistance à la sécurité de l’Afghanistan (FIAS), qui a largement contribué à sécuriser Kaboul, puisse s’étendre à l’ensemble du pays.
Par ailleurs, la Malaisie insiste sur la bonne conduite du processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) des anciens combattants engagés par le Gouvernement afghan par le biais de son programme de DDR mis en œuvre conjointement avec la MANUA. Rappelant ensuite que les femmes afghanes représentaient dans le passé 50% du service public, 40% des médecins et 70% des instituteurs, M. Agam a déploré que l’analphabétisme touche aujourd’hui 85% de la population féminine et que 8% seulement des fillettes soient scolarisées. A ce titre, il a insisté sur la nécessité de mettre en œuvre et de consolider des programmes dans les domaines de l’éducation, de la santé, de l’éducation civique et de la prise en charge de la petite enfance, notamment grâce à des organismes tels que le PNUD. Enfin, M. Agam a exhorté la communauté internationale à soutenir les efforts du Gouvernement afghan dans l’éradication de la production et de la commercialisation de l’opium en intervenant sur les facteurs qui sont à l’origine de la recrudescence de cette activité, à savoir l’insécurité et la pauvreté, entre autres.
M. MARKIYAN KULYK (Ukraine) a rappelé que l’Afghanistan venait de connaître sa première année de paix depuis dix ans, preuve de la validité de l’Accord de Bonn et des efforts concertés de la communauté internationale et de l’Autorité de transition afghane pour restaurer la paix et la sécurité sur le territoire. La Loya Jirga d’urgence, organisée en juin dernier, a constitué une étape majeure vers la mise en place de nouvelles institutions, a-t-il poursuivi, saluant notamment les efforts déployés dans les domaines de l’éducation, de la santé (notamment pour éradiquer la poliomyélite), des finances publiques (par la création d’une nouvelle monnaie), et pour assurer le retour des réfugiés. Il a fait part ensuite de la détermination de son pays à assister l’Afghanistan dans le domaine de l’action antimines et a invité la communauté internationale à envisager l’extension du mandat de la Force internationale d’assistance à la sécurité de l’Afghanistan (FIAS) au-delà de Kaboul. Par ailleurs, face à une situation sécuritaire encore incertaine, en raison de la persistance des seigneurs de la guerre, le représentant de l’Ukraine a apporté son soutien aux efforts internationaux visant à former une armée et une force de police afghanes. La lutte contre la production et la commercialisation des drogues est également un domaine dans lequel l’Autorité de transition doit pouvoir compter sur le soutien de la communauté internationale, en particulier pour financer, dans le cadre des programmes de reconstruction et de réhabilitation, des cultures de substitution.
M. SAAD AL-KUBAISI (Qatar) a souligné qu'on ne pouvait s'attendre à ce que le pays se relève sans l’unité du peuple afghan, tout en relevant l'instabilité persistante de la situation en Afghanistan. Depuis les Accords de Bonn, la situation a néanmoins beaucoup évolué: la communauté internationale et les organismes des Nations Unies ont joué un rôle louable et ont mis en place de nombreux programmes d'assistance. Parmi ces efforts, le représentant a cité l'aide apportée aux personnes déplacées et réfugiées pour les amener à rentrer chez elles. Mais l'Afghanistan doit continuer de faire face à de graves défis humanitaires, notamment à l'approche de l'hiver et a grandement besoin d'aide et d'assistance. D'autant que le Gouvernement central n'a pas les ressources pour faire face. Une réunion des Etats islamiques a été convoquée le mois dernier à Doha pour créer un Fonds d'affectation spéciale qui viendra en aide à ce pays, a indiqué le représentant. Ceci permettra de consolider les efforts internationaux dans les domaines alimentaire, sécuritaire, de lutte contre les stupéfiants, mais aussi de la formation et de l'aide au retour des réfugiés. L'espoir est d'arriver à 100 millions de dollars et une partie des fonds a déjà été collectée, a-t-il indiqué.
M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a salué le processus de reconstruction politique, économique et social lancé en Afghanistan à la suite de la signature de l’Accord de Bonn. Rappelant la nature des liens fraternels qui unissent ce pays et le sien, le Pakistan a déclaré avoir contribué à hauteur de 100 millions de dollars sur cinq ans aux efforts de restauration de l’Afghanistan et, malgré l’étroitesse de ses moyens, s’est dit prêt à collaborer plus avant. Le Pakistan s’est félicité de la coopération économique régionale croissante entre les deux pays et se montre favorable à un accord de libre-échange à l’avenir. Toutefois, la sécurité reste un problème majeur en Afghanistan, où les forces de coalition essaient toujours d’éradiquer les ultimes groupes de Taliban, situation à laquelle s’ajoutent les rivalités tribales et régionales. Pour ces raisons, le Pakistan suggère que la taille et le mandat de la mission de maintien de la paix soient redéfinis en conséquence. Conforté par la volonté des Américains d’accroître la sécurité en coopérant directement avec les Afghans, le Pakistan appuie la création d’une armée et d’une police nationales. Mais le Gouvernement afghan ne pourra à lui seul accomplir cette tâche, affairé à la reconstruction d’une infrastructure dévastée et d’une agriculture en friche. Par ailleurs, le représentant a rappelé que son pays avait pris en charge des millions de réfugiés afghans, dont le retour n’a été toutefois que partiel, en raison de perspectives d’emploi insuffisantes dans leur pays d’origine. Une reconstruction durable doit reposer sur une approche intégrée, a préconisé le représentant en conclusion.
M. FAWZI BIN ABDUL MAJEED SHOBOKSHI (Arabie saoudite) s’est félicité du processus de Bonn et de la constitution du Gouvernement afghan, estimant que si les réalisations effectuées cette année n’étaient pas suffisantes, elles permettaient tout de même d’être optimiste. Il a également salué la solidarité de la communauté internationale envers le peuple afghan et a rappelé que son pays avait, entre autres, versé 20 millions de dollars au budget afghan, contribué au fond des Nations Unies pour le versement des salaires du Gouvernement afghan à hauteur de 21 millions de dollars et fourni un montant d’un demi million de dollars au Fonds d’urgence des Nations Unies pour l’aide à l’Afghanistan. En outre, le représentant a rappelé que l’Arabie saoudite avait participé à de nombreuses réunions sur la reconstruction de l’Afghanistan, dont la réunion de haut niveau à Washington et la Conférence de Tokyo.
M. AHMED ABOUL GHEIT (Egypte) a estimé que l'année écoulée avait mis en lumière l'importance des actions prises par les Nations Unies sous la direction de M. Brahimi. Toutefois, la sécurité, la stabilité, la culture du pavot et le relèvement économique restent de sérieux défis à relever. Alors que la FIAS contribue à maintenir la sécurité à Kaboul, l'insécurité dans la majeure partie du pays continue de menacer les progrès politiques enregistrés. La situation sécuritaire a entraîné la fragmentation de l'économie et encouragé la culture du pavot.
La communauté internationale n'a d'autre option, a-t-il poursuivi, que de poursuivre inlassablement ses efforts pour assurer le succès du processus de Bonn, jusqu'à la tenue d'élections générales. La communauté internationale doit respecter l'indépendance de l'Afghanistan et le principe de non-ingérence dans les affaires de ce pays, car les dangers de l'ingérence sont bien connus. Le représentant a salué les efforts faits par la communauté internationale sous les auspices de l'ONU et a annoncé qu'il soutiendrait le projet de résolution.
M. V. K. NAMBIAR (Inde) s’est dit vivement préoccupé par la dégradation du climat d’insécurité en Afghanistan et notamment par les troubles aux frontières sud et sud-est du pays, provoqués sans aucun doute par des responsables Taliban et d’Al Qaeda qui reçoivent un soutien moral et matériel de leurs mentors par-delà les frontières. A cet égard, le représentant à jugé impératif de s’assurer que les forces extrémistes et fondamentalistes résurgentes soient rapidement neutralisées. Le représentant a en revanche salué la régression des tensions dans le nord de l’Afghanistan, due à une coopération accrue entre les dirigeants régionaux. Par ailleurs, le représentant a jugé impératif d’entreprendre les réformes des structures de sécurité du pays, se félicitant à ce titre de la décision de créer une armée nationale professionnelle et multiethnique et insistant sur l’importance du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion des anciens combattants afghans ainsi que des milices locales. Par ailleurs, le représentant a estimé que le Gouvernement afghan avait besoin de davantage de ressources afin de renforcer son autorité, d’établir une constitution et de préparer le pays aux élections de 2004. En outre, il s’est dit vivement préoccupé par l’augmentation de la culture du pavot dans le pays et a estimé essentiel que la communauté internationale poursuive son soutien à l’Afghanistan au cours de cette période difficile de développement afin que les forces néfastes d’autrefois ne refassent pas surface. Le représentant a également rappelé que l’Inde contribuait à la reconstruction de l’Afghanistan et avait déboursé cette année près d’un tiers des 100 millions de dollars alloués à l’aide à l’Afghanistan.
M. SUN JOUN-YUNG (République de Corée) a rappelé l'importance de la signature de l'Accord de Bonn qui a mis fin à 23 ans de violence et de lutte et ouvert de nouveaux espoirs pour le peuple afghan. Pour les Afghans, la convocation de la Loya Jirga d'urgence a marqué un tournant, en leur permettant de prendre pleinement part au processus politique. Le représentant a souhaité que toutes les factions puissent désormais travailler ensemble pour appuyer le processus de paix. Le cadre ainsi fourni est de bon augure pour la tenue des élections générales de 2004 qui permettront d'avoir un Gouvernement pleinement représentatif. Compte tenu de la fragile et complexe situation de la sécurité, cependant, la communauté internationale doit continuer d'apporter un soin particulier à ces problèmes.
Par ailleurs, le représentant a estimé que la pierre angulaire de toute paix et démocratie était le développement social et économique. A cet égard, il s'est félicité des efforts engagés par les Nations Unies, mais, pour lui, la communauté internationale doit accélérer l'aide fournie pour les programmes de reconstruction à long terme. Les actions multilatérales doivent en outre renforcer la capacité des Afghans à promouvoir la loi et l'ordre et il est important, à la fois pour le secteur public et privé, de bénéficier de ressources humaines efficaces à ce stade de l'Histoire. Enfin, le représentant a rappelé que son pays avait promis d'apporter 45 millions de dollars d'ici à 2004, lors de la Conférence des donateurs à Tokyo en janvier 2002.
M. ENRIQUE A. MANALO (Philippines) a salué la détermination dont a fait preuve le peuple afghan, au cours de l’année écoulée, pour reconstruire ce pays dévasté par des décennies de guerre civile. Il a exprimé sa satisfaction que la Loya Jirga ait pu être convoquée comme prévu et l’Autorité de transition ait été mise sur pied en temps et en heure. Il a ajouté que sous la direction du Président Karzai un mécanisme de gouvernance avait été mis en place, y compris une commission constitutionnelle et une commission judiciaire. Prenant acte de la Déclaration de Petersberg du 2 décembre dernier, adoptée à l’issue de la réunion de suivi des Accords de Bonn un an après, le représentant des Philippines a invité la communauté internationale à ne pas se détourner de l’Afghanistan, à consolider les acquis et à renforcer les capacités dans ce pays. Au premier rang des préoccupations, les Philippines considèrent que la sécurité et la stabilité du pays sont essentielles, a indiqué le représentant, demandant à cet égard l’extension de la Force internationale d’assistance à la sécurité au-delà de Kaboul. En outre, M. Manalo a invité la communauté internationale à maintenir son niveau de soutien financier pour la reconstruction de l’Afghanistan et a indiqué que les Philippines étaient disposées à assurer la formation des Afghans dans les domaines de la santé, de l’assainissement, de l’agriculture, de l’irrigation et des transports. En outre, afin de consolider la situation socio-économique de l’Afghanistan et d’encourager le retour des réfugiés et leur réinsertion, d’autres efforts doivent être déployés, a jugé le représentant, en particulier dans la lutte contre la production et la commercialisation du pavot, domaine qui exige de développer des cultures de substitution.
M. JARGALSAIKHANY ENKHSAIKHAN (Mongolie) a salué les progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’Accord de Bonn, en particulier la convocation en juin 2002 de la Loya Jirga d’urgence et la mise en place de l’Administration de transition, et s’est félicité de l’assistance internationale à la reconstruction déployée par le biais de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Afghanistan (MANUA). L’Administration transitoire afghane a pris des mesures considérables dans les domaines de l’éducation et du déminage, a poursuivi le représentant, soulignant par ailleurs les dispositions prises pour améliorer les conditions de sécurité dans les villes. Toutefois, a-t-il déploré, les problèmes de sécurité demeurent le principal obstacle aux efforts de reconstruction et de développement à l’échelle du pays, insistant ensuite sur la nécessité de créer un environnement de paix et de sécurité. La paix et la sécurité sont une condition indispensable pour acheminer l’aide humanitaire et consolider le pouvoir et l’autorité de l’Administration de transition. Le représentant a salué ensuite les réformes engagées par l’Administration de transition dans les domaines de la bonne gouvernance, de la démocratie, de la santé, et dans le domaine de l’économie, qui ont permis d’attirer de nouveau des investissements étrangers. M. Enkhsaikhan a invité la communauté internationale à venir en aide à l’Afghanistan dans le domaine du rapatriement et de la réinstallation des réfugiés. Il a exhorté l’Assemblée générale à tenir compte des réflexions échangées lors du Groupe de travail du 18 novembre sur le thème «Afghanistan: un an après» dans son approche de reconstruction de ce pays. Il a mis en garde contre les risques de déstabilisation pouvant résulter de l’ingérence de certains États voisins de l’Afghanistan et a prôné des mesures de renforcement de la sécurité nationale et de protection des frontières.
M. ALTAR CENGIZER (Turquie), soulignant l’importance du processus de réconciliation en Afghanistan, a appelé la communauté internationale à respecter les engagements pris à la Conférence de Tokyo et à donner les moyens politiques, économiques et techniques nécessaires à l’Afghanistan pour rendre les Accords de Bonn pérennes. Saluant le rôle essentiel joué par la FIAS dans la sécurisation de la capitale et de ses environs, le représentant s’est cependant inquiété de l’insécurité croissante dans le reste du pays et a jugé impératif de mettre rapidement en place une armée et une police nationales efficaces. En outre, il a jugé indispensable que les «chefs de guerre» soient intégrés au système et collaborent avec le Gouvernement. Par ailleurs, il a fait valoir l’importance du respect de la souveraineté nationale et de l’intégrité du territoire afghan, appelant à cet égard les pays frontaliers à ne pas intervenir dans les affaires internes du pays et à ne pas traiter avec les chefs de guerre. Le représentant s’est également dit préoccupé par la production et le trafic de stupéfiants et a appelé la communauté internationale à soutenir les programmes soutenant les cultures de substitution et le contrôle de la production et de la circulation de drogues.
Par ailleurs, soulignant les liens historiques entre la Turquie et le peuple afghan depuis les années 20, le représentant a attiré l’attention de la communauté internationale sur la nécessité de concrétiser les promesses lancées le plus rapidement possible. La Turquie a mis en route plusieurs projets de reconstruction en Afghanistan notamment dans les domaines de la santé et de l’agriculture et se tient prête à augmenter sa contribution à la reconstruction du pays a enfin déclaré le représentant.
Mme MADINA B. JARBUSSYNOVA (Kazakhstan) a déclaré que le pouvoir et l'autorité du Gouvernement central afghan se trouveraient renforcés si celui-ci accordait davantage d'autonomie aux provinces, comme c'était le cas pendant plusieurs années au cours de la guerre civile et même auparavant. Elle a rappelé que le problème le plus important restait cependant le manque de sécurité, qui compromet tous les aspects du processus de paix, et nécessite la création d'une force de sécurité nationale. Se joignant aux efforts de la communauté internationale pour soutenir ce pays, notamment en participant activement au Programme alimentaire mondial, le Kazakhstan a appelé les pays donateurs à redoubler leurs efforts en vue de reconstruire la société afghane. Enfin, la représentante a déploré que l'Afghanistan continue d'être à l'origine de la prolifération de drogues dans les États d'Asie centrale, situation qui exige sans tarder des mesures de la part de la communauté des nations.
M. OLE PETER KOLBY (Norvège) a jugé vital de continuer de mettre en œuvre l'Accord de Bonn dont le processus culminera avec la convocation des élections générales en 2004, mais il a aussi souligné que beaucoup restait à faire. La fragile situation sécuritaire est une source de préoccupation et, si elle n'est pas stabilisée, elle risque de menacer le processus politique et le développement socioéconomique du pays. Ceci témoigne du besoin urgent d'une armée et d'une police afghanes ainsi que d'un système judiciaire qui fonctionne; les chefs de faction doivent aussi se placer sous le contrôle de l'Autorité centrale.
Les développements positifs à l'intérieur des frontières de l'Afghanistan doivent par ailleurs s'accompagner de stabilité en dehors de ces frontières, a insisté le représentant en appelant également l'Autorité de transition à faciliter le travail des commissions constitutionnelles, judiciaires et des droits de l'homme, qui ont un rôle particulier à jouer.
Le représentant a rappelé que le pays faisait toujours face à une crise humanitaire majeure, la sécheresse, les mauvaises récoltes, le retour de quelque 2 millions de réfugiés et de personnes déplacées laissant une large part de la population totalement dépendante de l'aide internationale. Il a également insisté sur les énormes besoins de l'Afghanistan, indiquant qu'un engagement de la communauté internationale sur le long terme était indispensable. Il a donc appelé les donateurs à honorer les promesses faites lors de la Conférence de Tokyo en janvier. Enfin, en tant que présidente du Groupe de soutien à l'Afghanistan, la Norvège accueillera sa réunion annuelle les 17 et 18 décembre à Oslo et le représentant s'est réjoui de la venue du Président Karzai.
M. KOICHI HARAGUCHI (Japon), rappelant que son pays s’était joint, au lendemain des attaques terroristes du 11 septembre 2001, à la coalition internationale contre le terrorisme, a souligné que les efforts déployés au niveau militaire n’étaient pas suffisants à eux seuls pour résoudre les problèmes de l’Afghanistan. Pour consolider la paix et la sécurité dans ce pays et renforcer les activités de contre-terrorisme, il faut poursuivre les efforts dans les domaines de la reconstruction, de l’humanitaire, du politique et de la sécurité, a dit M. Haraguchi. Il a rappelé ensuite que, lors de la Conférence internationale sur la reconstruction de l’Afghanistan, des promesses de plus de 4,5 milliards de dollars ont été faites pour la reconstruction et la réhabilitation de l’Afghanistan, tandis que 1,8 milliard de dollars était prévu pour 2002. Pour sa part, le Japon a accordé 282 millions de dollars dans le cadre du suivi de la Conférence de Tokyo et cette enveloppe se chiffre globalement à 375 millions de dollars en incluant l’assistance humanitaire. M. Haraguchi a plaidé pour une aide financière accrue à l’Administration transitoire pour lui permettre d’asseoir davantage son autorité, expliquant que son pays a débloqué une enveloppe de 50 millions de dollars pour financer un programme dans le domaine du renforcement de l’administration, entre autres pour développer la télévision de Kaboul. De même, dans le domaine de la sécurité, il a apporté son soutien à la formation de l’armée et de la police afin de consolider la sécurité qui demeure précaire dans certains endroits du pays, et a invité les divers groupes armés à rejoindre ces institutions. De plus, le domaine du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion (DDR) des anciens combattants est un domaine dans lequel le Japon entend continuer d’intervenir dans le cadre de la consolidation de la sécurité en Afghanistan. Enfin, M. Haraguchi a salué la pertinence du Programme d’assistance intermédiaire de transition de l’Afghanistan qui permet notamment de venir en aide aux réfugiés et aux personnes déplacées pour assurer leur réinstallation. Il a jugé nécessaire d’envisager maintenant une transition de l’aide d’urgence à une aide à la reconstruction qui doit être intensifiée afin de développer l’infrastructure de base. L’objectif d’un Afghanistan stable et viable est encore loin d’être obtenu, a-t-il conclu, invitant la communauté internationale à saisir l’occasion de la reconstruction de l’Afghanistan pour démontrer sa capacité à gérer une transition post conflit.
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