CONSEIL DE SECURITE : LA SOLUTION A LA CRISE HUMANITAIRE EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO EST LIEE A UN REGLEMENT POLITIQUE DU CONFLIT
Communiqué de Presse
CS/2072
CONSEIL DE SECURITE : LA SOLUTION A LA CRISE HUMANITAIRE EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO EST LIEE A UN REGLEMENT POLITIQUE DU CONFLIT
20001128Les personnes affectées par le conflit en République démocratique du Congo (RDC) représentent aujourd'hui 33% de la population. La guerre civile, déclenchée en août 1998 et exacerbée par les problèmes économiques et sociaux, a accentué la malnutrition chez les enfants et les adultes. La FAO estime à un million de tonnes le déficit alimentaire dans le pays. Telles sont, entre autres, les statistiques fournies cet après-midi, au Conseil de sécurité par la Coordonnatrice des secours d'urgence, Mme Carolyn McAskie. La fin du mandat de la Mission des Nations Unies en RDC (MONUC) approchant, le Conseil a décidé d'examiner la situation humanitaire dans le pays afin d'adapter au mieux le mandat de la Mission à tous les aspects de la situation sur le terrain. Qualifiant la situation de "la crise humanitaire la plus grave du moment", la Coordonnatrice des secours d'urgence a fait part des difficultés d'accès aux populations dans le besoin que rencontrent les institutions humanitaires aussi bien dans les régions contrôlées par le Gouvernement que dans les zones contrôlées par les factions rebelles.
Devant ces faits, des délégations ont appelé les belligérants à un respect strict "des principes d'engagement de l'action humanitaire" et ont reconnu la nécessité d'appuyer davantage les efforts sur le terrain des organisations humanitaires et de leur garantir toute la sécurité voulue. A cet égard, le représentant de la France a proposé le renforcement du volet civil de la MONUC qui pourrait ainsi rendre compte de la situation sur le terrain et assurer la liaison nécessaire avec la société civile. La Coordonnatrice des secours d'urgence a indiqué que l'appel consolidé interinstitutions pour la RDC s'articule autour d'une nouvelle stratégie axée sur la fourniture d'une aide d'urgence, le renforcement des stratégies de survie, la promotion de la libre circulation des personnes et des marchandises ainsi que sur l'appui aux communautés locales. La clef de l'action humanitaire sera l'"Intervention humanitaire d'urgence", mécanisme qui prévoit des fonds pour une fourniture rapide des secours d'urgence.
Devant les propos de la Coordonnatrice de secours d'urgence selon lesquels l'assistance humanitaire et le règlement politique sont deux éléments qui se renforcent mutuellement, des délégations ont mis en garde contre la tentation de considérer l'assistance humanitaire comme un élément de règlement durable de la crise. Ainsi la représentante des Etats-Unis a rejeté la responsabilité de la situation humanitaire en RDC sur les belligérants, à savoir les Gouvernements rwandais, ougandais et congolais ainsi que sur les factions rebelles. Des délégations ont donc estimé que la solution de la question humanitaire est liée au plein respect de l'Accord de cessez-le-feu de Lusaka et de la résolution 1304 du Conseil de sécurité.
(à suivre - 1a) - 1a - CS/2072 28 novembre 2000
Conformément à ces textes, ces délégations ont appelé au retrait des troupes étrangères, à la transformation des factions armées en partis politiques et à la mise en place d'institutions démocratiques en RDC. Elles se sont félicitées des initiatives régionales tendant à donner un nouvel élan à l'Accord de Lusaka et ont dit attendre beaucoup, dans ce contexte, d'une nouvelle convocation de toutes les parties concernées au Mozambique, réunion dite "Maputo II". Compte tenu de l'évolution sur le terrain, des délégations se sont montrées disposées à accepter une révision de l'Accord de Lusaka. La difficulté étant, a souligné le représentant des Pays-Bas, de parvenir à une révision acceptable pour tous.
Les Etats membres suivants du Conseil ont pris la parole : Bangladesh, Royaume-Uni, Canada, Argentine, France, Namibie, Etats-Unis, Chine, Fédération de Russie, Tunisie, Jamaïque, Malaisie, Mali et Pays-Bas. La Namibie a exercé son droit de réponse.
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LA SITUATION CONCERNANT LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
Déclarations
MME CAROLYN McASKIE, Coordonnatrice par intérim des secours d'urgence, Bureau du Coordonnateur des affaires humanitaires, a fait remarquer que la situation humanitaire en République démocratique du Congo (RDC), en particulier à Kisangani, s'est considérablement détériorée. Le système de santé s'est effondré et le nombre des personnes affectées par le conflit représente 33% de la population. La mortalité infantile en RDC est l'une des plus élevées au monde. Pour ce qui est des personnes déplacées, Mme McAskie a fait observer qu'elles constituent la cible d'attaques perpétrées par les groupes armés. Beaucoup de réfugiés trouvent refuge dans la forêt tropicale, en survivant grâce à des aliments crus.
On compte actuellement 300 000 réfugiés congolais dans les pays voisins. Au cours des trois derniers mois, on a noté un exode rapide de la province de l'Equateur vers la République du Congo où plus de 100 000 personnes ont fui les hostilités, et 10 000 personnes réfugiées en République centrafricaine. La situation économique de la RDC s'est effondrée, plongeant la majorité de la population dans une situation financière très grave. La guerre civile, exacerbée par les problèmes économiques et sociaux qui résultent de plusieurs décennies de mauvaise gestion du pays, a accru la malnutrition chez les enfants et les adultes. La FAO estime à un million de tonnes le déficit alimentaire dans le pays. Les institutions humanitaires sont de plus en plus confrontées à des obstacles dans l'accomplissement de leur mandat. La guerre a donné lieu à une nouvelle population de réfugiés et à une situation d'insécurité intenable qui empêche tout accès aux populations dans le besoin. Les problèmes d'accès existent aussi bien dans les régions contrôlées par le Gouvernement que dans celles tombées aux mains des entités rebelles - le Rassemblement pour la démocratie (RCD), le Mouvement pour la libération du Congo (MLC) et le Rassemblement pour la démocratie- Mouvement de libération (RCD-ML).
En dépit de ces difficultés, les Nations Unies continuent à déployer tous les efforts possibles pour faire face à la situation. Elles maintiennent une présence dans toutes les onze provinces de la RDC. Lors d'une mission interinstitutions récente effectuée à Kinshasa, il a été mis en exergue les accords en vigueur en matière de coordination humanitaire entre les Nations Unies, la MONUC et la communauté des secours d'urgence. Cette année, on note le succès d'une campagne en faveur de l'éradication de la polio sur l'ensemble du pays, qui a touché plus de 10 millions d'enfants de moins de cinq ans, ainsi que celui d'autres initiatives en matière d'éducation. Avec l'appui des autorités à tous les niveaux, les Nations Unies organisent actuellement un atelier de travail sur la santé et l'éducation à Kisangani, avec la participation de spécialistes provenant de toutes les régions du pays.
Ce matin, a indiqué Mme McAskie, le Secrétaire général a lancé un appel consolidé interinstitutions pour 2001, et demain, des lancements simultanés auront lieu dans les capitales des pays donateurs - à savoir Washington, Paris, Londres, Rome, Oslo et Bruxelles. L'appel aux contributions en faveur de la RDC s'articule autour d'une nouvelle stratégie humanitaire axée sur la fourniture immédiate d'une aide d'urgence, le renforcement des stratégies de survie, la promotion de la libre circulation des personnes et des marchandises et l'appui à la communauté.
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La clef d'une action humanitaire sera l'Intervention humanitaire d'urgence, mécanisme qui prévoit des fonds pour une action rapide des secours d'urgence aux situations qu'ont connu notamment Kisangani en juin dernier et plus récemment la province Equateur. Face à une situation humanitaire de plus en plus aiguë en RDC, les efforts des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires sont sapés par l'absence de sécurité, l'accès restreint aux populations affectées et les maigres ressources disponibles pour sauver des vies humaines. Sans un véritable engagement de toutes les parties concernées, l'accès aux institutions humanitaires sera impossible, a souligné Mme McAskie, priant instamment les membres du Conseil à exercer des pressions sur toutes les parties au conflit pour coopérer et faciliter cet accès.
Il est de la plus haute importance que toutes les parties au conflit respectent pleinement le droit humanitaire international et les droits de l'homme, ainsi que les principes d'engagement en faveur de l'assistance humanitaire en RDC pour garantir que les civils ne deviennent pas la cible d'actes de violence qui les forcent à fuir leurs foyers. En outre, la communauté internationale doit réaliser que les moyens dont dispose actuellement la communauté des secours d'urgence ne sont pas à la mesure de l'étendue de ce qui constitue certainement l'une des crises humanitaires les plus graves. Les institutions humanitaires opérant en RDC font appel à des ressources supplémentaires, notamment des moyens de transports aériens et de navigation sur les cours d'eau en vue de renforcer l'efficacité de l'action humanitaire face à cette crise.
Les bailleurs de fonds doivent reconnaître la symbiose étroite entre la paix et l'assistance humanitaire en RDC. L'appel aux contributions interinstitutions pour 2001 devrait permettre de renforcer les objectifs communs visant à sauver des vies humaines et à promouvoir la paix et la sécurité. A cette fin, la communauté internationale doit soutenir l'assistance humanitaire, indépendamment des progrès accomplis sur le plan politique. Ce sont des processus parallèles qui se renforcent mutuellement. Par ailleurs, il faudrait accorder une attention particulière à la sécurité du personnel humanitaire oeuvrant dans des zones extrêmement dangereuses en RDC. Pour la communauté humanitaire en RDC, l'année 2000 a été l'année qui a marqué le passage d'un rôle passif à une action plus dynamique pour s'attaquer aux conséquences dévastatrices de la guerre. En dépit de difficultés énormes, la communauté humanitaire a réalisé d'importants succès. Pour sa part, le Conseil de sécurité doit continuer à explorer des solutions durables pour répondre aux problèmes politiques et militaires, tout en tenant compte des efforts humanitaires, a estimé Mme McAskie.
M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh), se déclarant préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire en République démocratique du Congo (RDC), a lancé un appel aux parties pour qu'elles mettent immédiatement fin aux opérations militaires afin de faciliter l'assistance humanitaire. Il a appelé les membres des Nations Unies qui ont une influence sur les parties au conflit à obtenir un accès à l'assistance humanitaire. Le représentant a jugé regrettable que tous les acteurs du conflit continuent à justifier la guerre en soutenant qu'il n'existe guère d'alternative.
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Le fait de ne pas reconnaître le coût de la guerre se traduit par les violations incessantes du cessez-le-feu, a poursuivi le représentant en estimant que la solution à long terme de la situation humanitaire en RDC réside dans un règlement politique auquel l'assistance humanitaire ne saurait se substituer. Le représentant a souhaité que le Conseil prenne une décision sérieuse sur l'engagement des Nations Unies en RDC, en cette fin de mandat de la Mission des Nations Unies en RDC (MONUC), et a fait part de sa conviction que les Nations Unies doivent rester en RDC pendant que les efforts visant à créer les conditions favorables à un plein déploiement de la MONUC se poursuivent. Il ne faut pas ignorer la dimension régionale du conflit, a dit le représentant avant d'indiquer que son pays est disposé à envisager un Lusaka II, voire un Lusaka III. Les Nations Unies doivent appuyer tout effort visant à favoriser les perspectives de paix étant donné qu'un processus politique constitue le préalable essentiel à tout programme crédible de désarmement, de démobilisation et de réintégration. La paix en RDC réside dans la mise en oeuvre complète et rapide des résolutions du Conseil, a conclu le représentant.
M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni) a noté avec satisfaction qu'il existe une coordination très étroite entre le Bureau du Coordonnateur des affaires humanitaires et son personnel sur le terrain. Il a regretté que l'action humanitaire en République démocratique du Congo n'ait pas pu se dérouler dans des conditions normales. Les conclusions de la Réunion de Maputo-I montrent que le Gouvernement de Kinshasa est déterminé à oeuvrer en étroite coopération avec les Nations Unies pour faciliter l'accès de l'aide humanitaire aux réfugiés et personnes déplacées. Le représentant s'est félicité d'entendre un rapport détaillé sur la situation humanitaire en RDC, soulignant toutefois la nécessité de préciser la nature des obstacles auxquels le personnel humanitaire est confronté dans l'exercice de ses fonctions. Où sont les lacunes de la coordination de l'action humanitaire? On peut trouver des remèdes si l'on déploie des efforts bien ciblés, a estimé M. Greenstock. Il ne faut pas placer l'assistance humanitaire au niveau de l'aide alimentaire, mais faire également des efforts dans les domaines de la santé et de l'éducation.
M. PAUL HEINBECKER (Canada) a estimé que le principal obstacle à l'accès de l'aide humanitaire aux populations qui ont besoin d'aide de toute urgence est la non-application de l'Accord de Lusaka par les parties et le manque d'empressement de celles-ci à coopérer avec l'ONU. Le représentant a condamné les violations du cessez-le-feu et appelé toutes les parties à cesser immédiatement les opérations militaires en RDC. Le représentant a encouragé les institutions des Nations Unies et les organisations humanitaires à travailler étroitement à l'élaboration d'une stratégie d'action humanitaire. Le Canada, a dit le représentant, condamne toutes les violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international perpétrées par le Gouvernement congolais et les rebelles. Les responsables doivent être traduits en justice, a souligné le représentant qui a ajouté qu'il ne peut y avoir de paix dans une culture de l'impunité. Le représentant a attiré l'attention du Conseil sur les informations selon lesquelles certaines ONG estimeraient qu'un déploiement important de la MONUC risquerait d'entraver encore davantage l'accès humanitaire en incitant les forces hostiles à s'opposer à toute présence internationale. Il a demandé au Bureau de la coordination des affaires humanitaires de partager son évaluation de la question.
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M. LUIS ENRIQUE CAPPAGLI (Argentine) a estimé que la situation humanitaire en RDC est étroitement liée à la situation en matière de sécurité dans le pays. La guerre qui déchire la RDC - riche en ressources naturelles - a réduit le pays à la 150e place dans le monde. Les parties concernées doivent assumer leurs obligations pour faciliter l'accès des institutions humanitaires aux réfugiés et personnes déplacées. Des crimes contre l'humanité ont été commis en particulier dans la partie Est du pays. Il faut tout faire pour que les responsables de ces atrocités soient poursuivis et traduits en justice. La sécurité pour les pays de la région - notamment le Rwanda et l'Ouganda - et le retrait des troupes étrangères doivent être impérativement assurés. La MONUC doit continuer de jouer pleinement son rôle. L'Argentine souligne la nécessité d'adopter une démarche régionale intégrée pour régler le problème humanitaire en RDC.
M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a rappelé que le Conseil aura, dans les prochains jours, à prendre des décisions sur l'action des Nations Unies en RDC en soulignant la nécessité pour le Conseil de se prononcer en ayant examiné tous les aspects du dossier, ceux concernant la situation humanitaire étant essentiels. Il faut également garder à l'esprit, a dit le représentant, les informations recueillies par le Rapporteur spécial sur les violations des droits de l'homme en RDC. Il a rappelé que le Rapporteur spécial avait souligné que le droit à la vie était largement bafoué dans la partie orientale du pays. Le représentant a appelé l'attention du Conseil sur les informations transmises par les ONG dont le rapport de l'ONG américaine International Rescue Committee qui a estimé que le conflit a provoqué une surmortalité dans la seule partie orientale de la RDC. Il ne s'agit pas de se livrer à une querelle de chiffres, a concédé le représentant, mais de retenir l'essentiel. Les victimes du conflit se comptent en centaines de milliers et les décès proviennent de menaces contre les civils et de l'interruption des soins causée par l'instabilité ou l'absence d'accès aux populations, a insisté le représentant. Le Conseil doit être conscient que la crise est de nature politique et militaire qui trouve ses causes dans le drame qu'a connu la région au cours de la dernière décennie, dont la crise d'août 1998, a ajouté le représentant avant de plaider pour que les Congolais aient l'aide qu'ils méritent.
Le représentant s'est félicité de l'action des organisations des Nations Unies, du CICR et des autres ONG et a fait état des efforts en la matière de l'Union européenne. M. Levitte a jugé important de contribuer au règlement politique de ce conflit. Il s'agit de la responsabilité du Conseil. Dans les prochains jours, le Conseil devra décider de l'appui que la MONUC doit apporter au processus de paix, a rappelé le représentant en estimant qu'il faudra poursuivre tous les efforts. La MONUC, a-t-il dit, doit garder les moyens de jouer son rôle et il faut examiner la possibilité pour la MONUC de jouer un rôle d'évaluation de la situation humanitaire et de contribution aux efforts d'aide. A cet égard, le représentant a plaidé pour le renforcement du volet civil de la Mission. La composante civile peut jouer un rôle utile pour rendre compte de la situation et assurer une liaison avec la société civile. Naturellement les conditions de déploiement du personnel civil devront être examinées avec soin, a convenu le représentant en demandant le point de vue du Bureau de la coordination des affaires humanitaires sur la question.
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M. MARTIN ANDJABA (Namibie) a souligné qu'il incombe à tous d'assurer que les civils congolais vivent dans la dignité, comme tout autre pays dans le monde. Sa délégation se dit particulièrement préoccupée par le sort de la population civile dans l'Est du pays. Le rapport, présenté récemment par le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en RDC - M. Garreton - dresse un bilan tragique de la situation humanitaire, en particulier dans la partie Est de la RDC. M. Garreton avait souligné que dans cette région, il n'existe aucun droit à la vie. Les violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international, en particulier le fait de cibler délibérément les civils, surtout dans l'Est du pays, doivent prendre fin. Le Conseil de sécurité doit faire davantage pour mettre fin à l'impunité en RDC et en particulier dans l'Est du pays. La guerre en RDC a des conséquences dévastatrices au-delà des frontières du pays. Outre le fait qu'elles sont blessées, tuées ou mutilées, les femmes subissent toutes les formes d'atrocités en tant de guerre. A cet égard, M. Andjaba a souligné la complémentarité des actions du Conseil de sécurité et des institutions humanitaires. De l'avis de la délégation namibienne, la présence de la MONUC constituera un facteur de dissuasion et contribuera à l'amélioration de la situation humanitaire en RDC.
Mme NANCY SODENBERG (Etats-Unis) a rejeté la responsabilité de la situation humanitaire qui prévaut aujourd'hui en RDC sur les gouvernements du Rwanda, de l'Ouganda et de la RDC ainsi que sur les diverses factions rebelles armées congolaises et étrangères qui opèrent dans la région. La communauté internationale est déterminée à réaliser la paix en RDC. La représentante a estimé que le retrait des forces étrangères de la RDC contribuerait largement à l'amélioration de la situation humanitaire et des droits de l'homme de la RDC. Elle s'est également dite convaincue que les gouvernements doivent être tenus responsables de la manière dont ils traitent leurs populations. Jusqu'ici les Gouvernements de la RDC, du Rwanda et de l'Ouganda n'ont pas montré la volonté politique nécessaire, la communauté internationale n'a pas apporté les ressources demandées et le non-respect des accords de paix a retardé le temps de la reconstruction. La conjugaison meurtrière de trois facteurs a plongé la RDC dans sa situation actuelle, a ajouté la représentante en citant l'agression étrangère, la rébellion armée et l'existence d'un gouvernement irresponsable.
La représentante a lancé un appel aux Présidents de l'Ouganda et de la RDC ainsi qu'au Mouvement pour la libération du Congo (MLC) d'oeuvrer à un cessez-le- feu viable qui devra inclure la réouverture du fleuve Congo au trafic civil. Cet appel fait partie d'un appel global visant à faciliter les opérations humanitaires, a dit la représentante. Elle a estimé que personne ne peut compenser le manque de volonté politique. Il ne faut pas considérer l'assistance humanitaire comme un élément de règlement politique durable. Le peuple congolais sera en mesure de prendre en main son destin que lorsque les troupes étrangères se seront pas retirées, les groupes armés se seront transformées en partis politiques et que lorsqu'un gouvernement responsable se sera mis en place.
M. CHEN XU (Chine) a rappelé que de nombreux réfugiés de la République démocratique du Congo se trouvent actuellement à l'étranger, après avoir fui les hostilités dans le pays. La crise humanitaire s'est considérablement aggravée à la suite de ces hostilités. De nombreux sommets ont été tenus dans l'espoir d'aboutir à un règlement du conflit, mais en vain.
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Les Nations Unies, et en particulier la MONUC, devront amener les parties au conflit à la paix. La délégation chinoise, tout en appuyant le rôle crucial des institutions humanitaires, a souligné la nécessité de leur garantir la sécurité et un libre accès aux camps de réfugiés et de personnes déplacées.
M. ANDREI BRANOVSKI (Fédération de Russie) a déclaré que l'élimination à long terme de la crise humanitaire en RDC passe nécessairement par le règlement politique du conflit. Il a estimé que l'adoption de la résolution 1304 a permis au Conseil d'envoyer aux parties au conflit le message qu'il convenait et a jugé qu'étant donné le caractère impératif du règlement politique en RDC, il faut assurer un respect des résolutions du Conseil et de l'Accord de Lusaka. Il faut s'abstenir de décisions hâtives, a dit le représentant avant de souligner l'importance d'engager une réflexion sur la mise en place de la deuxième étape de l'opération de maintien de la paix des Nations Unies en RDC.
M. MOHAMED SALAH TEKAYA (Tunisie) a exprimé ses remerciements à Mme McAskie pour l'exposé détaillé de la situation humanitaire tragique en RDC. Les conséquences de cette crise sont dévastatrices pour l'ensemble du pays. Deux millions de réfugiés et de personnes déplacées sont la conséquence tragique de cette crise humanitaire. Les pénuries alimentaires sont extrêmement graves. Les Nations Unies et les institutions humanitaires jouent un rôle crucial pour répondre aux besoins urgents de la population civile en RDC. La présente réunion du Conseil de sécurité coïncide avec le lancement ce matin d'un appel consolidé interinstitutions en faveur de l'action humanitaire pour 2001. De l'avis de sa délégation, tant que le processus de paix ne connaîtra pas de nouvelles avancées, cette crise humanitaire ne pourra pas être résolue. Le déploiement complet de la MONUC n'a pas encore été effectué et les troupes étrangères n'ont toujours pas été retirées de la RDC. Aujourd'hui, l'Accord de Lusaka exige un nouvel élan. Soulignant le lien étroit entre la situation dans l'ensemble de la région des Grands Lacs et la situation humanitaire en RDC, le représentant a préconisé une stratégie intégrée pour y faire face.
M. CURTIS WARD (Jamaïque) s'est déclaré préoccupé par la gravité de la situation humanitaire en RDC. Il s'est dit encouragé par les promesses du Président congolais de faciliter l'accès à l'assistance humanitaire. Il a souhaité que les autres parties au conflit accordent la liberté de circulation aux organisations concernées. Après avoir souligné le caractère tragique de la situation en citant des exemples, le représentant a souhaité qu'il soit mis fin à la culture de l'impunité. Il s'est félicité du travail des institutions des Nations Unis sur le terrain et des différents mécanismes mis en place. Le représentant a appelé la communauté internationale à répondre généreusement aux appels consolidés des organismes des Nations Unies pour l'année 2001. Malgré le succès des institutions humanitaires, il ne faudrait pas perdre de vue que seul un règlement politique du conflit permettra de mettre fin à la situation que le pays connaît aujourd'hui. Il s'est dit déçu par le non-respect de l'Accord de cessez- le-feu de Lusaka en se déclarant néanmoins encouragé par la volonté politique de certains gouvernements de la région. Le représentant a dit qu'il fondait beaucoup d'espoir à la veille d'une prochaine réunion des protagonistes, en espérant que le processus de paix prendra enfin la bonne direction. Les responsables de cette situation seront jugés par l'Histoire et à par leurs compatriotes, a conclu le représentant en plaidant une dernière fois pour l'accès des organisations humanitaires aux populations dans le besoin.
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M. MOHAMMAD KAMAL (Malaisie) s'est déclaré attristé par l'aggravation de la situation humanitaire en RDC. Le conflit en RDC a eu des conséquences dévastatrices sur l'ensemble du pays, interrompant l'exportation de ses richesses et détériorant considérablement l'environnement. Il est donc impératif que les parties concernées respectent l'accord de cessez-le-feu. Les parties concernées doivent notamment garantir la sécurité du personnel humanitaire et lui permettre de s'acquitter de son mandat en lui facilitant l'accès de l'assistance humanitaire aux populations. Consciente des difficultés auxquelles la communauté internationale est confrontée en RDC, la délégation malaisienne estime qu'il faut poursuivre l'effort visant à rétablir la paix, la stabilité et l'intégrité du pays. Le déploiement en temps opportun de la MONUC doit contribuer au règlement du conflit. La Malaisie rend un vibrant hommage à toutes les institutions humanitaires pour le rôle exemplaire qu'elles jouent face à cette crise.
M. SEKOU KASSE (Mali) a estimé que le retour à la paix et à la stabilité régionales nécessite le rétablissement du respect des principes fondamentaux réaffirmés par les signataires de l'Accord de cessez-le-feu dont le principe est celui de l'unité et de l'intégrité territoriale du Congo et de l'inviolabilité de ses frontières. Parallèlement, les voisins du Congo ont également le droit de vivre en sécurité à l'intérieur de frontières sûres sans actions déstabilisatrices menées à partir du territoire congolais. L'autre facteur essentiel de stabilisation du Congo est celui de la réconciliation nationale, a dit le représentant avant de citer le facteur de la situation humanitaire. Il a jugé inadmissible que l'intensité des combats empêchent les organismes humanitaires d'avoir accès à de nombreuses régions, en particulier dans la partie orientale du Congo. Insistant sur l'importance de la question humanitaire, notamment pour le succès d'un accord de paix, le représentant a rappelé aux signataires de l'Accord de Lusaka que cet instrument dispose de clauses permettant la protection des populations civiles et des droits humains de même que l'acheminement de l'aide humanitaire. On retrouve des dispositions similaires dans les résolutions du Conseil de sécurité, a ajouté le représentant en soulignant que la gravité de la situation en RDC et ses conséquences humanitaires imposent plus que jamais que tout soit mis en oeuvre pour relancer le processus de paix. Il s'est dit convaincu qu'une coordination des activités des Nations Unies adossée sur une MONUC pleinement déployée permettra d'améliorer l'efficacité de l'aide humanitaire dont la RDC a cruellement besoin aujourd'hui.
M. PETER VAN WALSUM (Pays-Bas) a noté avec inquiétude que le rapport présenté par Mme McAskie décrit une situation humanitaire tragique en République démocratique du Congo. La pétition adressée par le syndicat du personnel humanitaire des Nations Unies et par la Fédération mondiale des fonctionnaires internationaux souligne la nécessité de garantir la sécurité du personnel humanitaire dans le cadre de l'exercice de ses fonctions. Le représentant, tout en réaffirmant que chaque délégation a un droit absolu de faire des ajustements, a souligné que si l'Accord de Lusaka avait fait la distinction entre les parties invitées et les parties non invitées, il n'aurait jamais été conclu. Les délégations qui insistent à faire ces ajustements doivent être pleinement conscientes de ce qu'elles font. Si l'on doit actualiser l'Accord de Lusaka, cette possibilité doit être offerte à toutes les parties signataires.
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Répondant aux observations formulées par les délégations, MME MCASKIE s'est félicitée de l'intérêt croissant que les pays donateurs ont manifesté à Genève. Elle s'est dite convaincue qu'il est possible d'oeuvrer en harmonie pour répondre plus efficacement aux crises humanitaires. Le Ministre de l'intérieur de la RDC a assuré les institutions humanitaires que l'accès aux personnes dans le besoin leur sera facilité, a-t-elle indiqué. Les groupes rebelles accueillent favorablement l'assistance humanitaire mais aucun d'entre eux ne peut garantir la sécurité du personnel humanitaire. Ce sont les mouvements de rebelles qui empêchent la navigation sur les cours d'eau. Des efforts sont déployés par les institutions humanitaires pour trouver une solution à ce problème. Les Nations Unies organisent actuellement un atelier de travail sur les problèmes de santé et d'éducation. La MONUC pourrait être déployée pleinement pour garantir la sécurité d'accès de l'assistance humanitaire. A Kisangani, la MONUC a fourni le transport à l'aide humanitaire, mais les ressources sont faibles. La plus grande difficulté à laquelle l'action humanitaire est confrontée est liée à la sécurité au Kivu. Dans la situation actuelle en RDC, la communauté humanitaire a besoin de l'appui de la MONUC. Une récente visite interinstitutions en RDC a recommandé de renforcer la coopération entre la composante civile de la MONUC et les institutions humanitaires. La Coordonnatrice a indiqué que le Bureau pour la coordination des affaires humanitaires exige entre 12 et 13 millions de dollars pour garantir la sécurité du personnel humanitaire pour l'ensemble des opérations.
Droit de réponse
Le représentant de la Namibie a souligné que quelle que soit l'utilité de la présente réunion du Conseil de sécurité, on doit faire une distinction entre les troupes invitées et celles qui ne le sont pas lorsque l'on invoque l'Accord de Lusaka. Son pays - la Namibie - a été invité à intervenir en RDC et à participer à l'Accord de Lusaka et ne peut donc être placé au même rang que le Rwanda et l'Ouganda, dont les troupes occupent une partie du territoire de la RDC. Il y a eu agression contre la RDC que l'on ne peut nier. Il est donc incompréhensible d'entendre que l'on défende les agresseurs au détriment de la victime.
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