En cours au Siège de l'ONU

AG/1322

LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETE, VOLET ESSENTIEL DE LA DIPLOMATIE PREVENTIVE, N’EST PAS MENEE AVEC LES MOYENS ADEQUATS, REGRETTENT PLUSIEURS DELEGATIONS

18/09/02
Communiqué de presse
AG/1322


Assemblée générale

15e séance – après-midi


LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETE, VOLET ESSENTIEL DE LA DIPLOMATIE PREVENTIVE, N’EST PAS MENEE AVEC LES MOYENS ADEQUATS, REGRETTENT PLUSIEURS DELEGATIONS


L’urgence et la nécessité de mener une lutte efficace contre la pauvreté, ainsi que l’inadéquation des institutions économiques internationales, ont de nouveau dominé le débat général de l’Assemblée générale qui s’est poursuivi cet après-midi.  «La misère et la pauvreté constituent la première menace à la paix et à la sécurité», a dénoncé le Ministre des relations extérieures de la Côte d’Ivoire, «et la lutte contre la pauvreté constitue donc un volet essentiel de la diplomatie préventive».  Rappelant des chiffres dramatiques, à savoir qu’un milliard et 380 millions de personnes vivent dans l’extrême pauvreté et qu’environ 854 millions ne savent ni lire ni écrire, le Ministre des affaires étrangères du Costa Rica a déclaré que ces conditions mettent en danger la démocratie.  Car il ne suffit pas d’avoir tenu des élections libres pour pouvoir parler de démocratie durable, il faut également que la lutte contre la pauvreté permette de consolider le fonctionnement démocratique des institutions.  De l’avis du Ministre des affaires étrangères de Sainte-Lucie, il serait nécessaire d’établir un véritable «Plan Marshall» contre la terreur de la pauvreté.


Pour mener cette lutte, les règles de fonctionnement du système économique international sont, de l’avis de plusieurs Ministres, inadaptées.  Ce sont d’abord les institutions économiques internationales qui ont été mises en cause par le Ministre de Sainte-Lucie.  Selon lui, l’une des manifestations les plus fortes de la crise de l’agenda du développement est le manque de légitimité des structures internationales de gouvernance économique.  Il a souhaité qu’elles soient réformées dans le sens de plus de transparence et de démocratie.  Pour le Nicaragua, les dysfonctionnements du marché international du café sont à l’origine de difficultés économiques qui viennent s’ajouter à la stagnation de l’économie mondiale.  Le Ministre nicaraguayen a expliqué qu’il y a cinq ans, les producteurs recevaient 40% de la valeur générée par la vente du café, soit 30 milliards de dollars.  Aujourd’hui, les producteurs ne perçoivent plus que 8,5% d’un marché qui est passé à 65 milliards de dollars.  Cette situation est due à des cartels de torréfacteurs de café qui empêchent la concurrence de prévaloir sur les marchés.  La Ministre des affaires étrangères du Niger a abondé dans ce sens, faisant observer que la bonne conjoncture économique mondiale aurait dû s’accompagner de la mise en place d’un ordre économique plus juste et plus propice à la réduction de la pauvreté.  Or, il n’en a rien été.  Plaidant pour une «conception plus élevée de la coopération internationale qui puise son essence dans le partenariat stratégique», elle a jugé indispensable et urgent de renverser la tendance à la baisse de l’aide au développement, qui est à son niveau le plus bas depuis 50 ans.


Un préalable essentiel à la lutte contre la pauvreté est la pacification et la fin des conflits de tous ordres, régionaux ou internationaux.  C’est ce qu’a exprimé le Ministre éthiopien des affaires étrangères, dont le pays a participé au processus de paix en Somalie dans le cadre de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).  «Nous sommes convaincus que l’intérêt vital est d’assurer la paix et la stabilité entre nos peuples, car nous avons une guerre à livrer contre la pauvreté», a-t-il indiqué.  Le Premier Ministre du Sri Lanka, dont le pays a été ravagé par 20 années de guerre qui ont causé plus de 65 000 morts et contraint le déplacement de 800 000 personnes, a indiqué que l’année dernière, pour la première fois, son pays a connu une croissance négative.  Mais il a annoncé avec satisfaction l’ouverture de pourparlers directs entre le Gouvernement du Sri Lanka et le mouvement des «Tigres de libération de l’Eelam Tamoul» (LTTE) le 16 septembre dernier en Thaïlande, ouvrant ainsi la voie à la paix et à une reprise de la croissance qui donnera au pays les moyens de lutter contre la pauvreté.


En ce qui concerne la reconstruction de l’Afghanistan, le Tadjikistan a annoncé qu’il continuerait de contribuer à sa renaissance sur la base de relations amicales et de respect mutuel dans l’intérêt de la sécurité et des pays de la région.  La représentante du Turkménistan, quant à elle, s’est réjouie du lancement du projet de construction d’un pipeline trans-afghan, reliant son pays, l’Afghanistan et le Pakistan: un projet d’une importance sociale, économique et politique «colossale» qui permettra notamment de créer plus de 12 000 emplois en Afghanistan. 


Le Président a en cours de séance annoncé que le Tchad s’est acquitté des paiements nécessaires pour ramener ses arriérés de paiement en deçà du montant spécifié par l’article 19 de la Charte des Nations Unies.


Outre les intervenants déjà cités, les Ministres des affaires étrangères du Bangladesh, du Tchad et d’Haïti se sont exprimés.  Les représentants de l’Indonésie et de la Turquie ont exercé leur droit de réponse.  L’Assemblée générale poursuivra son débat général demain matin à 10 heures.


Débat général


M. RANIL WICKREMESINGHE, Premier Ministre du Sri Lanka, a rappelé que son pays a été ravagé par 20 années de guerre qui ont causé plus de 65 000 morts et contraint le déplacement de 800 000 personnes.  Nous connaissons mieux que quiconque les ravages du terrorisme.  Il a évoqué la victoire du Gouvernement de décembre 2001 qui a abouti à la signature d’un cessez-le-feu le 22 février dernier.  Cela a permis de revitaliser l’économie et la liberté de circulation.  Il a souligné avec une grande satisfaction l’ouverture de pourparlers directs entre le Gouvernement du Sri Lanka et le mouvement des «Tigres de libération de l’Eelam Tamoul» (LTTE) le 16 septembre dernier en Thaïlande.  Le LTTE n’est plus considéré comme proscrit dans le souci de donner une chance aux négociations, a précisé le Premier Ministre, qui souligne que le Gouvernement va désormais essayer de résoudre des problèmes pratiques de la population avec la reconstruction économique des zones touchées.


Le Premier Ministre s’est, par ailleurs, félicité du rôle joué par la Norvège pour obtenir ce cessez-le-feu et les pourparlers en cours.  L’impératif de paix est en train de croître et les deux protagonistes doivent répondre à cette exigence et aux attentes de la population en ce domaine.  L’année dernière, pour la première fois, nous avons eu une croissance négative.  Dans ce contexte, nous allons mettre en place une administration intermédiaire adaptée aux réalités du Sri Lanka et de ses différentes composantes et communautés.  Nous allons décentraliser le pouvoir du Gouvernement et créer cinq régions économiques pour responsabiliser les populations au niveau local.  La méfiance et la suspicion commencent à se dissiper au fur et à mesure que les gens commencent à se parler.  Faire confiance aux personnes, qu’il s’agisse de la paix ou du développement, est la meilleure des recettes. 


M.MORSHED KHAN, Ministre des affaires étrangères du Bangladesh, a indiqué que le terrorisme n’est lié ni à une région, ni à une religion: c’est un phénomène mondial contre lequel nous devons lutter avec des moyens à la fois légitimes et consensuels.  Cela inclut la promotion de la démocratie et de ses valeurs, le respect du droit, un développement équitable et l’élimination de la pauvreté.  Le Bangladesh compte 130 millions d’habitants sur un territoire qui est de la taille de l’État de Wisconsin des Etats-Unis.  Des siècles d’exploitation coloniale en ont fait un pays sans infrastructures adéquates qui, de plus, est la proie de la pauvreté.  Soumis aux caprices de la nature, son économie est en danger à chaque mousson.  Juste après l’indépendance en 1971, il était considéré comme un puits sans fond, un cas désespéré.  Depuis, nous avons fait du chemin.  Une révolution silencieuse a eu lieu, basée sur des innovations telles que le microcrédit et les projets éducationnels spéciaux; cette révolution s’est nourrie de notre héritage

intellectuel et de notre tradition culturelle.  Des programmes de

Planification familiale ont permis de réduire le taux de croissance de la population de moitié au cours des 20 dernières années.  Des investissements massifs ont été réalisés en matière d’éducation primaire et secondaire, en mettant l’accent sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des filles et des femmes.  Il existe par ailleurs une excellente coopération entre le Gouvernement et la société civile.  La combinaison de politiques macroéconomiques appropriées et de l’utilisation efficace de l’aide externe a réduit la dépendance du Bangladesh à l’aide étrangère.  En ce qui concerne les équilibres régionaux, le Bangladesh est profondément préoccupé par l’opposition des deux grandes puissances voisines qui disposent d’un potentiel nucléaire.  Le Ministre encourage les pays de l’Asie du Sud à faire preuve de retenue et demande que l’idée de créer un Fonds mondial pour l’élimination de la pauvreté, financé par un impôt mondial, reçoive l’attention qu’elle mérite.


M. JULIAN ROBERT HUNTE, Ministre des relations extérieures, du commerce international et de l’aviation civile de Sainte-Lucie, a estimé que le tocsin résonne aux quatre coins du monde, pour l’humanité tout entière, lui signalant combien elle est en danger.  A l’heure des progrès techniques, de miracles scientifiques et de la conquête de l’espace, comment concevoir en effet que la misère et la souffrance humaine n’aient pas diminué.  Alors que de larges pans de l’humanité s’écroulent, nous sommes le plus souvent incapables de trouver l’élan nécessaire pour faire reculer ces fléaux.  La crise actuelle que traverse l’humanité découle de la crise de l’agenda du développement et du fait que pays développés et pays en développement n’ont toujours pas pleinement pris conscience qu’ils sont des partenaires inséparables du développement mondial.  De Doha à Johannesburg en passant par Monterrey, un rideau de désespoir s’est abattu sur les pays en développement, en particulier les petits Etats insulaires.  L’une des manifestations les plus fortes de la crise de l’agenda du développement est le manque de légitimité des structures internationales de gouvernance économique.  Celles-ci doivent donc être réformées, a déclaré le Ministre, ajoutant qu’il faut surtout remédier à leur manque de transparence et de démocratie. 


M. Hunte a déploré le fait que les pays en développement ont compromis leur propre agenda du développement en signant des accords de l’OMC ne contenant aucune clause qui reconnaît leurs spécificités et la nécessité d’un traitement différencié.  Une lacune qui doit être comblée lors des négociations de Doha, a-t-il souligné, ajoutant qu’une participation équitable au commerce mondial exige qu’une attention particulière soit accordée aux pays en développement.  Ce dont il est besoin est en fait d’un véritable « Plan Marshall » contre la terreur de la pauvreté, car le vrai message de Monterrey et même de Johannesburg, c’est qu’il n’y a ni volonté politique, ni ressources disponibles pour le développement.  Dans ce contexte, les Nations Unies semblent victimes de leur propre jeu, laissant

les principes de l’universalité, de l’égalité et la quête de la justice devenir obsolètes.  Aujourd’hui, les marchés déterminent tout et l’esprit du

secteur privé règne sur l’économie mondiale n’entraînant que chaos pour les pauvres et pour l’environnement.  Aucun mécanisme n’existe pour rendre les entreprises responsables et redevables de leurs actions, a regretté le Ministre.  C’est pourquoi, il a instamment demandé à l’ONU de rétablir le Centre sur les sociétés transnationales et de résister à toute tentative d’affaiblir la Conférence sur le commerce et le développement (CNUCED).  Condamnant le terrorisme sous toutes ses formes, Sainte-Lucie reconnaît la nécessité de lutter contre ce fléau, toutefois elle insiste sur le fait que ce combat ne doit pas se faire aux dépens des autres mandats conférés à l’ONU par la Charte, notamment dans les domaines économique et social.


M. TALBAK NAZAROV, Ministre des affaires étrangères du Tadjikistan, a souligné les efforts du Président Emomali Rakhmonov visant à entretenir de bonnes relations avec les pays voisins.  La relance économique, l’éradication de la pauvreté, l’augmentation du niveau de la vie et la création d’emplois figurent parmi nos priorités.  Pour ce faire, nous avons besoin de l’aide de la communauté internationale pour financer le développement, mettre en place un système commercial équitable, éliminer les risques de dégradation de l’environnement et régler les problèmes démographiques.  Nous formons le vœu que les engagements de Monterrey en matière de financement de développement soient respectés.  Le Ministre s’est félicité des progrès accomplis dans le cadre de la mise en œuvre des Conventions sur le changement climatique, de lutte contre la désertification, la diversité biologique ou encore le Protocole de Kyoto.  Il a salué le consensus de Johannesburg et l’émergence de la notion de développement durable.  Les objectifs du développement durable ne peuvent être réalisés si l’on ne tient pas compte de l’impact social de la mondialisation et si disparités et discriminations dans les relations économiques ne sont pas éliminées.  La persistance et le caractère urgent du problème de l’eau ont poussé le Tadjikistan à proposer que l’année 2003 soit proclamée Année internationale de l’eau potable et l’occasion pour les Etats Membres des Nations Unies d’échanger leurs expériences dans ce domaine. 


Par ailleurs, le Ministre a également évoqué le problème du terrorisme en précisant que son pays souhaite participer à la mise en place d’un cadre juridique international unifié pour lutter contre le terrorisme.  A cet égard, il a souligné la nécessité de convenir en 2003 d’une session extraordinaire de l'Assemblée générale sur la lutte contre le terrorisme et tous ses aspects.  Nous devrions également saisir l’occasion de cette session extraordinaire pour aborder les progrès réaliser au cours des cinq dernières années en matière de lutte contre la vente, la production illégale et le trafic de stupéfiants, a-t-il ajouté, en soulignant les liens évidents entre le terrorisme et les stupéfiants.  A ce sujet, la dimension régionale est de plus en plus importante pour aborder ces problèmes, d’où la nécessité de

renforcer la coopération entre les Etats.  Le succès remporté en Afghanistan, pays voisin, en matière de paix et de stabilité, a montré ce qui peut être accompli lorsque les Nations Unies et les organisations régionales combinent

leurs efforts.  Le Ministre a salué l’efficacité du Gouvernement de Hamid Karzaï en précisant que le Tadjikistan continuera de contribuer à la renaissance de l’Afghanistan sur la base de relations amicales et de respect mutuel dans l’intérêt de la sécurité et des pays de la région.  Cependant, l’ONU devra continuer de jouer le rôle de coordinateur international pour répondre à tous les défis de l’Afghanistan.  La solution des problèmes internationaux et régionaux ne pourra se faire sans le renforcement du système des Nations Unies et le raffermissement de son rôle.  Cela passe par une réforme adéquate pour gagner en efficacité et pour montrer avec conviction que les Nations Unies sont irremplaçables. 


M. MAHAMAT SALEH ANNADIF, Ministre des affaires étrangères et de l’intégration africaine du Tchad, a indiqué que le terrorisme ne pourra être enrayé que si ses racines, qui se nourrissent de relations internationales inégales, creusant chaque jour l’écart entre les riches et les pauvres, sont extirpées.  De nombreuses rencontres mondiales ont été organisées sous les auspices des Nations Unies, mais le tout n’est pas de tenir des sommets: il faut surtout leur donner suite en joignant l’acte à la parole.  Afin de promouvoir paix et progrès économique, le Tchad compte sur l’exploitation prochaine de ses richesses minières et agropastorales; celle du pétrole devrait commencer en juillet 2003.  Cependant, en dépit des perspectives qu’offre l’ère pétrolière pour le Tchad, la faiblesse des structures de l’économie nationale, le poids de l’endettement et des déséquilibres rendent précaires les conditions de vie des populations.  Le Tchad en appelle à l’appui de ses partenaires bilatéraux et multilatéraux pour qu’ils renforcent leur aide et annulent purement et simplement la dette extérieure.


Le Tchad demande que le Conseil de sécurité bannisse la politique des « deux poids, deux mesures » qu’il pratique et impose le respect de ses décisions, notamment les résolutions 242, 338 et 1397.  Le Gouvernement tchadien est opposé aux sanctions imposées à la Jamahiriya arabe libyenne et en demande la levée.  Enfin, il demande que le rôle de l’Assemblée générale soit renforcé, afin de lui conférer un caractère plus démocratique et plus actif dans la prise de décisions, et que la composition du Conseil de sécurité soit élargie.


M.ABOU DRAHAMANE SANGARE, Ministre des relations extérieures et des Ivoiriens de l’extérieur de la Côte d’Ivoire, a estimé que la 57ème session de l’Assemblée générale devrait donner une nouvelle dimension aux relations internationales.  Celles-ci devraient s’axer sur les grands axes suivants: la réforme de l’ONU, la lutte résolue contre la pauvreté, les droits de l’homme et la sécurité internationale.  Après plus de cinquante années d’existence, l’ONU gagnerait à se dépoussiérer pour s’adapter aux temps nouveaux, a déclaré le Ministre.  Depuis plus de 10 ans que durent les négociations sur la réforme du Conseil de sécurité, il est temps que des dispositions concrètes soient prises afin que commence un véritable débat général sur la base des positions des différents groupes régionaux.  Pour sa part, la Côte d’Ivoire reste convaincue que deux sièges permanents et trois sièges non permanents pour tout le continent africain épousent l’air du temps. 


De nos jours, la misère et la pauvreté constituent la première menace posée contre la paix et la sécurité, a poursuivi M. Sangaré, ajoutant que plus se creusera l’écart entre pays riches et pays pauvres, plus sera l’émigration en direction des pays riches qui, de la sorte, verront leurs programmes et prévisions de développement bouleversés.  La lutte contre la pauvreté constitue un pan essentiel de la diplomatie préventive; elle constitue la toute première opération de maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Saluant les résultats des Conférences de Doha, de Monterrey et de Johannesburg, le Ministre a souhaité vivement que leurs conclusions soient traduites en actes concrets.  Les efforts des pays en développement seront en effet vains si aucune disposition n’est prise pour les soulager du poids de la dette et si l’on n’évite pas les effets pervers de la mondialisation.  Il est grand temps de sortir de la logique voulant que l’on ait, d’un côté, des producteurs exclusifs de matières premières, et de l’autre, des producteurs de produits finis.  En mettant en place le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), l’Afrique offre désormais un cadre propice à l’exercice de la solidarité économique internationale. 


La Côte d’Ivoire est aussi profondément préoccupée par le droit à la santé.  Le VIH/sida est le premier problème de santé publique mondiale et fait des ravages en Afrique.  En attendant que soit trouvée la formule miracle contre le virus, il faut plus que jamais redoubler les efforts en matière de prévention et d’accessibilité aux médicaments pour les couches les plus démunies.  Le Ministre a reconnu cependant que la paix et la sécurité des biens et des personnes constituent la clé de tout développement.  A cet égard, il a espéré que très bientôt un rapport du Secrétaire général permettra d’évaluer les résultats partiels de la Conférence des Nations Unies sur la prolifération, la circulation et le trafic illicite des armes légères.  En ce qui concerne l’armement nucléaire, M. Sangaré a réitéré l’impérieuse nécessité du respect par tous des zones dénucléarisées instituées de par le monde.  Se réjouissant ensuite du retour de la paix en Sierra Leone, en Erythrée et en Ethiopie, ainsi qu’en Angola, il s’est dit inquiet de la persistance des hostilités au Libéria, au Soudan, en Somalie, et dans la région des Grands Lacs.  Il a invité tous les acteurs de la région à prendre conscience du fait que le retour de la paix et la réconciliation dépendent, en tout premier lieu, d’eux-mêmes et que seule leur volonté de s’entendre permettra de mettre fin aux souffrances de leurs peuples. 


M. SEYOUM MESFIN, Ministre des affaires étrangères de l’Ethiopie, a regretté que la situation sociale et économique de l’Afrique continue de se détériorer.  L’éradication de la pauvreté n’est pas seulement le défi de l’Afrique, mais celui de tout le monde développé.  A l’instar de ce qui a été souligné lors du Sommet de Johannesburg, la lutte contre la pauvreté est le plus grand défi du monde, car le désespoir qu’engendre la pauvreté a des implications pour le monde entier.  Beaucoup d’entre nous ont pensé que le Sommet de Johannesburg n’allait pas assez loin dans les mesures de lutte contre la pauvreté.  Toutefois, il faut se féliciter du consensus établi entre les pays du Nord et les pays du Sud sur le fait que l’apartheid mondial qui existe dans le monde actuellement ne peut continuer. 


Le Ministre a, par ailleurs, souligné la volonté des Africains de prendre en main leur destinée, comme en témoigne l’initiative du Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) qu’il a défini comme un engagement concret du continent africain pour prendre les mesures nécessaires en matière économique et politique en vue de parvenir à une réelle transformation sociale et économique.  Il s’est félicité du soutien exprimé à l’endroit du NEPAD par de nombreux membres de la communauté internationale, y compris le G-8.  La  lutte contre la pauvreté est vouée à l’échec si l’on n’est pas capable d’assurer la paix.  La région de la corne de l’Afrique a besoin du soutien de la communauté internationale pour assurer une paix et une stabilité durables.  Le bien-être des peuples de notre région passe par la nécessité de la paix et l’Ethiopie n’épargnera aucun effort dans ce domaine.  C’est dans cet esprit que nous déployons des efforts en faveur du processus de paix en Somalie dans le cadre de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).  Nous sommes convaincus que l’intérêt vital est d’assurer la paix et la stabilité entre nos peuples, car nous avons une guerre à livrer contre la pauvreté.  En ce qui concerne le terrorisme, il a déclaré que, tous ceux qui encouragent et appuient le terrorisme de quelque façon que ce soit, doivent en être tenus responsables.  Il faut une tolérance zéro à l’égard du terrorisme quelles que soient les cibles visées. 


M. ROBERTO TOVAR FAJA, Ministre des affaires étrangères et du culte du Costa Rica, a rappelé qu’aujourd’hui, 1 milliard et 380 millions de personnes vivent dans l’extrême pauvreté et qu’environ 854 millions ne savent ni lire ni écrire.  Nous nous sommes arrêtés à mi-chemin de la création d’un monde meilleur.  En effet, la tenue d’élections libres ne constitue que le premier pas sur la route de la démocratie.  Et à moins que les Nations Unies ne s’engagent en faveur de la durabilité de la démocratie, une élection ne signifie pas nécessairement la victoire des droits de l’homme.  La démocratie est un instrument sur la route d’un développement équitable.  La durabilité de la démocratie est sauvegardée par la promotion de valeurs sociales fondamentales telles que le dialogue, l’harmonie et la réconciliation, mais aussi le combat contre la pauvreté extrême et la réduction du fossé qui sépare les riches des plus pauvres.  Le Costa Rica soutient pleinement les efforts déployés par les Nations Unies pour promouvoir les droits de l’homme mais il est d’avis que l’Organisation ne devrait pas accorder moins d’importance à la création des conditions économiques et sociales indispensables à la consolidation de la démocratie.  De plus, les dangers posés par la mondialisation, sous la forme des barrières protectionnistes, de déséquilibres financiers et du manque d’investissements sociaux et productifs menacent des régions entières.


Le Costa Rica plaide en faveur de la création de nouveaux mécanismes de protection des droits de l’homme.  A cet égard, le projet de Protocole facultatif à la Convention contre la torture, qui a été adopté par le Conseil économique et social (ECOSOC), est prometteur.  Ce nouveau texte juridique sera soumis à l’Assemblée générale dans les jours qui viennent et le Costa Rica exhorte les Etats à apporter leur soutien à ce projet.  Rappelant par ailleurs que seulement douze États ont accepté la juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice sans réserve, le Ministre a en conclusion

estimé qu’ignorer l’autorité de la plus haute autorité judiciaire internationale équivaut à fermer la porte à la justice et à mettre en danger l’intégrité de l’ordre juridique international.  Car il n’y a pas d’alternative pour les Etats qui ne peuvent recourir aux moyens juridiques pour régler leurs différends, autres que le recours à la force.


Mme AICHATOU MINDAOUDOU, Ministre des affaires étrangères, de la coopération et de l’intégration africaine du Niger, a déclaré que pour être efficace, le combat contre le terrorisme doit à la fois éviter l’amalgame, s’inscrire dans la durée et se conduire dans le cadre de la légalité internationale qu’incarne l’ONU.  Parallèlement, il est aussi de notre devoir de prendre en compte la nécessité d’instaurer un ordre économique et politique plus juste, plus équitable, tant il est démontré que la pauvreté, l’ignorance, l’injustice et les frustrations de tous ordres sont des facteurs qui engendrent un terrorisme aveugle.  Pays pacifique, le Niger participe activement aux efforts déployés pour parvenir au désarmement général et complet.  A cet égard, il se réjouit que la Conférence des Nations Unies sur le commerce illicite des armes légères et de petit calibre ait adopté un programme d’action pour combattre ce fléau.  Mais beaucoup reste encore à faire, notamment au niveau des mesures d’assistance technique et financière pour soutenir les programmes de désarmement et de réinsertion des anciens combattants.  Si aucune région du monde n’est épargnée, il est incontestable que se sont les pays en développement, en particulier ceux d’Afrique, qui paient le plus lourd tribut des effets dévastateurs de la prolifération des armes légères.  Il faut donc renforcer les organes chargés des contrôles, de la détection et de la répression des infractions commises dans ce cadre, a insisté la Ministre. 


Le Niger, comme la quasi-totalité des pays africains, fait face à de nombreux défis majeurs qui appellent de la part de la communauté internationale le soutien matériel nécessaire.  C’est dans cette optique que le pays a mis en place une stratégie de développement consacrant une place de choix à la culture et à la promotion de la bonne gouvernance, à la transparence et à l’implication de la société civile à toutes les décisions économiques et sociales.  Sur le plan économique, jamais autant qu’à notre époque, l’humanité n’a disposé de tant de richesses et de potentialités à même de générer le bien-être commun.  La bonne conjoncture économique mondiale pouvait en effet laisser espérer la mise en place d’un ordre économique plus juste et plus propice à la réduction de la pauvreté.  Cette dernière est en effet un affront qui ne saurait être toléré plus longtemps dans un monde d’abondance qui dispose des moyens de la vaincre pour peu que la volonté politique nécessaire y soit.  Quatre fois en moins d’un an, les dirigeants se sont penchés sur les problèmes du monde, tout en connaissant les vrais remèdes.  Il faut désormais une conception plus élevée de la coopération internationale qui puise son essence dans le partenariat stratégique.  Il est indispensable et urgent de renverser la tendance à la

baisse de l’aide publique au développement (APD), qui est à son niveau le plus bas depuis 50 ans.  En outre, le problème crucial de la dette des pays africains, qui annihile tout effort de développement, appelle de la part de la communauté internationale, la mise en œuvre sans délais, ni conditionnalités autres que celles d’une bonne gestion des affaires publiques, de politiques et mécanismes de règlement satisfaisants, a souligné Mme Mindaoudou.  En conclusion, elle a estimé que l’ONU reste l’instrument privilégié capable de réaliser ce nouvel ordre mondial, à condition qu’elle mène à bien toutefois la «révolution tranquille » engagée par le Secrétaire général, il y a plus de 4 ans. 


M. JOSEPH PHILIPPE ANTONIO, Ministre des affaires étrangères de Haïti, a réitéré sa condamnation du terrorisme comme étant une des formes de violation les plus flagrantes des droits de l’homme.  Il a souligné l’importance capitale de la réforme du Conseil de sécurité pour permettre une plus grande participation à ses prises de décisions.  Il a exprimé la profonde préoccupation de son Gouvernement face à l’escalade de violence que connaît le Moyen-Orient, notamment le conflit israélo-palestinien et a appelé les protagonistes à régler leurs différends de manière pacifique.  Dans le même esprit, il a salué les pourparlers initiés entre les deux Corée.  En ce qui concerne l’Iraq, Haïti s’est dit profondément inquiet de la situation malgré l’acceptation par ce pays du retour sans condition des inspecteurs en désarmement.  Il a formé le vœu que cette situation soit traitée dans le cadre des Nations Unies. 


La régionalisation, a souligné par ailleurs le Ministre, constitue un outil important qui facilite le partenariat entre les Etats pour garantir le bien-être de leurs peuples.  Dans ce contexte, la République d’Haïti se félicite de sa pleine intégration au sein du Caricom, où elle compte participer au développement social et  économique de la région.  Eu égard aux difficultés que rencontrent les 614 millions d’habitants des pays les moins avancés (PMA) et qui vivent avec moins de 1 dollar par jour, nous revenons avec espoir des sommets de Doha, de Monterrey et de Johannesburg.  Les attentes sont grandes, à la mesure des promesses et l’important est maintenant d’avoir la volonté de respecter les engagements pris et de promouvoir le développement durable au mieux des intérêts de nos peuples. 


S’agissant de la situation en Haïti, le Ministre a rappelé le lancement le 7 septembre 2001 par le Président Jean Bertrand Aristide d’une campagne nationale d’alphabétisation visant à alphabétiser 3 millions d’Haïtiens d’ici à 2004.  Il s’est félicité de l’adoption récente par le Conseil permanent de l’Organisation des Etats américains (OEA) de la résolution 822 en «Appui au renforcement du processus démocratique en Haïti » qui ouvre des perspectives encourageantes pour engager ce pays dans la voie de la normalisation.  Il a précisé que son Gouvernement maintient résolument le cap sur la réalisation des élections comme un élément indispensable de cette démarche.  Il nourrit de profondes attentes quant à l’accompagnement que lui offrira la communauté internationale à cet égard.  Le Ministre a formé le vœu que l’on mette un terme à l’embargo financier qui frappe son pays.  Il a également précisé que le Gouvernement haïtien a consenti à indemniser les victimes des événements du 17 décembre 2001, en conformité avec les résolutions 806 et 822 de l’OEA. 


M. NORMAN JOSE CALDERA CARDENAL, Ministre des affaires étrangères du Nicaragua, a évoqué la croisade, publique et privée, lancée dans son pays contre la corruption et qui a abouti à l’emprisonnement, il y a quelques jours, de membres de la famille de l’ancien Président.  Le développement humain, objectif ultime de l’action de l’État, repose sur trois objectifs intermédiaires: la gouvernance démocratique, la croissance économique et l’égalité sociale.  La gouvernance est l’art de faire les choses de manière juste dans la sphère politique, grâce à la transparence, le respect des droits de l’homme et de la souveraineté; la croissance est la conséquence d’avoir agi correctement dans les sphères économique et financière, en établissant un taux de change, ainsi que des politiques fiscales et monétaires justes; l’égalité, quant à elle, est le résultat de politiques sociales bien définies et ciblées sur l’éducation, la santé, le logement et l’égalité entre les sexes.  Et il ne sera pas possible d’avancer sur ces trois chantiers tant que la corruption n’est pas extirpée.


Le Nicaragua est engagé en faveur de l’établissement de l’union douanière de l’Amérique centrale qui doit prendre effet le 31 décembre 2003.  L’union douanière doit contribuer au développement économique et social des pays qui la composent.  Elle aura pour objectif de promouvoir le commerce régional, de réduire les coûts de transport qui sont aujourd’hui dus aux attentes aux frontières, de faciliter le mouvement des personnes, et d’attirer les investissements internationaux dans la région.  Cependant, au Nicaragua, la stagnation de l’économie mondiale s’est durement faite ressentir, d’autant qu’elle s’est doublée d’une augmentation du prix du pétrole, qui est importé, alors que les cours du café étaient au niveau le plus bas de leur histoire.  Il y a cinq ans, le marché du café s’élevait à 30 milliards de dollars et les producteurs en recevaient 40%.  Aujourd’hui, le marché est passé à 65 milliards de dollars mais les producteurs n’en perçoivent plus que 8,5%.  Cette situation est due à des cartels de torréfacteurs du café et il importe de remédier le plus tôt possible à cette situation et de promouvoir la concurrence.


Mme AKSOLTAN ATAEVA (Turkménistan) a rappelé que son pays, bien que neutre, demeure pleinement attaché au respect de ses obligations internationales.  A la suite des événements tragiques du 11 septembre, la région de l’Asie centrale est devenue le centre de l’attention du monde entier.  Et les perspectives de paix et de sécurité y dépendront beaucoup de la manière dont le dialogue multilatéral reposera effectivement sur les problèmes qui frappent la région.  Le Turkménistan attache une grande importance au rôle des Nations Unies dans la revitalisation du dialogue régional et interrégional pour résoudre les problèmes existants.  Le premier de ces problèmes concerne le commerce et l’interaction économique, les sources d’énergie, l’utilisation des eaux, les transports, et la coopération humanitaire.  A cet égard, la représentante a estimé qu’un mécanisme de consultations multilatérales au niveau des chefs d’Etat favoriserait l’élaboration et la mise en œuvre d’accords se fondant sur l’intérêt mutuel

serait le meilleur moyen d’optimiser l’interaction.  C’est dans cette perspective que le Président turkmène a décidé d’organiser une conférence internationale sur la coopération économique en Asie centrale et en Asie du

Sud, a indiqué Mme Ataeva.  Elle s’est aussi réjouie du lancement du projet de construction d’un pipeline trans-afghan, reliant son pays, l’Afghanistan

et le Pakistan ; un projet d’une importance sociale, économique et politique «colossale » qui permettra notamment de créer plus de 12 000 emplois en Afghanistan.  Elle a demandé à l’ONU d’apporter son aide en vue de la bonne mise en œuvre de ce projet et a rappelé que son pays a déjà proposé l’adoption d’une convention internationale sur le régime et les garanties de fonctionnement des pipelines traversant plusieurs Etats. 


Mme Ataeva a ensuite expliqué que le développement durable au XXIème siècle consistera à trouver un savant équilibre entre les avancées industrielles et technologiques et la protection de l’environnement.  A cet égard, elle a particulièrement attiré l’attention sur la question de l’exploitation des énormes réserves d’hydrocarbures situées dans le bassin de la mer Caspienne.  Ces réserves, qui sont les plus importantes de la planète, à condition d’être exploitées de manière raisonnable et efficace permettraient de devenir une grande source de revenus et de croissance économique pour de nombreux Etats.  Les Nations Unies, a suggéré la représentante, pourraient garantir la sécurité du transport de ces hydrocarbures au moyen des pipelines qui devront être construits à cet effet.  Une coopération efficace et amicale sur les activités de développement de la mer Caspienne est directement liée à la stabilité de la région, a ajouté   Mme Ataeva réaffirmant que son pays se bat en faveur d’une zone caspienne de paix, de stabilité et de coopération internationale durable, qui reposerait sur les principes de la justice et du respect mutuel. 


Droits de réponse


Le représentant de l’Indonésie a répondu à la déclaration du représentant de Vanuatu sur la situation de la Papouasie qui, a-t-il rappelé, est partie intégrante de l’Indonésie.  Cette question a été depuis longtemps entérinée par l'Assemblée générale des Nations Unies.  Par ailleurs, il a rappelé que les communiqués finaux des deux dernières rencontres annuelles du Forum des îles du Pacifique – qui se sont respectivement tenus à Nauru et Fidji – ont reconnu l’autorité souveraine de l’Indonésie sur ce territoire et ont exprimé l’appui pour une autonomie spéciale de cette province. 


Exerçant lui aussi son droit de réponse, le représentant de la Turquie a réagi à la déclaration du Ministre des affaires étrangères de l’Arménie indiquant que son pays allait poursuivre ses efforts en vue de la reconnaissance du génocide arménien.  Ce faisant, il pense sans doute à tous ceux qui sont tombés sous le coup des conflits internes et de la Première Guerre mondiale, a indiqué le représentant, avant de rappeler que l’Arménie et la Turquie ont plus de 1 000 ans de vie commune.  Les événements tragiques en question correspondent à une toute petite période de l’histoire et l’Arménie ne devrait pas permettre de ternir ainsi ce riche passé et de tuer les perspectives futures.  Il faut comprendre que cette ère tragique a fait des victimes tant du côté arménien que du côté turc.  Il ne s’agit pas de minimiser la douleur du peuple arménien mais il ne faut pas, non plus, oublier que 2 millions de musulmans ont aussi perdu la vie sur le même sol.  Tous les habitants de la région, sans exception, ont énormément souffert.  Il ne faut pas faire parler les morts, mais se souvenir et honorer la mémoire de tous les morts.  A ce jour, les allégations de plan prémédité et de stratégie d’annihilation du peuple arménien par la population ottomane demeurent sans fondement.

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