TRANSCRIPTION DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE TENUE PAR LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL, M. KOFI ANNAN, AU SIÈGE DES NATIONS UNIES, LE 27 JUIN 2001
Communiqué de presse SG/SM/7865 |
TRANSCRIPTION DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE TENUE PAR LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL,
M. KOFI ANNAN, AU SIÈGE DES NATIONS UNIES, LE 27 JUIN 2001
M. Kofi Annan (Secrétaire général) (interprétation de l’anglais) : Je voudrais commencer par m’excuser pour ce petit retard de 10 minutes. Je voudrais dire que c’est un honneur pour moi d’avoir été saisi du vote qui vient d’avoir lieu au Conseil de sécurité. Je voudrais remercier le Conseil de sécurité pour l’appui dont il a fait preuve à mon égard. Mais vous comprendrez que je ne veux pas m’attarder sur ce point dans le cadre de cette conférence de presse car c’est une question qui relève du Conseil de sécurité. Le Conseil de sécurité fait une recommandation mais c’est à l’Assemblée générale de trancher en dernier ressort. Et tant que l’Assemblée générale ne se sera pas prononcée, je pense qu’il serait préférable pour moi de ne pas faire de commentaires supplémentaires et j’espère que vous me comprendrez.
De toutes les façons, nous ne sommes pas ici pour discuter de cela. Nous sommes ici car aujourd’hui c’est la dernière journée de cette session extraordinaire sur le VIH/sida. Et nous devons tous reconnaître qu’il s’agit là d’un événement historique. Événement historique pour deux raisons : premièrement, le niveau de participation indique que le monde est en train de se réveiller, de se rendre compte de la gravité de la crise du VIH/sida, et deuxièmement, la déclaration qui sera adoptée cet après-midi énonce une stratégie très claire permettant de lutter contre le VIH/sida. Il est clair que tous les dirigeants politiques dans les pays développés et dans les pays en développement se sont rendus compte que ce défi était un défi particulièrement important.
Ils ont participé à plusieurs réunions, et j’ai eu d’ailleurs la possibilité de parler avec les uns après les autres. Et je suis sûr que dans les pays comme les pays asiatiques et les pays d’Europe de l’Est, on a été sensibilisé à cet événement historique, car au cours des prochaines années, l’épidémie risque de sévir. Mais j’ai été particulièrement impressionné par la participation des ONG. Certaines d’entre elles étaient membres de certaines délégations. Elles ont participé aux tables rondes, aux réunions parallèles, et également aux travaux de la plénière. Et on peut se rendre compte de la présence de ces ONG, on se rend compte de la présence de ces militants, et je pense que ces derniers ont permis de transformer l’atmosphère qui a régné dans ce bâtiment, ce que font les militants d’ailleurs, dans le cadre de tous les événements qui ont lieu au sein des Nations Unies. Et je suis sûr que ce type de partenariat est un élément essentiel si l’on souhaite connaître des succès. Alors bien sûr, qui dit activisme dit problèmes, dit controverse. Mais toute nouvelle idée engendre la polémique. Et au cours des deux dernières journées, au cours de toutes ces journées d’ailleurs, il y a eu des divergences de vues assez complexes. Mais je pense qu’il est important que ces divergences soient énoncées, il est important de les examiner, il est important de ne pas les balayer d’un revers de la main. En fait, ce qui est important, c’est qu’après la journée d’aujourd’hui, nous disposerons d’un document qui énoncera un plan de bataille dans cette guerre contre le VIH/sida. Et ce plan de bataille énoncera très clairement des objectifs et des calendriers. Il s’agit donc d’un schéma, d’un projet, qui permettra à toute l’humanité de travailler et qui permettra de répondre à cette crise mondiale.
Il y a également une autre idée très clairement énoncée dans cette déclaration. Et cette idée est la suivante. Les femmes doivent jouer le rôle de chefs de file dans cette bataille. Et nous gagnerons cette bataille si les femmes sont éduquées et si les femmes voient leurs droits protégés. Il faut que les femmes puissent avoir leur mot à dire dans le cadre de cette responsabilité collective de la société. Il a été dit que le pouvoir des adolescentes, des jeunes filles, est le vaccin pour l’Afrique, le vaccin pour le VIH/sida. Et cela est vrai pour le monde entier.
Il y a également un autre élément qui est important. Nous nous sommes tous rendus compte qu’il était nécessaire de disposer de ressources supplémentaires, et plusieurs annonces de contributions ont été faites lors de la session. Et j’espère qu’au cours du sommet qui se tiendra le mois prochain, j’espère que d’autres annonces de contributions seront faites.
Nous avons également pu bénéficier de l’appui à l’égard de ma proposition, de l’appui à la création d’un Fonds mondial pour la santé et la lutte contre le sida. Et cet appui est particulièrement. J’ai pu discuter de cette proposition avec plusieurs partenaires. Je travaille avec tous les acteurs, avec le G8, avec les autres donateurs, avec les pays développés, les fondations, les ONG, le secteur privé, afin de réunir un groupe qui finalisera tous les détails concernant la création de ce fonds. Et ce groupe de transition finalisera ses travaux avant que le Fonds ne devienne opérationnel, avant la fin de l’année.
Entre-temps, il y a eu un grand nombre d’offres de contributions immédiates qui ont été faites de la part de donateurs privés et publics. L’ONUSIDA est déjà en train de recevoir des chèques et j’ai ici un chèque que malencontreusement je viens de laisser tomber, mais c’est un chèque qui est encore valable, d’un montant de 1000 dollars, qui a été envoyé par un citoyen privé. Et je dois dire qu’il s’agit d’un premier versement, d’un effort que nous devrons tous déployer. J’espère que vous êtes tous d’accord avec moi. J’ai demandé à la Fondation des Nations Unies de mettre en place un compte spécial afin de pouvoir recevoir ces contributions, contributions qui ne seront pas imposables pour les citoyens américains et pour tous les contribuables. Et dès que le Fonds deviendra opérationnel, les fonds pourront lui être affectés. Et je dois dire que je suis beaucoup plus optimiste aujourd’hui que je ne l’étais il y a trois jours. Je pense qu’il nous est possible de mettre fin à cette épidémie mortelle.
Le débat est ouvert.
Question (interprétation de l’anglais) : Nous souhaiterions poser une question. Nous souhaiterions vous féliciter et nous espérons pouvoir vous rencontrer au cours des cinq prochaines années lors des autres conférences de presse.
Le Conseil de sécurité vous a félicité pour votre action. Je pense que vous avez une position beaucoup plus forte que jamais. Alors quel sera votre programme au cours des jours à venir, au cours des mois à venir? Y aura-t-il une nouvelle initiative concernant le Proche-Orient?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je pense que nous avons tous beaucoup de choses à faire au cours des mois à venir. Je vais continuer à œuvrer afin que ce Fonds soit créé et bien sûr, je travaillerai avec tous les dirigeants du monde afin de mettre fin à la tragédie qui sévit au Proche-Orient. J’ai des contacts journaliers avec tous les dirigeants de la région, avec tous les dirigeants du monde, et ces efforts continueront. Et bien sûr, lors de la dernière Assemblée générale, les États Membres nous ont donné un programme très clair. Il s’agit de la Déclaration du Millénaire. Nous devons tous redoubler d’efforts afin que cette Déclaration soit mise en œuvre. Donc, j’ai du travail sur la planche.
Question (interprétation de l’anglais) : Il y a slogan dont on parle souvent, un mot, il s’agit de la durabilité. Donc il y a eu un nouvel élan pour ce qui est du sida, mais comment cet élan pourrait-il être durable afin que la manifestation d’aujourd’hui connaisse une heureuse issue, afin que l’élan d’aujourd’hui soit le début d’une grande activité? En fait la question qui se pose est la suivante : Comment allons-nous faire en sorte que cet élan soit durable? Car nous sommes tous impliqués. Et j’ai parlé de démobilisation sociale totale. Nous avons besoin des gouvernements, du secteur privé, des ONG, des individus. Tous doivent être impliqués dans cette bataille. Et ce qui est unique dans le cas de cette session extraordinaire, c’est qu’elle ne s’est pas limitée aux fonctionnaires des gouvernements mais a inclus des militants du sida, des ONG, le secteur privé, et lorsque tout le monde va rentrer chez soi, je pense qu’ils garderont ce même élan et continueront de travailler avec beaucoup plus d’optimisme. Et d’ailleurs, moi-même j’ai pu contacter par exemple, les entreprises pharmaceutiques. J’ai des contacts réguliers avec elles, je travaille avec des sociétés privées et nous allons continuer à travailler avec les gouvernements afin d’élaborer des plans permettant de lutter contre cette épidémie. Et la seule façon de garder cet élan et de faire en sorte qu’il soit durable, c’est que tout le monde participe aux niveaux local et national. Nous devons tous travailler, car si nous ne le faisons pas, toutes nos tentatives seront vouées à l’échec. Malheureusement, nous ne pouvons nous permettre un tel échec.
Question (interprétation de l’anglais) : Le Conseil de sécurité a décidé aujourd’hui de discuter de votre nomination. Je voudrais faire une observation. Le représentant chinois a dit que cette nomination engendre des attentes pour les Nations Unies. Il a également dit qu’il espère qu’au cours du deuxième mandat, vous ferez un meilleur travail. Etes-vous d’accord?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Vous savez, tout travail est toujours perfectible et je voudrais également dire que nous avons un véritable défi à relever, mais je pense que ce n’est pas le Secrétaire général seul qui doit relever ce défi. Si j’ai pu obtenir des résultats, le peu que j’ai pu obtenir a été possible grâce à la coopération des États Membres et grâce aux fonctionnaires compétents des Nations Unies qui ont travaillé, qui ont appuyé mes activités. Et je pense que les défis qui nous attendent galvaniseront l’énergie et les ressources des États Membres également. Donc je peux vous assurer et assurer aux États Membres que je redoublerai d’efforts, que je continuerai à travailler aussi durement que je l’ai fait au cours des cinq dernières années, et j’espère qu’ils se joindront à moi dans cette tâche afin que nous puissions ensemble relever les défis qui nous attendent et ensemble, nous pourrons y arriver.
Question (interprétation de l’anglais) : Vous venez de dire que les femmes doivent jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre le sida. Toutefois, nous savons que dans un grand nombre de pays d’Afrique et dans la plupart des régions touchées, les femmes ont très peu de pouvoir et sont considérées comme étant inférieures. Que peut-on donc faire dès maintenant pour modifier ce type de comportement et renforcer la capacité d’agir des femmes?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Dans mes contacts avec les dirigeants, notamment dans le cadre du sommet d’Abuja, nous les avons encouragés à faire participer les groupes de femmes et à les impliquer dans l’élaboration de plans nationaux de lutte contre le sida. Nous leur avons également demandé de faire en sorte que les femmes disposent de ressources et disposent d’appui afin de pouvoir assumer leur rôle. Dans certains de ces pays, les femmes jouent un rôle très important. J’ai également été encouragé de voir que les délégations présentes lors de cette conférence se composaient en grande partie de femmes.
Mais je pense que la responsabilisation des femmes commence avec l’éducation des adolescentes et je ne parle pas d’éducation dans le sens traditionnel. Il s’agit d’éducation qui doit commencer dans les communautés, dans les églises, dans les écoles. Dans certaines sociétés ce type d’éducation a déjà débuté et au niveau scientifique on a beaucoup fait également. Je suis encouragé de voir le travail qui a été fait sur les microbicides pour donner aux femmes la possibilité et les moyens de se protéger.
J’encourage les gouvernements à consulter les femmes afin de les faire participer à la quête d’une solution et à les intégrer à la lutte contre le sida.
Question (interprétation de l’anglais) : Vous avez parlé du caractère unique de la présente session du fait qu’elle est plus ouverte aux militants. Il est particulièrement important qu’une militante controversée à laquelle 11 membres de l’Assemblée s’étaient opposés ait été autorisée à intervenir. Cela nous montre-t-il que la politique des Nations Unies face aux militants a changé?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je l’espère. J’ai été très clair dès le début et j’ai dit qu’il faut ouvrir cette organisation, il faut rapprocher les Nations Unies des gens. Il faut travailler en partenariat avec le secteur privé, les fondations, la société civile. Je pense avoir montré que je suis déterminé à le faire et je pense que les États Membres commencent à s’ouvrir. Ils acceptent cela et travaillent en étroite collaboration avec les organisations non gouvernementales. Je pense que l’on peut considérer que nous allons dans la bonne direction. Ce sera ainsi que les choses se présenteront.
Question (interprétation de l’anglais) : Vous avez reçu un certain nombre de rapports assez critiques au sujet de la gestion du programme des Nations Unies pour le contrôle des drogues. Est-ce que vous continuez à faire confiance à la direction de Pino Arlacchi et avez-vous l’intention de le recommander pour un second mandat en février prochain?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Il est vrai que j’ai reçu ces rapports. Nous les étudions et je suis en train de passer par les procédures et les examens requis avant de me faire une opinion.
Question (interprétation de l’anglais) : Puis-je vous demander dans quelle mesure il y a véritablement un consensus sur la question de l’autonomisation des femmes. Est-ce que vous pouvez confirmer qu’il y a quelques minutes encore, les États islamiques continuaient à avoir des inquiétudes en ce qui concerne la question de l’autonomisation des femmes et le texte de la déclaration?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je crois que mes commentaires précédents faisaient allusion à des mesures prises par les gouvernements sur le plan national en considérant la contribution très importante que les femmes apportent et peuvent apporter. Pour ce qui est du texte, je crois comprendre que nous sommes très près d’un accord. Je n’ai pas les détails de l’incident auquel vous faites allusion. J’espère cependant que tous les gouvernements se rendent compte que toute société qui refuse de faire appel aux talents de 50% de sa population court le risque de perdre et les femmes éduquées, formées et autonomes apportent beaucoup à la société. En fait, l’une de mes collaboratrices les plus efficaces est le Dr. Obaid d’Arabie saoudite qui est très active et parle de façon très éloquente sur ces questions.
Question (interprétation de l’anglais) : Pouvez-vous nous donner quelques précisions sur le groupe que vous allez convoquer pour mettre au point les détails de l’administration du fonds et quelle est votre vision personnelle sur la façon dont il faudrait constituer ce fonds? Quel groupe devrait être associé, qui devrait en être le banquier, etc?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : J’aimerais répondre à votre question en vous disant comment nous envisageons la structure du fonds. Nous concevons le fonds comme un partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Le conseil aura des membres du gouvernement, du secteur privé, des organisations non gouvernementales, de la communauté des donateurs et des pays bénéficiaires ainsi que des représentants des Nations Unies. Nous espérons que ce conseil pourra être assez restreint. Il y aura un groupe scientifique qui nous donnera des conseils sur les approches à adopter de façon à faire face aux questions de façon aussi efficace que possible et à utiliser les ressources ainsi mobilisées de la façon la plus efficace. Il y aura un petit Secrétariat qui traitera les opérations au quotidien. Nous comptons qu’il n’ait pas beaucoup de personnel pour qu’il puisse réagir rapidement et ne pas être bureaucratique. Sur le plan national, les gouvernements pourront présenter des demandes au fonds et selon leurs besoins et la qualité des demandes, le conseil décidera s’il convient ou non de débourser les fonds et décidera de la façon d’agir.
Ainsi, ce conseil sera assez ouvert. D’ici une ou deux semaines j’espère pouvoir travailler avec toutes les parties prenantes de façon à avoir une équipe transitoire pour élaborer les détails du fonds et décider du mandat de ce conseil de façon à pouvoir le constituer d’ici à la fin de l’année pour qu’il commence à fonctionner.
Question (interprétation de l’anglais) : Toujours sur la question du fonds, comment pouvez-vous veiller à ce que le fonds ne devienne pas victime des divisions auxquelles vous avez fait allusion vous-même et que nous avons pu constater entre les nombreux États Membres?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Nous avons eu une très bonne expérience. Récemment nous avons constitué un autre fonds : le Fonds mondial pour les vaccins. Plus d’un milliard de dollars a été ainsi mobilisé. Nous avons un partenariat entre les secteurs privé et public et nous avons constitué une structure qui a fonctionné de façon très efficace. Il n’y a pas de divisions, pas de désaccord et nous espérons pouvoir répéter cette expérience. Le Fonds sera un fonds mondial avec ses propres règles, avec le type de partenariat auquel j’ai fait allusion et étant donné que nous nous concentrons tous sur les objectifs, j’espère que nous n’aurons pas de divergences.
Il est certain qu’il y aura des pressions de la part de tous les gouvernements qui souhaiteront être en mesure d’avoir accès à ces fonds et obtenir de l’aide et un soutien. Mais, franchement, étant donné le consensus et la convergence de vues sur la façon d’aller de l’avant, je pense qu’une fois que le conseil sera établi il y aura peu de divergences. Bien entendu, jusque là il y aura beaucoup de pressions pour savoir qui siégera au conseil et on s’occupera de cela au cours des semaines et mois à venir et cela posera peut-être encore un certain nombre de difficultés jusque là. Mais une fois le conseil constitué, il n’y aura plus de divergences je l’espère.
Question (interprétation de l’anglais) : En Asie du Sud-Est, les deux nouvelles puissances nucléaires sont sur le point d’entamer un dialogue de paix sur une question qui préoccupe les Nations Unies depuis 50 ans et qui est le Cachemire. Avez-vous des commentaires ou un conseil à donner aux dirigeants qui négocieront le 16? Et pensez-vous que pendant votre second mandat on verra une sorte de solution à ce problème?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Comme vous le savez je me suis trouvé dans la région au mois de mars et j’ai eu la possibilité de parler avec les deux dirigeants et avec d’autres dirigeants politiques de la région.
Je suis très heureux de voir que les deux dirigeants se rencontreront. Je leur ai écrit à tous deux pour les encourager à vraiment rechercher une solution.
Je crois que les deux dirigeants se rendront à cette réunion dans ce juste état d’esprit et que leurs attentes sont très positives. Je formule l’espoir qu’ils demeureront attachés à ce processus jusqu’à ce qu’ils parviennent à une solution. Je ne pense pas qu’à la première réunion, ils pourront résoudre tous leurs problèmes. Néanmoins il s’agit d’un pas important. Je pense que cela représente un grand espoir pour la région. Je peux dire qu’ils peuvent compter sur tout mon soutien et le soutien des peuples de la région et du monde.
Question (interprétation de l’anglais) : Secrétaire général, j’ai une question. Quels types d’efforts les Nations Unies vont-elles déployer pour atteindre les communautés rurales, car beaucoup de travailleurs migrants viennent dans les villes et les zones urbaines, deviennent porteurs du virus et le transmettent à leurs partenaires sexuels ou à leurs époux. Ainsi l’infection se propage sur une grande échelle.
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Dans notre travail de développement avec les gouvernements, nous avons essayé de les encourager à consacrer une plus grande attention au développement rural, car c’est souvent les défaillances du développement rural qui poussent des millions de personnes dans les zones urbaines et les bidonvilles où ils sont exposés aux risques auxquels vous avez fait allusion.
Avec notre organisation, Habitat, et avec le travail que nous accomplissons avec les gouvernements locaux et les maires des villes dans le monde, nous encourageons un développement équilibré entre les grandes villes et les zones rurales. Une fois qu’il y a des possibilités d’emploi dans les zones rurales, la population y reste. Sans emplois, les filles sont exploitées et subissent les conséquences que vous avez mentionnées. Les gouvernements avec lesquels je me suis entretenus cette semaine et que j’ai visité durant mes déplacements sont très conscients de ces problèmes. J’espère que, dans leur plan de développement national, ils prendront des mesures pour y faire face. Pour ceux d’entre vous qui ne connaissez pas Peter Piot, c’est le chef du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA) et l’un de nos acteurs principaux dans ce domaine.
Question (interprétation de l’anglais) : Comme vous le savez, plusieurs pays ont demandé que nous respections leurs sensibilités culturelles en citant les groupes vulnérables. En tant que dirigeant international qui affirme que l’intervention internationale ne reconnaît pas forcément les frontières nationales, pensez-vous que nous devons respecter ces sensibilités culturelles lorsqu’elles correspondent à une oppression des droits individuels de certains groupes tels que les homosexuels et les femmes?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Dans ma déclaration à l’Assemblée générale, j’ai dit clairement que nous avons à faire face à une tragédie humaine aux propositions inimaginables et que nous devons traiter la maladie et ceux qui en sont frappés de façon humaine en acceptant qu’indépendamment de leurs convictions religieuses et de leurs orientations sexuelles, ce sont des êtres humains avec des droits humains qui doivent être respectés et nous devrions réellement traiter l’individu selon ses propres mérites et faire tout notre possible pour les aider à prévenir la maladie et à les soigner une fois qu’ils sont infectés. Nous devons également nous assurer que les grandes sociétés commerciales ne les abandonnent pas lorsqu’ils sont porteurs du virus mais prennent véritablement des mesures pour les soutenir, les aider, leur donner des soins et leur permettre de garder leurs emplois plutôt que de les isoler et de les frapper d’ostracisme.
Question (interprétation de l’anglais) : Dans le projet de document, les références ayant trait aux groupes à haut risque, tels que les homosexuels, les professionnels du sexe et les toxicomanes ont été omises. Est-ce une victoire contre les préjugés? Êtes-vous persuadé que les représentants des pays auxquels le libellé du document dérangeait retourneront chez eux et seront capables de tendre la main à ces groupes?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je pense que la victoire ne sera pas remportée en un jour. Je pense que chacun a tiré ici des enseignements. Je suis certain que les discussions et les débats qui ont eu lieu ont été entendus et écoutés. Cela pourra prendre plus longtemps dans certains pays de les amener à reconnaître les réalités auxquelles nous faisons face de les faire respecter les droits de toute personne et les choix faits par autrui sans ostracisme ni stigmatisation. Nous devons confronter directement la question. Je pense que le débat et la discussion, qui ont eu lieu ici et qui ont été rapportés dans la presse et dans les médias, sont suivis dans certains de ces pays et que le débat a été lancé là-bas. Il ne va pas être étouffé. C’est en soi une évolution très positive.
Peter Piot (UNAIDS) (interprétation de l’anglais) : Je voudrais dire qu’il est incorrect de dire que la référence faite à ceux qui sont les plus à risque et les plus vulnérables et qui devraient être inclus dans la lutte contre le sida a disparu. En fait, je suis surpris par le fait que l’on s’étonne de ce qu’il s’agit d’un sujet de débat. C’est un débat qui a fait rage dans chaque pays où nous avons travaillé, y compris dans mon propre pays, en Europe, à savoir la Belgique. Il en est de même pour d’autres pays en Europe. Mais je dois avouer que pour nous, cela a été une très bonne chose que ces débats aient eu lieu, car nous avons pu nous attaquer au fond de la question, comme les questions de sexospécificité, la vulnérabilité des femmes, le rôle des femmes, ainsi que l’a dit le Secrétaire général.
Question (interprétation de l’anglais) : Pour revenir à la question sur le fonds, pouvez-vous me dire, dans le cadre des 7 à 10 milliards de dollars nécessaires pour mener une lutte adéquate contre le VIH/sida, quelle part devrait être versée au fonds? Également, quels types d’actions pensez-vous que le fonds devrait faire mais qui ne peut être réalisé maintenant par les programmes bilatéraux et multilatéraux existants? Pourquoi ce fonds est-il nécessaire?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Tout d’abord, j’espère que le fonds, une fois qu’il sera créé, sera axé sur le sida. Néanmoins, il y a des possibilités pour qu’il soit utilisé pour la tuberculose ou pour le paludisme. J’espère que la plupart des donateurs nous laissera toute latitude mais je crains que certains demanderont expressément que leurs contributions soient versés au titre du sida. D’autres voudront que leurs contributions soient pour le paludisme et certains iront même jusqu’à préciser que leurs contributions devraient être employées pour lutter contre la transmission de la mère à l’enfant. Vous soulevez une question au sujet de ce que le fonds peut faire qui n’est pas encore fait aujourd’hui. Tout d’abord, nous ne disposons pas de fonds. Nous nous efforçons d’accroître le niveau des contributions pour combattre l’épidémie sans les ressources et les moyens nécessaires. Il y a beaucoup de choses que nous ne sommes pas en mesure d’accomplir. J’espère que le fonds pourra aider les Gouvernements à élever le niveau des soins de santé et des ressources qu’ils peuvent consacrer à la maladie.
Vous avez demandé quelle part du financement sera, à mon avis, destinée au fonds ou passera par d’autres sources existantes. Je pense que c’est une question qui est examinée par les Gouvernements. Certains m’ont approché à ce sujet. Je voudrais voir s’accroître le niveau de financement pour le sida, avec des dépenses supplémentaires de 7 à 10 milliards de dollars. L’Université de Harvard a estimé que le sida coûte déjà au monde 10 milliards de dollars. Aussi, 10 milliards de dollars par an pour lutter contre la maladie ne semblent pas trop et seraient en fait tout à fait raisonnables. Je pense que ceux qui décideront d’augmenter leurs contributions bilatérales et de verser des ressources supplémentaires répondront aux objectifs que nous nous sommes fixés pour le fonds. Mais nous souhaitons voir quintupler les dépenses consacrées à la maladie. En effet, j’aimerais qu’une grande partie soit versée au fonds car cela serait plus facile pour les pays bénéficiaires qui n’auront pas à s’adresser à différents agences et gouvernements pour obtenir de l’aide. Nous serions en mesure d’évaluer d’une façon plus cohérente et organisée.
Mais si un gouvernement venait à me dire qu’il a mis en œuvre un bon programme avec un pays, Haïti par exemple, et qu’il souhaite augmenter son financement de 100 ou 200 millions de dollars et poursuivre ce programme, je ne dirais pas non. Je serais très heureux. Ce serait une contribution supplémentaire et normale.
Question (interprétation de l’anglais) : Le peuple iraquien apprécie le rôle positif du Secrétaire général pour atténuer les souffrances du peuple iraquien. Y a-t-il une réaction de votre part au sujet de la situation en matière de zones d’exclusion aérienne en Iraq?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : La question de la zone d’exclusion aérienne est une des questions que les autorités iraquiennes ont discuté avec moi chaque fois que nous nous sommes rencontrés. Elle a été imposée par deux membres du Conseil qui la mettent en application. Je sais qu’il y a une question de savoir s’il s’agit d’une sanction, d’une action sanctionnée par le Conseil de sécurité des Nations Unies ou s’il s’agit de quelque chose d’imposé de façon unilatérale par les deux pays. Récemment, l’Iraq avait indiqué que l’action aérienne avait causé la mort de 23 personnes, ce qui est nié par les Etats-Unis et le Royaume-Uni. J’espère qu’en tant que poursuite des discussions au Conseil, on essaiera de trouver une solution à cette impasse et que nous serons en mesure d’aller de l’avant et que, assez rapidement, la question de la zone d’exclusion aérienne pourra être surmontée. Vous connaissez ma position à ce sujet, et j’avais déjà indiqué que lorsqu’on analyse et lit les résolutions du Conseil de sécurité, je ne vois pas les résolutions du Conseil de sécurité comme base?. Il existe un débat. Les deux pays estiment que le Conseil de sécurité leur donne légitimité pour appliquer (inaudible)?.
Question : Monsieur le Secrétaire général, je m’excuse. Vous avez parlé brièvement d’Haïti, l’un des pays les plus frappés par ce fléau du SIDA après l’Afrique. Hier, au cours de son discours, la Première Dame d’Haïti a mentionné que l’aide a été enlevée à ce pays alors que ce pays a été le pays le plus frappé par le SIDA. Une question morale a été introduite par devant la communauté internationale. Est-ce que vous vous sentez (inaudible) par cette question morale où l’aide destinée au pays le plus frappé par le SIDA a été enlevée? Est-ce que vous pouvez nous donner une opinion là-dessus?
Le Secrétaire général : Disons que évidemment je n’étais pas dans la salle, mais j’ai eu des échos. On m’a parlé du discours de la Première Dame d’Haïti. Je crois que ce n’est pas juste qu’on enlève le soutien et l’aide à un pays qui est si frappé, et on doit tous travailler pour aider Haïti. Je vous promets que personnellement, je vais essayer de pousser pour cela.
M. Piot (UNAIDS) (interprétation de l’anglais) : Je viens en effet de rencontrer la délégation haïtienne tout juste avant cette réunion, et on a discuté de ce problème. Notre position est très claire qu’en ce qui concerne la coopération internationale dans le domaine du SIDA, il ne faut pas confondre les problèmes disons politiques et l’aide humanitaire. Et par exemple, on négocie en ce moment des accords très importants aussi bien de façon bilatérale que multilatérale pour stimuler la lutte contre le SIDA en Haïti, parce que je crois que récemment, elle a trouvé vraiment un nouvel élan.
Question (interprétation de l’anglais) : Certains disent que ce ne sont que des mots, ces déclarations, (inaudible); en d’autres termes, quelle est l’importance de ce document au sein des Nations Unies?
Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Il s’agit d’un commentaire que l’on entend pratiquement après chaque grande réunion. J’aimerais quand même essayer de répondre à votre question de la façon suivante. Au cours des dernières dix, quinze années environ, les Nations Unies ont organisé une série de réunions (inaudible) encore plus de travail qui a été très utile pour les gouvernements dans le monde et certaines ont été considérées comme des percées réelles dans le développement, la mobilisation et la sensibilisation sociale. Et je crois que l’on peut parler (inaudible) de la conférence sur les femmes aisément, et son impact sur la responsabilisation des femmes et encourageant les organisations des femmes de se réunir et de travailler en partenariat pour faire avancer leurs intérêts. Je crois que lorsqu’on vient à une réunion de ce type, parfois il est difficile de quantifier les réalisations, mais ce que je peux vous dire, c’est que les gens partiront d’ici avec des idées, des contacts nouveaux, des réseaux. Des contacts pour échanger des idées et tirer profit des meilleures pratiques existant dans le monde. Même plus que le montant de fonds qui pourra être mobilisé par le (inaudible), nous avons pu consacrer la sensibilisation sur cette question d’une façon qui n’a pas été vue précédemment dans le monde. Et j’espère que cette conférence donnera l’énergie à la base, les encouragera à s’impliquer, à demander à leurs parlementaires et leur gouvernement, en leur posant des questions : Que faites-vous sur cette maladie? Aux Nations Unies, vous avez fait telle ou telle promesse. Quand allez-vous mettre en oeuvre ces promesses? Ce sera certainement une sorte de norme, de repère, qui permettra de mesurer leur performance. Chaque citoyen pourra l’utiliser pour mettre au défi son gouvernement, en demandant ce (inaudible). Donc, il existe beaucoup d’aspects positifs d’une réunion telle que celle-ci, qui ne sont peut-être pas évidents aujourd’hui mais qui pourront avoir une répercussion sur les sociétés et les gouvernements qui ont participé à la présente réunion.
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