LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT ENTEND PLUSIEURS INTERVENTIONS CONCERNANT LA MISE EN ŒUVRE DE LA CONVENTION SUR L'INTERDICTION DES MINES ANTIPERSONNEL
Communiqué de presse CD/G/508 |
LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT ENTEND PLUSIEURS INTERVENTIONS CONCERNANT LA MISE
EN ŒUVRE DE LA CONVENTION SUR L'INTERDICTION DES MINES ANTIPERSONNEL
Le Chili annonce qu'il vient de ratifier la Convention et le Pérou qu'il est
sur le point de détruire tous ses stocks de mines terrestres antipersonnel
Genève, le 13 septembre -- La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, plusieurs interventions concernant la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction après que le Chili eût annoncé que son gouvernement a déposé hier l'instrument de ratification de la Convention.
Le Chili a souligné que l'avènement de la démocratie a signifié un changement dans la politique de défense des pays d'Amérique latine qui a permis l'abandon de la logique de confrontation et de conflit. Le Chili souligne par ailleurs que la Convention d'Ottawa montre ce qu'il est possible de faire dans le domaine de la sécurité internationale et du désarmement lorsqu'il y a une volonté politique et souhaite que cet exemple contribue à exorciser les forces qui continuent de paralyser la Conférence du désarmement.
Le Pérou a pour sa part annoncé que, jeudi prochain, le pays achèvera la destruction des 321 368 mines terrestres antipersonnel qu'il possédait. Conformément à ses obligations en matière de déminage, le Pérou continue d'œuvrer, comme le fait également l'Équateur, à la destruction, le plus rapidement possible, de toutes les mines antipersonnel qui se trouvent encore dans la zone frontalière entre les deux pays.
La Belgique, en tant que co-Président du Comité permanent sur le Statut et le fonctionnement général de la Convention, a vivement salué la ratification de la Convention par le Chili et a souligné les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Convention. La Belgique appelle tous les États, qu'ils soient États parties, signataires ou non-signataires, de cesser d'utiliser des mines antipersonnel, vu leur impact sur des vies de civils innocents.
L'Argentine, la Norvège, le Canada, l'Algérie et le Mexique sont également intervenus sur la question des mines terrestres antipersonnel soulignant notamment que la troisième Conférence des États parties qui se tiendra à Managua du 18 au 21 septembre prochains doit être l'occasion d'appeler à l'universalité de la Convention et au renforcement de la coopération dans les domaines du déminage, de la destruction des stocks et de l'aide aux victimes.
L'Ambassadeur Ian Soutar du Royaume-Uni a pour sa part fait une déclaration d'adieu à la Conférence.
La séance plénière de la Conférence a été suivie d'une séance informelle consacrée à l'examen du rapport annuel de la Conférence, qui termine ses travaux de 2001 cette semaine.
La prochaine séance plénière de la Conférence du désarmement aura lieu le jeudi 13 septembre à 10 heures.
Déclarations
M. ALFREDO LABBE (Chili) a informé la Conférence du désarmement que son pays a déposé hier, lundi 10 septembre, l'instrument de ratification de la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction. Le Chili achève ainsi le long processus juridique sur le plan national pour l'application d'un instrument qui revêt une importance particulière pour l'Amérique latine et le monde entier.
Le représentant chilien a rappelé que, dans les années 70, son pays a posé des milliers de mines à ses frontières dans le cadre de la stratégie de défense de l'époque. L'avènement de la démocratie a signifié un changement dans la politique de défense des pays d'Amérique latine. Les gouvernements démocratiques de la région ont résolu les différends frontaliers qui avaient mené à des conflits. On ne peut que se féliciter de cette logique de confrontation et de conflit qui a conduit le Chili à poser le plus grand nombre de mines de tous les pays d'Amérique latine.
La ratification par le Chili de la Convention d'Ottawa implique pour le pays une importante tâche de destruction de l'énorme quantité de mines terrestres antipersonnel. Le Chili fera sa part pour éliminer ses mines et espère que les pays amis l'aideront dans cet effort. M. Labbe a enfin fait observer que la Convention d'Ottawa montre ce qu'il est possible de faire dans le domaine de la sécurité internationale et du désarmement lorsqu'il y a une volonté politique. Elle montre également que les petits États et les États d'importance moyenne peuvent générer une «masse critique» pour produire des résultats qui affectent positivement la vie de millions d'être humains. Le Chili souhaite que cet exemple contribue à exorciser les forces qui continuent de paralyser la Conférence du désarmement.
M. JORGE VOTO BERNALES (Pérou) a déclaré que son pays est fermement engagé en faveur des principes de la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction et a rappelé que son pays participe activement au Programme de travail intersession de la Convention, en particulier au sein du Comité sur le déminage et les techniques connexes.
Dans ce cadre, le Pérou souhaite annoncer que, le 13 septembre prochain, le pays achèvera la destruction des 321 368 mines terrestres antipersonnel qu'il possédait. Cette destruction des stocks péruviens s'est effectuée dans la transparence tout au long de l'année, avec l'appui et sous le contrôle de la communauté internationale, des Nations Unies, de l'Organisation des États américains, du Comité international de la Croix-Rouge et de la société civile. Le Pérou se sera ainsi pleinement acquitté de ses obligations aux termes de l'article 4 de la Convention, un an et demi avant le délai prévu de quatre ans. Le Pérou est reconnaissant envers les pays qui l'ont appuyé dans cet effort.
M. Voto Bernales a ajouté que, conformément à ses obligations en matière de déminage, le Pérou continue d'œuvrer, comme le fait également l'Équateur, à la destruction, le plus rapidement possible, de toutes les mines antipersonnel qui se trouvent encore dans la zone frontalière entre les deux pays et à la prise en charge et la réintégration socioéconomique des victimes de ces armes.
M. JEAN LINT (Belgique) a déclaré, en tant que co-Président du Comité permanent sur le Statut et le fonctionnement général de la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel, qu'il prenait note avec grande satisfaction de l'annonce de la ratification de la Convention par le Chili, qui deviendra dans six mois le 120ème État partie et le 35ème État membre de la Conférence du désarmement à avoir ratifié ou accédé à la Convention. Six autres membres l'ont signée mais non encore ratifiée, et 25 restent en dehors de la Convention. La ratification par le Chili revêt une importance majeure dans le contexte régional de l'Amérique du Sud. Depuis la Deuxième Assemblée des États parties en septembre 2000, cinq États membres de la Conférence ont ratifié la Convention, s'est félicité M. Lint, à savoir le Bangladesh, le Chili, la Colombie, le Kenya et la Roumanie. Deux autres membres, l'Algérie et le Cameroun, ont indiqué qu'ils déposeraient bientôt leurs instruments de ratification. M. Lint a espéré que l'Éthiopie procédera bientôt à la ratification compte tenu de l'accession de l'Érythrée le 27 août dernier. La Turquie a annoncé qu'elle accéderait prochainement la Convention, à la même date que la Grèce la ratifierait. La République démocratique du Congo a indiqué que toutes les mesures nécessaires ont été prises pour une accession prochaine. En outre, des États membres de la Conférence ont pris des mesures importantes pour mettre en œuvre intégralement la Convention. Ainsi, la Bulgarie, l'Espagne, la Malaisie, la Slovaquie et le Zimbabwe ont détruit leurs stocks de mines antipersonnel.
Le représentant belge a souligné qu'à ce jour, 141 États ont soit signé ou ratifié la Convention ou y ont accédé. Il est clair qu'une norme internationale a été créée, à savoir l'interdiction totale de la production, du stockage, de l'utilisation et du transfert des mines antipersonnel, et que cette norme est devenue incontournable même pour les États non-signataires. En effet, depuis
l'entrée en vigueur du Traité, le commerce des mines antipersonnel a virtuellement cessé et la production de ces mines a sensiblement diminué. On ne compte plus dans le monde que quatorze producteurs. De même, le nombre des victimes dans les pays les plus touchés est en diminution constante et, au niveau mondial, une aide financière accrue est accordée chaque année à des fins de déminage, d'assistance aux victimes et de sensibilisation aux dangers des mines. Toutefois, il faut faire mieux encore et atteindre l'ensemble de la communauté internationale.
M. Lint a rappelé que, la semaine prochaine, la troisième Assemblée des États parties se tiendra à Managua et a encouragé les 52 États qui n'ont pas signé la Convention à y accéder dès que possible. Toutefois, il importe également de mettre intégralement en œuvre la Convention pour débarrasser le monde de cette arme inhumaine. Il a appelé tous les États, qu'ils soient États parties, signataires ou non-signataires, de cesser d'utiliser des mines antipersonnel, vu leur impact sur des vies de civils innocents.
M. HORACIO SOLARI (Argentine) a déclaré que son pays adhère pleinement aux principes de la Convention sur l'interdiction des mines terrestres antipersonnel. L'Argentine est convaincue que la création en Amérique latine d'une zone exempte de mines terrestres antipersonnel est un objectif atteignable, rappelant que le Cône sud a déjà été déclaré zone exempte de mines terrestres antipersonnel.
La réunion des États parties à la Convention à Managua la semaine prochaine sera l'occasion de faire avancer le processus de mise en œuvre effective des dispositions de la Convention dans le domaine du déminage et de la destruction des stocks et de tirer parti des expertises acquises dans ce domaine par certains pays de la région. La Convention d'Ottawa est un instrument juridique important pour le droit humanitaire international et l'Argentine se félicite du nombre important de pays qui ont souscrit à l'engagement de mettre fin aux souffrances causées par les mines terrestres antipersonnel. Le représentant argentin a vivement salué à cet égard la ratification de la Convention par le Chili.
La Convention d'Ottawa favorise la confiance entre les pays dans toutes les régions du monde. Il est essentiel que les pays qui n'ont pas encore ratifié la Convention le fassent le plus rapidement possible. Pour sa part, l'Argentine a ratifié la Convention le 14 septembre 1999, a rappelé le représentant qui a souligné la contribution de son pays à l'assistance humanitaire dans le cadre de la Convention d'Ottawa.
M. KNUT LANGELAND (Norvège) a déclaré que son pays attachait une grande importance à la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, comme en témoigne l'élection de la Norvège à la présidence de la Deuxième réunion des États parties à la Convention et sa fonction actuelle de Président du Comité de coordination. La priorité principale pour la présidence norvégienne avait été la consolidation du processus d'Ottawa et la mise en œuvre intégrale de toutes les dispositions du Traité. La Norvège a maintenu son engagement de consacrer 120 millions de dollars aux activités menées dans ce domaine sur une période de cinq ans.
D'important progrès ont été réalisés depuis l'entrée en vigueur de la Convention il y a plus de deux ans, mais 52 pays n'ont pas encore signé ni ratifié la Convention et il faut les encourager à devenir parties. Le représentant norvégien a salué la diminution de l'utilisation des mines terrestres antipersonnel et la réduction importante de la production. Et surtout, on constate une diminution significative des exportations.
M. CHRISTOPHER WESDAL (Canada) s'est associé à ceux qui ont salué la ratification de la Convention par le Chili. Le Canada salue également la publication de l'Observatoire des mines par la Campagne internationale pour l'interdiction des mines qui a constaté l'an dernier une diminution des victimes des mines et une augmentation des destructions de stocks. M. Wesdal a toutefois déploré que les mines terrestres antipersonnel continuent d'être utilisées dans certaines régions du monde et a indiqué la détermination de son pays à appuyer tous les efforts visant à réduire l'utilisation des mines terrestres antipersonnel.
À un moment où la capacité des instances multilatérales à obtenir des résultats dans le domaine de la sécurité et du désarmement suscite des doutes et des remises en cause, il est encourageant de constater l'efficacité de la coopération multilatérale dans le domaine des mines terrestres antipersonnel, a fait valoir le représentant canadien.
MME NASSIMA BAGHLI (Algérie) a rappelé que son pays a été l'un des premiers à signer la Convention d'Ottawa et qu'il vient de procéder à sa ratification. L'Algérie est particulièrement touchée par ces engins qui datent, en grande partie, de la période coloniale. Ces mines ont été posées par les forces coloniales en violation des règles les plus élémentaires des droits humains et ce dans le but de freiner la lutte pour l'indépendance livrée par le peuple algérien. Ces mines continuent jusqu'à aujourd'hui de faire des victimes. Ces dernières sont en droit de réclamer des indemnisations et des réparations de la part de ceux-là même qui ont procédé à la pose de ces mines. Dès l'avènement de l'indépendance, l'Armée algérienne a effectué des opérations de déminage mais ces efforts restent insuffisants faute de formation adéquate et de moyens nécessaires.
La représentante algérienne a rendu hommage aux organisations non gouvernementales qui ont grandement contribué à l'aboutissement du processus d'Ottawa ainsi qu'à la mise en œuvre de la Convention d'Ottawa et pour apporter une assistance précieuse aux populations affectées par les mines. C'est notamment l'engagement et l'efficacité démontrés par les ONG dans le domaine du désarmement qui incite l'Algérie à demander la participation des ONG aux travaux de la Conférence du désarmement, en qualité d'observateurs. La représentante a en outre salué l'exemple de solidarité et de coopération internationales des pays donateurs qui mettent à la disposition des pays affectés par les mines les fonds nécessaires pour enrayer ce fléau. Elle a également rendu hommage aux rôles joués par des organismes tels que le Comité international de la Croix Rouge, les instances compétentes des Nations Unies ainsi que le Centre international de déminage humanitaire pour leur engagement en faveur de la mise en œuvre de la Convention d'Ottawa.
À la veille de la tenue de la Conférence des États parties à Managua, l'Algérie appelle à une universalisation de la Convention afin de libérer notre terre du fléau des mines antipersonnel. Pour sa part, l'Algérie s'engage, aux termes de sa ratification de la Convention d'Ottawa, à se conformer pleinement aux disposition qui y sont prévues et à coopérer en vue de sa mise en œuvre intégrale.
M. TONATIUH ROMERO REYES (Mexique) a déclaré que la Convention d'Ottawa a signifié la création d'une norme internationale incontournable qui rend inacceptables les mines terrestres antipersonnel. Sa ratification par autant de pays montre bien que l'élimination de ces mines est un objectif atteignable. Plusieurs pays d'Amérique latine ont réalisé d'important progrès en matière de déminage et de destruction des stocks. La Convention a permis une diminution du nombre de pays producteurs et la réduction de l'exportation de ces mines. On constate en outre une baisse importante des victimes et une augmentation des ressources consacrées à la réhabilitation des victimes.
Le représentant mexicain a toutefois souligné qu'il fallait maintenir les efforts pour l'élimination totale et renforcer la coopération internationale afin de réaliser les objectifs de la Convention. M. Romero a lancé un appel aux 52 États qui n'ont pas encore ratifié la Convention de le faire. À Managua, la semaine prochaine, il faudra poursuivre les efforts en faveur de l'universalité de la Convention. Le Mexique est convaincu que la réunion de Managua sera également l'occasion de donner un nouvel élan aux efforts visant à faire de l'hémisphère occidental une zone exempte de mines terrestres antipersonnel.
M. IAN SOUTAR (Royaume-Uni), dans un discours d'adieu à la Conférence, a exprimé sa déception de ce que les quatre ans qu'il a passés en tant qu'ambassadeur de son pays auprès de la Conférence aient coïncidé avec un «passage à vide» dans ses travaux de fond. Il estime toutefois avoir joué une part modeste, avec d'autres, pour «bien huiler le moteur et le faire tourner afin qu'un jour, nous l'espérons tous, il sera possible à nouveau d'appuyer sur l'accélérateur».
M. Soutar a indiqué qu'au cours de son séjour à Genève, il avait notamment appris l'importance de la transparence dans les relations. La transparence, et avec elle la crédibilité et la prévisibilité, devraient être au cœur des travaux de la Conférence. Il faut aussi beaucoup de patience.
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