LA COMMISSION EXAMINE LA QUESTION DES DROITS DE L'HOMME AU SOUDAN ET EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
Communiqué de presse AG/SHC/545 |
Troisième Commission
34e séance – après-midi
LA COMMISSION EXAMINE LA QUESTION DES DROITS DE L'HOMME AU SOUDAN ET EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
Elle adopte deux projets de résolution portant sur la deuxième Assembléemondiale sur le vieillissement et sur la Décennie des populations autochtones
Le Rapporteur spécial sur la question des droits de l'homme au Soudan,
M. Gerhart Baum, a indiqué, cet après-midi, devant les délégations de la Troisième Commission que les racines du conflit dans le pays n’étaient pas d’ordre religieux. Il s’agirait en fait d’une lutte ethnique pour le pouvoir et les ressources naturelles dont le pétrole. Le Rapporteur spécial a indiqué que l'exploitation du pétrole continuait d'avoir des répercussions négatives sur la situation des droits de l'homme, malgré toutes les infrastructures fournies aux populations locales des zones pétrolifères par les compagnies pétrolières. Il a aussi rappelé que rien ne prouvait que les revenus du pétrole étaient utilisés pour assurer le développement du pays, notamment au sud du pays.
Répondant aux interrogations des nombreuses délégations qui s'inquiétaient de savoir s'il n'avait pas outrepassé le cadre de son mandat, M. Baum a précisé qu'il s'était appuyé sur le droit au développement et sur le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels pour demander au Gouvernement du Soudan de prouver ses allégations selon lesquelles ses recettes auraient été affectées à des dépenses de développement. Le Rapporteur spécial a précisé qu'il y avait quatre millions de personnes déplacées au Soudan et que, contrairement aux allégations de certaines délégations, il ne s'ingérait pas dans les affaires intérieures d'un État.
En réponse à ces affirmations, le représentant du Soudan a déclaré que l'exploitation pétrolière avait eu des conséquences positives pour la population locale en garantissant notamment son droit au logement, à l'alimentation, à l'éducation, à la santé, ainsi que la liberté de mouvement. Il a expliqué que les déplacements de populations dans les régions pétrolifères avaient été motivés par l'invasion des rebelles dans la ville fortement peuplée de Raga.
Commentant, le rapport de M. Garretón, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo (RDC), la représentante de la RDC a regretté que les efforts de son Gouvernement pour rétablir la primauté du droit n’y figurent pas. Elle a mis l'accent sur les violations des droits de l'homme commises dans la partie orientale du pays par les puissances étrangères ayant violé l'intégrité territoriale de son pays, à savoir le Rwanda, l'Ouganda et le Burundi. Au cours de l'échange de vues qui a suivi, les représentants du Rwanda et de l'Ouganda ont mis en cause la crédibilité des informations contenues dans le rapport.
(à suivre – 1a)
En début de séance, la Commission a adopté, à l'unanimité, un projet de résolution relatif à la Décennie internationale des populations autochtones, aux termes duquel l'Assemblée générale réaffirmerait que l’un des principaux objectifs de la Décennie est l’adoption d’une déclaration sur les droits des populations autochtones.
La Commission a également adopté par consensus un projet de résolution relatif à la Suite donnée à l’Année internationale des personnes âgées, deuxième Assemblée mondiale sur le vieillissement, aux termes duquel l’Assemblée générale inviterait le Département de l'information du Secrétariat à poursuivre en coopération avec le Département des affaires économiques et sociales et le pays hôte la campagne d'information sur la deuxième Assemblée mondiale.
Demain vendredi 9 novembre, à partir de 10 heures, la Commission entendra
M. Andreas Movrammatis, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Iraq, M. Paulo Sergio Pinheiro, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, M. José Cutileiro, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Bosnie-Herzégovine et en République fédérale de Yougoslavie, ainsi que Mme Marie-Thérèse Keita-Bocoum, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Burundi.
Adoption de projets de résolution
Aux termes d’un projet de résolution relatif à la Suite donnée à l’Année internationale des personnes âgées, deuxième Assemblée mondiale sur le vieillissement (A/C.3/56/L.6/Rev.1), adopté à l’unanimité tel qu'oralement amendé, l’Assemblée générale inviterait le Département de l'information du Secrétariat à poursuivre, en coopération avec le Département des affaires économiques et sociales et le pays hôte, la campagne d'information sur la deuxième Assemblée mondiale sur le vieillissement. L'Assemblée générale inviterait également la deuxième Assemblée mondiale à aborder, entre autres, la question des mauvais traitements et de la discrimination dont sont victimes les personnes âgées. Elle inviterait les États Membres à envisager, le cas échéant, de proroger le mandat des comités nationaux ou autres mécanismes créés à l’occasion de l’Année internationale des personnes âgées afin de leur permettre de préparer au plan national la deuxième Assemblée mondiale et inviterait les États Membres n’en disposant pas à envisager les moyens ou les mécanismes leur permettant de préparer la deuxième Assemblée mondiale. Les incidences sur le budget-programme du projet de ce projet de résolution sont consignées dans le document paru sous la cote A/C.3/56/L.19.
Expliquant sa position, le représentant des États-Unis a indiqué qu'il se dissociait du consensus en raison des incidences budgétaires de ce projet. Il a rappelé que la deuxième Assemblée mondiale devait être financée sur le budget ordinaire. Pour sa part, la représentante de la Nouvelle-Zélande, au nom du Groupe CANZ, a estimé que les frais visant à faire connaître la deuxième Assemblée mondiale devraient être prélevés sur le budget actuel du Département de l'information. Reconnaissant l'importance de la campagne d'information, la représentante du Japon a fait valoir que son financement aurait dû être étudié par la Cinquième Commission et le CCQAB.
Par le projet de résolution relatif à la Décennie internationale des populations autochtones (A/C.3/56/L.30), également adopté à l'unanimité, l’Assemblée générale réaffirmerait que l’un des principaux objectifs de la Décennie est l’adoption d’une déclaration sur les droits des populations autochtones, et soulignerait qu’il importe d’assurer la participation effective de représentants des populations autochtones aux travaux du Groupe de travail intersessions à composition non limitée de la Commission des droits de l’homme chargée d’élaborer un projet de déclaration sur les droits des populations autochtones. Elle inviterait les institutions financières, les organismes de développement, les programmes opérationnels, les institutions spécialisées et les secrétariats des Nations Unies ainsi que les autres organisations régionales et internationales, à attribuer un rang de priorité plus élevé et à consacrer davantage de ressources à l’amélioration de la situation des populations autochtones, notamment en élaborant, dans leurs domaines de compétence, des programmes d’action concrets pour la réalisation des objectifs de la Décennie.
L’Assemblée déciderait que le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les populations autochtones devra également servir à aider les représentants de communautés et d’organisations autochtones à assister, en qualité d’observateurs, aux sessions de l’Instance permanente sur les questions autochtones. Elle engagerait tous les gouvernements et organismes à envisager d’alimenter le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les populations autochtones, si possible en augmentant sensiblement le niveau des contributions.
Rapport intérimaire sur la situation des droits de l’homme au Soudan, établi par le Rapporteur spécial M.Gerhart Baum (A/56/336)
Le rapport indique que la situation des droits de l’homme s’est encore aggravée ces derniers mois au Soudan, comme le témoigne le rétablissement de l’état d’urgence jusqu’à la fin de 2001 par l’Assemblée nationale, le renforcement de la censure de la presse et la limitation des activités politiques des partis d’opposition. Les derniers mois ont à nouveau été marqués par l’arrestation de sympathisants des groupements d’opposition et des militants des droits de l’homme.
Le rapport constate également un accroissement des activités militaires. Des combats ont entraîné de larges mouvements de civils dans la région des monts Nouba, dans le Bahr al Ghazal et l’état d’Unity, à proximité des champs de pétrole. L’aviation soudanaise, poursuit le rapport, a continué à attaquer des cibles civiles bien que le gouvernement ait indiqué qu’il n’en était rien. Le Mouvement populaire de libération du Soudan et l’Armée populaire de libération du Soudan (MPLS-APLS) agiraient, pour leur part, dans le plus grand mépris du droit international humanitaire et des droits de l’homme, pillant les réserves de vivres, blessant ou tuant parfois des civils par la même occasion, recrutant des enfants soldats et commettant des viols.
Le Rapporteur spécial a été particulièrement frappé par le sort des personnes déplacées dans leur propre pays, qui sont plus nombreuses au Soudan que partout ailleurs dans le monde. Il fait sien l’appel qui a été adressé par l’Union européenne tant au gouvernement du Soudan qu’au MPLS/APLS pour qu’ils s’engagent dans des négociations continues en vue de parvenir à un règlement politique juste et durable du conflit; il partage l’avis de l’Union selon lequel il est essentiel, dans le contexte du processus de paix engagé par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), de promouvoir d’urgence l’instauration d’un cessez-le-feu global dûment surveillé par des observateurs acceptés par les deux parties.
Le Rapporteur spécial a relevé que des sources autorisées s’accordaient à dire que l’exploitation des réserves de pétrole avait aggravé le conflit, qui était aussi désormais une lutte acharnée pour le pétrole. Bien que les compagnies pétrolières aient fourni des équipements à la population locale des zones pétrolières, l’exploitation du pétrole continue d’avoir des répercussions négatives sur la situation des droits de l’homme. Le rapporteur spécial estime donc que, quelles que soient leurs réalisations sociales, les compagnies pétrolières resteront en butte aux critiques de la communauté internationale parce qu’elles mènent leurs activités dans un pays déchiré par la guerre et secoué par des crises humanitaires fréquentes.
Abordant la question des rapts de femmes et d’enfants, le Rapporteur spécial a indiqué que des mesures positives ont été adoptées, mais qu’il reste nécessaire de mener une campagne massive de lutte contre ce phénomène. Il encourage le gouvernement soudanais à prendre publiquement position contre les rapts et en faveur du Comité pour l’élimination des rapts de femmes et d’enfants (CERFE). En mi-2001, le CERFE n’avait favorisé le retour dans leurs foyers que de 550 personnes enlevées sur un nombre total supérieur à 5 000. Le Rapporteur spécial est particulièrement préoccupé par le rôle négatif que jouent les tribus arabes nomades, les “Murahaleen”, qui se rendent coupables de meurtres, de viols et de rapts collectifs, et qui son tolérés par l’armée soudanaise.
Abordant la question de la constitution et de la transition vers la démocratie, le Rapporteur spécial a indiqué qu’il déplorait que des violations des droits de l’homme soient ainsi commises sans que les pouvoirs publics prennent des mesures pour enquêter sur elles et les réprimer. Il a encouragé le gouvernement à prendre des mesures positives qui aillent dans le sens d’une transition réelle vers la démocratie, c’est à dire essentiellement abroger l’état d’urgence. Le Rapporteur a enfin demandé instamment au MPLS/APLS de cesser de commettre des violations des droits de l’homme et d’empêcher que de telles violations ne se reproduisent. Il a encouragé le gouvernement à envisager de créer une commission nationale des droits de l’homme indépendante.
Déclaration liminaire
M. Gerhart Baum, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Soudan, a indiqué que les violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire se poursuivent dans le pays. Il a exprimé son inquiétude quant à la reprise des bombardements de civils, notamment dans la région des Monts Nouba et dans l'Etat du Nil bleu. Ces bombardements continus ont empêché l'accès de la population à l'aide humanitaire. Ce mépris du droit à l'aide humanitaire, a indiqué M. Baum, représente un problème majeur. Le Rapporteur spécial a fait état de violations aux droits de l'homme perpétrées par ailleurs par le Mouvement populaire de libération du Soudan et par l'Armée populaire de libération du Soudan, notamment dans les zones pétrolifères. Les combats entre les deux parties poussent les populations à fuir et les civils relogés ne bénéficient d'aucune compensation. En dépit des équipements fournis à la population par les compagnies pétrolières dans les zones pétrolifères, l'exploitation du pétrole continue d'avoir des répercussions négatives sur la situation des droits de l'homme. Le Rapporteur spécial a observé qu'il n'y avait par ailleurs pas de preuve indiquant que les revenus du pétrole contribuaient au développement du sud du pays.
Durant son voyage à Khartoum en octobre 2001, le Rapporteur spécial a rassemblé des informations sur le processus de transition vers la démocratie. Il s'est déclaré préoccupé par un nouvel amendement à la loi relative aux forces de sécurité nationale qui étend la détention sans révision judiciaire. Il a mentionné aussi que les articles de presse étaient soumis à la censure préliminaire par des organes de sécurité. Les forces de sécurité continuent leur campagne de harcèlement contre les représentants de l'opposition, notamment ceux de l'Alliance démocratique nationale, malgré la décision prise par le chef de l’Etat d'abandonner les accusations pénales contre l'ancien président de l'Assemblée nationale, Hassan al-Turabi, toujours sous mandat d’arrêt.
Le Rapporteur spécial a fait état de discussions avec des représentants du Mouvement populaire de libération du Soudan, dans le sud du pays. Il a constaté que dans cette partie du pays, les structures civiles, l'administration du droit et l'application du droit avaient besoin d'être raffermis. Les structures judiciaires existantes sont très faibles, avec moins de 100 avocats professionnels pour tout le sud du pays. Au cours de ses discussions avec les représentants du MPLS, M. Baum a soulevé la question des élections prévues maintenant pour la fin de l'année. Il a indiqué que ce processus ne pouvait être caractérisé de démocratique puisqu'il était fondé sur des nominations, à tous les niveaux.
Le conflit au Soudan n'a pas de racines religieuses, a insisté le Rapporteur spécial. Ce conflit est fondé sur la concurrence opposant différents groupes ethniques pour l'accès aux ressources, leur contrôle, et pour le pouvoir. M.Baum a exprimé son scepticisme quant aux volontés de paix des parties au conflit. Les initiatives de paix stagnent et semblent accentuer la tendance à la sécession du sud du pays. Les nombreuses violations des droits de l'homme sont liées à la guerre et à cet égard, le fardeau supporté par les populations déplacées est énorme.
Le Rapporteur spécial a par ailleurs mis l'accent sur le problème des rapts d'enfants et des femmes. Le Gouvernement, a-t-il dit, doit prendre des mesures concrètes pour prévenir ces pratiques. M. Baum a encouragé le Gouvernement de Khartoum à soutenir notamment le travail du Comité pour l'élimination des rapts et à lui fournir les ressources nécessaires à son fonctionnement. Il a encouragé le Gouvernement à utiliser les instruments disponibles pour créer une société civile, et exhorté le MPLS à assumer ses responsabilités pour assurer la survie des populations vivant sur son territoire. M. Baum a encouragé les donateurs à investir dans le développement du Soudan et dans la construction de la société civile. Le sud du pays, a-t-il dit, ne pourra exercer son droit à l'autodétermination sans structures civiles. Le Rapporteur spécial a expliqué que le renforcement des institutions soudanaises existantes et de la société civile étaient des éléments essentiels de la démocratisation du nord et du sud. Une bonne gouvernance et une approche participative sont primordiales pour assurer une paix durable.
Dialogue avec les délégations
Le représentant du Soudan a indiqué que, indépendamment de sa volonté de coopération avec les Nations Unies, son pays rejetait catégoriquement la politisation, la sélectivité et la politique des deux poids deux mesures dont l’Organisation fait preuve dans la question des droits de l'homme au Soudan. Il a regretté, d’une part, que l'ONU continue à «montrer du doigt» certains pays en développement et, d’autre part, que la communauté internationale se préoccupe de la situation des droits de l'homme de manière sélective sans essayer de savoir ce qu'il en est dans les pays développés.
Le représentant a ensuite fait état des progrès mentionnés par le Rapporteur spécial. S'agissant des préoccupations exprimées dans le rapport, il en a tenu pour responsable le conflit qui persiste au sud du pays. Comme le Rapporteur spécial l'a lui-même observé, le Gouvernement du Soudan a renouvelé son attachement à un cessez-le-feu. En outre, il a justifié la révision de la loi sur les forces nationales de sécurité par le fait qu'un groupe terroriste avait profité de la souplesse de l'ancienne loi pour tuer, en décembre 2000, 22 citoyens qui priaient dans une mosquée de Khartoum. Il a de plus indiqué que la plupart des cas individuels cités par le Rapporteur spécial ne sont pas des violations des droits de l'homme puisqu'il s'agit d'individus passibles de peines pénales. Il a précisé que les victimes civiles faites par les bombardements aériens s'expliquaient par le fait que les rebelles utilisaient des installations civiles à des fins militaires. Il a fait savoir que le Gouvernement avait pris des mesures pour mettre fin à ces accidents. Il a ajouté que les forces rebelles avaient fait plus de victimes civiles que les bombardements.
Par ailleurs le représentant a déclaré que l'exploitation pétrolière avait eu des conséquences positives pour la population locale en garantissant notamment son droit au logement, à l'alimentation, à l'éducation, à la santé, ainsi que sa liberté de mouvement. Il a précisé que les déplacements de populations dans les régions pétrolifères étaient causés par l'invasion des rebelles dans la ville fortement peuplée de Raga. C'est pourquoi le représentant s'est étonné des conclusions formulées à cet égard par le Rapporteur spécial. Il a regretté que le Rapporteur spécial n'ait pas su voir l'aspect positif de l'exploitation pétrolière au Soudan et se soit contenté de répéter les allégations de certains groupes connus pour leur haine du peuple soudanais. Le représentant a insisté sur le fait que le Gouvernement utilisait les revenus de l'exploitation pétrolière pour améliorer l'infrastructure et les services sociaux dans l'ensemble du pays. Il a rejeté les allégations visant à lier l'exploitation pétrolière aux violations des droits de l'homme. Le représentant a fait savoir que son Gouvernement était alarmé par le fait que le Rapporteur spécial prétende "qu'il cherche toujours à obtenir des preuves sur la façon dont les recettes pétrolières sont dépensées et se penchera davantage sur cette question." Il a estimé qu'une telle atteinte à la souveraineté du Soudan était inacceptable et a demandé de quel droit le Rapporteur spécial s'immisçait dans la répartition de ses dépenses publiques. Il a mis le Rapporteur spécial en garde contre cette fâcheuse tendance à dépasser le cadre de son mandat.
En conclusion, le représentant a reconnu que le Soudan n'était pas un pays complètement exempt de problèmes concernant les droits de l'homme, mais il a fait remarquer que les aspects positifs du rapport reposaient sur des informations obtenues de première main lors de la visite du Rapporteur spécial, tandis que les allégations négatives se fondent sur des télécopies et des courriers électroniques transmis par des groupes qui ne sont que trop connus.
La représentante de l'Egypte a rappelé l'importance de la réconciliation et la nécessité de la poursuivre. Elle a estimé qu'il fallait maintenir l'intégrité territoriale du Soudan, sans intervenir dans ses affaires intérieures.
La représentante de la République arabe syrienne a indiqué que le Rapporteur spécial avait trop insisté sur les aspects négatifs de la situation au Soudan. Elle aurait voulu que tous les aspects de la question soudanaise soient traités équitablement. Elle a rappelé qu'une intervention dans les affaires intérieures du Soudan n'était pas acceptable.
La représentante des Etats-Unis a demandé un commentaire sur la situation des femmes et des enfants enlevés. Elle a demandé un complément d’information sur leur sort, de même que sur le nombre d'enfants renvoyés dans leurs foyers. Elle a aussi souhaité connaître les idées du Rapporteur spécial sur les mesures à prendre. La représentante a par ailleurs évoqué les pratiques des tribus arabes Murahalin, qui participeraient à des rapts collectifs. Elle a souhaité obtenir des informations sur la politique du Gouvernement soudanais concernant les institutions d'enseignements et les caractéristiques de l'éducation au Soudan.
La représentante de l'Ethiopie a indiqué que la paix au Soudan apportera la stabilité dans la région. Elle a espéré que les parties au conflit pourront aller à la table des négociations.
La représentante de la Jamahiriya arabe libyenne a remercié le Rapporteur spécial pour avoir mentionné dans le rapport l'initiative égypto-libyenne. Elle s'est montré préoccupée par la situation dans le sud du Soudan, qui entrave le développement du pays. Elle a salué par ailleurs le Gouvernement du Soudan qui s’est déclaré disposé à entamer des négociations. Abordant la question de l'utilisation des revenus du pétrole, elle a demandé des preuves suffisantes pour soutenir les allégations mentionnées dans le rapport. Elle a estimé que la demande en informations du Rapporteur sur ce sujet n'entre pas dans son mandat.
La représentante de la Belgique s'est félicitée de la première visite au Sud du Soudan du Rapporteur spécial dont le mandat est valable pour l’ensemble du pays. Elle a souhaité avoir des détails sur les perspectives d'amélioration dans le domaine des droits de l'homme dans la région, et a voulu connaître les prochains projets de visite du Rapporteur, dans les montagnes Nouba et dans les «camps de la paix» notamment.
Au sujet du complément d’information demandé, le représentant de Cuba, a déclaré que cette démarche dépassait son mandat. Il a par ailleurs demandé des précisions sur l’origine des sources d’informations concernant l'exploitation du pétrole et la recrudescence du conflit. Le représentant a indiqué que la population civile souffrait et a estimé que la communauté internationale devrait aider ces populations. Le représentant a voulu savoir si le Rapporteur estimait qu'il était important, pour la communauté internationale, d'aider ces populations.
La représentante de la Malaisie s'est montré encouragée par les faits positifs observés au Soudan. Mais elle ne parvient pas à comprendre, a-t-elle dit, le lien qui pourrait exister entre la situation pétrolière et la recrudescence du conflit sur le terrain.
Le représentant de la Fédération de Russie a salué le niveau de coopération entre le Gouvernement du Soudan et le Rapporteur spécial. Mais il n'a pas compris la thèse selon laquelle l'exploitation du pétrole a des répercussions négatives sur la situation des droits de l'homme.
La représentante du Maroc a remercié le Rapporteur spécial pour son rapport et sa déclaration. Elle a saisi l'occasion pour féliciter le Gouvernement du Soudan pour sa coopération et pour les progrès réalisés dans le domaine de la démocratisation, malgré les conflits engendrés sans doute par les problèmes mentionnés dans le rapport. Elle a souhaité par ailleurs que le Rapporteur spécial s’étende davantage sur certaines sources d'informations, afin de voir dans quelles mesures elles sont fiables..
Le représentant du Tchad a indiqué que, en tant que voisin du Soudan, son pays était intimement concerné par tout ce qui se passait dans le pays. Il a précisé que le rapport lui paraissait déséquilibré, car il chargeait davantage le Gouvernement soudanais, minimisait ses efforts en matière de droits de l'homme, ainsi que la portée des ingérences extérieures. Il a trouvé préoccupante la thèse développée sur l'exploitation pétrolière.
Le représentant de la République islamique d'Iran s'est montré encouragé par la coopération offerte au Rapporteur spécial par le Gouvernement du Soudan, et par l'amélioration dont a fait état le représentant du Soudan dans sa déclaration sur les droits de l'homme. Il est du devoir de la Communauté internationale, a-t-il dit, d'aider le Gouvernement du Soudan et de mettre fin au conflit afin de garantir les droits de l'homme de tous les groupes vivant dans le pays. Mais il s'est dit préoccupé par le lien existant entre l'exploitation du pétrole et les violations des droits de l'homme. Evoquant les demandes supplémentaires en informations souhaitées par M. Baum, le représentant a souhaité que le Rapporteur spécial explique sur quelles bases juridiques il pouvait présenter une telle proposition qui pourrait constituer une tendance dangereuse. Cette tendance, a-t-il ajouté, constitue une attaque déséquilibrée contre certains pays.
Répondant à ces observations et questions, M. BAUM s'est appuyé sur le droit au développement pour poser des questions ayant trait à l'affectation des recettes publiques parce que les allégations du Gouvernement à ce sujet sont contestées. Le Rapporteur spécial a insisté sur le fait que selon ses informations, les populations du Sud ne bénéficient pas de ces dépenses qui seraient en vérité affectées au renforcement des garnisons. Le Rapporteur spécial a précisé qu'il y avait quatre millions de personnes déplacées au Soudan et qu'il ne s'ingérait pas dans la souveraineté d'un État mais examinait la situation dans un pays en guerre. Il a fait valoir que le droit au développement était un véritable droit des populations et il a demandé au Gouvernement de prouver qu'il affectait bien ces recettes à des dépenses de développement ce qui était contesté.
Le Rapporteur spécial s'est défendu d'être influencé par certains groupes. Il a demandé au Gouvernement du Soudan de répondre à ses observations concernant l'emprisonnement de journalistes. Il a demandé des précisions sur la situation humanitaire des 400 000 personnes vivant dans la région des Monts Nuba et dans la région du Haut-Nil où se trouvent les champs pétrolifères. Il a expliqué que les organisations humanitaires avec lesquelles il s'était entretenues n'étaient pas en mesure d'acheminer l'aide à ces populations. Le Rapporteur spécial a également demandé au Gouvernement de s'expliquer sur l'action des milices "murahaleen" qui pratiquent des enlèvements et sont des alliés du Gouvernement.
Concernant la liberté de culte, le Rapporteur spécial a dénoncé les allégations de certains intégristes chrétiens selon lesquels la guerre serait une guerre religieuse. Il a déclaré qu'il n'y avait pas de répression systématique contre les églises chrétiennes au Soudan. Il a dénoncé ceux qui accusent le Gouvernement du Soudan d'utiliser la religion musulmane pour réprimer la liberté de culte. Le rapporteur spécial a mis l'accent sur la complexité de la situation au Soudan. Il a déclaré qu'il s'efforçait d'être objectif et a demandé à ce que l'on discute sur les faits mentionnés dans le rapport.
Le représentant de l'Iran a de nouveau voulu savoir sur quel texte le Rapporteur spécial s'appuyait pour prétendre superviser les dépenses publiques d'un État. Même si le droit au développement est un droit de l'homme, le représentant a demandé de quel droit le Rapporteur spécial pouvait demander à un Gouvernement une ventilation de ses dépenses.
Répondant à cette question, M. Baum a dit qu'il se fondait sur le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et qu'il ne souhaitait pas superviser la ventilation des dépenses. Il a simplement demandé au Gouvernement du Soudan d'apporter la preuve de ce qu'il avançait concernant ses dépenses de développement.
La représentante de la Malaisie a de nouveau demandé des précisions sur les liens éventuels entre l'exploitation des ressources pétrolifères et les droits de l'homme.
Le représentant du Soudan, assurant que la région des Monts Nuba était sous le contrôle du Gouvernement, a expliqué qu'il n'y avait pas de problèmes pour porter secours aux personnes qui s'y trouvaient. Il a fait part de l'accord de son Gouvernement avec les États-Unis à cette fin, mais a expliqué que son Gouvernement tenait à ce que ses opérations humanitaires se fassent en toute transparence. Il a justifié sa position par le fait que les groupes rebelles qui devaient contrôler 10 % des 400 000 personnes mentionnées par le Rapporteur spécial, utilisaient les couloirs aériens. Revenant sur la pratique des enlèvements, le représentant a fait savoir que cette pratique, combattue par le Gouvernement, avait diminuée. Il a précisé que les groupes rebelles pratiquaient eux-mêmes ces enlèvements. S'agissant de la région pétrolière du Haut-Nil, le représentant a expliqué qu'il y avait moins de combats dans ces zones parce que la population de ces régions n'appartenait pas aux groupes rebelles.
Revenant elle aussi sur la question de la légitimité des demandes du Rapporteur spécial concernant l'affectation des recettes pétrolières, la représentante de la Belgique a précisé que le mandat du Rapporteur spécial couvrait tous les droits de l'homme, y compris le droit au développement et les droits économiques, sociaux et culturels. Elle a estimé que les questions du Rapporteur spécial sur l'affectation des recettes aux projets de développement dans le sud étaient légitimes.
Répondant à ces remarques, M. Baum a insisté sur le fait qu'il était l'avocat des peuples du Soudan et a espéré que le débat permettrait de leur venir en aide. Il a demandé si le Gouvernement du Soudan pouvait citer un seul exemple de quelqu'un qui aurait été traduit en justice pour avoir commis des enlèvements.
Déclaration liminaire
MME MAARIT KOHONEN, Membre du Bureau de New York du Haut Commissaire aux droits de l'homme, a lu la déclaration du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo (RDC), M. ROBERTO GARRETON, qui a démissionné de son poste pour se consacrer à ses fonctions au sein de la Commission des droits de l'homme et qui sont incompatibles avec sa qualité d'expert indépendant. M. Garretón a occupé ce poste de Rapporteur spécial depuis 1994. Le Rapporteur spécial a regretté que le dialogue intercongolais qui a commencé à Addis-Abeba ait cruellement souffert du manque de fonds et d'accords substantiels. M. Garretón a ensuite rendu compte de ces deux visites en RDC dans les régions contrôlées par les forces du Gouvernement du Président Kabila, par le Rassemblement congolais pour la démocratie soutenu par le Rwanda et par le Front de libération du Congo, soutenu par l'Ouganda. Il a dressé le bilan de la situation depuis 1998 et a fait savoir que les Congolais dans leur ensemble se sentent abandonnés et humiliés par cette situation de conflit où des puissances étrangères visent à s'approprier les ressources naturelles du pays.
Retraçant l'évolution de la situation depuis l'assassinat de Laurent-Désiré Kabila, le Rapporteur spécial rappelle que les mesures de démocratisation prises par le nouveau Président avaient fait renaître l'espoir, notamment en ce qui concerne l'application du mandat de la MONUC et du Facilitateur du dialogue intercongolais, M. Ketumile Masire. Malheureusement, on observe que la torture continue d'être pratiquée, les abus de la Cour militaire se perpétuent, la liberté d'expression et la liberté de la presse continuent d'être bafouées. Le Rapporteur spécial s'est également inquiété du fait que la compétence de la Cour militaire ne soit pas limitée aux crimes militaires.
S'agissant des zones contrôlées par le Rassemblement congolais pour la démocratie ou par le Front de libération du Congo, le Rapporteur spécial a relevé des violations plus graves, notamment des représailles contre la population civile et le pillage systématique des richesses naturelles qui appartiennent au peuple congolais. Au vu de la terreur que fait régner l'occupation étrangère, le Rapporteur spécial a rappelé les résolutions du Conseil de sécurité qui demandent le retrait des troupes étrangères et la démilitarisation de Kisangani. Le Rapporteur spécial se déclare particulièrement préoccupé par la participation de l'Ouganda qui a contribué à la déstabilisation complète de la région.
S'inquiétant du fait que ces recommandations n'ont pas été prises en considération par le Gouvernement de Kinshasa, le Rapporteur spécial a mis l'accent sur le fait que le dialogue intercongolais offre une réelle possibilité au peuple congolais de parvenir à un accord qui lui permettra d'établir un réel projet de société démocratique. Il a de nouveau demandé aux pays qui ont enfreint l'intégrité territoriale de la République démocratique du Congo de retirer leurs troupes et de respecter les résolutions du Conseil de sécurité. Il a en outre demandé aux États qui soutiennent ces pays d'exercer leur influence afin qu'ils respectent leurs obligations et de mettre fin à l'exploitation illicite des richesses congolaises.
Dialogue avec les délégations
La représentante de la République démocratique du Congo a indiqué que ce rapport comme les précédents reflétait la bipolarisation de la situation en RDC depuis que les armées régulières du Rwanda, de l'Ouganda et du Burundi ont franchi ses frontières et occupés la partie orientale du pays. Elle a mis l'accent sur la situation dans l'Est de la RDC, reprenant les termes du Rapporteur spécial sur le fait que c'est sous cet angle qu'il convenait d'examiner la situation en RDC. Reprenant les termes des résolutions du Conseil de sécurité qu'elle a trouvés «pudiques», la représentante a attiré l'attention sur le fait que dans ces combats, aucun civil ressortissant de ces pays n'est tué ni blessé et que le pillage des ressources congolaises sert à financer l’appareil de mort et de destruction.
Par ailleurs, elle a estimé que lorsqu'il s'agit de décrire les faits survenus dans la partie contrôlée par le Gouvernement de Kinshasa, le Rapporteur émet des jugements personnels et impartiaux. Elle s'est étonnée du fait que le Rapporteur spécial insiste sur des faits dépassés mais omet de rappeler les atrocités inoubliables commises sur la population civile congolaise. Estimant que cette partie du rapport a été rédigée à la hâte, elle a déclaré que son Gouvernement attachait une grande importance à la primauté du droit et avait fait fermer tous les lieux de détention non conformes au respect des droits de l'homme. En outre, elle a affirmé qu'il n'existait, dans la partie contrôlée par le Gouvernement, aucun prisonnier pour délit d'opinion, aucune personne incarcérée pour ses convictions religieuses, aucun citoyen poursuivi en raison de son ethnie ou de son sexe. Elle a fait part de la collaboration de son Gouvernement avec la MONUC et le Haut Commissariat aux droits de l'homme.
En conclusion, elle a demandé un renforcement de la MONUC, notamment dans sa composante des droits de l'homme, afin qu'elle puisse continuer à protéger la population congolaise et faire respecter ses droits.
Le représentant de l'Ouganda a regretté l'absence du Rapporteur spécial qui laisse les questions sans réponse. Il a souhaité corriger les énoncés erronés et tendancieux qui figurent dans le Rapport de M. Garretón. Il a estimé que ces déclarations créent des tensions inutiles. Concernant les deux missions du Rapporteur spécial en RDC, le représentant a demandé à savoir quelles sont les autres rencontres qu'a faites le Rapporteur spécial et quels sont les lieux qu'il a visités. Le représentant a estimé que le Rapporteur spécial n'a sans doute pas eu le temps de vérifier les faits qu'il allègue. S'il en avait eu le temps, il aurait sans conteste pris la peine de vérifier ses informations auprès des représentants de l'Ouganda, par exemple lorsqu'il a consulté le conseil de sécurité dans le cadre de la formule "aria". Le représentant a voulu savoir qui le Rapporteur spécial avait rencontré au cours de sa mission. Il a souligné l'injustice de ce rapport qu'il a jugé déséquilibré. Selon lui, les mécanismes d'enquête du Rapporteur spécial sont entachés d'intentions malicieuses. Il a mis en cause la crédibilité des conclusions du Rapporteur spécial qui ne semble pas avoir pris la peine de vérifier si elles correspondaient à la réalité. Il a espéré qu'à l'avenir, les rapports seront établis par un rapporteur spécial plus compétent.
Prenant la parole à son tour, le représentant du Rwanda a lui aussi regretté l'absence du Rapporteur spécial. Il a également regretté que le rapport soit basé sur ce qu'il a estimé être des allégations ou des opinions personnelles. Il a demandé au Rapporteur spécial de prouver son affirmation selon laquelle le Rwanda serait allé en RDC pour annexer ce pays. Il a fait savoir que son pays respectait les Accords de Lusaka. De même, il a estimé que l'affirmation selon laquelle le Rwanda exportait son propre conflit était erronée. Il a souhaité avoir la possibilité de faire parvenir les diverses observations de son pays au Rapporteur spécial.
La représentante de la Belgique, s'exprimant au nom de l'Union européenne, a émis l'espoir que le successeur de M. Garretón pourra poursuivre son dialogue constructif avec le Gouvernement de ce pays.
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