CARBURANTS PROPRES, DEVELOPPEMENT DES TRANSPORTS COLLECTIFS ET RESPONSABILISATION DE TOUS LES ACTEURS SONT VUS COMME LES MOYENS DE PARVENIR A UNE GESTION DURABLE DES TRANSPORTS
Communiqué de presse ENV/DEV/563 |
Commission du développement durable
5e séance – après-midi
CARBURANTS PROPRES, DEVELOPPEMENT DES TRANSPORTS COLLECTIFS ET RESPONSABILISATION DE TOUS LES ACTEURS SONT VUS COMME LES MOYENS DE PARVENIR A UNE GESTION DURABLE DES TRANSPORTS
Cet après-midi, la Commission du développement durable, dans le cadre de son dialogue entre les grands groupes, s’est particulièrement penchée sur les partenariats entre les secteurs public et privé aux fins d’une gestion durable de l’énergie au service des transports. Energie et transports sont des éléments indispensables à la croissance et au développement, mais, principalement en raison des modèles actuels de production et d’utilisation, ils ont des conséquences néfastes sur l’environnement et notamment l’atmosphère. Par exemple, plus de 95% du carburant utilisé dans le secteur des transports est à base de pétrole contribuant ainsi à “l’effet de serre”. Il est donc nécessaire de mettre au point et de gérer des systèmes de circulation et de transport plus efficaces et ce, d’autant que la mondialisation devrait susciter une augmentation de la demande en services de transports partout dans le monde et en particulier dans les pays en développement.
Plusieurs participants, dont la Secrétaire d'Etat à la coopération pour le développement international, les politiques d'asile et les migrations de la Suède, ont fait remarquer que les besoins en matière de transport des pays du Nord sont différents de ceux des pays du Sud. Si au Nord, on parle beaucoup de congestion, au Sud, en revanche, les personnes doivent encore être reliées entre elles et il n’est pas question de priver ces individus de leur droit à la mobilité. C’est en tenant compte de ces données de base que les représentants des cinq grands secteurs, soit la communauté scientifique, le monde des entreprises et de l'industrie, les travailleurs, les autorités locales et les organisations non gouvernementales, ont proposé un certain nombre de solutions en soulignant tous la nécessité d’une approche intégrée et la participation de tous les acteurs sociaux et économiques.
Ainsi pour le secteur industriel, l’un des enjeux qui se posent est de définir de nouvelles stratégies de mobilité qui soient économiquement rentables. Pour le milieu scientifique, il est urgent de repenser et de comprendre les besoins humains de mobilité, afin de trouver des alternatives aux moyens de transport motorisés ou du moins développer des systèmes de transport à zéro émissions polluantes A cette fin, la recherche fondamentale doit être favorisée. De l’avis du monde syndical et de celui des organisations non gouvernementales, les exigences de profit ne doivent être les seuls éléments pris en compte et la notion de bien-être, de sécurité et de service pour tous devrait être rétablie et guider les politiques de transport. Il faudrait en fait agir simultanément sur deux plans : rendre les transports énergiquement plus efficaces et réduire la demande en matière de transports.
(à suivre – 1a)
Au fil des interventions, une nouvelle division des responsabilités est apparue. Ainsi, l’influence en amont des pouvoirs publics a particulièrement été mise en avant. Parce qu’ils décident des politiques de transport et peuvent ainsi favoriser les transports collectifs, et surtout parce qu’ils peuvent imposer des taxes et impôts divers sur les moyens de transport les plus polluants ou à l’inverse subventionner ceux plus respectueux de l’environnement et des hommes, les gouvernements ont été souvent présentés comme les véritables guides vers une gestion durable des transports. En outre, réunis au niveau mondial et en coopération avec des organisations comme les Nations Unies, ils peuvent se mettre d’accord sur des normes contraignantes concernant les émissions de gaz à effet de serre ou plus généralement la qualité de l’air. En somme les gouvernements peuvent envoyer des signaux forts aux marchés en faveur des technologies propres. Ces actions doivent ensuite être relayées par les autorités locales qui peuvent les adapter aux besoins particuliers de leurs communautés.
De son côté, le secteur privé a été identifié comme le réservoir premier d’investissements et de moyens financiers et beaucoup ont préconisé qu’une partie substantielle des profits réalisés par ce secteur soit réorientée vers la recherche et le développement de moyens de transports “propres”, principalement en ce qui concerne les carburants. La société civile doit quant à elle entreprendre un vaste travail de sensibilisation et de responsabilisation des individus, afin de les encourager à opter pour les transports collectifs plutôt que pour les véhicules privés ou même à réduire leur utilisation des moyens de transports motorisés, au profit par exemple de la marche ou de la bicyclette. Sur ce point, nombreux ont été les intervenants à souligner les bienfaits, non seulement pour l’environnement mais aussi pour la santé humaine, d’un moindre recours aux transports motorisés.
Demain, à partir de 10 heures, le quatrième et dernier segment du dialogue entre les parties prenantes aura pour thème la planification d’une gestion durable des transports : choix et modèles pour la conception d’établissements humains et options possibles en matière de véhicules.
DIALOGUE MULTIPARTITE : PARTENARIATS ENTRE LES SECTEURS PUBLIC ET PRIVE AUX FINS D’UNE GESTION DURABLE DE L’ENERGIE AU SERVICE DES TRANSPORTS
Présentation des enjeux par les grands groupes
Prenant la parole au nom du secteur des entreprises et de l’industrie,
M. ARVE THORVIK du Conseil mondial des entreprises pour le développement durable a fait observer que le rapport entre l’énergie et la durabilité est particulièrement prononcé dans le domaine des transports. Un système efficace de transports est un impératif pour assurer le bien-être social, la croissance économique et la prospérité. C’est aussi un impératif pour assurer la durabilité de l’environnement. Et ce parce que les transports sont si importants pour toutes les activités humaines et qu’ils représentent la moitié de la demande totale en énergie. Le problème est qu’une grande partie de cette demande concerne les produits pétroliers qui a plus d’un titre sont porteurs de risques, pour l’environnement, pour la santé humaine mais également en matière de sécurité. Toutefois il n’y a pas de danger immédiat en matière d’approvisionnement du pétrole et l’on sait qu’à moyen terme les combustibles fossiles continueront de représenter 80% des sources d’énergie utilisées. Le secteur des transports et tout particulièrement celui de l’automobile a aussi consenti d’importants efforts concernant la réduction des émissions de gaz carbonique et autres substances polluantes. L’un des problèmes les plus aigus qui se pose est que les nouvelles technologies sont mieux adaptées aux objets immobiles, comme les centrales pour les piles à combustible ou les maisons pour le gaz naturel, que pour les moyens mobiles. Il faut donc définir de nouvelles options de mobilité qui soient rentables au niveau économique.
Le secteur privé n’est pas en reste en matière d’initiative, a poursuivi
M. Thorvik, avant d’expliquer que le Conseil mondial des entreprises pour le développement durable a élaboré un projet de partenariat unique qui rassemble 10 entreprises multinationales ainsi que les secteurs public et civil. En conclusion, le représentant a expliqué que c’est l’explosion de la demande en matière de transports dans le monde en développement qui va avoir le plus fort impact. C’est pourquoi il faut impérativement envisager également la durabilité du marché des transports. Le secteur industriel n’est pas opposé à des changements profonds mais il estime que ceux-ci doivent se produire sans priver les sociétés et les individus de la mobilité dont ils sont devenus si dépendants.
Au nom des milieux scientifiques, M. NEBOJSA NAKICENOVIC du Conseil international des associations scientifiques, a rappelé que rien ne laisse présager que la mobilité croissante des individus va ralentir. En fait, elle se développe à un rythme plus rapide que la croissance économique. Dans certains pays, cette mobilité, surtout automobile, atteint des proportions effarantes. On estime ainsi que chaque américain parcourt chaque jour 70 km. Le problème c’est qu’une grande partie de la population mondiale n’a pas accès à la mobilité. Tout comme pour l’énergie, l’accès aux transports est très inégal. Les activités de transports consomment beaucoup d’énergie et sont une source importante de pollution atmosphérique et sanitaire. Il est donc urgent de repenser et de comprendre les besoins humains de mobilité. Des systèmes de transport collectif avancés peuvent en principe réduire l’impact de l’augmentation des transports qui est attendue. Le défi est donc de détourner les individus de l’automobile. Or, l’on sait d’expérience que les habitudes sont très difficiles à abandonner. Un autre problème est que le remplacement du parc de véhicules, notamment au profit d’automobiles plus “propres” est très lent et prend deux à trois décennies. L’objectif ultime devrait être un système de transport à zéro émission, ce qui ouvrirait la porte au passage à la propulsion hydrogène ou électrique. A l’heure actuelle, les difficultés rencontrées en matière de stockage de l’électricité jouent encore contre le recours à grande échelle à cette source de propulsion. Cependant des mesures peuvent être prises et la communauté scientifique en prône quatre grands types : appuyer la recherche fondamentale et la compréhension des besoins afin de trouver des remplacements à la mobilité motorisée, contribuer à la recherche sur la planification des transports en adoptant une approche pluridisciplinaire, contribuer au développement de nouvelles infrastructures de transport à émissions nulles et favoriser le déploiement rapide sur les marchés de nouveaux systèmes de transport afin que les coûts de la recherche soient rapidement compensés.
Prenant la parole au nom du secteur des travailleurs, M. STUART HOWARD, Fédération internationale des travailleurs du secteur des transports du Royaume-Uni, a noté, à l'instar de dirigeants et d'économistes spécialisés dans l'industrie des poids lourds des Etats-Unis, que les exigences en matière de rapidité et de livraison font que les conducteurs passent de plus en plus de temps éloignés de leur famille. La distribution et le commerce semblent donc reposer sur le principe de salaires bas et de longues heures de travail. En vingt ans, le secteur des transports, comme celui des services en général s'est trouvé devoir répondre aux exigences non pas d'un public national mais de clients mondiaux plus importants et plus puissants, les entreprises mondiales lancées dans la production au niveau mondial. La mondialisation économique a été rendue possible par des coûts du transport extrêmement bas.
Le développement des ports et des chemins de fer était décidé par les gouvernements en fonction de considérations économiques et sociales générales. Aujourd'hui, ce sont les exigences des lignes de transport maritime transnationales qui dirigent le développement portuaire. Le secteur ferroviaire cherche également de moins en moins à être un réseau national public et est de plus en plus contrôlé par des acteurs privés. Prenant en exemple le système des pavillons de complaisance, M. Howard a estimé qu'il s'agit d'une protection offerte à ceux qui violent les normes de sécurité, les lois du travail et les mesures de protection de l'environnement. Le mépris des travailleurs va de pair avec celui de facteurs "non commerciaux" tels que la sécurité et l'environnement. Rappelant que les pétroliers battant pavillon de complaisance sont ceux qui sont les plus impliqués dans des marées noires, le représentant a souligné le lien entre la sécurité des transports, les conditions de travail et la protection de l'environnement. Bien que les compagnies de transport maritime ne soient pas toutes disposées à bafouer les normes établies, elles souffrent d'une concurrence sans pitié ainsi que des pratiques d'armateurs malhonnêtes. Un système de transport fondé sur les forces du marché n'est pas durable, a-t-il conclu, en appelant les gouvernements à honorer leurs responsabilités et à adopter des régulations internationales dans ce domaine. Il faut également créer des organes de contrôle internationaux.
Prenant la parole pour le secteur des autorités locales, Mme CLAUDIA SCHEINBAUM-PARDO, Conseillère municipale de la Ville de Mexico (Mexique) et membre du Conseil international pour les initiatives écologiques locales (ICLEI), a déclaré que les véhicules utilisant des combustibles fossiles sont la première cause de l'augmentation de la pollution atmosphérique et de l'émission de gaz à effet de serre dans les zones urbaines. Mettre en place des moyens de transports durables passe par le recours à des technologies et à des carburants améliorés mais aussi par la promotion de moyens de transport non motorisés, tels que la bicyclette et la marche. Les communautés locales souffrent encore plus de la pollution à cause de leurs équipements de mauvaise qualité. Les autorités locales ne peuvent résoudre ce problème à elles seules. Dans la plupart des régions, les normes en matière de carburants et de véhicules sont établies par le gouvernement national. L'établissement de ces normes est également influencé par les accords économiques multilatéraux, entre autres, qui ne favorisent pas les véhicules "propres".
La représentante a déclaré qu'ICLEI recommande que les normes nationales et internationales en matière de construction automobile favorisent les technologies propres. Le Conseil demande en outre que les obstacles tarifaires ou douaniers à l'importation de véhicules propres, notamment les bicyclettes, soient éliminés.
Prenant à son tour la parole, M. HARVEY RUVIN, Conseiller du Comté de Miami-Dade (Etats-Unis), a ajouté que les politiques publiques peuvent favoriser l'emploi de véhicules et de carburants moins polluants. Il a déclaré que l'adoption de solutions et de moyens de transport sûrs doit être soutenue à tous les niveaux par le gouvernement et le secteur privé. En outre, le gouvernement peut envoyer des signaux forts aux marchés en faveur des technologies propres.
Au nom du secteur des organisations non gouvernementales, Mme BEATRICE SCHELL de la Fédération européenne pour les transports et l’environnement a insisté sur les coûts sociaux des transports. Les transports ont un impact catastrophique sur l’atmosphère, tuent des individus et détruisent les communautés. Pour remédier à cela, deux stratégies sont possibles : rendre les transports énergiquement plus efficaces et réduire la demande en matière de transports. Il faut tenir compte de ces deux volets en même temps. La tendance actuelle à la consommation d’énergie polluante pour les transports ne peut pas durer et le développement de moyens de transport non motorisés est tout à fait possible. En somme, des mesures doivent être prises à grande échelle. Pour cela, il faut en premier lieu adresser la question de l’offre et de la demande. Il faut ensuite encourager les innovations technologiques.
Les gouvernements devraient utiliser toute une série d’instruments, comme les impôts sur les parkings et l’essence et autres carburants, pour générer des revenus qui seraient destinés à la recherche et à l’élaboration de systèmes de transport de remplacement. Les Nations Unies et les gouvernements devraient travailler ensemble pour encourager la mise en place d’un processus officiel pour l’adoption de normes contraignantes dans 5 domaines clefs : élimination de l’essence avec plomb, qualité de l’air, lutte contre le bruit, sûreté des véhicules et sécurité des routes. Les milieux des affaires doivent aussi s’engager à appliquer les normes les plus élevées en matière d’émissions de gaz des véhicules. Il faut que les communautés participent étroitement à toutes les décisions qui sont prises. Les transports non motorisés doivent devenir une alternative à l’utilisation de la voiture, a insisté en conclusion la représentante.
Réponses des gouvernements
M. IMRAN SIDDIQUI (Pakistan) a souligné le rôle fondamental que jouent les transports dans toutes les communautés. Les transports sont d’une importance toute particulière pour certains groupes d’individus plus vulnérables, ainsi ils sont fondamentaux pour l’émancipation des femmes. En fait, la question doit être abordée sous trois aspects : les investissements, les capacités technologiques et l’exploitation durable des ressources. Les gouvernements sont responsables en premier lieu de la définition des objectifs de développement durable. Pour sa part, le secteur privé contribue, lui, essentiellement aux investissements et aux gains de productivité. L’un des problèmes persistants est que les connaissances technologiques et le savoir-faire existent surtout dans les pays développés et des partenariats sont donc nécessaires. Il faut donc harmoniser les investissements au moyen d’un partenariat entre secteurs public et privé. Les pays en développement doivent être aidés dans le développement de leurs capacités. Au niveau global, les émissions de gaz à effet de serre doivent être réduites. Il faut comprendre aussi que ce sont les pays industrialisés qui sont à 60% responsables des émissions de polluants venant des transports, a poursuivi le représentant se référant au rapport du Secrétaire général sur la question. Il faut donc que ces pays assument leurs responsabilités, a-t-il insisté, avant de proposer qu’un fonds international soit créé pour soutenir les efforts dans ce domaine.
Mme GUN-BRITT ANDERSSON, Secrétaire d'Etat à la coopération pour le développement international, les politiques d'asile et les migrations de la Suède, a rappelé qu'au Sommet du millénaire, les dirigeants du monde ont confirmé l'objectif de réduire de moitié la proportion de la population mondiale vivant dans l’extrême pauvreté d'ici à 2015. Pour nourrir un taux de croissance permettant une telle réduction de la pauvreté, a-t-elle souligné, il faudra augmenter les investissements dans les secteurs de l'éducation et de la santé mais aussi de l'énergie et des transports. Il faut que ces investissements soient durables au niveau de l'environnement et de l'économie. Les investisseurs privés doivent favoriser les industries propres et les pouvoirs publics du Nord doivent tenir leurs engagements en matière d'aide publique au développement (APD).
Mme Andersson a noté que les besoins en matière de transport des pays du Nord sont différents de ceux du Sud. Au Nord, on parle notamment de congestion alors qu'au Sud, les personnes doivent encore être reliées entre elles. La représentante a suggéré la mise en place de programmes novateurs de financement, notamment par le microcrédit, afin de permettre aux populations des zones pauvres et des zones rurales de se développer. Elle a noté que les économies en transition, qui ont également un besoin aigu d'investissements ont du mal à obtenir des financements de la part des investisseurs qui demandent un contexte économique prévisible et un cadre juridique clair. En ce qui concerne l'aide publique au développement, Mme Andersson a estimé qu'elle peut jouer un rôle de catalyseur et compléter les ressources de financement extérieures. Observant que le secteur privé ne peut se développer sans un certain développement économique, la représentante a préconisé une multiplication des partenariats entre les industriels et les décideurs publics et privés, par exemple pour passer aux combustibles propres.
Echange de vues
Un scientifique britannique représentant la Fédération mondiale du Conseil des ingénieurs, a mis l’accent sur la nécessité de produire des directives sur la coopération entre les secteurs privé et public. Il faudrait aussi, selon lui, appliquer une discipline de bonne gestion des projets, qui passe par une évaluation réaliste des risques, l’élaboration de directives sur les bonnes pratiques en matière de bonne gestion du risque, et la multiplication des échanges sur les meilleures pratiques. Un représentant du milieu des entreprises a expliqué que l’industrie du pétrole estime que des solutions sont possibles pour promouvoir des combustibles plus propres. Ainsi le secteur industriel a développé des partenariats avec plusieurs grandes villes et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) en faveur de l’air propre. Les gouvernements, notamment pour ce qui est de l’occupation des sols, ont un rôle essentiel à jouer si l’on veut véritablement avoir une approche intégrée, mais un autre facteur à ne pas négliger est l’importance des solutions locales pour répondre aux besoins locaux.
Un membre d’une ONG chilienne a expliqué que la croissance économique dont son pays a joui ces dernières années n’a pas servi à améliorer la qualité de l’air et de la vie des habitants. Les grandes villes chiliennes sont très polluées car les transports publics ne représentent que 20% de l’ensemble des moyens de transport utilisés et plutôt que de développer de meilleurs systèmes collectifs, le gouvernement préfère financer la construction d’autoroutes. En fait, le problème est que les citoyens ne sont pas associés à la prise de décisions. Les choix des gouvernements dans les investissements à grande échelle sont essentiels et ont une influence directe sur les systèmes de transport. Ainsi quand un gouvernement construit une nouvelle autoroute, les citoyens vont acheter plus de voitures, au contraire, lorsqu’un gouvernement décide d’élargir les trottoirs, alors les citoyens s’adonnent plus volontiers à la marche.
La représentante d'un groupe d'organisations non gouvernementales de Chicago (Etats-Unis) a déclaré que les politiques de transport mal conçues au lendemain de la deuxième guerre mondiale ont entraîné la fermeture de nombreuses gares et rendu très difficile la marche dans cette ville. A Chicago, les autorités locales travaillent aux côtés des ingénieurs et des ONG pour rappeler aux usagers et aux acteurs économiques, entre autres, que la marche contribue au bon fonctionnement économique, social et sanitaire de la ville. Pour inciter les parents à ne pas conduire leurs enfants à l'école en voiture, ces acteurs s'efforcent de garantir à nouveau la sécurité des piétons. Un représentant des syndicats espagnols a déclaré qu'une grande partie des accidents du travail dont meurent les travailleurs en Espagne ont lieu dans les moyens de transport. Pour rendre plus sûr, plus agréable et moins polluant le trajet vers le lieu de travail, le représentant a suggéré de favoriser le transport assuré par les entreprises, le partage des automobiles et de faciliter la marche ainsi que l’utilisation d’autres véhicules non polluants.
Un représentant du secteur des entreprises danoises a déclaré que le partenariat entre entreprises acheteuses et vendeuses de véhicules et le gouvernement permet des économies et une réduction de la pollution. Le transport à notre époque est une chaîne qui va du producteur à l'utilisateur final et ceux qui achètent un véhicule doivent savoir quel type d'émissions ils produiront. Les autorités publiques doivent reconnaître les résultats positifs des initiatives privées et les soutenir, a-t-il ajouté. Un représentant de la communauté des organisations non gouvernementales s'est prononcé pour la réglementation des émissions polluantes des véhicules. Il a indiqué que, dans certains pays, la mise en place de telles règles a permis de réduire ces émissions jusqu'à dix fois. Dans la plupart des pays en développement, les véhicules vendus n'ont pas les mêmes systèmes de contrôle des émissions et ne bénéficient pas de carburants aussi efficaces. L'établissement de normes au niveau mondial serait donc une mesure très efficace. Il serait possible de passer des accords internationaux en ce qui concerne les émissions des véhicules ou encore élaborer des normes ISO.
Un représentant des syndicats du Royaume-Uni a demandé à la communauté scientifique comment elle procède pour consulter directement les acteurs concernés, c'est-à-dire les travailleurs du secteur des transports. Il a cité les travaux que mène une université des Etats-Unis pour mettre au point un système de surveillance des heures de travail des conducteurs afin d'améliorer la sécurité dans ce domaine.
Un conseiller municipal du Royaume-Uni a expliqué que sa commune a fait des investissements pour encourager la population à utiliser la marche et le vélo. Des pistes sont ainsi préparées et des circuits de ramassage “piéton” des enfants sont organisés. En outre, l’accent est mis sur les bienfaits pour la santé de la marche et de la bicyclette. Un travail important dans ce sens peut être fait auprès des jeunes. Un membre d’une ONG allemande a demandé à ce que davantage de recherche de pointe soit menée en matière de transports par la communauté scientifique. Les Nations Unies devraient quant à elles s’attacher à modifier l’environnement réglementaire pour que les systèmes de transport polluants soient abandonnés. A cet égard, un facteur important est de supprimer les subventions notamment pour ce qui est du transport de fret par route. Une stratégie de diminution de l’emploi de la voiture doit être mise en place en même temps qu’une politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre et substances nocives. Le représentant d’un syndicat de travailleurs des transports air/bus et chemins de fer a insisté sur ce dernier type de transport qui présente un bon potentiel pour une mobilité durable. Les chemins de fer sont en effet énergiquement 5 fois plus efficaces que les autres moyens de transport, a-t-il expliqué. Il a également mis en garde contre l’élaboration de nouvelles réglementations alors que celles dont on dispose déjà ne sont pas suffisamment mises en oeuvre par les gouvernements. Les chemins de fer sont une industrie à très forts investissements et ils sont l’exemple même d’un secteur où les subventions sont nécessaires, utiles et souhaitables.
Une représentante de la communauté des affaires venue d’Afrique du Sud a fait part de son expérience personnelle et des bénéfices que l’on peut tirer à un niveau très concret d’un partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Elle a notamment évoqué le programme de recyclage et de récupération des huiles de vidange des voitures mis en place dans son pays. Ainsi non seulement, les huiles usées sont moins rejetées de manière sauvage dans la nature mais, parce que leur huile est changée plus souvent, les voitures sont moins polluantes. Un membre de la communauté scientifique a insisté sur l’importance de l’amélioration du rendement énergétique. Il a pris l’exemple des Pays-Bas où le produit national brut (PNB) a doublé en 30 ans sans que la consommation énergétique n’ait augmenté et ce grâce à une plus grande efficacité énergétique. Un élément pivot est la promotion d’un système de transport collectif peu coûteux et efficace. De manière générale, il faut encourager les moteurs et les carburants plus propres pour tous les types de véhicules. Le défi est de produire des carburants plus propres et moins coûteux, et cela est possible si l’on adopte une stratégie pluridisciplinaire.
Un représentant du secteur des entreprises a estimé que l'insistance sur les problèmes de pollution attribués aux voitures ne doit pas cacher que, pour les pays en développement, elles sont un outil très important. Quant aux possibilités de déplacement virtuel que pourrait permettre le numérique, elles ne pourront être exploitées pleinement tant que la majorité de la population mondiale n'aura pas accès à un ordinateur. Le représentant du Brésil, Secrétaire aux transports de Sao Paolo, a expliqué que l'autobus alimenté au gaz coûte 40 % de plus qu'un autobus au diesel, et qu'il en va de même pour son exploitation. Les transports publics à l'alcool et à l'électricité coûtent trois fois plus cher que les autobus traditionnels, ce qui donne une idée des problèmes que rencontrent les agglomérations urbaines brésiliennes dans leurs efforts pour utiliser des sources d'énergie peu ou pas polluantes.
Un représentant d’un syndicat du Danemark a déclaré que l'impact négatif sur l'environnement des secteurs de l'énergie et des transports peut être réduit. Il a cité l'exemple du commerce des fleurs coupées cultivées au Zimbabwe, acheminées en Hollande puis réexpédiées au Japon. Ce commerce suppose de nombreux voyages aériens et un manque à gagner des horticulteurs zimbabwéens, a-t-il noté, en suggérant d'envoyer ces fleurs directement au Japon. Il a ensuite expliqué qu'au Danemark, il y a 5 fois plus de cochons que de Danois, des cochons engraissés par les aliments pour animaux produits par les pays en développement, et dont la viande est ensuite vendue au Japon et aux Etats-Unis. Le représentant a proposé que le Danemark produise lui-même ces aliments ou qu'il produise moins de viande de porc non consommée sur place. Un représentant de la communauté scientifique a déclaré que les subventions sont des facteurs externes utilisés par les grands producteurs de ce monde. Si l'on veut assurer la durabilité des systèmes d'énergie, il faut supprimer les subventions et faire parvenir directement l'aide aux pauvres. Il faut également que l'énergie leur soit fournie à des prix abordables.
Un représentant du secteur des affaires s'est félicité de l'adoption par le Parlement de l'Angola d'un plan national et de sa ratification d'instruments juridiques internationaux visant à lutter contre la pollution maritime. Un représentant des ONG a regretté que peu de villes cherchent à favoriser la marche ou la bicyclette. Il a demandé que les participants aux futures négociations n'oublient pas les modes de transport humbles. Un représentant des entreprises a vanté les mérites du gaz naturel et des véhicules au gaz liquide, qui sont beaucoup moins polluants que les véhicules traditionnels. Des pays tels que l'Australie et le Japon possèdent déjà un marché important pour ce type de véhicules et de carburants. Par ces mesures, ils favorisent un passage harmonieux aux véhicules à l'hydrogène. Le secteur de l'industrie du gaz liquide fait lui aussi son possible pour faciliter le passage aux véhicules à l'hydrogène, qui requiert le développement de modes de stockage adaptés, la création de véhicules acceptant ce type de carburant, l'information des usagers et la formation de garagistes.
Un membre du monde syndical a évoqué plus particulièrement le VIH/Sida arguant que les transports contribuent grandement à l’expansion de cette maladie. Il a rappelé en effet que traditionnellement la prostitution, qui est une source importante de transmission de la maladie, suit les marins ou les camionneurs. C’est pourquoi cet aspect de la question devrait aussi retenir l’attention. Un représentant de la communauté scientifique chinoise a exposé l’impact des voitures sur des villes de la taille de Beijing, par exemple. Bien souvent, les gouvernements préfèrent construire des routes plutôt que des voies ferrées et c’est ainsi que l’on en arrive à une véritable congestion des grandes villes. Ceci pose également des problèmes de sécurité énergétique puisque pour suivre ainsi l’expansion des véhicules motorisés, il faut importer du pétrole en quantité toujours plus grande. Il est important d’encourager les pays qui n’ont pas de pétrole à développer d’autres sources de carburant plus propres, à partir du gaz liquide ou du méthanol, par exemple. Une position qu’a reprise un représentant du monde industriel, expliquant que les gaz liquides notamment sont de plus en plus le choix de référence. Il est donc important de multiplier les encouragements financiers pour que l’on change de carburants.
Un représentant du monde syndical a mis l’accent sur l’information et la sensibilisation de tous les groupes de la société, en matière de développement durable et de gestion durable des transports en particulier. Un représentant d’une ONG du Royaume-Uni a fait remarquer que là où cela est possible, il faut réduire la circulation et pas seulement réduire les émissions de polluants des moyens de transports. En revanche, dans certaines zones rurales ou certaines communautés particulièrement démunies, il est impératif d’assurer un meilleur accès des populations aux transports.
Une représentante des autorités locales a estimé qu'outre l'accent sur les carburants "propres", il ne faut pas oublier que les fabricants de bus et de camions disposent également de technologies "propres". Bien que ces technologies supposent des coûts supplémentaires ces fabricants doivent en étudier l'utilisation. Une représentante de la communauté des ONG, a ajouté que l'aviation entraîne des émissions croissantes car les transports aériens se développent beaucoup. Ces émissions doivent être réglementées et la prochaine réunion de l'Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), en octobre 2001, devrait être mise à profit par les gouvernements pour faire en sorte que les acteurs de ce secteur respectent des normes plus strictes en matière de pollution.
Observations finales des grands groupes
Le représentant du secteur des entreprises et de l'industrie a déclaré que beaucoup de mesures positives sont en cours d'élaboration et s'est réjoui que nombre d'exemples novateurs aient été cités en matière d'infrastructure et de carburants. Il a jugé qu'il est très important de travailler en partenariat avec les gouvernements, les ONG, le système des Nations Unies et les communautés scientifiques. Il s'agit de faire en sorte que tous les individus puissent avoir accès à la mobilité, en particulier dans les pays en développement. Le représentant a rappelé que dans 30 ans, il faudra être en mesure de gérer 1,6 milliards de véhicules dans le monde. En conclusion, il a estimé que la mondialisation à visage humain est une nécessité et que les progrès en matière de mobilité devront être utilisés pour réduire la pauvreté.
La représentante du secteur des ONG a attiré l'attention sur les usagers de la route non motorisés, qui sont très nombreux dans le monde en développement. Ce type d'usager est souvent victime d'accidents et il faut donc prendre des mesures de protection à leur intention. Des mesures pour promouvoir la sécurité et les moyens durables de transport doivent également être adoptées. La représentante a recommandé de lancer un dialogue sur la réglementation de la sécurité routière et des émissions polluantes. Elle a ensuite estimé que le financement international ne doit pas être monopolisé pour introduire de nouvelles technologies mais également servir à accroître la mobilité du public dans les pays en développement.
Le représentant des milieux scientifiques et technologiques a déclaré que le secteur des transports a fait des progrès en matière d'utilisation de l'énergie, notamment grâce aux nouveaux carburants. Il a regretté que ces innovations n'aient pas été transmises aux pays en développement, qui se sont néanmoins efforcés de développer leurs propres solutions. Il a suggéré d'intensifier la recherche de nouveaux carburants produisant moins d'émissions de gaz à effet de serre, d'améliorer les infrastructures routières et d'éliminer progressivement les véhicules utilisant l'essence au plomb.
La représentante du secteur des travailleurs a évoqué le programme du Bureau international du Travail sur la sécurité économique qui comporte un volet sur l'énergie et les transports. Elle a appelé les différents acteurs travaillant avec ce type d’organisations internationales à poursuivre leurs efforts pour parvenir à une gestion durable de l'énergie au service des transports. Il faut reconnaître que la peur du changement, aussi forte quelle soit, doit être surmontée.
La représentante des autorités locales a recommandé l'adoption de normes nationales pour la production de véhicules "propres" et fonctionnant de façon satisfaisante. Elle a recommandé que les pouvoirs publics utilisent leur pouvoir et leur influence pour promouvoir des transports en commun "propres", et des moyens de transport non polluant tels que la marche et la bicyclette. Il faudrait aussi utiliser le pouvoir d'achat du gouvernement pour acheter des technologies propres ou encourager le secteur des affaires à adopter des technologies propres. La représentante a également recommandé la suppression des taxes et impôts divers qui frappent les moyens de transports non polluants. En outre, grâce à des partenariats avec les gouvernements les compagnies pétrolières devraient être incitées à produire des carburants moins polluants.
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