L’ELIMINATION DES INEGALITES À L’INTERIEUR DES ETATS ET ENTRE ETATS CONTRIBUERAIT A LA PREVENTION DES CONFLITS
Communiqué de presse AG/1175 |
Assemblée générale
108ème séance – matin
L’ELIMINATION DES INEGALITES À L’INTERIEUR DES ETATS ET ENTRE ETATS CONTRIBUERAIT A LA PREVENTION DES CONFLITS
L’ONU devra jouer le rôle principal dans cette entreprise
L’Assemblée générale a terminé ce matin l’examen du rapport du Secrétaire général sur l’activité de l’Organisation des Nations Unies relative à la prévention des conflits armés. Les représentants ont dans l’ensemble manifesté leur accord avec les recommandations du rapport, tout en observant que la prévention devra faire partie intégrante des stratégies de maintien de la paix et de la sécurité internationales. L’opinion selon laquelle la prévention des conflits armés doit faire l’objet d’efforts de tous les acteurs de la scène internationale comme du secteur privé a été suffisamment partagée. Si l’ONU a été présentée comme l’acteur principal dans cette entreprise, il n’en reste pas moins que les organisations régionales, les gouvernements et les organisations non gouvernementales devront y jouer un rôle important de mobilisation. La responsablité première des Etats en matière de prévention des conflits armés a été souvent évoquée, ainsi que le renforcement des capacités nationales. Il a été souligné qu’il faudrait enrayer la pauvreté et réduire l’inégalité intraétatique et interétatique qui, de l’avis de plusieurs délégations, alimentent les conflits.
L’Assemblée a entendu des délégations qui ont souhaité que l’on accorde plus d’importance au respect des droits de l’homme et que l’on s’engage à appliquer les principes de la Charte s’agissant de la prévention des conflits. Les investissements des conflits sont essentiels dans le domaine de la prévention et ceux accomplis en faveur du développement durable contribueront autant à la prévention des conflits.
Les représentants des pays suivants sont intervenus: Roumanie, Nouvelle-Zélande, République arabe syrienne, Israël, Indonésie, Japon, Fédération de Russie, Népal, Vénézuéla, Inde, Palestine et Suisse. Les représentants du Liban, de la République arabe syrienne et d’Israël ont exercé leur droit de réponse.
Examen du rapport sur la prévention des conflits armés
M. ALEXANDRU NICULESCU (Roumanie) s’est associé à la déclaration du représentant de l’Union européenne et a abordé la question de la coopération entre les Nations Unies et l’OSCE. Chaque conflit a ses caractéristiques et les circonstances régionales ne peuvent être négligées, a-t-il rappelé. Il a fait remarquer que l’OSCE joue un rôle particulier dans la promotion de la paix et des droits de l’homme en Europe. Son apport est important en terme de prévention des conflits. Au cours de la présidence de l’OSCE par la Roumanie, il a indiqué que le Ministre roumain des affaires étrangères s’est rendu au siège des Nations Unies et s’est adressé au Conseil de sécurité dont l’ordre du jour portait sur la coopération entre l’ONU et l’OSCE. Le Ministre a formulé des propositions pour améliorer celle-ci. A ce titre, il a suggéré une amélioration de la coordination, un échange d’agents de liaison, une formation du personnel en matière de prévention et d’alerte rapide.
S’agissant de l’optique nationale de la Roumanie, qui souhaite la stabilité, le représentant a affirmé que le gouvernement est déterminé à assurer une plus grande sécurité au peuple roumain, en s’attachant à empêcher des conflits nouveaux. Il est favorable à l’invitation, formulée dans le rapport, de passer d’une culture de la réaction à une culture de la prévention. Il s’est dit tout à fait d’accord avec les autres recommandations figurant au rapport et a indiqué que son gouvernement est prêt à les soutenir. Les mesures de prévention doivent être prises dès que possible, dès qu’un conflit prend naissance. Il faut prendre en compte, a-t-il ajouté, les racines économiques et les raisons historiques des conflits potentiels, en évitant de semer des graines de conflit à venir.
M. TREVOR HUGHES (Nouvelle-Zélande), citant l’un des principes de base énoncé dans le rapport du Secrétaire général sur la prévention des conflits armés, a été d’avis que les gouvernements nationaux portent la responsabilité première dans les efforts de prévention et que la communauté internationale ne peut généralement que fournir des ressources financières, techniques et humaines en vue de les aider à faire face aux causes des conflits. Il a ajouté que, dans certains cas, les gouvernements peuvent ne pas avoir la capacité de résoudre eux-mêmes un conflit, auquel cas la communauté internationale a une bien plus grande responsabilité d’aider à prévenir les conflits et protéger les civils. C’est particulièrement le cas pour les conflits qui se déroulent à l’intérieur d’un Etat, qui sont la forme de conflits la plus préoccupante dans la région où se trouve la Nouvelle-Zélande. Le représentant a souligné le rôle crucial que jouent les organisations régionales. Il a estimé que la solution des conflits dépend largement des sociétés et des pays touchés mais que l’aide au développement peut grandement aider à dépasser un conflit et à reconstruire la société. Le représentant a pris pour exemple les îles Salomon, où un fort taux de chômage des jeunes et des possibilités de formation limitées ont été identifié comme des facteurs contribuant à l’éclatement de conflit. L’aide publique au développement a permis de fournir à la jeunesse des débouchés sans lesquels ils auraient pu être tentés de s’impliquer dans un conflit. Au nombre des autres facteurs qui alimentent les conflits, le représentant a identifié l’armement et a appelé à une transparence dans ce domaine. Dans le Pacifique Sud, des mesures de lutte contre la circulation illicite des armes légères ont été prises, notamment dans le cadre de l’Initiative “Pacific Forum Honiara” et dans le “Nadi Framework”. M. Hughes a appuyé l’analyse du Secrétaire général sur l’impact des conflits armés sur les enfants et a préconisé de mettre l’accent sur les soins, la protection et l’éducation. Citant le Timor oriental, le représentant a estimé qu’une présence internationale continuera d’y être nécessaire.
M. FAYSSAL MEKDAD (République arabe syrienne) a noté que le débat concerne le cœur même de l’action de l’ONU et de sa mission, et la raison même de sa création. Cependant, après plus de 50 ans la prévention demeure toujours un espoir à réaliser, a-t-il considéré. Il a souhaité que les efforts déployés par les Nations Unies doivent être conformes aux objectifs de la Charte. Il a rappelé que la communauté internationale est formée de nombreux Etats et qu’il faut mettre l’accent sur la démocratie dans leurs relations entre eux, même s’ils ont des croyances et des principes différents. Il a ajouté qu’il faut respecter la non-ingérence dans les affaires internes des Etats.
Le représentant a observé que le rapport fait des allusions concernant des situations dans certains pays, qu’il n’aborde pas suffisamment la situation du Moyen-Orient, et qu’il ne mentionne pas correctement le Golan occupé, par exemple. Il a demandé au Secrétariat général de corriger cette faute. Il est désormais reconnu, à son avis, que l’occupation étrangère est une des plus grandes causes de conflit et le rapport aurait du s’y attacher davantage. Il a estimé qu’Israël s’emploie tous les jours à exacerber les conflits, citant notamment les bombardements aériens des positions syriennes au Liban qui ont eu lieu deux fois en une courte période. La situation est explosive et il importe que l’ONU confirme l’application des résolutions du Conseil de sécurité et du droit international. Les droits de l’homme et le droit au développement doivent faire l’objet de plus d’importance, a-t-il ajouté. Il a considéré qu l’ONU assume un rôle important dans la prévention des conflits armés et que le paragraphe du rapport concernant le désarmement et les petites armes est intéressant. Il est cependant important, de mettre l’accent sur le désarmement nucléaire. Tout mécanisme de prévention doit être créé en accord avec tous les Etats Membres, a-t-il conclu.
M. YEHUDA LANCRY (Israël) a partagé la conviction que la meilleure manière de protéger «nos enfants du fléau des guerres» de demain est de prévenir ces conflits dès aujourd’hui.
Réagissant à l’intervention précédente, prononcée par le représentant de la République arabe syrienne, M. Lancry a trouvé particulièrement «troublant» les termes employés par ce dernier, étant donné le comportement adopté récemment par le Gouvernement syrien. Le long des frontières Nord d’Israël avec le Liban, l’organisation « terroriste » du Hezbollah continue de lancer des attaques contre les soldats et la population d’Israël, en contradiction avec les normes du droit international. Le gouvernement syrien permet l’acheminement d’armes vers les bases du Hezbollah. La communauté internationale doit sérieusement se poser des questions à propos du Gouvernement syrien, qui veut devenir membre du Conseil de sécurité alors que sa politique va clairement à l’encontre des principes de la Charte des Nations Unies. Outre les résolutions 242 et 238 du Conseil de sécurité qui sont une référence sur la route de la paix, Israël a pleinement appliqué les dispositions de la résolution 425 et est disposé à participer à un dialogue constructif visant la résolution des conflits dans notre région.
L’un des principes de base du rapport du Secrétaire général sur la prévention des conflits armés est que la responsabilité première de la prévention des conflits incombe aux gouvernements et que le rôle des Nations Unies doit être de soutenir leurs efforts nationaux, a noté M. Lancry. Le Moyen-Orient est un exemple frappant des améliorations qui peuvent être obtenues grâce à une telle approche. Les traités de paix conclus entre Israël et la Jordanie d’une part et entre Israël et l’Egypte d’autre part, et les guerres que ces traités ont permis d’éviter ont été le résultat de négociations directes entre les parties. Le représentant a évoqué le cas du processus de paix israélo-palestinien qui est en cours depuis presque huit ans. Il a déclaré qu’Israël a engagé des négociations directes avec les Palestiniens dans l’espoir de mettre un terme à des décennies de conflit et de prévenir ceux à venir. Ces dernières années, de grands progrès ont été faits sur la base de la reconnaissance mutuelle, du rejet de la violence, de la suppression de la terreur et des négociations bilatérales directes. Il a regretté qu’en septembre dernier, les Palestiniens ont décidé de se démarquer de cette formule en renonçant à leur engagement à la non-violence et au dialogue. Le Gouvernement israélien travaille à résoudre ce développement très perturbant grâce à une acceptation complète du Rapport Mitchell et du plan Tenet, a indiqué M. Lancry.
Reconnaissant les principes cités dans le rapport du Secrétaire général, M. Lancry a déclaré que la première leçon du passé est que plus on s’attaque tôt aux causes des conflits, plus il sera probable que les parties pourront engager un dialogue constructif et considérer les griefs qui sous-tendent le conflit. Dans cet esprit, il a appelé les partenaires palestiniens d’Israël à s’engager de concert sur la voie du dialogue, de la paix et d’une véritable coexistence.
M. MAKMUR WIDODO (Indonésie) a rappelé que la Déclaration du Millénaire a accordé une priorité à la prévention des conflits. Il est de plus en plus évident, a-t-il noté, que les stratégies de réaction ne suffisent plus et que la prévention doit faire partie intégrante des stratégies de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il faut renforcer les capacités nationales, a-t-il considéré, et il s’est dit en accord avec l’avis selon lequel la responsabilité première de la prévention incombe aux gouvernements nationaux. Cependant, tous les gouvernements ne sont pas dotés de capacités suffisantes, surtout lorsqu’ils sont instables. Le rapport s’adresse à l’Assemblée générale qui a la compétence d’éliminer les cause profondes des conflits, en particulier les causes socio-économiques. L’Assemblée a aussi un rôle important à jouer en sa capacité d’instance internationale. Le représentant a considéré qu’il est impératif d’augmenter nettement les flux d’aide au développement. Il a estimé que l’ONU doit encourager la perception du rôle potentiel que le développement économique peut jouer dans la prévention des conflits. Le rôle des organisations régionales est aussi important du fait de la connaissance des facteurs locaux, a-t-il ajouté. Il estime que les modalités de coopération entre elles et l’ONU doivent être améliorées. L’Indonésie apporte son soutien aux réunions recommandées par le Secrétaire Général. Le rôle préventif de celui-ci doit être renforcé, comme il est affirmé dans le rapport. Le représentant s’est félicité du rôle joué par la société civile et les Organisations non gouvernementales.
M. YUKIO SATOH (Japon) s’est concentré sur le rôle du Secrétaire général et de l’Assemblée générale dans la prévention des conflits. Dans le contexte d’une approche préventive multidimensionnelle combinant des mesures humanitaires, politiques, économiques et sociales, l’Assemblée générale pourrait contribuer à la prévention des conflits. L’Assemblée pourrait également contribuer à intégrer certaines questions de l’ordre du jour international qui jouent un rôle important dans la prévention des conflits, parmi lesquels la lutte contre le VIH/SIDA et le commerce illicite des armes légères. Appuyant l’idée d’un renforcement du rôle traditionnellement dévolu au Secrétaire général en matière de prévention, M. Satoh a déclaré que ce renforcement pourrait prendre la forme de missions d’établissement des faits et de renforcement de la confiance dans les zones instables, ainsi que la création d’un réseau informel de personnalités.
M.ANDREI GRANOVSKY (Fédération de Russie) a considéré que les investissements sont essentiels dans le domaine de la prévention. Cependant, ils doivent être corroborés par la promotion de la culture de la prévention, en mettant l’accent sur le rôle central joué par les Nations Unies. Les engagements du Sommet du Millénaire démontrent un renforcement des volontés des Etats à mettre en oeuvre la prévention, a-t-il remarqué. Dans le rapport, il a noté que la responsabilité première dans ce domaine incombe aux Etats eux-mêmes, les Nations Unies étant appelées à jouer un rôle de coordination. Il a estimé que les Etats doivent appuyer les efforts en cours pour prévenir les conflits, en respectant à la lettre les principes de la Charte des Nations Unies. Il ne serait pas productif d’essayer de prévenir les conflits en prenant des mesures contraires au droit.
La coordination entre l’ONU et les différentes structures internationales est essentielle en ce domaine, a-t-il poursuvi. Il a estimé que des rapports régionaux et sous régionaux doivent être demandés par le Conseil de sécurité. Il a appuyé la proposition de consacrer une session de fond de l’ECOSOC au rôle du développement durable dans la prévention des conflits. La dimension économique croissante de la diplomatie préventive est liée à une plus grande coopération entre l’ONU et les institutions de Bretton Woods, a-t-il ajouté. Il est indispensable d’adopter une approche régionale dans la prévention des conflits, particulièrement dans une région explosive. Nous comptons sur le soutien de l’ONU pour la mise en oeuvre de l’initiative russe, a-t-il conclu. La Fédération de Russie, consciente de sa responsabilité, continuera à faire des efforts dans ce domaine.
M. DURGA P. BHATTARAI (Népal) a souligné la responsabilité de l’Organisation des Nations Unies dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il a ajouté que l’Organisation doit s’assurer que les mesures appropriées soient prises pour prévenir des conflits armés potentiels mais doit le faire dans le plein respect des principes d’indépendance politique, de souveraineté et d’intégrité territoriale de tous les Etats. La nature extrêmement complexe des conflits et l’ampleur du travail requis pour les prévenir exigent une analyse complète et une approche holistique. A moins que tous les acteurs à tous les niveaux et dans toutes les sphères du pouvoir ne soient inclus dans les efforts de prévention, ces efforts échoueront. C’est pourquoi il ne sera pas possible au Conseil de sécurité de mener seul toute l’action de prévention des conflits pour ce qui est des mesures à long terme. Le système des Nations Unies dans son ensemble et particulièrement ses organes principaux et ses partenaires internationaux doivent agir de concert. L’Organisation doit agir comme un ensemble uni. M. Bhattarai a déclaré que les liens reconnus entre la pauvreté et les conflits démontrent que la meilleure manière d’aider les gouvernements nationaux à renforcer leur capacité préventive nationale est de leur permettre d’éradiquer la pauvreté et d’améliorer leur développement socio-économique. En outre, le recours aux déploiements préventifs dans les zones où des conflits risquent d’éclater devrait rester un important outil pour les Nations Unies dans la prévention des conflits armés.
M. MILOS ALCALAY (Venezuela) a estimé que la prévention des conflits revêt une importance croissante. L’apparition de nouveaux conflits et la résurgence d’autres, que l’on croyait endigués sont souvent favorisés par l’inégalité croissante à l’intérieur des Etats et entre Etats. Ces conflits constituent de véritables menaces pour la paix. En cette période de changement, il faut concevoir la paix au sens large du terme, pour éliminer les causes principales des conflits et créer ainsi un contexte de solidarité. Cet engagement dépend de tous, des organisations internationales comme des organisations non gouvernementales et du secteur privé. Il est dès lors important de développer une culture de prévention, a-t-il poursuvi, qui doit reposer sur l’application efficace des normes du droit international. Il a fait valoir que la lutte contre la pauvreté est un objectif essentiel. Le Venezuela exprime son appui au processus visant à assurer plus de dignité a l’être humain, en l’intégrant dans le développement et en lui reconnaissant des droits. Une aide financière aux pays qui en ont besoin est un élément clé pour éviter l’explosion de conflits, a noté le représentant. Le Venezuela participe aux efforts collectifs entrepris pour renforcer le dialogue entre les pays.
M. KAMALESH SHARMA (Inde) a déclaré que certaines des recommandations contenues dans le rapport du Secrétaire général sur la prévention des conflits armés ont déjà fait l’objet d’un accord et ont été mises en oeuvre, notamment celle concernant les déploiements préventifs, examinée en détail dans l’Agenda pour la paix et dans la résolution 47/120B du 20 septembre 1993. Il aurait été préférable que le rapport examine les cas où il a été demandé un déploiement préventif ainsi que les résultats obtenus par un tel déploiement. Dans sa recommandation 15, le Secrétaire général encourage le Conseil de sécurité à inclure une composante sur le désarmement, la démobilisation et la réinsertion dans le mandat des opérations de maintien de la paix. Le Conseil a déjà pris cette mesure, aux termes d’une déclaration présidentielle (S/PRST/2000/10). Il faudrait maintenant déterminer des mesures à long terme qui, appliquées sérieusement et pleinement, contribueront progressivement à réduire les possibilités d’éclatement de conflits, a expliqué M. Sharma. Il a suggéré un cadre de mesures à long terme s’appuyant sur le renforcement et la généralisation de la gouvernance démocratique, sur la réduction de la pauvreté et sur le respect des principes régissant les relations interétatiques, la réalisation sérieuse du désarmement et l’engagement de négociations pacifiques.
M. NASSER AL-KIDWA (Observateur de la Palestine) a déclaré que la prévention des conflits armés exige un environnement international basé sur le respect des principes de la Charte, la fin de la culture de l’impunité et la réalisation des principes de la justice et de la paix. Le représentant a regretté que le rapport du Secrétaire général ne comporte "aucune mention sérieuse" de la question des territoires palestiniens occupés. Un passage du rapport du Secrétaire général fait simplement mention de « territoires occupés », comme si ceux-ci appartenaient à la Lune. Le rectificatif du Secrétariat à ce passage du rapport n'a fait qu’aggraver les choses. Dans la rédaction des rapports du Secrétariat des Nations Unies, il semble qu’il existe une tendance à éviter de traiter de la question de l’occupation étrangère quand bien même elle représente un conflit armé. La situation en Palestine et au Moyen-Orient devrait figurer en bonne place dans les documents du Secrétariat des Nations Unies du fait de la menace qu’elle représente pour la paix et la sécurité internationales. Israël est le seul Etat Membre des Nations Unies qui soit officiellement considéré par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale comme une « puissance occupante ». C’est également le seul Etat Membre qui ait violé de façon constante les conventions de Genève de 1949, quelque 25 résolutions du Conseil concernant les territoires palestiniens occupés, ainsi que plusieurs autres normes du droit international. Les Nations Unies doivent mettre un terme à de telles pratiques et à de tels accommodements modalités et politiques qui s'apparentent à une culture de l’impunité.
La position du Conseil de sécurité sur les attaques perpétrées contre le peuple palestinien en dit long sur les performances de cet organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Ce qui, en toute évidence, équivaut à la politique des deux poids et deux mesures, et sape la capacité du Conseil à prévenir les conflits armés. M. Al-Kidwa a émis l'espoir qu'une telle situation changera, faute de quoi sa délégation se tournera vers l’Assemblée générale afin qu’elle adopte une approche alternative et préventive dans ce qui pourrait devenir une guerre régionale.
M. PIERRE HELG (Suisse) a souligné l’importance d’une collaboration étroite entre les Nations Unies et les organisations régionales ou sous-régionales comme l’OSCE ou le Conseil de l’Europe, de même qu’avec la société civile. La responsabilité de la prévention des conflits incombe en premier lieu aux Etats eux-mêmes et la Suisse continuera d’assumer sa responsabilité à cet égard, a-t-il déclaré. A cet effet, il a fait valoir que son pays a été un des premiers Etats à soutenir et à alimenter le “Trust Fund for Preventive Action” qui permet au Secrétaire général d’agir dans l’urgence et la liberté requises par les circonstances. Ensuite, la prévention des conflits est systématiquement prise en compte dans les programmes suisses d’aide humanitaire et de coopération au développement. L’observateur a indiqué que la Suisse est très engagée dans la lutte contre la prolifération des armes légères et contre les mines antipersonnel. Elle mène également une politique pour le respect et la promotion des droits de l’homme, ainsi que pour la promotion de l’état de droit et de la démocratie. Enfin, M. Helg a indiqué que son gouvernement s’engage en faveur d’une meilleure compréhension du droit international humanitaire et de sa mise en oeuvre, en se concentrant notamment sur les travaux relatifs à la Cour pénale internationale qui revêt un caractère préventif marqué. Pour conclure, il s’est réjoui de cette occasion qui est donnée de renforcer la volonté politique de prévention des conflits.
Droits de réponse
Le représentant du Liban, répondant aux accusations lancées par le délégué israélien, a noté que ce délégué oublie les conditions imposées depuis 22 ans par le Gouvernement d’Israël et oublie que la seule raison pour laquelle Israël a cessé d’imposer sa volonté au Liban est que le Liban lui-même a su réagir pour faire cesser cet état de faits. Pour que la prévention des conflits armés soit efficace, il faut identifier les causes fondamentales d’un conflit, or nul ne peut nier que les causes fondamentales du conflit avec Israël remontent à l’occupation du territoire arabe par Israël, et au refus de son gouvernement d’appliquer les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité demandant à Israël de restituer ces territoires. Le représentant a déclaré que les gouvernements et populations de la région demandent à Israël de se retirer des territoires occupés, ce qui est indispensable si l’on veut réaliser les dispositions du droit international et faire régner la paix et la sécurité dans la région. Israël a déployé des mines terrestres sur le territoire libanais et refuse de remettre aux Nations Unies les cartes qui permettraient de savoir en quels endroits elles se trouvent. Une centaine de Libanais ont été tués ou blessés après le retrait d’Israël du Liban. Dans le Sud du Liban, ces mines terrestres vont continuer de constituer un grave danger pour la FINUL. En outre, Israël commet des violations des frontières et de l’intégrité territoriale libanaises. Est-ce conforme à la culture de la paix que le représentant d’Israël dit rechercher ? Le représentant a estimé que les propos tenus par le représentant israélien constituent une ingérence dans affaires internes du Liban et de la Syrie et que le représentant israélien n’a aucun droit d’y intervenir.
Le représentant de la République arabe syrienne a déclaré que les termes utilisés par le représentant d’Israël au sujet de la République arabe syrienne et de la situation au Liban sont « ridicules ». Cette intervention constitue une nouvelle tentative de la part d’Israël de déformer les faits et d’induire en erreur la communauté internationale, ainsi que de justifier une politique d’agression et de meurtre. Il semblerait que, pour Israël, la destruction de quartiers entiers fait partie de la prévention des conflits armés. La Syrie continue à appuyer ses frères libanais pour mettre un terme à la guerre civile qu’Israël a contribué fortement à attiser. Les dirigeants syriens et libanais continuent de se consulter pour coordonner leurs décisions. Le Hezbollah est un parti libanais qui joue un rôle légitime au sein du territoire libanais et ne reçoit aucune instruction de quelque partie que ce soit, y compris la Syrie.
Poursuivant, le représentant a déclaré que la Syrie est le pays qui a ouvert la porte au processus de paix alors que le Président Sharon déclare chaque jour ne pas vouloir continuer le processus de paix et dit vouloir installer de nouvelles colonies israéliennes de peuplement. Qu’en est-il du respect des résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité ? De nombreux pays sont prêts à appuyer la candidature de la Syrie au Conseil de sécurité car ils connaissent le rôle qu’elle joue et peut jouer. Le représentant a espéré que les efforts d’Israël en vue de faire changer d’avis les Etats du Groupe asiatique se révèleraient vains. Il a souligné que la Syrie respecte les principes de la Charte et respectera ses engagements lorsqu’elle sera membre du Conseil de sécurité.
Le représentant d’Israël, répondant à la déclaration selon laquelle l’occupation israélienne est la cause profonde et la source du conflit israélo-arabe, a déclaré que cette occupation n’est pas tombée comme une foudre du ciel mais est le résultat d’une tentative d’éradication de l’Etat d’Israël menée en 1968 par la Syrie, entre autres. L’occupation du Liban par la Syrie la place en porte-à-faux dans sa défense du respect de l’intégrité territoriale. Que la Syrie commence par évacuer le Liban, pour être en meilleure adéquation avec les principes du droit international qu’elle évoque indûment. Comment, dans cette situation, le représentant syrien peut-il se permettre de berner la communauté internationale en jurant par le respect du droit international? Le représentant s’est dit extrêmement attentif aux voix libanaises qui s’élèvent sans inhibition contre l’occupation du Liban par la Syrie. Recouvrer son entière souveraineté sera la condition nécessaire à l’épanouissement du Liban, au déploiement de ses forces à la frontière israélo-libanaise et pour soumettre le Hezbollah à la loi libanaise. Israël n’aurait rien à voir dans situation syro-libanaise si elle n’était gravissime pour l’ensemble de la région. Israël n’est pas le seul Etat Membre à occuper des territoires. La Syrie occupe le Liban. Israël a démontré sa volonté de compromis territorial avec l’Egypte et avec les Jordaniens. En janvier 2000, à Shepherd’s Town Israël a offert à la Syrie un règlement respectant l’intégrité territoriale. La Syrie a refusé cette offre. Le délégué a jugé réductrice la conception de la paix avec Israël qu’a professé le Ministre des affaires étrangères syrien. C’est une bonne position pour la Syrie de disposer de l’aval du Groupe asiatique mais elle est crucialement insuffisante car l’Article XXIII de la Charte préconise d’examiner la contribution de tout membre du Conseil de sécurité à la stabilité et à la paix internationale.
Reprenant la parole, le représentant du Liban a considéré que les remarques faites par le représentant d’Israël sont « ridicules». Le représentant d’Israël jette le doute, selon lui, sur l’indépendance du Liban, en oubliant l’alliance qui existe entre le Liban et la Syrie pour défier l’occupation étrangère. Nous ne pouvons pas oublier les massacres israéliens perpétrés contre la population civile du Liban, a-t-il déclaré, et contre le poste des Nations Unies qui a été directement attaqué. Il a considéré que les autorités israéliennes sont convaincues elles-mêmes du terrorisme qu’Israël pratique en violation des accords signés. Le gouvernement d’Israël n’a pas honte de propager des idées erronées, a-t-il ajouté.
Le représentant de la République arabe syrienne est à nouveau intervenu, pour répondre aux « mensonges » que le représentant d’Israël essaye de propager. Il a relevé que le représentant du Liban a justement rappelé le rôle de frère que joue la Syrie au Liban. Il a considéré qu’Israël mène une politique d’agression et que la présence de la Syrie au Liban est une aide fraternelle, certes un fardeau pour les ressources syriennes, mais que la Syrie assumera tant que le Liban aura à affronter toutes ces difficultés. Depuis 1967, Israël continue d’occuper des territoires et ne souhaite pas la paix, à son avis, car il continue à occuper ces terres.
Le représentant d’Israël a répondu aux deux interventions précédentes en expliquant pourquoi la Syrie est le siège d’organisations terroristes et de trafiquants de drogue. Les droits de l’homme n’y sont qu’une « plaisanterie », a-t-il ajouté. Israël a proposé une concession aux exigences syriennes, a-t-il expliqué, que la Syrie a refusé en demandant un échange de territoires. C’est pour cette raison que les négociations n’ont pas abouti, a-t-il affirmé.
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