LES ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES FONT PART DE LEURS ATTENTES DEVANT LE COMITE PREPARATOIRE
Communiqué de presse CD/229 |
Comité préparatoire de la Conférence des
Nations Unies sur le commerce illicite
des armes légères sous tous ses aspects
34ème séance - matin
LES ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES FONT PART DE LEURS ATTENTES
DEVANT LE COMITE PREPARATOIRE
Sans un engagement ferme des Etats en faveur d’un programme d'action ferme et dynamique avec des délais stricts pour son suivi et des ressources importantes, il est à craindre que les résultats de la Conférence des Nations Unies sur le commerce illicite des armes légères ne se limitent à une série de bonnes paroles, qui ont bien peu de sens dans les rues et les foyers de Sierra Leone, de San Diego ou de San José de Costa Rica, a averti ce matin le représentant de l’organisation gouvernementale «Fondation Arias». La Fondation Arias est l’une des 17 ONG qui ont pu ce matin présenter leurs activités et exprimer leurs attentes concernant le commerce illicite des armes légères devant le Comité préparatoire de la Conférence de l'ONU sur le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects. La décision concernant les modalités de participation des organisations non gouvernementales aux travaux du Comité préparatoire et à ceux de la Conférence qui aura lieux à New York en juillet a été prise hier par le Comité préparatoire. Comme l’a rappelé le représentant du «Groupe de personnes éminentes», l’avenir dépend d’une coalition entre acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux et les ONG doivent participer activement à toutes les activités pour mobiliser l’opinion et créer des synergies et un partenariat à long terme.
En même temps, les ONG reconnaissent que le contrôle des armes légères doit être décidé par les Etats, ce qui fait reposer sur ceux-ci de lourdes responsabilités. La représentante de la Women’s International League for Peace and Freedom, - rejointe par celle de l'"International Action Network on Small Arms, (IANSA) - a rappelé que la prolifération des armes légères ne touche pas uniquement aux questions de sécurité mais a de sérieuses répercussions humanitaires: au cours de la dernière décennie, 20 millions d’enfants ont été déplacés, deux millions d’entre eux ont été tués, six millions ont été blessés en situation de guerre. En outre, l’impact des armes légères sur les enfants est désastreux et elle a condamné l’enrôlement de 300 000 enfants dans les conflits armés.
Comment agir? Pour le Groupe de Recherche et d'Information sur la Paix et la Sécurité (GRIP, Belgique), il faut mettre l'accent sur le marquage et le traçage rapide des armes, ainsi que sur leur enregistrement. Mais l'ONG "Institute for Security Studies (Afrique du Sud) a fait valoir que le continent africain, qui produit moins de 5% des armes mondiales, est moins concerné par un code de conduite sur la production que par des mesures efficaces afin de lutter contre les transferts illicites et contre l’abondance des livraisons d’armes. Dans le même sens, Amnesty International, au nom de cette organisation,
ainsi que de Human Rights Watch et de NISAT (Initiative norvégienne sur les transferts d'armes légères) a demandé que le programme d’action comprenne un engagement concret concernant la question du courtage international des armes et de leurs transports car c’est là un des principaux moyens utilisés par les trafiquants pour contourner les lois et violer les récents embargos des Nations unies.
Certaines ONG, comme la Fondation Arias, se sont prononcées en faveur de la mise au point d'un instrument contraignant qui fixerait notamment des règles pour la possession par les civils d'armes, ou tout le moins d'armes à vocation militaire. Au contraire, le représentant de la National Rifle Association (NRA, Etats-Unis) a fait référence aux droits constitutionnels des citoyens américains, parmi lesquels des dizaines de millions de chasseurs, de tireurs et de processeurs légaux d’armes à feu, qui méritent d’être dûment pris en compte par la Conférence. Il a souhaité que celle-ci se limite à des questions telles que le marquage des armes, le traçage par des agences nationales existantes des armes faisant l’objet d’un commerce illégal et la création de procédures commerciale efficaces. Fabricant d'armes, l'organisation "Sporting Shooters Association of Australia" s'est déclarée favorable à un marquage indélébile et harmonisé au plan mondial, faisant observer que les industriels de l’armement avaient mis en place un Groupe d’experts chargés de définir des normes universelles. Elle a plaidé en faveur d’un registre qui serait contrôlé par les industriels.
En début de séance, le Ministre kenyan des affaires étrangères, M. Bonaya Adhi Godana, a suggéré la création de centres régionaux de coopération, car le problème du commerce des armes légères, complexe, doit être résolu à différents niveaux dans le cadre d’une stratégie globale que l’ONU est la mieux à même de définir. Il a estimé que l’idéal serait l’adoption d’un instrument contraignant, que la Conférence de juillet devra se frayer des chemins pour une action concrète et devra constituer un moteur pour la mobilisation des ressources et le renforcement des capacités.
En outre, au nom du Département des affaires de désarmement de l'ONU,
M. Evgeniy Gorkovskiy a présenté le Mécanisme de coordination des actions sur les armes légères des Nations Unies (CASA) qui regroupe 17 agences et départements de l'ONU collaborant étroitement à la préparation de la Conférence.
En fin de séance, le représentant des Emirats arabes unis a exercé son droit de réponse face aux allégations contenues dans la déclaration faite par Amnesty International.
Le Comité préparatoire poursuivra cet après-midi, à huis clos, ses travaux sur le préambule du projet révisé de programme d'action.
Interventions
M. BONAYA ADHI GODANA, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale du Kenya (au nom des pays de la région des Grands lacs et de la Corne de l’Afrique) a estimé que la principale tâche de la Conférence sur le commerce illicite des armes légères est de définir la voie à suivre pour défendre les pays les plus vulnérables à s’attaquer à l’offre en armes légères. La disponibilité des armes légères est déjà considérable dans la région et s’accroît. Elle contribue à l’accroissement des activités criminelles comme le vol ou les braquages, qui se multiplient sur tout le continent africain. En outre, l’abondance des armes empêche de trouver une solution rapide aux conflits. Des groupes constituent leurs propres stocks d’armes privés, contribuant ainsi à la création d’une «culture du fusil» qui menace les démocraties africaines.
Les femmes et les enfants représentent souvent 80% des victimes de ses armes, a rappelé M. Godana. En outre, les enfants sont souvent enrôlés de force dans les conflits armés. Les travailleurs humanitaires et soldats de la paix sont également victimes de ce climat d’insécurité provoqué par le trafic d’armes. En Somalie et en Sierra Leone, les acquis du développement sont annihilés, les armes légères sont bon marché, aisément disponibles et faciles à utiliser. Les armes légères se sont accumulées au fil des ans, notamment au cours de la guerre froide, un peu partout dans le monde. Les souffrances des populations civiles, du fait des conflits, ont contraint les dirigeants africains à prendre des mesures. En 1998, la CEDEA, la première, a adopté un moratoire politique sur l’importation, l’exportation et le transfert des armes légères. En Afrique australe, la SADEC élabore un protocole sur la question. En Afrique centrale, les Etats étudient également des mesures. Dans la Sous-région des Grands lacs et de la Corne de l’Afrique, a été approuvée récemment la déclaration de Nairobi, dans laquelle les ministres des pays concernés ont noté l’effet dévastateur des armes légères dans les conflits armés, mais aussi dans des opérations comme les tueries de bétail. La Déclaration de Nairobi souligne le droit inhérent à l’autodéfense ou à la légitime défense. L’incapacité des Etats à contrôler les frontières complique les choses du fait des déplacements massifs de populations et de réfugiés parfois armés, a ajouté le Ministre. La Déclaration de Nairobi insiste sur la sensibilisation du grand public et la coopération avec l’ONU ou de grandes organisations régionales comme l’OUA.
Le Ministre a souhaité que la Conférence traite de la question de l’offre et de la demande en armes légères, de la gestion des stocks, de la destruction des armes excédentaires et de la coopération internationale. Il a suggéré la création de centres régionaux de coopération. Pour lui, l’idéal serait l’adoption d’un instrument contraignant. Le problème du commerce des armes légères est complexe et doit être résolu à différents niveaux dans le cadre d’une stratégie globale que l’ONU est la mieux à même de définir. La Conférence de juillet devra trouver les chemins pour une action concrète. Elle doit constituer un moteur pour la mobilisation des ressources et le renforcement des capacités.
M. EVGENIY GORKOVSKIY (Mécanisme de coordination des actions sur les armes légères, CASA) a rappelé que la lutte contre le fléau du commerce illicite des armes légères nécessite une approche unifiée. Il a ajouté qu’en 1998, le Secrétaire général a confié la coordination des actions à mener contre les armes légères au Département pour les affaires de désarmement qui a mis en place le mécanisme CASA. Le rôle assigné à CASA est de coordonner l’action internationale en matière de lutte contre la prolifération des armes légères en associant les agences spécialisées des Nations Unies et la société civile à des programmes d’assistance aux pays et régions affectés. CASA regroupe 17 agences et départements des Nations Unies qui collaborent étroitement dans la préparation de la Conférence de juillet 2001. Il tente de recenser les expériences nationales afin de renforcer les actions à mener en matière de lutte contre la prolifération des armes légères. CASA collabore étroitement avec l’UNICEF et le DPKO sur la question de l’impact des armes légères sur les enfants, en particulier leur enrôlement dans les conflits. CASA s’attelle en outre à dénoncer le lien existant entre le commerce illicite des armes légères et le trafic des diamants du sang. Enfin, il a précisé que CASA menait des actions en matière de démobilisation et de désarmement.
Participation des ONG
Mme FELICITY HILL (Women’s International League for Peace and Freedom) a rappelé que la prolifération des armes légères ne touche pas uniquement aux questions de sécurité mais a de sérieuses répercussions humanitaires. Elle a rappelé qu’au cours de la dernière décennie, 20 millions d’enfants ont été déplacés, deux millions d’entre eux ont été tués, six millions ont été blessés en situation de guerre. Elle a ajouté que l’impact des armes légères sur les enfants est désastreux et elle a condamné l’enrôlement de 300.000 enfants dans les conflits armés. Se félicitant de la teneur du projet de programme d’action élaboré par le Comité préparatoire, Mme Hill a souhaité que ce document comprenne des mesures efficaces pour protéger les enfants. Elle a poursuivi en demandant que ces mesures s’appliquent également aux femmes qui souffrent considérablement des ravages causés par la prolifération des armes légères dans la mesure où les femmes sont victimes d’abus de toute sorte dans les zones de conflits. La représentante a déclaré que la prolifération des armes légères compromet les activités des agences humanitaires avant de proposer que des mesures soient prises pour réduire le commerce licite des armes et mieux le réglementer et que les Etats respectent les mesures d’embargo prises dans les zones de conflit. Elle a souligné que les conséquences de la prolifération des armes légères sur le développement économique et social et sur la santé car elles fragilisent le tissu socioéconomique.
M. JACOB A. N. KAMENJU (Security Research and Information Center, Kenya) a souligné que le rôle de la société civile est de soutenir les efforts des gouvernements dans la mise en oeuvre de programmes et que cela implique une indépendance et une structuration de la communauté des ONG. Il a défendu le principe d’une meilleure coordination entre société civile et pouvoirs publics, notamment en matière de collecte d’armes légères disséminées, expliquant que pour rendre leurs armes, les populations doivent avoir la certitude que leur sécurité sera assurée par le gouvernement. Il a recommandé une meilleure coordination entre les gouvernements et les ONG dans la mise en oeuvre des recommandations
adoptées au cours des conférences. Il a fait observer que les ONG peuvent jouer un rôle d’expertise et de contrôle de premier plan, du fait qu’elles incluent un certain nombre de professionnels dans leurs rangs. Il a déclaré que le rôle des ONG et de la société civile dans le succès de la Conférence de juillet 2001, et plus généralement, dans la mise en oeuvre de politiques de lutte contre la prolifération des armes légères est essentielle.
M. HEANG PATH (Working Group on Weapons Reduction, WGWR, Cambodge) a rappelé que le Cambodge, en raison de conflits armés chroniques, subit la pression d'une large présence d’armes légères. Leur possession par la population – une étude de 1998 indique que les deux tiers des foyers de la ville de Phnom Penh possède des armes à feu - renforce l’insécurité et contribue à une culture de la violence et à la déstabilisation de l’environnement politique au Cambodge. Le contrôle de ces armes reste un problème majeur. WGWR est une coalition d’ONG locales et internationales coopérant pour traiter de ces problèmes. M. Heang Path a présenté certains des efforts menés par le Gouvernement cambodgien en faveur d’une remise volontaire des armes par la population. Ainsi, en février 2001, plus 106 000 armes avaient été récupérées. Mais seulement 36 000 avaient été détruites lors de sept cérémonies publiques, et aucune durant les douze derniers mois, le Gouvernement invoquant le manque de ressources. En outre, la collecte et la destruction des armes se heurte à de multiples difficultés. WGWR, qui mène des activités de contrôle, d’information et d’éducation du grand public, a mis en place un groupe d’ONG chargées de faire des suggestions et d’inciter à l’élaboration de législations nationale sur les armes, leur contrôle de leur utilisation et d’autres activités concernant les conséquences armes sur la société cambodgienne.
Le WGWR souhaiterait que les autorités chargées de la collecte des armes soient plus responsables devant leur gouvernement, afin que les armes ainsi récupérées soient effectivement placées dans un environnement sûr et ne soient pas remises en service. Il cherche aussi à obtenir la destruction des armes collectées. Il souhaite que le programme d’action de la Conférence ne se limite pas à des propos forts sur la nécessité pour les autorités de bien contrôler les stocks d’armes légères, mais qu’il promette aussi des ressources pour permettre aux Etats de parvenir à cet objectif.
M. FORQUILHA ALBINO (Christian Council of Mozambique) a rappelé que la société civile peut jouer un rôle important dans la collecte et la destruction des armes légères. Il a ajouté que son organisation travaille, depuis 1995, aux questions de désarmement, de paix, de justice et de réconciliation au Mozambique, pays détruit à 95% par la guerre civile qui a duré 16 années. En tentant de rapprocher le Gouvernement et la RENAMO, le Christian Council of Mozambique (CCM) a contribué à ramener la paix dans le pays. Il a expliqué que son organisation avait entamé l'analyse des causes des conflits et de leurs conséquences socioéconomiques ce qui contribuera au lancement de programmes de collecte d’armes et de promotion de la réconciliation. Depuis 1995, 180 000 armes à feu ont été récupérées, grâce au soutien du Président de la République et du leader de l’opposition armée.
Afin de garantir le succès de ces collectes d’armes, le CCM a offert en contrepartie des moyens économiques et financiers afin de permettre aux personnes démobilisées et désarmées de monter des projets. Ces projets ont permis de désenclaver certaines régions rurales du Mozambique et de former femmes et enfants, ainsi que de développer des exploitations agricoles. Un certain nombre d'armes ont été reconverties en pièces de musée pour consolider la paix, la réconciliation et la justice par l’entretien de la mémoire. Il a souhaité que les Nations Unies et les Etats Membres prennent conscience de l’importance de la collaboration avec les ONG et la société civile dans la mise en oeuvre du programme d’action qu'adoptera la Conférence de 2001.
Mme SUSAN WALTZ (Amnesty International), au nom de cette organisation, ainsi que de Human Rights Watch et de NISAT - Initiative norvégienne sur les transfert des armes légères), a demandé que le programme d’action de la Conférence comprenne un engagement concret concernant la question du courtage international des armes et de leurs transports. C’est là un des principaux moyens utilisés par les trafiquants pour contourner les lois et violer les récents embargos des Nations unies, a-t-elle expliqué. A chaque fois que ces trois organisations, ou encore des experts des Nations Unies, mettent en évidence les détails des trafics illicites d’armes légères utilisées pour commettre des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre ou des violations graves, que ce soit par des forces étatiques ou non, on retrouve des courtiers et des transporteurs d’armes qui approvisionnent ces forces et sont capables d’opérer dans de nombreux pays en marge des lois, en utilisant les failles des réglementations, en corrompant les fonctionnaires, en recourant aux paradis fiscaux ou en utilisant les faiblesses des forces de l’ordre pour échapper aux détections et pour violer les embargos en toute impunité. Si elles ne traitent pas de cette question, les Nations Unies ne progresseront pas, a ajouté M. Waltz, qui a cité en exemple le rapport publié le 20 décembre par les Nations Unies sur les violations de l’embargo en Sierra Leone. Mme Waltz a cité les activités de l’homme d'affaires Victor Bouts, déjà mentionné dans les rapports de l’ONU comme fournisseur de moyens de transports du trafic d’armes dans différents pays d'Afrique, notamment au profit de l'UNITA et en République démocratique du Congo.
Malgré le moratoire décidé en 1998 par les Etats de la CEDEAO sur les importations, exportations et transferts d'armes, la région regorge d'armes légères, a déclaré Mme Waltz. Les groupes d'opposition armés reçoivent armes et munitions grâce à des réseaux transfrontières de courtiers, de criminels et d’insurgés. Il n’existe pas d’information systématique sur cette contrebande. Les enquêtes des experts de l’ONU doivent donc continuer, a déclaré Mme Waltz, afin de mettre en lumière les sources des armes et les identités des trafiquants.
Le plan d’action de la Conférence doit inviter tous les Etats Membres à promouvoir des actions concrètes et immédiates pour prendre des mesures comme le contrôle au sol de tous les avions soupçonnés d’être utilisés pour transporter des armes vers des régions ou des groupes soumis à embargo. Les inspecteurs des Nations Unies devraient pouvoir interviewer les équipages et vérifier tous les documents afin de pouvoir faire rapport aux comités des sanctions. Mme Waltz a également demandé. La mise en place par tous les Etats de systèmes strict d'enregistrement et de contrôle des courtiers en armes, appuyés sur ces sanctions
pénales. Toute transaction de ce genre de la part d’un courtier devrait être soumise à l’approbation préalable le gouvernement dont il est ressortissant par le biais de licence, et cela même sur les transactions ou les livraisons se font dans des pays tiers. Aucune licence ne devrait être accordée lorsqu’il existe un risque clair que les transferts d'armes en question contribueront à de graves violation du droit humanitaire ou des droits de l’homme. Enfin, Mme Waltz a demandé la création d’une unité qu’enquêteurs des Nations Unies permanente et dotée de suffisamment de fonds pour pouvoir travailler efficacement.
Mme CLARISSA KAYOSSA (Center for International Policy, USA) a déclaré que la prolifération des armes légères en Afrique est devenue un problème sérieux qui exige que des mesures urgentes soient prises. Prenant le cas de son pays, la Zambie, elle a fait observer que ce dernier n’avait jamais connu de guerre civile et ne s’était jamais engagé dans une guerre hors de ses frontières. Elle a regretté que son pays soit le théâtre d’actes d’agression de plus en plus fréquents et a souhaité qu’un partenariat s’établisse aux plans national et international entre pouvoirs publics et société civile afin de lutter contre ce fléau de la prolifération des armes légères. Elle a rappelé que la Zambie et le Kenya avaient été des points de transit pour les transferts d’armes à destination de pays en guerre tels que l’Angola, le Burundi, le Rwanda ou encore la Somalie et l’Ethiopie. Elle a souhaité à ce qu'un contrôle plus étroit des transferts soit fait afin d’éradiquer la prolifération de celles-ci.
Mme LIZ CLEGG (Saferworld, UK) a déclaré que la Conférence des Nations Unies sur le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects représente une opportunité historique pour la communauté internationale de se mettre d’accord sur un programme d’action afin de lutter contre la prolifération et l’usage néfaste des armes légères. Elle a ajouté que, afin d’assurer le succès de cette Conférence, les Etats membres devraient s’entendre sur la notion même de commerce illicite afin de la distinguer des transferts d’armes légaux. Ces deux phénomènes sont étroitement liés et Mme Clegg a souhaité que les Etats s’engagent à assurer un meilleur contrôle. Cela implique la responsabilisation des pays producteurs et exportateurs d’armes, une meilleure réglementation de la détention d’armes légères par le populations civiles, ainsi qu’un contrôle minutieux par les Etats exportateurs de l’usage qui est fait de ces armes légères dans les pays destinataires. Elle a souhaité qu’à l’issue de la Conférence, un certain nombre de principes internationaux soient clairement définis par les participants afin de prévenir le commerce illicite d’armes légères, leur prolifération ainsi que la réexportations par des Etats d’armes achetées légalement vers des zones de conflits sous embargo.
M. OCHIENG ADALA (Africa Peace Forum, Kenya) s’est concentré sur la question de la responsabilité des Etats en observant que ces derniers portent la responsabilité principale des efforts visant l'éradication des transferts d'armes légères illicites ou contraires au droit international. Les Etats sont responsables de la mise en place de contrôles efficaces sur la possession d’armes par des civils. M. Adala a demandé, entre autres, que le projet de programme d'action demande l’interdiction de la possession illimitée et du commerce privé des armes légères, ainsi que l’interdiction de la possession privée d'armes légères spécifiquement destinées à des fins militaires. Il est également urgent de renforcer la capacité des Etats à appliquer les lois destinées à prévenir le
commerce illicite des armes. M. Adala a demandé un renforcement des dispositions du programme d'action sur ce point, et a fait référence au paragraphe 3 de la Déclaration de Bamako qui invite les Etats à prendre des mesures pour renforcer ses services de maintien de l’ordre. M. Adala également demandé des mesures pour lutter contre la corruption et réformer le secteur de la sécurité, afin de les rendre plus efficaces.
M. Thomas Mason (National Rifle Association, NRA) a rappelé que nous vivons dans un monde beaucoup plus global que chacun de nous ne le réalise. Des questions qui, il y a quelques années encore, semblaient purement intérieures, apparaissent aujourd’hui en tête des préoccupations internationales. Pour la NRA, le mandat de la Conférence est large. Jusqu’à ce qu’une définition plus proche des armes légères, l’actuelle définition inclue pratiquement toutes les armes à feu. On eut donc dire qu’il s’agit de la première Conférence de l’histoire sur le désarmement dans laquelle la majorité des armes concernées ne sont pas détenues par des Etats mais par des citoyens. C’est là un événement sans précédent. Or, ces citoyens, parmi lesquels des dizaines de millions de chasseurs, de tireurs et de processeurs légaux d’armes à feu, méritent d’être dûment pris en compte par ce Comité comme par la Conférence.
Cette Conférence va nécessairement traiter de sujets fondamentaux comme la souveraineté, le droit à l’autodétermination et les droits constitutionnels des citoyens, a ajouté le représentant de la NRS, qui a fait référence sur ce point aux discussions tenues à Vienne dans le cadre de la négociation du protocole sur les armes à feu lié à la Convention sur la lutte contre la criminalité organisée. A cet égard, il a rappelé les préoccupations importantes que certains Etats éprouvent encore à propos du Protocole. Il a également estimé que plus la date de la Conférence approchera, plus les questions deviendront politiques.
M. Mason a plaidé pour que la Conférence se limite à des questions telles que le marquage des armes, le traçage par des agences nationales existantes des armes faisant l’objet d’un commerce illégal et la création de procédures commerciales efficaces. Si elle se limite à cela, la Conférence ne gênera pas le commerce légitime des armes et sera une entreprise réaliste, qui pourra être à la base d’une conférence réussie et non d’une stérile bataille politique, a estimé le représentant de la NRA.
M. MICHEL WERY (Groupe de Recherche et d’Information sur la Paix et la Sécurité -GRIP - Belgique) a souhaité que le Comité préparatoire et la Conférence mettent l’accent en particulier sur le traçage rapide et fiable des armes légères afin de contrôler étroitement leur marquage et leur enregistrement. Il a recommandé que les Etats se mettent d’accord sur un système de marquage harmonisé qui diffère de celui préconisé par le Protocole de Vienne car il serait alors indélébile. Il a regretté que le marquage des armes légères soient encore rudimentaire ce qui favorise les transferts illicites. M. Wery a proposé, concernant l’enregistrement des armes, la création d’un registre international confidentiel qui permettrait de centraliser les informations et de sauvegarder les données.
M. OWEN GREENE (University of Bradford, Royaume-Uni) a insisté sur deux éléments, à savoir le traçage des armes légères et de petit calibre ainsi que le renforcement de l’échange d’information et de la transparence. Les efforts de prévention face à la prolifération des armes légères sont, selon lui, hypothéqués par l’absence de marquage et de traçage qui devraient être une composante centrale du programme d’action de la Conférence de juillet 2001. Il a souhaité une étroite collaboration internationale en matière de traçage et de marquage et un renforcement des procédures déjà contenues dans le Protocole de Vienne. Il a ajouté que seul le marquage permettra d’assurer un suivi des flux d’armes au plan international et de distinguer le commerce illicite des transferts légaux d’armes à des fins de défense nationale.
M. Greene a revendiqué un meilleur échange d’informations et une plus grande transparence dans la mise en oeuvre des programmes de lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre. Il a recommandé une coopérations plus étroite, au plan international, entre les polices nationales, les douanes, le renforcement des capacités de contrôle et de surveillance, la sensibilisation des populations civiles, le renforcement de la confiance entre les Etats. Il a recommandé la création d’un registre qui permettrait de mieux contrôler l’origine et la destination des armes légères et de réglementer davantage le commerce licite des armes légères et de petit calibre.
Mme EUGENIA PIZA LOPEZ (International Alert, UK) a souhaité soulever quatre questions urgentes en vue de la tenue de la Conférence de juillet 2001, à savoir le rôle de la société civile, le cadre d’action à mettre en place, les mesures à prendre à différents niveaux ainsi que les ressources à mettre en oeuvre. Elle a souligné l’importance de la contribution des ONG qui bénéficient le plus souvent d’une expertise et d’une meilleure approche des problèmes des populations. Elle a fait observer que de nombreux gouvernements ont d’ores et déjà reconnu l’importance de partenariats avec les ONG mais elle a souhaité que le programme d’action prenne en compte le rôle central des ONG et de la société civile dans la mise en oeuvre des mesures qui seront décidées. Elle s’est félicitée de la décision prise, dans le projet de programme d’action, d’organiser des rencontre de suivi tous les deux ans. Elle a déclaré que la mise en oeuvre de programmes de bonne gouvernance, de désarmement et de démobilisation aux niveaux national, sous-régional et régional ne pourrait se faire efficacement sans une contribution effective de la société civile.
M. GREG PULEY, (Fondation Arias, Costa Rica) a rappelé que, pendant des décennies, des puissances étrangères ont envoyé dans la région de l’Amérique centrale des tonnes d'armes utilisées pour assassiner, torturer et assassiner des milliers de personnes en particulier des paysans, poètes, chefs religieux et des enfants. Une grande partie de cet arsenal est toujours en circulation dans les rues d'Amérique centrale et fait de nombreuses victimes. Les taux d’homicide y sont parmi les plus élevés du monde, parfois plus que pendant les périodes de conflits ouverts. La sécurité ainsi que les catastrophes naturelles, représentent le principal sujet de préoccupation des peuples d’Amérique latine, a expliqué
M. Puley
M. Puley a plaidé pour un programme d’action audacieux et complet qui fixe des normes concernant la possession d’armes par des civils. Il faut des obligations explicites des Etats concernant les échanges d’information et l’aide économique pour traduire les mots par la réalité. La validité du programme d’action ne sera pas évaluée en fonction de mots mais de résultats concrets.
M. Puley a demandé qu’en marge de la Conférence soit négocié un accord contraignant sur les transferts illicites d’armes. Les Etats ont l’obligation de ne pas transférer d'armes lorsque celles-ci peuvent contribuer à des violations des droits de l’Homme ou du droit humanitaire, a ajouté M. Puley. La Fondation Arias oeuvre à l’élaboration d’un projet de ce type avec d'autres ONG, le Gouvernement du Costa Rica et 18 Prix Nobel de la paix. Mais, sans un engagement ferme en faveur d’un programme d'action ferme et dynamique avec des délai stricts pour son suivi et des ressources importantes, la Fondation Arias craint que les résultats de la Conférence ne se limitent à une série de bonnes paroles.
Mme VIRGINIA GAMBA (Institute for Security Studies, Afrique du Sud) a souhaité que des mesures soient définies, région par région, et mises en oeuvre au plan national et régional tout en assurant une coordination au plan international. Elle a fait valoir que le continent africain, qui produit moins de 5% des armes mondiales est moins concerné par un code de conduite sur la production que par des mesures efficaces afin de lutter contre les transferts et livraisons illicites d’armes. Elle a ajouté que le continent africain ne pourrait attendre 2006 ou 2060 pour voir ce problème crucial traité par les Etats et que le programme d’action devrait davantage tenir compte des réalités et spécificités régionales. Elle s’est réjouie de ce que le projet de programme d’action soumis au Comité préparatoire tienne compte de réalités certaines et prévoit une meilleure coordination et coopération entre Etats et organisations sous-régionales et régionales. Elle a ajouté que les éléments du projet de programme d’action sont encourageants et incitent les ONG à participer activement à sa mise en oeuvre. Elle s’est félicitée des premières mesures prises sur le continent africain en matière de lutte contre la prolifération et le commerce illicite des armes légères et a salué les avancées contenues dans la Déclaration de Bamako et des répercussions sur des régions telles que l’Afrique australe où la SADC a mis en oeuvre des mesures de contrôle.
M. ROBERT GLOCK (Sporting Shooters Association of Australia) a exprimé la position d’un fabricant d’armes sur les questions abordées par le Comité préparatoire. Il s’est déclaré favorable au marquage, faisant observer que les industriels de l’armement avaient mis en place un Groupe d’experts chargé de définir des normes universelles. Il a souhaité que le marquage soit unique et indélébile et harmonisé au plan mondial. M. Glock a plaidé en faveur d’un registre qui serait contrôlé par les industriels, faisant valoir que ces derniers peuvent répondre dans les 72 heures aux enquêtes sur les transferts d’armes. Il a recommandé aux délégations de définir avec précision les notions d’armes légères et de petit calibre ainsi que les notions de commerce licite et illicite.
M. LLOYD AXWORTHY (Eminent Persons Group) s’est félicité du travail considérable accompli par le Comité préparatoire. Il a souhaité que des mesures soient prises d’urgence pour mettre fin à la prolifération et au commerce illicite des armes légères qui affectent durement les populations civiles. Il a recommandé que le commerce licite d’armes soit limité à des courtiers autorisés par l’Etat afin de mieux contrôler les transferts d’armes. M. Axworthy a également défendu l’idée de ne pas exporter d’armes légères vers les pays qui violent les droits de l’homme et à promouvoir un respect des embargos en empêchant la réexportation vers les régions frappées d’embargo. Le représentant s’est prononcé en faveur de la contribution des ONG aux travaux du Comité et de la Conférence afin de créer des synergies, de mobiliser l’opinion et créer un partenariat à long terme entre acteurs gouvernementaux et société civile. Il a fait appel aux délégations afin que leurs Etats prennent des mesures efficaces pour lutter contre le commerce illicite des armes légères et a fait appel à davantage de cohésion et de coopération entre gouvernements. Il a souhaité que les ressources nécessaires soient affectées par les Etats et les Nations Unies pour la mise en oeuvre du programme d’action qui sera adopté lors de la Conférence de juillet 2001 afin d’alléger les souffrances des victimes de ces trafics.
Mme Sally Joss (International Action Network on Small Arms, IANSA) a rappelé que la plupart des ONG qui ont pris la parole ce matin sont membres de l’IANSA et a demandé qu’on oublie pas que des milliers de vies sont en jeu dans le monde entier, et parfois dans notre propre arrière-cour, et que chaque jour, un nombre incalculable de personnes sont menacées, déplacées ou tuées à la force des armes. Mme Joss a expliqué que les membres de l’IANSA entendent organiser des manifestations dans leurs propres pays à l’occasion de la Conférence de juillet. Ils cherchent à obtenir le soutien de leurs gouvernements respectifs pour promouvoir la Conférence et lui accorder le statut et le niveau politique qu’elle mérite. L’IANSA entend également coordonner les activités de milliers de personnes qui veulent faire clairement comprendre qu’il est nécessaire de prendre des décisions maintenant. L’IANSA est satisfaite de l’accord conclu concernant l’accès et la participation des ONG au Comité préparatoire et à la Conférence elle-même. Toute ONG estimant pourvoir apporter une contribution devait pouvoir participer à la Conférence et la société civile devrait pouvoir assister en tant qu’observateurs aux séances plénières, a estimé M. Joss. L’IANSA entend continuer à travailler avec les gouvernements et les communautés partout dans le monde. Elle continuera à créer des réseaux régionaux – une de ses principales priorités, et à favoriser des initiatives transfrontalières. L’IANSA sait que ce sont les Etats qui portent la responsabilité principale d'apporter des réponses au problème du commerce illicite des armes légères et pour mobiliser la volonté politique nécessaire pour soutenir les engagements pris.
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