CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT : LES ÉTATS-UNIS DISPOSÉS À ACCEPTER DES COMITÉS SUR LE DÉSARMEMENT NUCLÉAIRE ET SUR L'ARMEMENT DANS L'ESPACE
Communiqué de presse CD/G/507 |
CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT : LES ÉTATS-UNIS DISPOSÉS À ACCEPTER DES COMITÉS
SUR LE DÉSARMEMENT NUCLÉAIRE ET SUR L'ARMEMENT DANS L'ESPACE
Selon eux, la défense antimissile et le Traité ABM ne doivent pas
servir de motif pour empêcher la négociation d'un traité sur les matières fissiles
Genève, le 4 septembre -- La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, les États-Unis, qui ont répondu à l'intervention faite jeudi par la Chine au sujet du Traité sur la limitation des systèmes de missiles antimissiles (ABM), signé en 1972 par Washington et Moscou, et du système de défense antimissile envisagé par les États-Unis.
Les États-Unis estiment que le Traité ABM, dans son état actuel, «est devenu une relique». S'agissant de la défense antimissile, ils comprennent mal que des mesures de défense puissent être considérées comme une menace. Ils soulignent en outre que les plans en matière de systèmes antimissiles ne sont pas dirigés contre la Russie ou la Chine.
Les États-Unis estiment que les questions de la défense antimissile et du Traité ABM sauraient servir de motif pour faire obstacle aux négociations sur un traité d'interdiction de la production future de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires (traité «cutoff»). Tout en regrettant les manœuvres procédurières liées à l'examen des questions sur l'espace extra-atmosphérique, qui n'en est qu'à une étape préliminaire, et reconnaissant qu'il ne faut pas que la Conférence demeure dans l'impasse, les États-Unis sont disposés, dans le cadre des discussions en cours sur le traité «cutoff», à accepter la création d'un comité spécial sur le désarmement nucléaire, ainsi que d'un comité spécial chargé de mener des discussions exploratoires sur les questions relatives à l'espace extra-atmosphérique.
L'Inde a pour sa part estimé que l'impasse actuelle dans les efforts pour établir le programme de travail est le résultat des positions inflexibles de quelques délégations qui ont empêché un accord sur les deux questions en suspens - le désarmement nucléaire et l'espace extra-atmosphérique.
L'Inde estime que la priorité en ce moment doit être de commencer les négociations et que l'examen des questions de procédure ne contribuera pas beaucoup à faire sortir la Conférence de l'impasse.
La prochaine séance plénière de la Conférence du désarmement aura lieu le mardi 11 septembre à 10 heures. La Conférence termine ses travaux de 2001 le
14 septembre.
Déclarations
M. ROBERT GREY (États-Unis) a rappelé que le représentant de la Chine est intervenu jeudi dernier pour indiquer l'importance qu'attache la Chine à la préservation, la protection et la défense du Traité sur la limitation des systèmes de missiles antimissiles (ABM) signé en 1972 à Moscou entre représentants des États-Unis et de l'Union des Républiques socialistes soviétiques, «comme si ce traité était un document sacré, ou encore une relique religieuse». Les États-Unis renoncent pour leur part à passer en revue les divers traités bilatéraux signés par la Chine au cours des années 70, et à donner des conseils à la Chine sur la préservation, la protection et la défense de l'un quelconque de ces traités bilatéraux signé il y a deux ou trois décennies.
Le représentant des États-Unis a estimé qu'en diplomatie, comme dans la vie, tout ce qui ne contribue pas à l'évolution et à la croissance est condamné à dépérir et disparaître. Ainsi, le Traité ABM, dans son état actuel, est réellement devenu une relique, il est fondé sur l'équilibre de la terreur, des calculs de guerre froide qui veulent que des centaines de millions d'êtres humains soient autant d'otages menacés d'un anéantissement instantané. Ce paradoxe extrême a pu s'avérer nécessaire à l'époque; il ne l'est plus aujourd'hui, dix ans après la fin de la guerre froide. Les États-Unis et la Russie doivent s'entendre sur un nouveau cadre sécuritaire, et le Président Bush et le Président Poutine ont entamé un tel processus. «Certains peuvent trouver rassurant de vivre dans le passé, mais nous, Américains, avons choisi de regarder vers l'avenir», a déclaré M. Grey. Les doctrines d'hier ne nous rapprocheront pas d'un avenir envers lequel les États-Unis et les quatre autres États dotés d'armes nucléaires se sont engagés en vertu de l'article VI du Traité sur la non-prolifération nucléaire, à savoir, un monde sans armes nucléaires.
Les États-Unis comprennent qu'une défense antimissile puisse avoir des incidences importantes pour la Chine et d'autres pays, mais ont du mal à comprendre comment des mesures de défense peuvent être considérées comme une menace. M. Grey a rappelé à cet égard que la Charte des Nations Unies reconnaît le droit inhérent à la légitime défense. Il a rappelé que les États-Unis cherchent à réduire le nombre d'armes nucléaires offensives, et non de les maintenir à leur niveau actuel. Par ailleurs, les États-Unis savent bien que la réalisation de plans de défense antimissile mettrait le pays et ses alliés à l'abri d'attaques par des missiles. De tels systèmes seraient totalement inefficaces contre des missiles technologiquement avancés et en grand nombre. Mais les États-Unis estiment que les plans qui sont envisagés pourraient être constructifs et utiles «dans certaines circonstances qui nous préoccupent tout particulièrement», a déclaré M. Grey, qui a rappelé que les systèmes antimissiles ne sont pas nouveaux et que des missiles Patriot ont abattu des missiles Scud dirigés contre Israël et l'Arabie saoudite pendant la guerre du Golfe. Mais tous les Patriot n'ont pas fonctionné parfaitement et il faut poursuivre la recherche.
Le représentant des États-Unis a réitéré que les plans en matière de systèmes antimissiles ne sont pas dirigés contre la Russie ou la Chine. Les États-Unis souhaitent entretenir des relations positives et orientées vers l'avenir avec la Russie et la Chine sur les plans politique, économique et culturel. La question de la défense antimissile ne devrait pas entraver de tels efforts. Les États-Unis estiment en outre que les questions de la défense antimissile et du Traité ABM ne sauraient fournir un motif valable ou même plausible pour faire obstacle aux négociations sur un traité d'interdiction de la production future de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires (traité «cutoff»). M. Grey a regretté que les préoccupations politiques sur la question de la défense antimissile, qui n'est pas à l'ordre du jour de la Conférence, aient mené à des manœuvres procédurières liées à l'examen des questions sur l'espace extra-atmosphérique. C'est ce qui s'est produit ici à Genève alors que ces questions sont vastes et complexes et se trouvent dans les étapes préliminaires des discussions de la communauté internationale. Les propositions tendant à négocier un nouveau traité sur l'espace extra-atmosphérique ne pourront porter de fruits à moins qu'il soit démontré de façon convaincante que la sécurité collective et la retenue mutuelle dans l'espace seraient mieux réalisées en cherchant à négocier un nouvel instrument juridique. Il faudrait notamment aboutir à des moyens fiables et efficaces de vérifier le respect des nouvelles obligations. À cet égard, les États-Unis doutent que des discussions au sein d'un comité spécial puissent mener à un tel résultat.
Néanmoins, il ne faut pas que la Conférence demeure dans l'impasse. Les États-Unis sont disposés, dans le cadre des discussions en cours sur le traité «cutoff», à accepter un programme de travail comprenant la création d'un Comité spécial sur le désarmement nucléaire, ainsi que d'un Comité spécial chargé de mener des discussions exploratoires sur les questions relatives à l'espace extra-atmosphérique. Les États-Unis regrettent que la Chine fasse partie du petit nombre d'États membres qui ne sont pas encore prêts à avancer sur la base de la proposition Amorim et lancent un appel à ces pays pour qu'ils revoient leur position afin que la Conférence du désarmement puisse se remettre au travail et ainsi répondre aux attentes justifiées de la communauté internationale.
M. RAKESH SOOD (Inde) a déclaré que, malgré tous ses efforts, la Conférence était à nouveau cette année parvenue à la fin de sa session sans avoir commencé des travaux de fond sur un seul point de son ordre du jour à cause de son incapacité à convenir d'un programme de travail. Cela est d'autant plus préoccupant qu'aucun signe positif ne se profile à l'horizon pour dissiper le pessimisme ambiant, qui va en s'accentuant. Au contraire, les événements, comme dans le cas de la Convention sur les armes biologiques, semblent révéler une tendance qui pourrait menacer le concept même de négociations multilatérales en matière de désarmement. La proposition Amorim a mené la Conférence extrêmement près de parvenir à un accord. Malheureusement, un an plus tard, la communauté internationale constate qu'elle ne parvient pas à adopter une décision sur la base de ce compromis.
M. Sood a déclaré que la position qui recueille le plus fort soutien de l'Inde est la proposition du Groupe des 21 (pays non alignés membres de la Conférence du désarmement) tendant à établir un comité spécial sur le désarmement nucléaire chargé de commencer des négociations sur un programme par étapes pour l'élimination complète des armes nucléaires avec un calendrier précis, y compris par le biais d'une convention sur les armes nucléaires. L'Inde s'est montrée disposée à accepter le compromis Amorim et avait soutenu l'établissement d'un comité spécial pour négocier un traité non discriminatoire, multilatéral et internationalement et efficacement vérifiable interdisant la production de matières fissiles. L'Inde a aussi soutenu la position du G-21 sur la création d'un comité spécial sur la prévention d'une course aux armements dans l'espace. L'impasse actuelle dans les efforts pour établir le programme de travail est le résultat des positions inflexibles de quelques délégations qui ont empêché un accord sur les deux questions en suspens - le désarmement nucléaire et l'espace extra-atmosphérique.
S'agissant des questions de procédure, le représentant indien a souligné, dans le cadre de l'examen de la question de l'amélioration et de l'efficacité du fonctionnement de la Conférence, que la règle du consensus est une nécessité absolue parce qu'elle garantit la protection des intérêts essentiels et légitimes de chaque État membre en matière de sécurité. Affaiblir cette règle en l'interprétant de nouveau ou en la redéfinissant aurait un impact négatif sur la confiance mutuelle qui est essentielle au sein de la Conférence, et par conséquent sur l'efficacité de son fonctionnement. Pour sa part, le Coordonnateur spécial sur le réexamen de l'ordre du jour s'est concentré sur le rôle et le contenu de l'ordre du jour, mais l'Inde estime que le problème se situe plutôt dans sa mise en œuvre. S'agissant de l'élargissement de la composition de la Conférence, l'Inde réitère qu'un équilibre doit être trouvé entre les critères d'adhésion à la Conférence et son efficacité en tant qu'instance de négociation. Quoi qu'il en soit, la priorité en ce moment, y compris pour les pays candidats, doit être de réactiver la Conférence pour que commencent les négociations, a souligné le représentant indien, qui a ajouté que l'examen des questions de procédure ne contribuera pas beaucoup à faire sortir la Conférence de l'impasse actuelle.
L'ordre du jour du désarmement international change sans cesse en raison de certains arrangements unilatéraux qui menacent le processus de négociation multilatérale que représente la Conférence. Cette année a vu de nouvelles tentatives visant à retirer à la Conférence du désarmement des questions qui relèvent de son mandat pour les transférer vers d'autres instances sous prétexte qu'elles sont trop importantes pour être ignorées. Cette évolution n'augure pas bien de l'avenir de la Conférence. Pourtant, même dans la situation actuelle, elle offre davantage d'espace au dialogue multilatéral sur les questions qui la concernent que tout autre instance.
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