DES DÉLEGATIONS ET LE HCR PRIVILEGIENT LE RAPATRIEMENT VOLONTAIRE COMME SOLUTION DURABLE POUR LES REFUGIES
Communiqué de presse AG/SHC/559 |
Troisième Commission
48e séance – après-midi
DES DÉLEGATIONS ET LE HCR PRIVILEGIENT LE RAPATRIEMENT VOLONTAIRE
COMME SOLUTION DURABLE POUR LES RÉFUGIÉS
La Commission achève son débat général sur les questions relatives aux réfugiés aux rapatriés et aux personnes déplacées
Faisant écho aux délégations qui ont regretté que le Haut Commissariat pour les réfugiés mette fin à certaines opérations faute de ressources, M. Nicolas Bwakira, Directeur du Bureau de New York du Haut Commissaire pour les réfugiés, a expliqué dans ses remarques de clôture qu'il importait maintenant de coordonner les efforts de tous afin de s'attaquer aux causes profondes des mouvements de réfugiés et de rechercher ensemble des solutions durables aux problèmes rencontrés par les réfugiés et les personnes déplacées. L'ensemble des délégations, se félicitant de l'action du HCR, ont demandé qu'il soit doté des ressources nécessaires à son bon fonctionnement.
Au cours du débat général de la Troisième Commission sur les questions relatives aux réfugiés, aux rapatriés et aux personnes déplacées, de nombreuses délégations se sont déclarées favorables au rapatriement volontaire qui apparaît comme la meilleure solution durable, à condition toutefois que la communauté internationale aide les pays de retour à créer des conditions propices à leur développement. La Troisième Commission avait ouvert son débat général sur ce point, lundi dernier, en entendant une présentation du Haut Commissaire pour les réfugiés, M. Ruud Lubbers, qui avait mis l'accent sur l'apport des réfugiés pour les communautés d'accueil et sur le fait qu'il fallait donner les moyens aux réfugiés, notamment les femmes, de déployer leur potentiel de développement. À ce propos, le représentant de l'Inde a expliqué que pour les pays en développement qui accueillaient de larges groupes de réfugiés au détriment parfois de leur propre stabilité économique et politique, il était souvent difficile de prendre la mesure des capacités de développement qu'apporteraient les réfugiés.
Outre la solidarité, le partage des charges et la coordination internationale pour améliorer les réponses à court et à long terme, les délégations se sont penchées sur les problèmes liés à l'utilisation abusive du statut des réfugiés et par les migrations illégales. À ce propos, la coopération régionale est apparue comme un moyen privilégié de contrôler les frontières et, comme l'a suggéré cet après-midi la représentante du Bélarus, devrait être encouragée entre les pays qui ont des frontières communes.
De nombreuses délégations se sont félicitées des perspectives offertes par les consultations mondiales sur la protection internationale engagées à l'occasion du cinquantième anniversaire de la Convention de 1951 relative aux réfugiés et de la tenue, les 12 et 13 décembre prochains, à Genève (Suisse) d'une réunion ministérielle des États parties à la Convention. Ces consultations ont permis d'envisager l'avenir du mandat du Haut Commissaire pour les réfugiés et de stimuler la volonté politique pour la recherche de solutions durables aux crises humanitaires actuelles.
Prenant à nouveau la mesure des souffrances du peuple afghan et de ses quatre millions de réfugiés qui ont fui vers l'Iran et le Pakistan, de nombreuses délégations ont espéré que l'ampleur de la crise actuelle ne détournera pas l'attention de la communauté internationale des 21,1 millions de réfugiés qui dépendent de l'aide du HCR. Le représentant de la République islamique d'Iran et du Pakistan ont, cet après-midi, demandé l'aide de la communauté internationale, notamment aux frontières et surtout à l'intérieur de l'Afghanistan.
La Commission entamera lundi 26 novembre à partir de 10 heures, son débat général sur la discrimination raciale si le rapport sur les résultats finaux de la Conférence de Durban contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée est disponible d'ici là. Elle entendra également plusieurs présentations de projets de résolution relatifs aux droits de l'homme.
Suite et fin du débat général
M.MAREK MADEJ (Pologne), évoquant le sort de la population afghane, a recommandé à la communauté internationale et à l'ONU de travailler à la reconstruction de l'économie du pays et au rétablissement de conditions de vie normales dès la fin du conflit. Il a espéré que des conditions de stabilité et de sécurité retrouvées permettront au HCR d'agir efficacement dans le pays, pour le plus grand bénéfice de la population.
Le représentant a ensuite indiqué que les réfugiés et les mouvements forcés de populations, dus souvent à des catastrophes naturelles, constituaient de véritables défis pour le HCR; le Haut Commissariat doit continuer à s'occuper également des victimes de conflits armés, des réfugiés ou des personnes déplacées, tout comme les gouvernements concernés. La protection des réfugiés est une responsabilité commune. La pleine coopération des gouvernements et une forte contribution de leur part sont nécessaires pour résoudre de façon concrète et dynamique le problème des réfugiés.
La Pologne a exprimé sa préoccupation face aux conflits qui entraînent de nouveau flux de réfugiés. Elle s'inquiète également du nombre croissant d'actes violents contre les équipes du HCR sur le terrain. Le représentant a indiqué qu'il s'agissait en l’occurrence d'actes barbares. Le représentant a par ailleurs évoqué le phénomène des migrations en Europe centrale et a suggéré la création d’institutions nationales efficaces en matière d'immigration et d'asile. Il a précisé que la question de la présence de réfugiés sur le territoire polonais était désormais régi par la loi sur le rapatriement des ressortissants et des étrangers, sous forme d'amendement.
M. HOSSEIN GHASSEMI (République islamique d'Iran) a rappelé que depuis trois décennies l'Iran accueille des millions de réfugiés, ce qui pose des problèmes sociaux, économiques, culturels, politiques et sécuritaires particuliers à sa population et à son gouvernement. En outre, la pauvreté endémique en Afghanistan a conduit de nombreuses personnes à abuser de la protection qui est accordée aux réfugiés et aux demandeurs d'asile et à se livrer au trafic des drogues. Dans ce contexte, il a estimé qu'il était urgent que le HCR, dans le cadre de la coopération internationale, s'attache à élaborer un mécanisme qui empêche les trafiquants d'abuser du statut de réfugiés. Par ailleurs, il a souligné que l'appui international devrait être conforme aux possibilités du pays d'accueil. Il a fait savoir que l'assistance fournie par la communauté internationale à l'Iran ne suffit pas à assurer les besoins de la population de réfugiés pendant une semaine. Il a précisé que les dépenses engagées par son Gouvernement pour les réfugiés dépassent le budget annuel du HCR.
Le représentant s'est dit convaincu que la communauté internationale doit assurer sa part de responsabilité dans le règlement de cette crise humanitaire. Il a déclaré que le rapatriement volontaire apparaissait comme la meilleure solution à long terme, à condition toutefois que la communauté internationale contribue également à créer des conditions propices au développement dans le pays d'origine. Dans cette perspective, il a mis l'accent sur le développement de l'infrastructure, la création d'emplois et la mise en place d’un système d'éducation et de santé le long des frontières de l'Afghanistan. Ces efforts devraient être associés à de vastes opérations de déminage, a-t-il déclaré.
M. ISHTIAQ HUSSAIN ANDRABI (Pakistan) a déclaré que le Pakistan aujourd'hui, abrite toujours plus de trois millions d'Afghans. Le représentant a souligné qu'il était impossible de quantifier exactement les coûts financiers de cette présence. Il a évoqué l'impact dévastateur de la présence des réfugiés sur la structure démographique et sociale du pays, sur l'économie, l'emploi, l'écologie et les ressources naturelles. Il a aussi souligné que de plus en plus d'Afghans prenaient aujourd'hui la direction du Pakistan. D'après le HCR, 135 000 nouveaux réfugiés auraient fui au Pakistan depuis le 11 septembre. Les Afghans aujourd'hui constituent le plus large groupe de personnes déplacées et le Pakistan est le pays hôte qui accueille le plus grand nombre de réfugiés.
La seule solution durable pour faire face à cette tragédie humaine consiste à aider les déplacés à l'intérieur même de l'Afghanistan. D'après le HCR, 7,5 millions de personnes ont fui leurs foyers sans quitter le pays. S'occuper des Afghans au Pakistan, sans établir en même temps des camps d'aide à l'intérieur de l'Afghanistan conduirait seulement à un exode encore plus large des déplacés vers le Pakistan, a averti le représentant. Il a suggéré que l'ONU dresse des camps à l'intérieur de l'Afghanistan. Le représentant a ajouté que son pays était prêt à accueillir les groupes les plus vulnérables, y compris les personnes blessées, handicapées, malades, ainsi que les orphelins.
Le rétablissement de la paix en Afghanistan est donc d'une importance vitale pour le Pakistan. Les progrès en la matière, a estimé le représentant, sont tributaires de la formation d'un gouvernement multiethnique et représentatif à Kaboul, un gouvernement qui pourrait ramener la paix dans le pays. La communauté internationale devra s'impliquer dans la reconstruction et la réhabilitation de ce pays ravagé par la guerre, de façon telle que le rapatriement des réfugiés afghans basés au Pakistan et en Iran puisse s'amorcer. Le représentant a salué le soutien fourni par le HCR au Pakistan. Cependant, le nombre de réfugiés a continué de s'accroître tandis que l'aide du Haut Commissariat a diminué de 27,38 millions de dollars en 1990, cette aide est passée à 16 millions l'an dernier. Le HCR accorde 2% de son budget au Pakistan, tandis que le pays accueille plus de 16% de la population réfugiée du globe. Le HCR, a souligné le représentant, devrait adopter un nouveau format budgétaire afin de faire face aux besoins des pays hôtes en développement.
MME ANZHELA KORNELIOUK (Bélarus) a indiqué que son pays s'attachait maintenant à contrôler le problème des migrants qui s'ajoutent à la masse de réfugiés illégaux en provenance du Moyen-Orient, d'Afrique et d'Asie. Elle a recensé un grand nombre d'associations de trafiquants illégaux de migrants et a reporté qu'en 2000, près de 2 % des crimes commis était le fait de migrants illégaux. Elle a mis l'accent sur la nécessité de renforcer la coopération entre les États qui ont des frontières communes. Par ailleurs, la représentante a demandé que l'on assiste les États d'accueil de ces migrants qui ont coûté, au Bélarus, quelque deux millions de dollars.
D'autre part, la représentante a rappelé que son pays continuait de souffrir des conséquences de Tchernobyl, catastrophe qui, à l´époque, avait entraîné d´importants déplacements de population. Evoquant le problème posé par les migrants illégaux, elle a estimé qu´il était important de mettre au point au plus vite des mécanismes permettant de distinguer cette catégorie de personnes des réfugiés.
M. ALEXEY A. ROGOV (Fédération de Russie) a demandé qu´un maximum d´efforts soient déployés sur les plans économiques, sociaux et humanitaires pour régler le problème des réfugiés. Il a fait savoir que son pays était particulièrement attaché aux processus de consultations mondiales pour leur protection internationale. La prochaine réunion, les 12 et 13 décembre prochain, des États parties à la Convention de 1951 et à son Protocole de 1967, en fournira l´occasion.
Il a ensuite expliqué que son pays était attaché à assainir la situation dans les États de la Communauté des États indépendants. Il a appelé au renforcement de l'aide apportée à ces pays dans le cadre de la Convention de Genève. Par ailleurs, il a estimé que la lutte contre le terrorisme en cours doit se faire dans le cadre imposé par les institutions chargées des droits de l'homme.
M.GOCHA LORDKIPANIDZE (Géorgie) a rappelé que les conflits entre l'Abkhazie et la région de Tskhinvali/Ossétie du sud prolongeaient les souffrances de plus de 300 000 personnes déplacées dans le pays. Mais la violence contre la population de Géorgie, le crime organisé, et la politique de discrimination séparatiste Abkhaze dans les écoles (notamment dans le district de Gali) visaient à enrayer le retour de ces personnes déplacées dans leurs foyers. Le représentant a qualifié d'alarmante la situation humanitaire en Géorgie. Il s'agit, a-t-il dit, de fournir protection et assistance aux réfugiés et aux personnes déplacées, et cela constitue un véritable défi. Des garanties internationales sont ainsi indispensables pour assurer la protection et la sécurité des déplacés et des réfugiés en Abkhazie. Le HCR a un rôle important à jouer, dans la mesure où il contrôle le processus de retour engagé dans le district de Gali et dans la mesure où il apporte aux réfugiés une aide matérielle.
S'agissant de l'assistance aux personnes déplacées à l'intérieur de leurs propres frontières, la Géorgie a soutenu l'idée d'une double approche qui fournirait une aide humanitaire immédiate et une assistance au développement sur le long terme. En Géorgie, a indiqué le représentant, la survie d'un groupe considérable de personnes déplacées dépend toujours de l'aide humanitaire. Mais le représentant a exprimé sa préoccupation face à l'intention du HCR de se désengager et de réduire progressivement l'assistance aux personnes déplacées en provenance d'Abkhazie et de la région de Tskhinvali/Ossétie du sud.
Le représentant a ensuite expliqué que son Gouvernement était déterminé à mettre en oeuvre un programme facilitant l'intégration des personnes déplacées, et renforçant en même temps leur autosuffisance. Il a indiqué que la coopération notamment avec le HCR, le PNUD et la Banque mondiale allait se renforcer afin d'atteindre les objectifs de ce programme. Il a estimé qu'une politique cohérente d'assistance aux personnes déplacées impliquait l'existence de mesures administratives et législatives visant à mieux assurer la protection de ces personnes et la réalisation de leurs besoins. Dans ce contexte, la Géorgie va poursuivre le dialogue engagé avec les organisations internationales, des programmes internationaux, des ONG locales pour réviser les pratiques administratives et la législation sur les déplacés et les réfugiés.
M. ROLAND Y. KPOTSRA (Togo) a rappelé que l'Afrique compte 3,6 millions de réfugiés soit 30 % de l'ensemble des réfugiés du monde. A cela s'ajoute le nombre plus important de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays, phénomène qui a des conséquences sociales, économiques et politiques désastreuses. Rappelant que la présence prolongée de réfugiés dans les pays d'accueil engendre de lourdes charges et contraintes pour les pays hôtes qui méritent une assistance continue et accrue de la part de la communauté internationale. Le représentant a également attiré l'attention sur la situation des enfants séparés de leur famille ou non accompagnés qui sont les plus exposés à la violence, à l'enrôlement forcé dans les groupes armés, aux sévices sexuels et autres mauvais traitements. Il s'est déclaré vivement préoccupé par la tâche qui reste à accomplir pour venir en aide à ces enfants de manière efficace.
Abordant ensuite le processus de consultations mondiales sur la protection internationale engagé à l'occasion du cinquantième anniversaire de la Convention de 1951, il a insisté sur le fait que le renforcement de la protection et de l'assistance aux réfugiés devrait aller de pair avec la recherche de solutions durables. Il importe en outre de s'attaquer aux causes profondes des conflits, y compris aux facteurs politiques, économiques et sociaux. Ainsi, il a invité la communauté internationale à renforcer son soutien aux efforts déployés par les pays africains en faveur de l'éducation et de la satisfaction des besoins spécifiques des filles et des enfants soldats démobilisés et à soutenir sans réserve les initiatives prises par les pays africains pour la promotion de la paix régionale et le règlement des conflits. En dernier lieu, soulignant l'importance de la mission du HCR, il a estimé impératif que des ressources adéquates soient mises à sa disposition pour lui permettre d'exercer convenablement son rôle de surveillance sur le continent africain, notamment, où ses services sont le plus souvent sollicités.
MME MIRJANA TRAJKOVSKA (ex République yougoslave de Macédoine) a rappelé avec regret qu´en ce début du XXIème siècle, des milliers de ressortissants de l'ex-République yougoslave de Macédoine sont des réfugiés ou des déplacés. Le Gouvernement de Macédoine est attaché au développement des droits de l'homme et à la démocratie. Les quatre plus grands partis parlementaires du pays ont d'ailleurs signé un accord-cadre à ce sujet. Mais des actes terroristes continuent à être perpétrés dans le pays. Des attaques, des enlèvements, des actes de torture, et la grave situation économique ont poussé des milliers de personnes à quitter leurs foyers. La Macédoine de son côté a accueilli les hommes, les femmes et les enfants en provenance du Kosovo et il n'a pas été facile d'assumer ce fardeau et d'organiser leur installation. La plupart de ces réfugiés ont cependant réussi à rentrer chez eux au Kosovo.
La représentante a ensuite indiqué que l'une des tâches principales consistait dorénavant à éliminer la notion d'Etat « propre » sur le plan ethnique, une notion qui est fondamentalement antidémocratique. Les engagements pris par la communauté internationale en matière de protection des droits de l'homme resteront des mots si les Etats ne sont pas disposés à mettre en oeuvre les normes existantes dans ce domaine.
M. KRISHNA KISHOR GHIMIRE (Népal) a d'abord rappelé qu'aucune région du globe n'était épargnée par le problème grandissant des réfugiés et des demandeurs d'asile. Les 21 millions de réfugiés, de demandeurs d'asile et de personnes déplacées aujourd'hui sont victimes de conflits armés, de persécutions, de violations des droits de l'homme échappant à leur contrôle. Les conflits internes liés aux questions de race, d'ethnies ou de nationalités contribuent également à accroître rapidement le nombre de réfugiés.
Le représentant a ensuite salué le travail du HCR, des nombreuses organisations gouvernementales et des ONG travaillant depuis plus de 50 ans sur cette question. Le représentant a ajouté qu'une solution durable au problème des réfugiés n'était possible que si l'on traitait à temps les raisons qui poussent les populations à fuir leurs foyers. Le représentant a par ailleurs exprimé sa préoccupation face à la situation financière, décourageante, du HCR. Il a appelé tous les donateurs, et notamment les pays développés, à accroître leurs contributions.
Le Népal accueille aujourd'hui plus de 100 000 réfugiés, principalement en provenance du Bhoutan. Ces réfugiés vivent depuis plus de dix ans dans la partie est du pays. Leur présence, a indiqué le représentant, génère d'énormes problèmes économiques, sociaux et politiques, ainsi que des problèmes d'environnement. Le représentant a remercié le HCR, les pays donateurs et les organisations ayant fourni abris, eau, nourriture, soins de santé, éducation et formation aux réfugiés, tout en allégeant l'impact de leur présence dans le pays. Il a indiqué que des négociations bilatérales s'étaient engagées avec le Gouvernement du Bhoutan. Un processus de vérification des réfugiés a démarré, qui pourrait aboutir à leur retour dans leur pays. Le représentant a estimé que les pays pauvres qui accueillaient d’importants groupes de réfugiés devaient recevoir une aide et un soutien adéquat pour ne pas plonger davantage dans la pauvreté et le chaos.
M. R. N. PRASAD (Inde) a insisté sur le fait que la lutte contre le terrorisme ne saurait entâcher l'institution du droit d'asile. Il importe de veiller à ce que les réfugiés soient protégés des discriminations. De la même manière, il convient de veiller à ce que certains États ne s'abritent pas derrière le droit d'asile pour accueillir des terroristes. Au-delà de la crise humanitaire actuelle, il importe de faire la lumière sur les causes profondes de ces situations. À ce propos il a souligné les liens entre la pauvreté, les conflits et les déplacements forcés qu'il a jugé évidents. Il a en outre observé que la question des réfugiés n'est pas une question annexe au développement. Rappelant que la pauvreté est souvent à l'origine des flots de réfugiés, le représentant s'est déclaré convaincu que la prévention des crises humanitaire passe par le développement durable qui apparaît, en fait, comme la solution la moins coûteuse. Par ailleurs, s'opposant en cela au rapport présenté par M. Lubbers, le représentant a fait remarquer que, pour les pays en développement qui accueillent des réfugiés pesant lourdement sur leur environnement, leur économie, leur ordre public et ravivant les tensions ethniques, il est plutôt difficile d'estimer à sa juste valeur le potentiel de développement que représenteraient les réfugiés. Il a suggéré que ceux qui sont convaincus du potentiel de développement des réfugiés montrent un peu plus d'empressement à ouvrir leurs frontières et à partager les charges. Il a rappelé qu'à l'heure actuelle le devoir d'accueil et le partage des responsabilités sont mal répartis et dépendent plutôt des accidents de la géographie et de la capacité des États à contrôler leurs frontières.
À propos de la dégradation de la qualité de l'asile, le représentant a cité des exemples choquants de rejet des demandeurs d'asile. S'il a reconnu la nécessité de lutter contre les migrations illégales et de protéger le droit d'asile des utilisations abusives, il a posé la question de savoir quel type de mesures les États étaient habilités à prendre pour se protéger. Il a estimé qu'il fallait que les mesures et les méthodes employées respectent les droits fondamentaux de la personne. Il ne s'agit pas simplement de renvoyer les demandeurs d'asile, a-t-il observé. Abordant la question de l'application de la Convention de 1951, il déclaré que celle-ci ne prévoyait pas les cas de flots massifs de réfugiés et se concentrait sur les cas de persécutions individuelles. En outre, l'application de cette Convention souffre de l'absence de volonté politique d'une part et d'autre part d'un manque de moyens. Il a espéré que les consultations mondiales en cours permettraient aux États parties qui en ont les moyens de montrer l'exemple dans le domaine de son application. S'agissant des solutions durables, le représentant s'est déclaré favorable au rapatriement volontaire, à condition toutefois que l'on aide les pays en développement à créer les conditions propices au retour des réfugiés.
MME DALILA SAMAH (Algérie) a déclaré que la communauté internationale devait faire montre d'un plus grand engagement et de solidarité en faveur de l'action du HCR, afin de lui permettre d'assurer le financement des programmes d'assistance et de protection en faveur des réfugiés. La représentante a indiqué qu'il était très préoccupant de constater, d'année en année, une baisse dans les contributions aux programmes d'assistance aux réfugiés. Elle a rappelé que tous les réfugiés, où qu'ils se trouvent, nécessitaient la même considération et avaient les mêmes besoins essentiels en nourriture, en soins de santé, en éducation, et qu'il n'existe pas de réfugiés de première classe et de réfugiés d'une classe inférieure.
L'Algérie a célébré, le 20 juin dernier, la première journée mondiale du réfugié, qui est celle du réfugié africain. A cette occasion, le HCR a organisé un séminaire sur la promotion du droit du réfugié. Au cours de cette rencontre, il a été rappelé que l'Algérie avait été, depuis le début des mouvements de décolonisation en Afrique, un lieu de refuge pour les persécutés. La représentante a précisé que l'Algérie était l'un des pays arabes à avoir accueilli le plus grand nombre de réfugiés, de plus de 42 nationalités. Aujourd'hui, le pays accueille des dizaines de milliers de réfugiés sahraouis auxquels il fournit une aide et une assistance combinées à celles apportées par le HCR et nombre d'autres institutions internationales, publiques et privées. La représentante a indiqué que son pays poursuivrait son action humanitaire jusqu'au règlement juste et final du conflit du Sahara occidental, en application du Plan de règlement de l'ONU et de l'OUA et des accords de Houston signés entre les deux parties.
M. AHMED TAHIR BADURI (Erythrée) a fait savoir que le retour et la réintégration des réfugiés érythréens au Soudan est depuis 1992 l'une des priorités du Gouvernement. Les conséquences du récent conflit entre l'Érythrée et l'Éthiopie ont touché plus d'un million de personnes qui ont été déracinées, sans parler des conséquences économiques et de la destruction des infrastructures de base. Il s'est félicité de la coopération avec le HCR et les ONG qui ont pu atténuer ces conséquences sur les populations civiles. Ainsi quelque 600 000 personnes déplacées (environ les deux tiers du nombre total) ont pu rentrer au cours des six premiers mois qui ont suivi la signature de l'Accord de paix. En outre la présence des forces de maintien de la paix des Nations Unies ont encouragé les personnes déplacées à quitter les camps et à retourner dans leurs villages. Parmi les obstacles qui empêchent encore leur retour, le représentant a mis l'accent sur la présence de nombreuses mines terrestres qui restent la plus grande menace dans la zone de sécurité temporaire. Il a rappelé que la résolution 1369 du Conseil de sécurité, en date du 14 septembre dernier, demande à l'Ethiopie de fournir des cartes détaillées des champs de mines.
Il a estimé regrettable que les gens n'aient pu rentrer chez eux et profiter de la saison des semailles et des pluies. Le représentant a ensuite apporté des détails sur le fonctionnement de la coopération pour le retour et la réintégration des réfugiés en provenance du Soudan. Ainsi la nouvelle phase du programme mise en oeuvre en mai 2001 a permis le retour de 21 000 réfugiés et l'on attend le retour de 41 000 réfugiés de plus d'ici à la fin de l'année. Le programme prévoit en outre le rapatriement de quelque 100 000 personnes en 2002, ce qui amènera leur nombre total à 160 000. Il s'est félicité dans ce domaine de l'étroite coopération entre l'Erythrée, le Soudan et le HCR. Faisant part des succès du programme de démobilisation, il a indiqué que les plus grands défis à relever touchaient au retour des personnes déplacées et le logement des personnes déportées d'Éthiopie.
M. MALIK-ASLANOV (République d'Azerbaïdjan) a évoqué la souffrance d'un million de réfugiés et de personnes déplacées dans le pays et rappelé que 20% du territoire était occupé par l'Arménie voisine. Dans ce contexte, le représentant a mentionné la récente signature d'un décret portant sur la réinstallation d'azerbaïdjanais poussés hors de leurs terres ancestrales situées en Arménie. Il s'agit, a indiqué le représentant, d'un nettoyage ethnique mené par les nationalistes arméniens. Un autre décret récemment signé porte sur la réinstallation d'une partie des personnes poussées hors des régions de Fyzuli et d'Agdam par les forces militaires arméniennes occupant ces territoires azerbaïdjanais.
Le représentant a indiqué que son gouvernement était prêt à travailler à la résolution du conflit sur la base de la souveraineté, de l'intégrité territoriale, en accordant une autonomie de gouvernance à toute la population de la région du Nagorny-Karabakh, au sein de l'Etat azerbaïdjanais. La question des personnes déplacées à l'intérieur de l'Azerbaïdjan pourrait être complètement résolue par le retrait inconditionnel des forces militaires arméniennes des territoires azerbaïdjanais, dès que possible. Le représentant a par ailleurs évoqué le lancement par l'Arménie d'un programme visant à installer des familles arméniennes dans la région du Nagorny-Karabakh. Le représentant a appelé les Nations Unies à faire tout leur possible et à prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir toute action faisant obstacle à la réalisation du droit inaliénable des réfugiés et des personnes déplacées à retourner dans leurs foyers.
Avec un million de réfugiés et de personnes déplacées depuis huit ans, l'Azerbaïdjan doit faire face à un problème humanitaire aigu. Le pays doit en plus accueillir des réfugiés en provenance de régions voisines en crise. Dans ces conditions, il est indispensable que le bureau du HCR à Bako puisse continuer à fonctionner.
M. YESHEY DORJI (Bhoutan) a attiré l'attention sur la nécessité de rechercher des solutions durables adaptées à chaque situation. Face à la lutte contre les migrants illégaux, il a expliqué que tous les États n'avaient pas les mêmes moyens à leur disposition pour contrôler la porosité de leurs frontières.
Il a regretté que toutes les situations ne recevaient pas la même attention de la communauté internationale et a distingué les arrivées massives de personnes appartenant à un même groupe ethnique et les regroupements qui s'opèrent sur de longues périodes et posent de sérieux problèmes aux petits États.
S'agissant des camps de réfugiés se trouvant dans la partie orientale du Népal, le représentant a indiqué que les gouvernements du Bhoutan et du Népal étaient parvenus à un accord sur les modalités de vérification des personnes qui se trouvent dans ces camps. Il a rappelé que les gouvernements avaient identifié en 1994 quatre groupes de populations, y compris des populations non bhoutanaises--raison pour laquelle il importe de procéder aux vérifications. Il a fait savoir que le processus de vérification suivait son cours et que le Ministre des affaires étrangères du Bhoutan et le Ministre des finances du Népal s'étaient rencontrés à New York la semaine dernière. Les deux pays procèdent dans un esprit de coopération et l'on devrait parvenir rapidement à un règlement de la situation, a-t-il déclaré.
Mme JOSEPHINE FOTSO (Cameroun) a déclaré que le caractère transfrontalier du phénomène des réfugiés posait un problème de droit, et qu'il s'accompagnait aussi de préoccupations d'ordre politique, liées à la stabilité ou à la sécurité des Etats, et à l'intégration sociale des réfugiés. La représentante s'est par ailleurs félicitée des initiatives prises par le Haut Commissariat pour renforcer le statut du réfugié. A ce titre, elle a mentionné la souplesse et la flexibilité dans le fonctionnement des mécanismes de gestion des opérations, la mise en place d'un budget programme annuel unifié et le renforcement de la politique des regroupements familiaux.
La représentante a ajouté que le Cameroun a été depuis des décennies une terre d'accueil et d'asile pour des milliers de réfugiés d'Afrique centrale et d'autres pays du continent. Elle a exprimé sa préoccupation devant la possible fermeture du bureau du HCR à Yaoundé, et a indiqué que son pays apprécierait vivement que le Haut Commissaire revienne sur l'éventualité d'une telle décision. La représentante a justifié le maintien du bureau en insistant d'abord sur la conjoncture actuelle. La situation des réfugiés afghans depuis le 11 septembre a souligné l'ampleur de la problématique des réfugiés en général, a-t-elle dit. Ainsi le Cameroun abrite en ce moment près de 50 000 réfugiés que la fermeture du Bureau risquerait de désavantager. La représentante a ensuite insisté sur la situation géographique et socio-politique du Cameroun, placé dans une région marquée par un contexte instable et volatile. Enfin, elle a précisé que sur le plan diplomatique, son pays offrait un environnement qui favorisait la bonne coordination sur le terrain des opérations des autres institutions de l'ONU. Si les motivations des Nations Unies pour la fermeture du bureau de Yaoundé sont d'ordre budgétaire, il est à relever que les économies escomptées sont minimes, a enfin indiqué la représentante.
Droits de réponse
Le représentant de l'Arménie a posé la question de savoir comment un pays aussi riche en pétrole et en ressources que l’Azerbaïdjan ne parvenait pas à résoudre la question des réfugiés. Il a regretté que le Gouvernement utilise la question des réfugiés comme un instrument politique et a mis l'accent sur le fait qu'il s'agissait d'une guerre de propagande puisque l’Azerbaïdjan parle d'un million de réfugiés azéris alors que le rapport du HCR n´en mentionne que 720 000.
A propos du programme qui viserait à peupler le Nagorno-Karabakh d'une population arménienne, le représentant a fait savoir qu'il s'agissait de personnes souhaitant simplement rentrer chez elles. Par ailleurs, il a expliqué que pour sa part, l'Arménie s'employait à intégrer les réfugiés et à leur créer des conditions de vie décentes.
Le représentant de l’Azerbaïdjan a réfuté l'assertion selon laquelle son pays ne chercherait pas à régler la question des réfugiés. Il a expliqué qu'au contraire son pays cherche à les intégrer comme en atteste le récent décret qui vise à améliorer la situation des réfugiés et des personnes déplacées. S'agissant du nombre de réfugiés, le représentant a cité une résolution de l'Assemblée générale qui estime que le nombre des réfugiés a dépassé le million de personnes. À propos de la réinstallation de la population arménienne sur le territoire du Nagorno-Karabkh, le représentant a estimé que cette procédure était illégale et qu'il était hors de question de réinstaller des familles arméniennes sur ce territoire tant que le conflit n'aurait pas trouvé de solution politique.
Le représentant de l'Arménie a pris note du fait que le Gouvernement azerbaïdjanais s'oppose au retour des réfugiés. Il a de nouveau cité les chiffres figurant dans le rapport du HCR qui estime le nombre des réfugiés à quelque 700 000. Il a rappelé que les réfugiés ne devraient pas être utilisés à des fins de propagande politique.
Le représentant de l’Azerbaïdjan a attiré l'attention de la Commission sur le fait que l'Arménie détourne l'attention des résolutions du Conseil de sécurité qui demandent un retrait sans condition des forces arméniennes des territoires occupés de l’Azerbaïdjan.
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