L'IMPUNITÉ EST L'UN DES PROBLÈMES LES PLUS GRAVES QUI AFFECTENT LES DROITS DE L'HOMME ET LEURS DÉFENSEURS
Communiqué de presse AG/SHC/548 |
Troisième Commission
37e séance – après-midi
L'IMPUNITÉ EST L'UN DES PROBLÈMES LES PLUS GRAVES QUI AFFECTENT LES DROITS DE L'HOMME ET LEURS DÉFENSEURS
La Commission a également examiné
la situation des droits de l'homme en Iran et au Cambodge
«La culture de l'impunité persiste et c'est l'un des problèmes les plus graves affectant la situation des droits de l'homme dans de nombreux pays», a déclaré, cet après-midi, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des défenseurs des droits de l'homme, Mme Hina Jilani. Mme Jilani a présenté son premier rapport à la Troisième Commission qui poursuivait son examen des questions relatives aux droits de l'homme. On ne peut efficacement dénoncer les violations des droits de l'homme et obtenir réparation que dans un climat de sécurité. C'est pour cela qu'il est essentiel de résoudre la question de l'impunité des auteurs de violence à l'égard des défenseurs des droits de l'homme, a-t-elle estimé.
Au-delà de l'impunité des auteurs d'actes de violence à l'égard des défenseurs des droits de l'homme, elle s'est inquiétée de l'absence de volonté politique des gouvernements pour y remédier. Ainsi, depuis le début de son mandat, elle a saisi divers gouvernements de trente et un cas de menaces de mort et a transmis onze communications sur cette question. À cet égard, elle a rappelé qu'il incombait aux États de créer un environnement propice au respect des droits de l'homme et de modifier leur législation nationale à cette fin. Au cours du dialogue qui a suivi, plusieurs délégations, dont l'Egypte et Cuba, ont mis l'accent sur les obligations et les responsabilités des défenseurs des droits de l'homme.
Nommé en août dernier et présentant son premier rapport sur la situation des droits de l'homme au Cambodge, M. Peter Leuprecht a attiré l'attention sur les lacunes du pouvoir judiciaire, notamment en ce qui concerne les procès des combattants de la liberté. Appelant les autorités cambodgiennes à entamer des réformes juridiques, il a espéré que les prochaines élections municipales prévues pour février 2002 contribueront à renforcer la démocratie dans le pays. Regrettant que des actes de violence se soient déjà produits à leur approche, il a espéré que les coupables seront traduits en justice. Il ne doit pas exister d'impunité pour les auteurs d'actes de violence. Les représentants du Cambodge et du Viet Nam ont pris part au dialogue qui s'est engagé à l'issue de la présentation.
(à suivre – 1a)
S'agissant de la situation des droits de l'homme en Iran, M. Maurice Copithorne, Représentant spécial du Secrétaire général, a estimé que de nombreux signes confirment que l'intégration des droits de l'homme dans la société iranienne progresse rapidement, même si elle reste en deçà des aspirations du peuple. Au cours du dialogue qui a suivi, le représentant de l'Iran a réfuté plusieurs points du rapport concernant notamment la situation des femmes et les assassinats en série de 1998. Il a estimé que les informations contenues dans le rapport sont une injustice qui ne reconnaît pas les efforts du Gouvernement afin que tous ceux qui ont été impliqués dans ces crimes soient jugés.
En début de séance, M. Bacre Ndiaye, Directeur du bureau de New York du Haut Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme, a lu la déclaration de M. Francis Deng, Représentant spécial du Secrétaire général chargé d'examiner la question des personnes déplacées.
Les délégations se sont jointes à M. Omar Al-Hinia (Oman), Président de la Troisième Commission (Affaires sociales, culturelles et humanitaires) pour exprimer leurs condoléances et leur profonde sympathie aux familles de la nouvelle tragédie qui a frappé New York ce matin.
La Commission poursuivra demain, mardi 13 novembre à partir de 10 heures, son débat général sur les questions relatives aux droits de l'homme.
Documentation
Le Rapport du Représentant du Secrétaire général chargé d’examiner la question des personnes déplacées (A/56/168) passe en revue les faits nouveaux ayant marqué l’exécution du mandat de M. Francis M. Deng, chargé d’examiner cette question. Depuis l'élaboration d'un cadre normatif et de Principes directeurs relatifs aux droits et garanties applicables à tous les stades du déplacement, des efforts importants et souvent assez novateurs ont été déployés: un nombre croissant d’États et d’organisations intergouvernementales, régionales et non gouvernementales ont cherché à promouvoir, diffuser et appliquer ces Principes. Le Représentant entend élargir les consultations qu'il a engagées avec les Etats afin d'examiner leurs préoccupations et de déterminer la meilleure manière d'appliquer les Principes conformément à leurs souhaits souverains.
Au cours des 18 derniers mois, conscients de la nécessité de mettre en place des mécanismes institutionnels internationaux plus efficaces pour faire face aux crises que constituent les déplacements internes, les organismes des Nations Unies ont également pris des mesures pour améliorer la coordination des interventions à l'échelle internationale. Le rapport revient sur la nécessité d'une définition plus claire des responsabilités et sur le rôle d'un plan global visant à répondre aux besoins d'assistance et de protection des personnes déplacées. Le rapport souligne que, outre l'assistance et la recherche de solutions, l'octroi d'une protection est un élément essentiel en cas de crise humanitaire.
Malgré ces progrès cependant, la crise mondiale que constituent les déplacements de populations est aussi aiguë aujourd'hui qu'il y a huit ans. Dans 40 pays au moins, quelque 20 à 25 millions de personnes sont contraintes de quitter leur foyer et sont exposées à des dangers physiques et psychologiques. D’après le rapport, si la compréhension de ces questions s'est approfondie, il est devenu beaucoup plus difficile d'y apporter une réponse.
Le Rapport du Représentant spécial de la Commission des droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran (A/56/278) porte sur la période du premier semestre 2001. En règle générale, si le bilan global est certainement mitigé, le Représentant spécial estime que des progrès sont actuellement réalisés sur la voie de l’incorporation dans la société iranienne des valeurs liées aux droits de l’homme. Dans la mesure où il n’a pas été invité à se rendre en République islamique d’Iran depuis février 1996, le Représentant spécial s’est tourné vers de nombreuses sources d’information, dont le Gouvernement de la République islamique, d’autres gouvernements, des particuliers, des organisations non gouvernementales et les médias iraniens et internationaux.
En ce qui concerne la liberté d’expression, le Représentant spécial recommande d’abolir les mesures punitives arbitraires actuelles et d’opter pour une procédure régulière, devant un jury, avec des pouvoirs limités à la simple recommandation d’une suspension d’activités pour une période n’excédant pas six mois. Pour promouvoir la condition de la femme, il recommande que les différents pouvoirs travaillent à un plan échelonné précisant les changements d’ordre législatif et réglementaire requis pour parvenir à une véritable égalité de traitement des femmes.
En ce qui concerne la réforme de la justice, le Représentant spécial recommande que le fonctionnement de toutes les prisons du pays ainsi que leur gestion soit rigoureusement placée sous l’autorité de l’Administration nationale des prisons. En matière de répression, jugeant la situation toujours aussi sombre, il recommande au Gouvernement de décider, au plus haut niveau, qu’une réforme est indispensable et d’y procéder dans le courant de l’année.
Déplorant le rejet de la réforme du système judiciaire par le conseil des gardiens, le Représentant spécial appelle tous les pouvoirs de l’État à travailler à l’adoption au plus tôt d’une loi de ce type. Au vu de la nouvelle vague de prisonniers politiques et de prisonniers d’opinion qui a envahi les prisons iraniennes, il estime qu’il conviendra de parvenir à imposer aux juges qui instruisent des procès politiques un code de conduite très strict, leur dictant en premier lieu d’appliquer, dans l’esprit et dans la lettre, la circulaire du chef de la magistrature.
En ce qui concerne l’exercice démocratique du pouvoir, le Représentant spécial pense que les pouvoirs élus doivent l’emporter, en cas de désaccord, sur les autres pouvoirs de l’État et, conformément aux déclaration du Président, que les droits fondamentaux des individus dans le monde actuel comportent le droit de contrôle de leur propre sort. S’inquiétant du fait que les minorités, notamment bahaïs, chrétiens évangélistes, et certaines populations sunnites, continuent de faire l’objet d’une discrimination de la part des représentants officiels et de la société, le Représentant spécial recommande au Gouvernement d’envisager de promulguer une politique des minorités.
S’agissant des droits économiques, sociaux et culturels, au vu de la crise économique et sociale que subit l’Iran, le Représentant spécial recommande la mise au point d’un plan complet de restructuration économique.
Le Rapport du Représentant spécial du Secrétaire général chargé d'étudier la situation des droits de l'homme au Cambodge(A/56/209), M. Peter Leuprescht, a été établi à la suite des deux dernières missions entreprises par le Représentant spécial en février et juin 2001 au Cambodge. En premier lieu, il a tenu à réaffirmer sa conviction que quatre maux continuent d'affecter en profondeur la société cambodgienne: pauvreté, violence, corruption et anarchie. Il apparaît de plus en plus clairement au représentant spécial que ces quatre maux sont étroitement liés. Certes, il faut prendre acte des progrès enregistrés dans le pays ces dernières années. Par exemple, le Cambodge vit une période de paix et de sécurité relatives comme il n'en a pas connu depuis longtemps. Néanmoins, indique le Représentant spécial, un travail énorme reste à accomplir par les autorités et par la société cambodgienne afin d'effacer les traces laissées par la période tragique qu'a traversée le pays.
Le Représentant spécial a porté son attention sur un certain nombre de questions concrètes, dont les droits fonciers (usurpation des terres et expulsions illégales, manque d'un système d'enregistrement efficace des titres de propriété) et l'exploitation des ressources naturelles (attribution des concessions forestières et droits de la pêche). Il s'est félicité de ce que la démobilisation des forces armées soit au cœur du programme de réformes du gouvernement et de l'action qu'il mène pour éliminer la pauvreté. De fait, le gouvernement reconnaît que la part du budget national actuellement affecté à l'armée demeure disproportionné. Le Représentant spécial encourage le gouvernement et tous ses
partenaires à apporter tous les soins à la planification et à l'exécution du programme de démobilisation générale, en tenant compte des enseignements qui se dégagent d'un projet pilote mis sur pied. Le Représentant spécial souligne l'importance d'un programme de collecte, de mise en lieu sûr, d'enregistrement et de destruction des armes, et exhorte le gouvernement et le parlement à adopter aussi rapidement que possible la nouvelle loi sur les armes.
Le Représentant spécial aborde ensuite les questions de l'indépendance de la magistrature, des conditions de détention, des violences policières et des lynchages. Par ailleurs, des élections municipales sont prévues pour 2002, et le Représentant spécial ne laisse pas d'être préoccupé par la composition de la Commission nationale électorale et le climat politique dans lequel se sont déroulées les premières élections municipales. Il invite la Commission électorale nationale, les partis politiques, les ONG, la communauté internationale et les bailleurs de fonds à déployer des efforts concentrés en vue de garantir que les élections municipales seront régulières, transparentes et exemptes de violence, et qu'une information suffisante et concrète sera diffusée de façon adéquate à l'intention des électeurs.
Le Représentant spécial traite en outre des questions du trafic des enfants et des femmes, des demandeurs d'asile des hauts plateaux du Viet Nam, et du Tribunal chargé de juger les Khmers rouges. Le Représentant spécial suit avec intérêt les efforts déployés en vue de la création d'un tribunal spécial chargé de juger les auteurs de crimes commis pendant la période du Kampuchéa démocratique. Il continue de faire valoir que la réconciliation et la consolidation de la paix passent par la justice et la mise à jour de la vérité.
Ce premier Rapport du Représentant spécial pour la question des défenseurs des droits de l’homme (A/56/341), qui a commencé ses travaux en septembre 2000, informe l’Assemblée générale des tendances et des facteurs qui menacent la sécurité des droits de l’homme et compromettent l’exercice des droits consacrés dans la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et de protéger les libertés fondamentales universellement reconnues, adoptée par l’Assemblée générale en 1998. La première visite de pays du Représentant spécial s’est déroulée au Kirghizistan du 30 juillet au 4 août 2001.
Parmi les aspects de la protection des droits de l’homme qui soulèvent des inquiétudes particulières, on relève, entre autres, l’impunité des auteurs de menaces et actes de violence à l’égard des défenseurs des droits de l’homme. L’absence de volonté politique des gouvernements et l’absence de transparence des institutions de l’État contribuent grandement à renforcer cette impunité. À cet égard, depuis le début de son mandat, le Représentant spécial a saisi divers gouvernements de 31 cas de menaces de mort et leur a transmis 11 communications sur cette question. Le Représentant spécial s’inquiète également des mesures judiciaires à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme, de l’activité des services de renseignements visant les défenseurs des droits de l’homme et des campagnes de propagande et de diffamation dirigées contre les défenseurs des droits de l’homme.
Dans le cadre de l’application de la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et de protéger les libertés fondamentales universellement reconnues, le Représentant spécial attire l’attention de l’Assemblée générale sur le rapport très net qui existe entre le militarisme et la gravité des violations des droits de l’homme. Depuis le début de son mandat, le Rapporteur spécial a reçu 20 communications se rapportant à des violations des droits de l’homme commises par des groupes paramilitaires. Il signale que les tribunaux militaires sont devenus une garantie d’impunité pour les responsables de violations des droits de l’homme et attire l’attention sur le nombre de défenseurs de droits de l’homme qui ont été victimes d’exécutions extrajudiciaires, ont été soumis à la torture ou enlevés. En ce qui concerne la compatibilité de la législation nationale avec les principes de la Déclaration, le Représentant spécial rappelle aux gouvernements qu’ils doivent adopter des lois qui garantissent la jouissance effective des droits de l’homme et des libertés fondamentales et leur demande de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour rendre leur législation nationale conforme aux principes de la Déclaration.
En conclusion, le Représentant spécial regrette de ne pas pouvoir signaler davantage de progrès dans l’établissement d’un climat propice à la promotion des droits de l’homme et à la protection de ceux qui les défendent. Dans la mesure où cet état de fait provient des tensions qui subsistent entre l’État et la société civile, il faut que les gouvernements apprennent à tolérer les divergences d’opinions et cessent de voir des adversaires dans les défenseurs des droits de l’homme. Les gouvernements doivent respecter l’indépendance et l’autonomie des organisations de la société civile et se garder de faire pression sur elles.
Déclaration liminaire
S'exprimant au nom de M. Francis Deng, Représentant spécial chargé d'examiner la question des personnes déplacées, M. Bacre Ndiaye, directeur du Bureau de New York du Haut Commissaire aux droits de l'homme a indiqué que les personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays recevaient peu ou pas de protection ou de soutien de la part des autorités nationales. A plus d'un égard, franchir une frontière internationale offre plus de sécurité qu'un passage de frontière interne. La situation des personnes déplacées à l'intérieur de l'Afghanistan est à cet effet édifiante. Plus d'un million d'hommes, de femmes et d'enfants sont réfugiés à l'intérieur de leur propre pays, et leur nombre s'accroît tous les jours. Nombre d'entre eux sont menacés de famine, leur santé est déplorable et ils ont un immense besoin de protection. Pourtant leurs besoins sont ignorés et l'accès à ces réfugiés est impossible.
M. Ndiaye a rappelé que des progrès avaient été accomplis, notamment avec la mise en oeuvre d'un cadre normatif approprié baptisé Principes directeurs relatifs aux déplacements des personnes à l'intérieur de leur propre pays, et avec la nomination d'un coordinateur de l'aide d'urgence. Mais la mise en oeuvre des Principes directeurs reste, au mieux, rudimentaire. Quelques gouvernements remettent en question la manière dont les Principes directeurs ont été développés. Et tandis que les Nations Unies et la communauté internationale engagent un dialogue constructif avec les gouvernements, au nom des populations déplacées, certains gouvernements refusent l'accès aux déplacés et à leur pays.
M. Ndiaye a insisté sur le fait qu'il était urgent pour la communauté internationale de prendre au sérieux la question des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays, et de répondre au problème avec le même sérieux. Car ce n'est pas seulement une question de droits de l'homme ou un problème humanitaire: c'est aussi un problème qui menace les fondations des pays concernés, leurs sous-régions, et la communauté internationale. A l'échelon interne, les déplacements sont le symptôme de sérieux problèmes. La crise d'identité qui souvent caractérise les causes et conséquences des déplacements, et les réponses apportées, constituent un véritable défi à l'unité et à l'intégrité d'un pays, ainsi qu'à sa viabilité sur le long terme. Et bien que le droit d'asile ne doive jamais être mis en cause, il est dans l'intérêt de tous de voir, à l'intérieur d'un pays, se mettre en place les conditions assurant sécurité, stabilité et prospérité pour le pays, et la région. Il faut donc, a dit M.Ndiaye, consolider et renforcer les Principes directeurs.
Dialogue avec les délégations
La représentante de l'Algérie a voulu savoir ce que recouvrait le droit analogue des réfugiés. Elle a ensuite attiré l'attention sur le fait que les Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l'intérieur de leur propre pays n'ont jamais été soumis à l'adoption d'un organe intergouvernemental. Elle a voulu savoir pourquoi, au mépris des demandes de l'Assemblée générale, ces Principes directeurs n'étaient pas discutés par un organe intergouvernemental. Elle a également demandé pourquoi M. Deng n'utilisait que le Brooking Projet on internal displacement (devenu Brookings-CUNY) comme source d'information.
Déclaration liminaire
M. MAURICE COPITHORNE, Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme en Iran, a estimé que de nombreux signes confirment que l'intégration des droits de l'homme dans la société iranienne progresse rapidement, même si elle reste en deçà des aspirations du peuple. Au cours des quatre derniers mois, on a observé de nombreuses atteintes à la liberté d'expression, notamment au cours des procès intentés à des députés qui avaient professé des critiques à l'égard du pouvoir judiciaire--et cela en dépit du fait que le Président ait rappelé que la liberté d'expression des députés, particulièrement au sein du Parlement, était garantie par la Constitution. Il a également attiré l'attention sur les manifestations qui se sont déroulées à l'issue des matches de football pendant lesquels de nombreux jeunes s'en prenant à la loi islamique ont soulevé de nombreuses questions politiques. Quelque 1000 jeunes ont été arrêtés et les autorités judiciaires ont appelé à de sévères peines.
Concernant la situation des minorités, le Représentant spécial a appelé le gouvernement à mettre rapidement en place le Comité national pour la promotion des minorités religieuses, invitant les représentants de toutes les minorités religieuses à y participer. Par ailleurs, le représentant a relevé au cours des quatre derniers mois un accroissement des châtiments tels que les pendaisons et les flagellations publiques. La presse en a recensé 245 depuis le début de l'année. En août dernier, la Cour suprême iranienne a ordonné un nouveau procès des 15 éléments des services secrets iraniens accusés du meurtre d'intellectuels et de dissidents politiques en 1998. La presse a rapporté que le Ministre chargé des services de renseignements aurait qualifié ces meurtres d'erreur insignifiante, déjà oubliée par le public. En ce qui concerne les procès des personnes qui auraient participé à la Conférence de Berlin en avril 2000, le Représentant spécial a fait savoir qu'il n'a reçu aucune information confirmant que les peines auraient été commuées. Au contraire, trois condamnations auraient été maintenues par la Cour suprême, dont deux visant des traducteurs n'ayant pas participé à la dite conférence. Le Représentant spécial a appelé le gouvernement à respecter son engagement selon lequel tous les prévenus seraient libérés. Le Représentant spécial a également regretté que, malgré l'engagement pris, les prisonniers pour conviction religieuse n'ont pas été mis en liberté--après huit mois, certains seraient même encore détenus au secret. Il a de nouveau observé que ce traitement contrevient aux dispositions légales et aux directives publiées par le chef du pouvoir judiciaire. En outre, au mépris du droit humanitaire, ces détenus n'auraient pas eu accès à un traitement médical. En conclusion, il est difficile de dire que la situation des droits de l'homme en Iran s'est améliorée depuis la publication du Rapport. Reconnaissant que la tâche était difficile, M. Copithorne a exprimé son profond respect pour le peuple et la culture d'Iran, ainsi que sa profonde admiration pour tous les Iraniens, y compris les femmes et les minorités, qui s'efforçaient d'améliorer la situation des droits de l'homme dans leur pays.
Dialogue avec les délégations
Le représentant de la République islamique d'Iran a tout d'abord rappelé que son Gouvernement rejetait la base politique du mandat lui-même. Il s'est toutefois félicité de ce que M. Copithorne ait pour projet de mener une enquête sur le terrain. Néanmoins, il a insisté sur le fait que son Gouvernement se réservait le droit de rejeter les conclusions du Représentant spécial. Il a précisé que l'évolution de la situation des droits de l'homme était un processus progressif et que les réformes continuaient d'être menées à bien, malgré les nombreux obstacles à leur réalisation.
Concernant les assassinats en série, il a estimé que les informations contenues dans le rapport sont une injustice qui ne reconnaît pas les efforts du Gouvernement afin que tous ceux qui ont été impliqués dans ces crimes soient jugés. Le représentant a fait savoir que M. Copithorne avait pris ses informations dans la presse sans tenir compte du fait que le Guide suprême de la révolution, le Président et le Ministre de l'intérieur ont clairement qualifié ces assassinats d'intellectuels et d'écrivains comme des crimes graves. En outre, ceux qui ont été impliqués dans ces assassinats ont été traduits devant les tribunaux. Deux des coupables ont d'ailleurs été condamnés à la peine capitale, conformément à la loi en vigueur en Iran.
Reprenant l'affirmation de M. Copithorne selon laquelle l'intégration des valeurs des droits de l'homme dans la société iranienne ne répondrait pas aux attentes de la population, le représentant a précisé que le Gouvernement iranien avait lui-même encouragé les ONG et la population civile à s'exprimer sur leur droit. Il serait injuste dans ce contexte d'accuser le Gouvernement de retard dans la mise en oeuvre des programmes relatifs aux droits de l'homme.
S'agissant des paragraphes du rapport concernant les femmes, le représentant a indiqué que son pays avait préparé un plan d'action national concernant la promotion de la femme. Il s'est indigné du fait que le Représentant spécial parle de discrimination légalisée à l'égard des femmes. Pour ce qui est des droits politiques, il a insisté sur le fait que les femmes avaient les mêmes droits que les hommes et pouvaient de plein droit participer à la vie politique. Ainsi, dans le premier Parlement on comptait 90 femmes candidates. Lors des sixièmes élections, on a recensé 504 candidates. Lors des premières élections municipales, plus de 7 000 étaient candidates et plus de 1 000 d'entre elles ont été élus pour siéger dans les conseils municipaux et les conseils villageois. Il a fait savoir que l'on comptait également des femmes vices-ministres, hauts fonctionnaires et autres.
En ce qui concerne la participation des femmes à la vie économique, il a mentionné qu'il n'existait là non plus aucune discrimination : les femmes ont les mêmes droits de propriété et d'accès à la terre que les hommes. En outre, le Gouvernement a pris certaines mesures de discrimination positive en faveur des femmes. Par ailleurs, le taux d'alphabétisation des femmes et des jeunes filles dépasse 83 %. Les femmes représentent 42 % des écoliers du secondaire et sont mieux représentées que les hommes au niveau universitaire. À propos de la participation des femmes aux médias, beaucoup de médias sont gérés par des femmes. En outre, on compte 75 revues féminines et l'Iran compte également des femmes metteurs en scène qui ont reçu des récompenses internationales. Le représentant a également expliqué que son gouvernement avait mis en place un service d'urgence pour aider les femmes victimes de violence. Des réformes législatives ont également été menées afin d'assurer le respect des droits des femmes dans les codes civil et pénal. Il a regretté que M. Copithorne se soit référé à un film qui qualifie l'Iran de prison pour les femmes et a insisté sur le fait que son pays disposait des statistiques attestant de sa bonne foi dans ce domaine.
À propos de la liberté d'expression, le représentant a répété que le Président iranien avait protesté lors des arrestations des députés, et que ses protestations ont été transmises au chef de l'autorité judiciaire. Le représentant a reconnu que son Gouvernement restait préoccupé par cette question. Concernant les arrestations qui ont suivi les matches de football, le représentant a fait savoir que les supporters étaient quelquefois très expansifs et avaient troublé l'ordre public. Il a insisté sur le fait que ces arrestations n'avaient rien de politique et que ces manifestants avaient été relâchés depuis. Le représentant a ensuite précisé que son pays comptait de nombreuses publications libres. Il a reconnu que certaines publications avaient été interdites par décision judiciaire. Toutefois, elles continuent aujourd'hui de paraître et représentent la voix de l'opposition.
S'agissant de la situation des minorités, il a fait savoir que trois minorités étaient reconnues et représentées au Majilis (parlement). En outre, leurs droits civils et politiques sont reconnus. Ces minorités peuvent parler leur langue et leur culture est reconnue. Il existe sans doute des problèmes, mais le Gouvernement s'emploie à améliorer la situation. Le représentant a reconnu que son pays avait encore des défis à relever. Mais quel pays peut se vanter d'un respect parfait de tous les droits de toutes les communautés. Il ne s'agit pas de nier les problèmes, mais de s'efforcer de les résoudre. Le représentant a regretté que l'on ne s'attache pas à enregistrer les progrès réalisés et ne s'emploie pas à formuler des conseils positifs. Il importe de joindre tous les efforts pour améliorer les droits de l'homme dans le monde entier, a-t-il conclu.
Le représentant de Cuba a dit qu'on avait expliqué les difficultés économiques auxquelles se heurtait l'Iran par des raisons de gestion interne. En fait, le nombre de personnes réfugiées dans le pays pourrait avoir un impact négatif sur la situation économique du pays. Le représentant a demandé un complément d'informations sur le sujet. Il a aussi demandé au Rapporteur spécial si certains facteurs extérieurs auraient pu avoir engendré ces difficultés économiques; il faudrait en tous cas en tenir compte.
S'exprimant au nom de l'Union européenne, la représentante de la Belgique a souhaité en savoir plus sur les demandes de visites en Iran effectuées par le Représentant spécial. Evoquant les remarques du Représentant spécial sur la situation des femmes et les impasses constatées dans le domaine législatif, la représentante a demandé des précisions sur ces impasses ainsi que sur les perspectives d'amélioration des droits de l'homme en Iran.
La représentante du Soudan, abordant la situation de la femme en Iran, a rappelé que le Représentant spécial parlait d'abus dans ce domaine, et qu'il indiquait avoir utilisé différentes sources pour mener son enquête. Sachant que le film iranien "Le Cercle" a constitué, pour lui, une source de référence, il y a lieu d’ajouter qu’il ne s’agit que d’un film et les films, on le sait, ont tendance à dramatiser les situations. Elle a demandé au Représentant spécial de tenir compte des caractéristiques spécifiques de la société iranienne. Elle a précisé qu'elle ne croyait pas, si abus il y a eu, que ces abus ont été délibérés. Elle a aussi voulu connaître l'impact des mesures coercitives sur les femmes iraniennes.
Le représentant de la Fédération de Russie a évoqué les activités de la Commission iranienne sur les droits de l'homme, et a souhaité connaître en détails les activités de la Commission.
Le représentant de l'Australie a parlé du rythme accéléré de l'intégration des valeurs relatives aux droits de l'homme à la société iranienne et de la liberté d'expression dans le pays. Il a souhaité en savoir plus sur le lien entre les deux phénomènes.
Répondant au représentant de Cuba, M.Copithorne a indiqué que son mandat se limitait au Gouvernement même, en excluant les facteurs externes. Il a par conséquent posé la question de savoir ce que faisait le Gouvernement iranien pour améliorer la situation de la population. Il a précisé qu'il tiendra compte de ces observations dans ses futurs rapports. Répondant ensuite aux remarques de la représentante de la Belgique et du Soudan, le Représentant spécial a indiqué qu'il s’entretenait de temps à autre avec des collègues iraniens pour savoir d’une part quelle était la façon la plus simple de se rendre en Iran et, d’autre part, pour s’informer sur les moyens de se déplacer. Il a ajouté qu'il ne pensait pas que la situation allait changer à court terme, et qu’il ne s'attendait pas à visiter l'Iran dans un avenir proche. Il a précisé qu'il ne s'était pas rendu dans le pays depuis février 1996. Abordant la question de la violence contre les femmes, il a précisé qu'en ce moment en Iran, on parlait ouvertement des abus contre les femmes, notamment dans le milieu familial. Il a, à cet égard, complimenté le Gouvernement pour ses mesures positives, tout en indiquant que davantage de choses devraient être faites. Le Rapporteur spécial a indiqué qu'étant donné ce qui se passait aujourd'hui, il espérait une amélioration. Evoquant la référence au film "Le cercle", le Rapporteur a précisé qu'il savait que les films exagéraient souvent les situations, mais qu'ils comportaient aussi des métaphores utiles.
Répondant au représentant de l'Iran, le Représentant spécial a par ailleurs rappelé que le pays, depuis longtemps, a pris des mesures importantes pour les femmes, et que la Constitution de 1905 accordait déjà des droits aux femmes. Mais le Représentant spécial a expliqué qu'il s'était concentré sur les différents aspects de la législation et non pas sur des décisions politiques. S'agissant de la Commission des droits de l'homme, le Représentant spécial a indiqué qu'elle progressait, pas aussi rapidement que souhaité, mais qu’elle s'était fixée des objectifs très importants. Il a indiqué qu'il maintenait des contacts indirects avec la Commission et l'encourageait à transmettre des informations. Cette Commission est, a-t-il dit, l'histoire d'un succès en Iran en ce qui concerne les droits de l'homme. Abordant enfin les droits de l'homme, le Représentant spécial a indiqué que malgré la fermeture des journaux, le discours public ne semblait pas avoir limité la liberté d'expression. L'Iran, a-t-il dit, a payé un certain prix, libéralisé un peu la situation et toléré un grand nombre de commentaires sur des sujets spécifiques. Il y a donc interaction entre liberté d'expression et culture des droits de l'homme dans la société iranienne.
Déclaration liminaire
M. PETER LEUPRECHT, Représentant spécial chargé d'étudier la situation des droits de l'homme au Cambodge, a indiqué que l'un des principaux objectifs du combat pour les droits de l'homme consistait à réduire et prévenir la souffrance humaine. La situation au Cambodge s'est considérablement améliorée, mais il existe encore un degré de souffrance inacceptable dans le pays. Le Représentant spécial a rappelé qu'il avait vu de pauvres gens expulsés de leurs terres et relogés dans de terribles conditions sur des terrains minés. Il a rencontré des victimes de la traite d'êtres humains et de l'exploitation sexuelle, des jeunes femmes et des filles parfois âgées de six ou sept ans à peine. Il a évoqué le sort des détenus, parfois très jeunes, maintenus dans des conditions gravement inadéquates.
A son sens, la pauvreté, la violence, la corruption et l'anarchie continuent d'affecter en profondeur la société cambodgienne, et ces quatre maux sont étroitement liés. Lorsqu'il s'est entretenu avec le Représentant spécial, le Premier Ministre HunSen, en juin 2001, a d'ailleurs souscrit à cette analyse. Un travail énorme doit être effectué par les autorités cambodgiennes mais le pays aura aussi besoin de la solidarité de la communauté internationale. A cet égard, le Représentant spécial a remercié les pays donateurs, dont le Japon, l'Union européenne, ainsi que le Canada et l'Australie. Le Représentant spécial a par ailleurs espéré que les tragiques événements de ces derniers mois ne fassent pas oublier le Cambodge et les pressants besoins de ce pays, l’un des plus pauvres du monde. Il a fortement encouragé les pays donateurs à honorer leurs promesses d'assistance financière.
Le représentant spécial a attiré l'attention sur l'état du pouvoir judiciaire, puis sur les élections municipales de février 2002, qui, espère-t-il, permettront d’effectuer un nouveau pas vers le renforcement de la démocratie. Il a exprimé sa préoccupation devant le danger de violence politique, mais a salué l'accord entre les deux parties au pouvoir visant à s'abstenir de tout acte de cette nature. Le Représentant spécial a toutefois indiqué que des actes violents, se soldant par des morts, s'étaient déjà produits. Des enquêtes doivent avoir lieu et les auteurs de ces actes doivent être traduits en justice, a-t-il observé. Il ne peut exister d'impunité pour les auteurs d'actes de violence. Le Représentant spécial a par ailleurs attiré l'attention sur le tribunal chargé de juger les Khmers rouges. Une loi à ce sujet a été approuvée par toutes les autorités cambodgiennes compétentes, puis signée par le roi Norodom Sihanouk. Cette loi est en train d'être examinée par le Conseil juridique de l'ONU. Le Représentant spécial a espéré qu'un accord pourrait bientôt être conclu entre les Nations Unies et le Cambodge. Enfin, M. Leuprecht a abordé la question du Mémorandum d'accord entre le Gouvernement royal du Cambodge et le Bureau du Haut Commissariat pour les droits de l'homme, motif de regret et de déception, a-t-il dit. En effet, aucun accord n'a été atteint sur un mémorandum conforme à la Convention sur les privilèges et immunités, et à la pratique des Etats et de l'ONU en la matière.
Dialogue avec les délégations
Le représentant du Cambodge a d’abord évoqué le paragraphe 2 du résumé du Rapport, lequel indique que “quatre maux fondamentaux, tous étroitement liés, continuent à affecter la société cambodgienne : la pauvreté, la violence, la corruption et l’anarchie”. Cette déclaration ambiguë, a affirmé le représentant, pourrait induire le lecteur en erreur et lui donner l’impression qu’il n’y a au Cambodge ni gouvernement, ni autorité, comme dans “l’Ouest sauvage” des westerns. Or la situation, a-t-il souligné, est complètement différente. Aujourd’hui, le Cambodge connaît une paix et une stabilité sans précédent -politiquement, socialement et économiquement. Pour son second mandat, le Gouvernement s’est fixé comme priorité la réforme de son administration judiciaire, de son armée, de sa police et de ses institutions financières. Ces réformes ont été menées avec succès, avec notamment un contrôle renforcé des armes et explosifs, des opérations anticriminalité réussies. On a aussi noté ces dernières années une réduction considérable du nombre d’attaques à main armée et du trafic de drogues. Nous
avons enregistré également des résultats économiques encourageants. La communauté internationale a reconnu ces efforts et ces réalisations et tout ceci prouve s’il en était besoin que le Cambodge est fermement engagé sur la voie de la démocratie, que des progrès ont été faits en matière de protection des droits de l’homme du peuple cambodgien, ce qui devrait nous conduire à coup sûr vers un avenir prospère. Nous reconnaissons cependant que dans un pays comme le nôtre, l’un des plus pauvres du monde, subsistent des problèmes tels que la corruption et la violence, mais il ne s’agit nullement d’un pays sans loi et laissé à lui-même.
Le Cambodge, a poursuivi le représentant, a l’honneur d’être le premier pays où le Haut Commissariat pour les droits de l’homme a ouvert un bureau, en dehors de Genève. Cette décision faisait suite aux atrocités des Khmers rouges des années 70 mais jusqu’à présent, nous sommes toujours le seul pays d’Asie à abriter un tel bureau. Le Gouvernement du Cambodge coopère toujours avec le Haut Commissariat et a signé, il y a deux ans, un accord en vertu duquel l’Office pouvait poursuivre les opérations de son bureau spécial au Cambodge pendant deux ans. Maintenant que la paix est revenue au Cambodge, il est temps de revoir ces arrangements. Notre guerre aujourd’hui est une guerre contre la pauvreté. Mon Gouvernement est engagé dans la mise en oeuvre de projets de développement, qui permettront d’améliorer le niveau de vie de la population. Comment des gens peuvent-ils échanger des idées quand ils ne savent ni lire ni écrire? s’est interrogé le représentant. Nous devons leur fournir des écoles, des professeurs. Ce libre-arbitre des gens de se battre pour l’exercice de leurs droits s’appelle la démocratie.
S’agissant du paragraphe 67 du rapport, je voudrais dire qu’il est normal que les organisations non gouvernementales internationales et locales poursuivent leurs programmes d’assistance électorale, de contrôle de la campagne électorale et même du scrutin. En revanche, nous nous opposons à toute interférence ou assistance internationale, qu’elle soit financière ou matérielle à un parti politique. Ce serait une violation de la souveraineté du Cambodge et de l’éthique de la Commission électorale nationale.
Le représentant de la Belgique a demandé, au sujet du droit sur la propriété foncière, quelles étaient les mesures prises pour aider et protéger les personnes chassées de leurs terres. Il a par ailleurs souhaité savoir où en était la réforme judiciaire et a demandé d'identifier les problèmes les plus graves dans ce domaine.
Le représentant du Vietnam a regretté, évoquant la question des montagnards du Viet Nam réfugiés dans certaines provinces cambodgiennes, que le rapport se réfère uniquement à des informations fournies par un parti sans tenir compte de celles qui auraient pu être transmises par le Gouvernement du Vietnam. Le représentant a précisé que son pays avait travaillé avec le Haut Commissariat et le Gouvernement du Cambodge pour régler la question. Le représentant a indiqué qu'il ne fallait pas créer le chaos dans ces régions, et que les agents de l'ONU savaient que dans les années 80 certains vietnamiens avaient quitté le pays pour des raisons politiques et économiques. Ces personnes devraient revenir, a indiqué le représentant, mais cela créerait aussi le chaos. On parle ici de régions frontalières, et de personnes qui, de façon illégale, ont traversé la frontière. Le représentant a regretté de voir les affirmations mentionnées dans le rapport. Il a espéré que les informations fournies par le Gouvernement vietnamien seront, la prochaine fois, incluses dans le rapport.
S'adressant au représentant du Vietnam, M. Leuprecht, a dit qu'il mentionnait des faits, pas des supputations. Les personnes qui ont traversé la frontière ont parlé de persécutions, a-t-il ajouté. Mais des négociations ont eu lieu pour trouver une solution au problème.
Répondant au délégué de la Belgique, le Représentant spécial a dit que s'il attirait l'attention sur ces problèmes, c'était pour aider les pays à les dépasser. Evoquant les difficultés des personnes déplacées, il a indiqué que ces personnes chassées de leurs terres se retrouvaient pour la plupart dans une situation désespérée. Ce sont des personnes très pauvres qui vivent de leurs terres en cultivant du riz. Le Représentant spécial a rappelé qu'il avait vu certaines de ces personnes descendre manifester à Phnom Penh devant le Parlement. Il est dangereux pour une société d'avoir des personnes qui n'ont rien à perdre, a averti le Représentant spécial, ajoutant qu'il espérait que le Gouvernement s'occuperait de ces problèmes. Il a indiqué cependant que l'aide venait largement de l'extérieur, notamment du Japon, et des ONG. Souvent, a-t-il poursuivi, la vraie raison de ces expropriations est une spéculation sans vergogne. Dans un endroit, 800 personnes ont été expulsées. Sur le terrain, un grand signe annonce "magasin sans taxes" à côté d'un casino récemment construit. Le Représentant spécial indique que l'on devrait prendre des mesures pour éviter de telles pratiques et mettre fin à l'impunité de ceux qui s'emparent des terres. Il faudrait créer des cadastres, et des commissions impartiales pour régler ces litiges. Faute de quoi, on risque un nouveau conflit et des révoltes de la société civile.
Le représentant spécial a mentionné par ailleurs l'application des nouvelles lois, qu'il est maintenant nécessaire de distribuer. Evoquant la faiblesse du système judiciaire et ses problèmes, il a indiqué que ces problèmes étaient liés à un manque d'indépendance, un manque de formation, une ingérence de l'exécutif, des salaires très bas et la corruption. Il est difficile pour les jeunes juristes d’occuper une place dans le système judiciaire. A propos du mémorandum d'entente, le Représentant spécial a regretté qu'il ne soit pas possible de se mettre d'accord avec le Gouvernement cambodgien. Au début du mandat, a-t-il rappelé, les problèmes étaient liés à l'immunité accordée au personnel cambodgien du bureau. Maintenant le problème est lié à l'immunité des personnes qui font des propositions. Le Représentant a ajouté qu'il était encouragé par l'attitude positive du Premier ministre. Mais la réponse reçue n'est pas satisfaisante. Il s'est dit prêt à poursuivre le dialogue, mais a indiqué aussi que le Bureau du Haut Commissariat au Cambodge a besoin d'une solide base juridique.
Reprenant la parole, le représentant du Vietnam a mis l’accent sur le fait que les explications de son Gouvernement devraient aussi être prises en considération. Il faut éviter les malentendus sur ce qui se passe dans notre pays, a-t-il dit.
Déclaration liminaire
MME HINA JILANI, Représentante spéciale pour la question des défenseurs des droits de l'homme, a indiqué qu'elle avait effectué sa première visite au Kirghizistan, du 30 juillet au 4 août 2001, et sa deuxième visite en Colombie du 23 au 31 octobre dernier. Elle s'est déclaré profondément préoccupée par l'impunité des auteurs d'actes de violence à l'égard des défenseurs des droits de l'homme. La culture de l'impunité persiste et c'est l'un des problèmes les plus graves affectant la situation des droits de l'homme dans de nombreux pays, a-t-elle précisé. On ne peut efficacement dénoncer les violations des droits de l'homme et obtenir réparation que dans un climat de sécurité. C'est pour cela qu'il est essentiel de résoudre la question de l'impunité des auteurs de violence à l'égard des défenseurs des droits de l'homme. C'est l'un des éléments fondamentaux de la promotion des droits de l'homme, a-t-elle souligné. Elle a regretté que les gouvernements n'aient manifesté que peu d'empressement à enquêter sur les nombreuses menaces, attaques et actes d'intimidation dont ils ont fait l’objet. Au-delà du manque de ressources, c'est surtout l'absence de volonté politique qui limite les poursuites. A cela s'ajoute souvent le manque de transparence et le non-respect de l'obligation redditionnelle. On observe également un accroissement des actes de violence commis par des organisations non étatiques, y compris par des groupes d'opposition armés. Elle a exhorté les gouvernements à prendre les mesures qui s'imposent pour régler les problèmes structurels et politiques qui contribuent au maintien de cette culture de l'impunité.
Mme Hilani a ensuite attiré l'attention sur les poursuites légales à l'encontre des défenseurs des droits de l'homme. En effet les procès pénaux et les poursuites judiciaires sont de plus en plus utilisés pour réduire les défenseurs des droits de l'homme au silence et les inciter à renoncer à leurs activités. Mme Jilani a observé que les gouvernements manifestaient une tendance de plus en plus marquée à considérer les activités relatives aux droits de l'homme comme des menaces à la sécurité intérieure, contraires aux intérêts de l'État. Dans la même optique, la surveillance des défenseurs des droits de l'homme est un sérieux motif d'inquiétude. Il faut également s'inquiéter des campagnes menées par les gouvernements pour jeter le discrédit sur les organisations de défense des droits de l'homme.
Mme Jilani a ensuite attiré l'attention sur la pratique qui consiste à faire juger des civils par des tribunaux militaires dont les procédures n'ont pas la transparence requise et dont l'indépendance vis-à-vis du pouvoir n'est pas garantie. L'adoption de mesures visant à mettre fin à l'impunité devrait avoir des incidences positives sur cet aspect du problème. En dernier lieu, Mme Jilani a rappelé aux États qu'il était de leur responsabilité de créer un environnement propice au respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. À cet égard, elle a regretté de n'avoir observé que peu de progrès dans la modification des juridictions nationales en vue d'assurer leur conformité aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Impressionnée par la persévérance des défenseurs des droits de l'homme, elle a espéré qu'à l'avenir les gouvernements accorderont plus d'attention aux communications qui leur sont transmises.
Dialogue avec les délégations
Le représentant de la Belgique, au nom de l'Union européenne, a demandé des précisions sur les ateliers régionaux et sur leur impact sur la protection des défenseurs des droits de l'homme. S'agissant de l'absence de volonté politique, il a voulu savoir comment Mme Jilani pensait pouvoir agir sur ce plan et comment elle envisageait ses relations avec les États.
La représentante de Singapour a posé des questions sur les méthodes de travail de la Représentante spéciale et sur la manière dont elle vérifiait ses informations. Pour sa part, la représentante du Soudan a posé des questions relatives au mandat de la Représentante spéciale.
Le représentant de l'Egypte, estimant que chaque société a la liberté d'organiser la jouissance des droits de l'homme en fonction de sa culture, a regretté que la question de la responsabilité et des obligations des défenseurs des droits de l'homme ne figure que très brièvement dans le rapport.
Répondant à ces questions, Mme Hina Jilani a expliqué que ces séminaires régionaux étaient une source d'information. En outre, les défenseurs des droits de l'homme de toute la région peuvent s'y rencontrer et tisser des liens utiles entre eux. En outre, elle a estimé important d'impliquer les défenseurs des droits de l'homme dans l'élaboration de mesures visant à les protéger. Elle a fait savoir qu'elle se rendrait à Bangkok la semaine prochaine pour un autre séminaire régional.
En ce qui concerne l'absence de volonté politique des gouvernements, elle a notamment regretté qu'il n'y ait pas de cadre pour la mise en oeuvre des droits de l'homme qui soit disponible pour aider les États. Quant à son rôle, elle a fait valoir que la création de son mandat était en soi une reconnaissance du travail effectué par les défenseurs des droits de l'homme. La création de ce mécanisme reflète par conséquent un engagement de la communauté internationale dans ce sens. Il a estimé qu’il fallait toutefois appuyer les mouvements des défenseurs des droits de l'homme et compléter les mesures prises à cet effet à l’échelle régionale et nationale.
À propos de l'impunité, elle a estimé qu’il s’agissait en l’occurrence d’un problème grave dont atteste le peu d'intérêt que les gouvernements ont témoigné à ses communications. Même dans les pays où il existe un cadre juridique, ces droits ne sont pas toujours respectés, a-t-elle regretté.
Concernant ses méthodes de travail, Mme Jilani a expliqué qu'elles étaient identiques à celles des autres mécanismes relatifs aux droits de l'homme. Il faudrait d'abord qu'elle reçoive des informations et qu’elle puisse enquêter sur ces informations. Les résultats de l'enquête seront ensuite communiqués au gouvernement concerné. Après cela, il pourrait y avoir un suivi de l'enquête. Mme Jilani a insisté sur les soins qu'elle apportait à la vérification des informations auprès de plusieurs sources crédibles.
Exprimant son respect à l'égard des législations nationales, Mme Jilani a toutefois expliqué qu'il existait un cadre constitué par la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et de protéger les libertés fondamentales universellement reconnues. Toute législation nationale doit s'inscrire dans ce cadre juridique. Concernant la responsabilité et les obligations des défenseurs des droits de l'homme, elle a attiré l'attention sur la Déclaration qui confère à l'État la responsabilité de créer les conditions nécessaires pour que toutes les personnes sous sa juridiction puissent jouir pleinement de leurs droits fondamentaux. Pour leur part, les défenseurs des droits de l'homme ont pour devoir de protéger la démocratie et les libertés fondamentales. Il importe qu'ils soient en mesure de protéger et de défendre la démocratie. Tout acte en faveur des droits de l'homme ne saurait faire de tort à la communauté civile.
La représentante de Cuba a insisté sur les responsabilités des défenseurs des droits de l'homme. Elle a posé la question de savoir si l'on ne risquait pas de créer une sorte d'impunité légale pour les défenseurs des droits de l'homme. Elle s'est inquiétée de savoir si l'on ne donnait pas un chèque en blanc aux défenseurs des droits de l'homme à qui il arrive pourtant de violer ces droits. Elle s'est également déclaré préoccupée par le fait que le rapport semblait désigner les États comme violateurs des droits de l'homme alors qu'ils en sont aussi les défenseurs.
Pour sa part, la représentante du Mexique s'est félicitée des possibilités offertes par les ateliers régionaux.
Répondant à ces observations, Mme Jilani a indiqué qu'elle avait déjà fait une réponse écrite aux questions posées par la représentante de Cuba qui figurerait dans son prochain rapport à la Commission des droits de l'homme. Elle a ensuite attiré l'attention sur les parties de son rapport qui concernent des organisations non étatiques qui se livrent à des violations des droits de l'homme.
* *** *