DES DELEGATIONS DENONCENT LES ACTIVITES DESTABILISATRICES DES MERCENAIRES EN AFRIQUE
Communiqué de presse AG/SHC/541 |
Troisième Commission
30e séance – après-midi
DES DELEGATIONS DENONCENT LES ACTIVITES DESTABILISATRICES
DES MERCENAIRES EN AFRIQUE
La Commission achève son débat
Général sur le droit des peuples à l'autodétermination
"Les conséquences des activités mercenaires en Afrique sont une menace grave à la paix et à la sécurité, ainsi qu'au respect des droits de l'homme. C'est ce qu'a déclaré le représentant du Nigéria à la Troisième Commission qui achevait son débat général sur le droit des peuples à l'autodétermination. Il a estimé que la cupidité pour le contrôle des ressources naturelles (pétrole, uranium, magnésium, bauxite, pierres précieuses et diamants) est la cause de nombreuses actions, notamment au Congo, en Sierra Leone, en Angola et au Libéria, visant à déstabiliser les gouvernements légitimes, armer et financer les groupes rebelles et attiser les conflits internes. À cet égard, le Rapporteur spécial sur cette question, M. Enrique Ballesteros (Pérou) a rappelé que la responsabilité des entreprises diamantifères a été mise en cause dans la poursuite des conflits en Afrique.
Au cours des quatre séances consacrées au droit des peuples à l'autodétermination, les délégations de la Troisième Commission (Affaires sociales, culturelles et humanitaires) se sont inquiétées des nouvelles formes et modalités d’utilisation de mercenaires. Elles ont notamment estimé qu’il faut enquêter sur l’implication éventuelle de mercenaires dans diverses activités criminelles et ont souligné les liens possibles avec les actes terroristes. Plusieurs délégations ont recommandé d’inclure cet aspect dans les analyses, suivis et résolutions des Nations Unies concernant la lutte contre le terrorisme. Prenant la parole cet après-midi, le représentant de l'Inde a demandé au Rapporteur spécial d'étudier également la question des "volontaires payés" participant à des activités justifiées par des motifs politiques ou religieux.
Pour progresser dans la lutte contre le mercenariat, les représentants ont estimé indispensable d'adopter rapidement une définition juridique des mercenaires qui soit acceptée par tous. C'est l'absence d'une telle définition qui a retardé la ratification de la Convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction de mercenaires qui avait été adoptée en 1989 et n'est entrée en vigueur que le 20 octobre dernier, après la ratification par le Costa Rica.
S'agissant du droit des peuples à l'autodétermination, les participants ont mis en garde contre diverses interprétations de ce droit qui viseraient à en limiter l'exercice sous prétexte de préserver l'intégrité et la stabilité des États centraux ou qui, au contraire, justifieraient le recours à la violence et à la terreur.
Les représentants des pays suivants ont pris part aux débats: Inde, Pakistan, Nigéria, République arabe syrienne et Algérie. Les représentants du Maroc et de l'Algérie ont exercé leur droit de réponse.
En début de séance, le représentant du Danemark a présenté un projet de résolution relatif à la Décennie internationale des populations autochtones.
Demain matin à partir de 10 heures, la Commission entamera son débat général sur les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et entendra
Mme Mary Robinson, Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme.
Présentation d’un projet de résolution
Présentant le projet de résolution relatif à la Décennie internationale des populations autochtones (A/C3/56/L30), le représentant du Danemark a rappelé que la résolution insistait sur l'importance de la participation effective des représentants des peuples autochtones aux travaux du groupe de travail chargé d'élaborer un projet de déclaration sur les droits des populations autochtones. Le représentant s'est réjoui de ce que le projet de résolution mentionnait la nomination d'un rapporteur spécial pour les droits de l'homme et les droits fondamentaux des peuples autochtones, et la création d'une Instance permanente. Il a salué la première réunion de l'Instance, l'an prochain au Siège de l'ONU et rappelé que le Fonds de contributions volontaires pour les populations autochtones devrait aider les représentants des communautés autochtones à participer aux séances des différents groupes de travail sur les populations autochtones.
Suite du débat général
M. A. K. BATTACHARJEE (Inde) s'est inquiété de certaines interprétations de la Charte qui visent à justifier l'exercice du droit à l'autodétermination par des objectifs politiques étroits. Il a mis en garde contre le danger que cela fait courir aux États qui cherchent à abuser de l'exercice de ce droit. Il a mis en garde contre une interprétation du droit à l'autodétermination qui ouvrirait la porte des initiatives de déstabilisation des États centraux, portant atteinte à la souveraineté et à l'intégrité des États. Il s'est inquiété que le droit à l'autodétermination serve de prétexte à l'utilisation de la terreur et aux violations de la Charte des Nations Unies.
À l'instar du Rapporteur spécial sur l'utilisation de mercenaires, le représentant a souligné les liens qui existent entre le fondamentalisme, l'utilisation de mercenaires et le terrorisme nourri par le crime, le trafic de drogues et autres activités criminelles. Dans le cadre d'enquêtes sur des actes terroristes, il s'est déclaré convaincu que certains d’entre eux aient pu être commis par des mercenaires. Il a également demandé au Rapporteur spécial d'étudier la question des "volontaires payés" participant à des activités justifiées par des motifs politiques ou religieux.
M. SHAMSHAD AHMAD (Pakistan) a rappelé que le nombre d'Etats indépendants avait triplé au cours des cinquante dernières années. Le Timor oriental, dont la population n'atteint pas le million d'habitants, est le cas le plus récent d'un peuple ayant reçu de la communauté internationale l'autorisation d'exercer son droit à l'autodétermination. Le représentant a cependant ajouté que des millions de personnes ne bénéficiaient pas encore de ce droit fondamental, et que les résolutions du Conseil de sécurité, dans ce domaine, étaient restées lettres mortes. Le représentant a indiqué que l'on mettait malheureusement parfois sur un pied d'égalité la lutte pour ces libertés et le terrorisme. Lorsque cela se produit, on supprime ainsi la légitimité de la lutte des peuples sous occupation étrangère, a-t-il dit. Nous assistons alors à une distorsion de la réalité contemporaine qui enlève tout sens aux guerres d'indépendance.
Le représentant a ensuite abordé les cas du Cachemire et de la Palestine. En Palestine, le cycle de la violence et les mesures coercitives menées contre le peuple palestinien soulignent la nécessité pour la communauté internationale de travailler à la résolution de cette question. Le Pakistan espère que le processus de paix va reprendre prochainement et que ce processus aidera les Palestiniens à réaliser leur droit inaliénable à l'autodétermination et à la création d'un Etat indépendant. S'agissant du Cachemire, le représentant a rappelé que la privation du droit à l'autodétermination avait, comme en Palestine, suscité une lutte légitime du peuple cachemiri pour sa liberté. La question du Cachemire existe depuis 54 ans, a poursuivi le représentant, et la puissance occupante hésite à honorer le droit international. C'est ainsi que ce conflit est devenu un problème mondial. Une force brutale continue de s'exercer pour empêcher le Jammu et le Cachemire d'obtenir leur droit à l'autodétermination. Le représentant a observé que les résolutions du Conseil de sécurité concernant l'autodétermination de ces peuples n'étaient pas appliquées. Les cinquante dernières années n'ont cependant pas érodé la validité de ces résolutions ni diminué les menaces à la paix. Le représentant a remarqué qu'une telle sélectivité dans l'application des résolutions du Conseil de sécurité n'était pas justifiée.
Le représentant a enfin indiqué qu'il était souhaitable pour la communauté internationale d'exercer une pression sur l'Inde afin que ce pays mette fin à la répression contre le peuple cachemiri. Il faut convaincre l'Inde d'adopter la voie du dialogue et de la paix, et de travailler avec le Pakistan pour trouver une solution, a-t-il dit. Le Pakistan, a-t-il ajouté, est prêt à engager un dialogue pour créer une solution équitable pour le Jammu et le Cachemire, en conformité avec les aspirations légitimes du peuple cachemiri.
M. J. K. SHINKAIYE (Nigéria) s'est particulièrement inquiété du recours aux mercenaires pour empêcher l'exercice du droit des peuples à l'autodétermination. Il s'est déclaré préoccupé par l'accroissement et les nouvelles utilisations de mercenaires, notamment en Afrique où ils ont pillé le continent de ses ressources, déstabilisé les gouvernements et fait périr des milliers d'Africains. Les conséquences des activités mercenaires en Afrique sont une menace grave à la paix et à la sécurité mondiales, ainsi qu'au respect des droits de l'homme. Il a rappelé les conclusions du Rapporteur spécial qui fait référence à plusieurs pays - Congo, Sierra Leone, Angola, Libéria - où les conflits sont créés par des luttes meurtrières pour le contrôle des ressources naturelles, notamment le pétrole, l'uranium, le magnésium, la bauxite, les diamants et autres pierres précieuses. Il est indispensable, s'est-il exclamé, que la communauté internationale enquête sérieusement sur la participation et la complicité de mercenaires dans ces conflits. Pour lutter efficacement contre de telles pratiques, il serait souhaitable que les États prennent des mesures qui entraveraient l'utilisation de leur territoire pour le recrutement, l'entraînement et l'utilisation de mercenaires. Il importe que les États comblent le vide juridique et mettent en place des mécanismes de contrôle pour venir à bout de ces pratiques.
S'agissant des liens avec le terrorisme, le représentant a également estimé nécessaire d'examiner la possible implication de mercenaires dans les activités terroristes et d'intégrer cet aspect dans toutes les analyses et les résolutions du système des Nations Unies sur ce thème. Reconnaissant qu'il est nécessaire de parvenir à une définition des mercenaires qui soit acceptée par tous, le représentant a accueilli avec satisfaction l'annonce d'une deuxième réunion d'experts sur ce thème.
MME RANIA AL HAJ ALI (République arabe syrienne) a rappelé que le droit à l’autodétermination était un droit sacré. Elle a indiqué que son pays avait soutenu, de façon constante, les peuples souffrant de l’occupation étrangère. Elle a aussi précisé que l’ONU avait fait des progrès considérables pour aider les peuples en lutte pour leur autodétermination. Cependant, en dépit des nombreuses résolutions et de quelques résultats, les instances de l’ONU n’ont pas toujours permis aux peuples d’exercer leurs droits légitimes à l’autodétermination. C’est la situation dans laquelle se trouve le peuple palestinien, en raison de la politique expansionniste d’Israël, de son refus d’accepter les résolutions internationales pertinentes et du manque de pressions de la communauté internationale. La représentante a indiqué qu’Israël pratiquait une politique «d’établissement humain», en faisant venir des colons juifs du monde entier pour remplacer la population palestinienne. Elle a ajouté que l’ONU était incapable de freiner ces mesures coercitives et d’aider le peuple palestinien à accéder à son indépendance. La paix et la sécurité resteront impossibles tant que le peuple palestinien n’aura pas accédé à l’indépendance, a-t-elle conclu. Il est inacceptable et intolérable de s’opposer à l’exercice du droit à l’autodétermination.
MME DALILA SAMAH (Algérie) a exprimé l'espoir que le lancement de la deuxième Décennie internationale sur l'élimination du colonialisme (2001-2010) qui témoigne de l'engagement du Comité spécial et de la Communauté internationale aux côtés des peuples soumis à la domination coloniale, aboutira à l'éradication de ce fléau des temps révolus. À cet égard, elle a rappelé le combat du peuple palestinien qui continue de revendiquer son droit légitime et inaliénable à établir son État national avec Al Qods Al Charif pour capitale. Elle a exprimé sa condamnation face à la nouvelle vague de répression dont le peuple palestinien fait l'objet depuis plus d'un an et qui a provoqué la mort de centaines de Palestiniens. La répression doit cesser au plus tôt et Israël, puissance occupante, doit être mis en demeure de se conformer aux dispositions de la quatrième Convention de Genève, relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.
D’autre part, elle a rappelé la lutte du peuple sahraoui pour exercer son droit inaliénable à l'autodétermination et à l'existence qui continue d'être contrarié au mépris des principes de la Charte et des dispositions pertinentes du droit international. À cet égard, elle a estimé que le Plan de règlement adopté en 1991 par les deux parties à savoir le Front Polisario et le Maroc, a permis la réalisation de progrès notables dans le cadre du processus visant à la tenue d'un référendum d'autodétermination libre, équitable, et impartial en faveur du peuple sahraoui. Mme Samah a regretté que ce processus demeure en situation de blocage depuis plus d'une année et demie. Elle s'est déclaré convaincue que la seule voie à même de mener à un règlement juste et définitif de la question du Sahara occidental réside dans la mise en oeuvre intégrale du Plan de règlement et des accords subséquents dont l'ultime étape est la tenue d'un référendum d'autodétermination. Elle a estimé que toute initiative visant au règlement de cette question doit s'inscrire dans le strict respect des dispositions pertinentes du droit international en la matière et des mandats qui ont été confiés aux organes chargés de cette question. Elle a observé que la responsabilité de l'ONU demeurait pleinement engagée pour que la légalité internationale soit scrupuleusement respectée dans le cadre du processus de décolonisation du Sahara occidental, dernier territoire non autonome d'Afrique et ce, à travers l'exercice par le peuple sahraoui de son droit à l'autodétermination en toute liberté et en toute transparence.
Droits de réponse
Le représentant du Maroc a fait savoir que la question du Sahara occidental était examinée par le Conseil de sécurité qui a adopté une résolution tirant les conclusions du constat établi par le Représentant personnel du Secrétaire général, M. James Baker III, selon lequel le Plan de règlement est dans une impasse du fait des difficultés de sa mise en oeuvre. Dans le cadre de la recherche d'une solution juste et durable, le Conseil de sécurité a proposé une alternative pour régler cette question et a invité l'Algérie à se prononcer sur le projet d'Accord-cadre. Il a observé que l'Algérie n'avait pas encore répondu à cette demande alors que le Maroc a exprimé son ouverture d'esprit et sa volonté de dialoguer avec toutes les parties sur cette question.
Le représentant de l'Algérie a tout d'abord insisté sur le fait que la question du Sahara occidental est à l'ordre du jour de l'Assemblée générale depuis 1966 et que le Conseil de sécurité n'en est saisi que depuis 1991. Il a rappelé que le Maroc occupait le Sahara occidental depuis 1975 et qu’un conflit avait donc éclaté avec le Front Polisario qui se battait pour le droit à l'autodétermination du peuple sahraoui. Il s'agit bien d'une question relevant du droit des peuples à l'autodétermination, a-t-il déclaré. Quant à la résolution 1359 (2001) du Conseil de sécurité, le représentant a estimé qu'elle reconnaît l'engagement des Nations Unies sur cette question et se prononce pour la mise en oeuvre de l'Accord-cadre proposé par le Représentant personnel du Secrétaire général. Répondant sur le fait que le Conseil attendrait l'avis de l'Algérie sur cet accord, le représentant a rappelé que son pays n'était pas partie à cette question qui concerne le Front Polisario et le Maroc, et relève du droit à l'autodétermination. Pour ce qui est de l'Accord-cadre, le représentant a estimé que ce projet ne respecte pas les dispositions pertinentes de l'Assemblée générale et ne saurait servir de base pour le règlement de cette question. Il a fait savoir que la Quatrième Commission et l'Assemblée générale attendent une coopération plus régulière du Maroc afin que le peuple sahraoui puisse exercer son droit à l'autodétermination.
Reconnaissant que ce débat relève d'une autre enceinte, le représentant du Maroc a fait savoir que le Maroc occupait à bon droit le Sahara occidental depuis 1975, en vertu d'un accord avec l'Espagne. Il a ensuite apporté des précisions concernant l'Accord-cadre qui a été présenté par M. James Baker III, Représentant personnel du Secrétaire général, pour venir en aide à la mise en oeuvre du Plan de règlement qui achoppe sur les difficultés entre les parties. Sur le fait qu'il appartiendrait au Maroc de prouver sa volonté de coopérer, le représentant a affirmé que la preuve de la bonne volonté du Maroc était consignée dans les rapports du Secrétaire général. Il a expliqué que son pays avait donné son accord pour la solution alternative proposé dans l'Accord-cadre au vu des difficultés de mise en oeuvre du Plan de règlement
Le représentant de l'Algérie, revenant sur le statut de la présence marocaine et sur celui des deux parties à la question du Sahara occidental, a fait savoir que le Plan de règlement mis en oeuvre depuis 1991 avait permis l'identification des Sahraouis, le retour des réfugiés et le maintien du cessez-le-feu avec le Front Polisario. Toutefois, il a insisté sur le fait que la mise en oeuvre de ce Plan avait été bloquée par un déluge de 135 000 recours déposés devant la commission d'identification qui a bloqué la poursuite du processus d'identification. Quant à l'accord reconnaissant la légitimité de la présence marocaine, le représentant a indiqué qu'il s'agissait d'un accord secret dont il ne connaissait pas les termes. En revanche, il a rappelé les résolutions demandant la tenue d'un référendum permettant au peuple sahraoui d'exercer son droit à l'autodétermination. Il a précisé que son pays, à l'instar de nombreuses délégations, soutenait la lutte du peuple sahraoui.
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