DH/G/1370

LA CINQUANTE-SEPTIEME SESSION DE LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ELIT M. LEANDRO DESPOUY A SA PRESIDENCE

19/03/2001
Communiqué de presse
DH/G/1370


LA CINQUANTE-SEPTIEME SESSION DE LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ELIT M. LEANDRO DESPOUY A SA PRESIDENCE


Mme Mary Robinson déclare qu'elle ne briguera pas un

deuxième mandat en tant que Haut-Commissaire aux droits de l'homme


Genève, 19 mars -- La Commission des droits de l'homme a ouvert, ce matin, les travaux de sa cinquante-septième session, qui se tient à Genève jusqu'au vendredi 27 avril 2001.  La Commission a élu à sa présidence M. Leandro Despouy, de l'Argentine. 


La Commission a en outre élu sa vice-présidence Mme Najat Al-Hajjaji, de la Jamahiriya arabe libyenne; Mme Anda Filip, de Roumanie; et M. Alvaro de Mendonç a e Moura, du Portugal.  M. Imtiaz Hussain, du Pakistan, a été nommé Rapporteur de la Commission.  Elle a également adopté son ordre du jour et son programme de travail. 


Dans une déclaration liminaire, Mme Mary Robinson a notamment annoncé qu'elle ne se représenterait pas en tant que Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme lorsque son mandat actuel prendra fin, c'est-à-dire après la Conférence mondiale contre le racisme.  Elle a notamment appelé chacun à ne pas perdre de vue les véritables objectifs de la Conférence mondiale contre le racisme et s'est dit convaincue que l'on ne saurait prétendre parvenir à un programme d'action ambitieux à l'issue de cette Conférence sans regarder en face les profondes blessures du passé et sans prendre pleinement la mesure des problèmes actuels.


Mme Robinson a déclaré qu'elle reste impressionnée, aujourd’hui comme lors de son entrée en fonction, par l'important fossé entre les hautes aspirations des principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et la dure réalité à laquelle sont confrontés les gens dans leur vie quotidienne.  Elle a regretté que la prévention des violations de droits de l'homme ne soit pas encore vraiment enracinée dans les esprits ni dans les projets des gouvernements et de la communauté internationale.


Après avoir annoncé qu'elle ne se présenterait pas pour un second mandat, la Haut-Commissaire a souligné qu'elle continuerait à oeuvrer en faveur des droits de l'homme «de la manière que je connais le mieux : en tant que militante».  Elle a estimé être en mesure de faire davantage en dehors des contraintes qu'impose inévitablement une organisation multilatérale.


Le Président sortant de la Commission, M. Shambhu Ram Simkhada, a déclaré que la crédibilité future de la Commission dépendra de la manière dont elle saura répondre aux deux prochains grands défis que sont la pauvreté et la violence.


Pour sa part, M. Leandro Despouy, nouveau Président de la Commission, a rappelé la responsabilité de la Commission d'avancer dans la préparation des questions de fond concernant la Conférence mondiale contre le racisme.  Rappelant par ailleurs que les principales menaces vis-à-vis des droits de l'homme ne viennent pas seulement de la pauvreté mais paradoxalement aussi du progrès scientifique et technologique, M. Despouy a souhaité que la Commission contribue à promouvoir la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme.  Il a également fait part de l'importance que revêt pour la région à laquelle il appartient l'élaboration d'un projet de convention visant à prévenir et combattre la terrible pratique de disparition forcée ou involontaire de personnes.


La Commission poursuivra ses travaux en séance plénière demain matin, à

10 heures, en entendant notamment des déclarations du Vice-Premier ministre de la Croatie ainsi que de ministres des pays suivants: Albanie, Maroc, Mexique, Malaisie, Suède, Bélarus, Cameroun et Côte d'Ivoire.


Déclarations


Dans son discours d'ouverture, le Président de la cinquante-sixième session de la Commission des droits de l'homme, M. SHAMBHU RAM SIMKHADA, (Népal), a souligné que la Commission peut inscrire à son actif l'an dernier les deux Protocoles facultatifs sur l'utilisation des enfants dans les conflits armés et sur la vente d'enfants.  De même, les trois nouveaux mandats relatifs aux défenseurs des droits de l'homme, au droit à l'alimentation et au droit au logement constituent aussi un progrès marquant à porter au mérite de la dernière session.  Il a aussi attiré l'attention sur le défi supplémentaire qu'ont représenté la complexité et la gravité des événements dans les territoires palestiniens occupés qui ont donné lieu à la cinquième session extraordinaire de la Commission.


M. Simkhada a estimé que la crédibilité de la Commission dépendra à l'avenir de la manière dont elle saura répondre aux deux grands défis que représentent la pauvreté et la violence.  Dans cette optique, a souligné le Président sortant, une réflexion approfondie est essentielle pour reconnaître le rôle croissant des acteurs non-étatiques, qui correspond à l’une des évolutions les plus importantes dans les relations internationales d'aujourd'hui.  La Commission doit aussi s'occuper de tous les cas de violations graves et massives de droits de l'homme en tant que principal organe des Nations Unies pour la protection et la promotion des droits de l'homme.  Enfin, la Commission doit s'attacher à traiter à la fois des droits et des responsabilités, car la jouissance des droits implique la reconnaissance de la responsabilité et le respect des droits des autres.  M. Simkhada a souligné que la Commission doit mettre fin à ces pratiques qui consistent à critiquer les autres et a appelé de ses voeux des arrangements internationaux visant à surveiller et enquêter sur la situation des droits de l'homme dans le monde entier sur la base de normes internationales visant à encourager les États à se pencher sur leur propre situation des droits de l'homme.


MME MARY ROBINSON, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a souligné que, cette année, le thème dominant est sans conteste l'organisation de la Conférence mondiale contre le racisme.  La Conférence mondiale revêt une importance particulière pour la Commission parce qu'elle examinera des questions qui concernent des problèmes que nous devons combattre de toutes nos forces; parce que le racisme et la xénophobie font le terrain de la plupart des conflits mondiaux, que ces phénomènes constituent les principaux moteurs du cercle vicieux de la pauvreté et de l'exclusion sociale et que ces forces s'opposent directement au message fondamental des droits de l'homme, à savoir que chaque membre de la famille humaine jouit de droits égaux et inaliénables.  Mme Robinson a appelé chacun à ne pas perdre de vue les véritables objectifs de la Conférence mondiale.  À cet égard, elle s'est dit convaincue que l'on ne saurait prétendre parvenir à un programme d'action ambitieux à l'issue de cette Conférence sans regarder en face les profondes blessures du passé et sans prendre pleinement la mesure des problèmes actuels.


On constate chaque jour, les effets terribles du racisme et de la xénophobie, a poursuivi Mme Robinson.  Pour le seul dernier mois écoulé, des centaines de personnes ont été tuées à Bornéo, au Burundi et ailleurs dans le monde en raison de leur appartenance ethnique.  Un conflit ethnique est apparu dans l'ex-république yougoslave de Macédoine qui pourrait menacer une fois de plus la stabilité de la région, a souligné la Haut-Commissaire.  Les réfugiés et les requérants d'asile continuent d'arriver dans les pays riches où ils sont accueillis avec froideur voire, souvent, avec hostilité, a-t-elle ajouté.  Les formes insidieuses et subtiles de discrimination continuent de se manifester.  Combattre ces violations de droits de l'homme; oeuvrer à mettre un terme aux pratiques de trafic des êtres humains; respecter les droits des populations autochtones et des minorités, dans les faits comme dans les paroles; promouvoir l'éducation aux droits de l'homme: voilà les questions qui se trouvent au centre de la Conférence mondiale et auxquelles nous devons répondre ensemble, a déclaré Mme Robinson.


Mme Robinson a déclaré que lorsqu'elle avait entamé son mandat de Haut-Commissaire, elle était impressionnée par l'important fossé qui existait entre les hautes aspirations de la Déclaration universelle des droits de l'homme, des pactes et des principaux autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, d'une part, et la dure réalité à laquelle sont confrontés les gens dans leur vie quotidienne, de l'autre.  Aujourd'hui, cette première impression m'habite toujours, a-t-elle affirmé.  «Je reste donc convaincue que la mise en pratique des principes sur le terrain reste le principal défi que doit relever le mouvement des droits de l'homme», a-t-elle poursuivi. 


La capacité du Haut-Commissariat à gérer et à mener à bien des activités sur le terrain est en pleine évolution.  L'une des évolutions les plus récentes reste le soutien que le Haut-Commissariat apporte à des enquêtes sur les violations des droits de l'homme et à des commissions nationales de la vérité et de la réconciliation, comme en témoignent les exemples des activités qu'il a entreprises en rapport avec le Timor oriental, les Territoires palestiniens occupés et le Sierra Leone.


Mme Robinson a néanmoins fait part de son regret que la prévention ne soit pas encore vraiment enracinée dans les esprits ni dans les projets des gouvernements et de la communauté internationale.  À cet égard, il convient de rappeler que l'application de sanctions reste un élément essentiel en matière de prévention.  La manière dont un gouvernement répond aux allégations de violations massives témoigne de son engagement en faveur des droits de l'homme.  Partout où sont présentées des allégations d'exécutions extrajudiciaires, de torture et de détention arbitraire - que ce soit au Timor oriental, en ex-Yougoslavie ou en Afrique centrale - la réponse doit être convaincante.  C'est notamment la position qu'elle a adoptée face aux allégations de violations des droits de l'homme par le personnel de sécurité en Tchétchénie (Fédération de Russie), a indiqué Mme Robinson.  À cet égard, elle a déclaré que des informations récentes et troublantes ont renforcé sa conviction que les autorités russes devraient répondre à ces allégations de façon adéquate.


S'agissant de la prévention des conflits, Mme Robinson a insisté sur trois exemples de pays dans lesquels le Haut-Commissariat a été impliqué au cours de l'année écoulée.  Rappelant qu'elle s'était rendue au Moyen-Orient en novembre dernier en portant son attention sur la situation dans les territoires palestiniens occupés, elle a souligné que la Commission examinera très prochainement son rapport sur cette visite.  Malheureusement, les efforts de la communauté internationale n'ont pas permis de mettre un terme aux hostilités ni aux violations des droits de l'homme, a souligné la Haut-Commissaire.  En Colombie, la situation reste grave et ni le Haut-Commissariat ni la communauté internationale ne pourront remplacer la détermination de tous les acteurs internes à construire pacifiquement la vie du pays.  La Sierra Leone, quant à elle, continue d'être confrontée  à de graves problèmes causés par le conflit interne en cours.  La Commission de vérité et de réconciliation ainsi que la Commission nationale des droits de l'homme - qui devraient être mises sur pied dans les mois à venir - ont potentiellement le pouvoir de contribuer au rétablissement d'une culture de respect des droits de l'homme dans le pays, a estimé Mme Robinson.


Mme Robinson a enfin souligné que les six derniers mois de son mandat en tant que Haut-Commissaire seraient très exigeants et culmineront avec la Conférence mondiale contre le racisme qui se tiendra à Durban (Afrique du Sud) du 30 août au 7 septembre 2001.  «À la fin de cette Conférence, j'aurai achevé mon mandat de Haut-Commissaire et j'ai indiqué au Secrétaire général que je ne serai par candidate à un second mandat», a annoncé Mme Robinson.  «Je continuerai à oeuvrer de tout mon coeur en faveur des droits de l'homme de la façon que je connais le mieux : en tant que militante», a-t-elle ajouté.  «À ce stade, je pense pouvoir réaliser davantage en dehors des contraintes qu'impose inévitablement une organisation multilatérale».  Mme Robinson a conclu en affirmant que les Nations Unies constituent la plus importante organisation internationale du monde et qu'elle continuera à soutenir l'Organisation de toutes les manières qu'elle le pourra.


M. LEANDRO DESPOUY (Argentine), Président de la cinquante-septième session de la Commission des droits de l'homme, a affirmé sa volonté de conduire une gestion collective et transparente où les préoccupations des différentes régions seront prises en compte.  Il a en outre souligné que le Bureau de la Commission respectait la parité entre hommes et femmes et a souhaité que la dimension sexospécifique sera prise en compte dans tous les travaux de la Commission.


M. Despouy a par ailleurs rendu hommage au travail du Haut-Commissariat aux droits de l'homme sous la direction de Mme Robinson et insisté sur l'importance du soutien des États au Haut-Commissariat afin de l'aider à faire face à ses nombreuses tâches.  Évoquant la tenue prochaine de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et autres formes d'intolérance, il a rappelé que la Commission des droits de l'homme, qui tient lieu de Comité préparatoire, a la responsabilité d'avancer dans la préparation des documents finaux qui seront adoptés à Durban.


M. Despouy a exprimé son admiration pour le travail des organisations non gouvernementales et s'est félicité à cet égard de la décision de nommer un Représentant spécial pour les défenseurs des droits de l'homme.  Il s'est dit convaincu que ce mécanisme permettra de renforcer la protection des acteurs les plus exposés de la société civile.


Le nouveau Président de la Commission a évoqué les progrès importants accomplis, en particulier en matière normative, depuis l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme.  Il a estimé que les droits de l'homme ont incarné la révolution culturelle majeure du XXe siècle.  Il a toutefois insisté sur la nécessité d'une réelle harmonisation entre les différents organes et mécanismes du système.  Il a formé le voeu que le Groupe de travail chargé d'élaborer un projet de Protocole additionnel à Convention contre la torture pourra achever sa tâche en dépit des nombreuses difficultés rencontrées lors des dernières consultations.  Il a également appelé de ses voeux l'entrée en vigueur à brève échéance du Statut de Rome prévoyant la création d'une Cour pénale internationale pour juger les crimes de guerre, le génocide, les crimes contre l'humanité et l'agression, et souhaité que cet organe jouera un rôle décisif pour la prévention de ces crimes et la lutte contre l'impunité.


M. Despouy a souligné les paradoxes d'une époque où certains jouissent des avancées prodigieuses de la technologie, de la révolution informatique et des possibilités offertes par le développement spatial tandis que d'autres vivent dans la pauvreté, l'adversité et la marginalisation.  À cet égard, il a rappelé que les principales menaces sur les droits de l'homme ne viennent pas seulement de la pauvreté mais paradoxalement aussi du progrès scientifique et technologique qui posent de nouveaux défis dans la mesure où l'absence d'éthique peut conduire à une atteinte aux droits de l'homme.  Il a souhaité dans cette optique que la Commission contribue à promouvoir la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme.  Il s'est également inquiété des graves menaces que peuvent faire peser les nouvelles technologies, si elles sont livrées exclusivement aux règles du marché, en particulier sur l'environnement.


Le Président a ensuite rappelé qu'une des principales causes de la violence réside dans la détérioration des conditions socioéconomiques dans de nombreuses régions du monde.  Il a préconisé la création de nouveaux mécanismes et un renforcement de la diplomatie préventive.  Rappelant que les populations civiles représentent aujourd'hui 80% des victimes des conflits, il a souligné l'importance d'exiger le respect du droit international humanitaire et de prêter davantage d'attention aux causes comme aux nouvelles modalités des conflits armés actuels.  Il a en outre souhaité réaffirmer l'engagement collectif des États parties en faveur de la protection des réfugiés et s'est félicité du processus de consultation sur la protection internationale lancé par le Haut-Commissariat pour les réfugiés.


Rappelant l'importance de réaliser les droits de l'homme dans leur totalité, M. Despouy a souligné la dimension plurielle du droit au développement.  Il a également fait part de l'énorme importance que revêt pour sa région l'élaboration d'un projet de convention visant à prévenir et combattre la terrible pratique de disparition forcée ou involontaire de personnes.  Un tel texte aura certainement un impact préventif et contribuera à éradiquer une des pratiques répressives les plus perverses qui viole non seulement le droit à la vie mais laisse des séquelles douloureuses pour de nombreuses générations, a-t-il déclaré.


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