LA DELEGATION DES MALDIVES S'EXPRIME SUR LES RESTRICTIONS A LA REPRESENTATION POLITIQUE DES FEMMES, LA VIOLENCE DOMESTIQUE ET L'AGE DU MARIAGE
Communiqué de presse FEM/1128 |
Comité sur l'élimination de
toutes les formes de discrimination
à l'égard des femmes
506e séance - matin
LA DELEGATION DES MALDIVES S'EXPRIME SUR LES RESTRICTIONS A LA REPRESENTATION POLITIQUE DES FEMMES, LA VIOLENCE DOMESTIQUE ET L'AGE DU MARIAGE
Le Comité sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a ce matin entendu les réponses apportées par la délégation des Maldives aux questions posées par les experts le 24 janvier dernier, lors de l’examen du premier rapport présenté par le pays devant le CEDAW. Les réserves faites par l'Etat partie lors de la ratification de la Convention avaient ce jour suscité de nombreuses interrogations de la part des expertes. La Vice-Ministre des questions féminines et des affaires sociales des Maldives a à ce sujet clairement précisé que l’interdiction de l’accès à la présidence et à la vice-présidence avaient récemment fait l’objet d’un débat parlementaire et qu’une majorité des deux tiers s’était prononcée pour le maintien de ces restrictions. La présidente du Comité a déclaré qu’en dépit du vote majoritaire au Parlement, la Constitution et les lois devaient faire du respect des droits de l’homme une absolue priorité et que l’égalité des sexes faisait partie de ces droits fondamentaux.
En ce qui concerne l’élévation de l’âge du mariage, que de nombreuses expertes avaient proposé comme une incitation pour les jeunes filles à faire de plus longues études, la Vice-Ministre a déclaré que cette question rencontrait une réelle résistance dans son pays. Il y aura de plus des difficultés à accorder un pouvoir discrétionnaire en la matière aux seules autorités civiles en raison de la charia, a-t-elle ajouté. Elle a par ailleurs précisé que des dispositions avaient été prises afin de développer les institutions d’enseignement supérieur tertiaire accessibles aux femmes, même si les quotas visant à favoriser la proportion de femmes ayant accès à des bourses du supérieur n’étaient pas à l’ordre du jour.
Le CEDAW poursuivra ses travaux cette après-midi à partir de 15 heures.
Il entendra les réponses de l’Ouzbékistan aux questions posées par les expertes le 25 janvier.
Réponse de l’Etat partie
Mme ANEESA AHMED, Vice-Ministre des questions féminines et des affaires sociales des Maldives, a déclaré que la Constitution des Maldives, dans ses articles 34 et 52, interdit aux femmes d’accéder aux positions de Président de la République ou de Vice-Président. Mme Ahmed a fait savoir que cette disposition avait été largement débattue au Parlement, ou Majlis, mais que la majorité des deux tiers avait décidé de maintenir ces restrictions. Ces deux articles de la Constitution contreviennent donc aux dispositions de l’article 7(a) de la Convention et justifient le maintien des réserves. La Vice-Ministre a précisé que les Comités insulaires des femmes sont des organes électifs dirigés par des femmes; chaque île a son Comité qui compte une dizaine de membres et où toutes les femmes peuvent être élues. La Vice-Ministre a également déclaré que le Ministère des questions féminines et des affaires sociales a mis en oeuvre une politique dans les domaines suivants: lutte contre la violence domestique, organisation de programmes fonciers destinés exclusivement aux femmes, programmes d’éducation et de formation. Il favorise également l’accès des femmes à l’emploi, diffuse auprès des femmes des informations sur leur statut et le rôle qu’elles peuvent jouer dans la société. Il vise à accroître la participation des femmes à la création d'activités génératrices de revenu et à élever leur niveau en matière de santé et de nutrition.
La Vice-Ministre a également indiqué que le secteur éducatif a entamé une procédure de réexamen des programmes de l’école primaire. Aucune mesure temporaire spéciale pour améliorer la position des femmes dans le secteur éducatif ou pour faciliter l’accès des femmes aux bourses de l’enseignement supérieur n’existe ni n’est envisagée, a précisé Mme Ahmed. En ce qui concerne la malnutrition des femmes, elle a déclaré qu’il n’existe pas d’étude sur ce problème, mais a révélé que les femmes et les enfants mangent après les hommes et doivent donc se satisfaire des restes laissés par ces derniers. C’est sans doute là la source de la malnutrition des femmes, a expliqué la Vice-Ministre. En ce qui concerne la violence domestique, peu d’informations filtrent hors des foyers car ces affaires sont du domaine privé. La police nationale ne recrutait pas de femmes jusqu’en 1988, et il n’y a toujours pas de femmes dans la hiérarchie. La Vice-Ministre a reconnu que la femme ne peut pas inscrire le nom de l’enfant sur son passeport sans l’autorisation du père. En ce qui concerne le déclin des femmes dans la population active, Mme Ahmed a déclaré ne pas disposer d’informations sur les conséquences de ce phénomène, notamment sur l’augmentation de la pauvreté parmi les femmes.
La Vice-Ministre a déclaré que les contraceptifs étaient disponibles gratuitement pour les couples mariés, et que des préservatifs et des contraceptifs étaient disponibles dans les hôpitaux. En ce qui concerne le taux élevé de divorces, elle a déclaré que cela pouvait être dû à l’absence de stigmates sociaux sur les séparations, précisant par ailleurs que le remariage du même couple est assez fréquent. Les femmes demandent souvent le divorce, pour cause de violence physique et d’infidélité. En ce qui concerne le VIH/sida, la Vice-Ministre a déclaré que seulement 10 personnes des Maldives avaient été infectées par le virus, 6 d’entre elles étant déjà décédées. Les travailleurs étrangers porteurs du virus sont immédiatement reconduits à la frontière. Le nouveau Code de la famille stipule que l’âge minimum du mariage est de 18 ans, mais que si une
personne mineure et pubère souhaite se marier, elle peut le faire. La Vice-
Ministre a en conclusion remercié les expertes pour l’attention qu’elles avaient porté au statut des femmes aux Maldives et elle s’est engagée à améliorer les données statistiques pour pouvoir à l’avenir répondre de façon plus précise à toutes leurs questions.
Dialogue
Mme SAVITRI GOONESEKERE, experte du Sri Lanka, a attiré l’attention sur l’article 13 de la Constitution maldivienne en regrettant que les dispositions en soient trop générales puisqu'il n'est pas précisé que la discrimination fondée sur le sexe est interdite. De même, elle a noté que l'article 31 ne prévoit pas de mécanisme de recours en cas de violation des principes fondamentaux. Elle a recommandé d’instaurer un véritable dialogue avec les ONG. Elle a également fait remarquer qu’il n’était nulle part fait mention de projets dans le domaine de l’enseignement supérieur ou tertiaire et que par ailleurs la réglementation des Maldives sur l’âge du mariage était contraire aux recommandations du Comité.
Mme IVANKA CORTI, experte de l’Italie, a estimé que la question de la violence à l’égard des femmes ne devrait pas être confiée à une ONG mais faire l’objet d’une attention soutenue au plan national et qu’il faudrait élaborer des projets de loi montrant que la violence domestique n’est pas un problème de couple mais un problème général qui touche la condition de la femme. Elle a souhaité que le prochain rapport comporte des éléments à cet égard.
Mme AHMED a indiqué qu’elle veillerait à ce que les ONG soient impliquées à l’avenir. En ce qui concerne les questions sur l’enseignement supérieur tertiaire, a-t-elle précisé, un collège d’enseignement supérieur a été créé récemment et il existe un Institut des sciences de la santé qui a passé des accords avec une université australienne et a mis en place des programmes post-universitaires ainsi qu’un Institut de gestion. Elle a expliqué qu’elle avait elle-même participé aux débats sur l’abaissement de l’âge du mariage dans le cadre de l’élaboration des dispositions sur la famille, qu’il y avait de fortes réticences à modifier l’âge du mariage et qu’il y aurait des difficultés à accorder un pouvoir discrétionnaire en la matière aux seules autorités civiles en raison de la charia. La question de la violence suscite de fortes réactions dans la société maldivienne, a-t-elle également indiqué. Il était très courageux de la part de l’ONG concernée d’entreprendre une étude sur ce sujet mais nous continuerons de tenter de faire progresser la situation dans ce domaine.
La Présidente du Comité, Mme CHARLOTTE ABAKA, experte du Ghana, est revenue sur l’interdiction faite aux femmes de se porter candidate à la présidence de la République. Il nous a été expliqué que la majorité parlementaire avait voté pour le maintien de cette interdiction, or la démocratie doit être fondée sur le respect des droits de l’homme et des droits humains sinon il ne s’agit pas d’une véritable démocratie, a-t-elle fait observer. Elle a exhorté la délégation de l'Etat partie à faire connaître les commentaires du Comité au Gouvernement et aux ONG et à consulter d’autres pays musulmans. Elle a rappelé que les Etats parties à la Convention étaient tenus de préserver les droits et la sécurité des femmes dans leur foyer comme au sein de la société et que le Protocole facultatif invitant à épuiser les recours internes au pays avant de porter des plaintes devant le Comité, il était important de mettre en place ces recours. Elle s’est également inquiétée de ce que les femmes soient seules considérées comme responsables de la contraception familiale mais a déclaré attendre avec confiance les améliorations du prochain rapport des Maldives.
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