En cours au Siège de l'ONU

AG/SHC/492

L'INTOLERANCE RELIGIEUSE, LE DROIT AU DEVELOPPEMENT AU CENTRE DES TRAVAUX DE LA COMMISSION

25 octobre 2000


Communiqué de Presse
AG/SHC/492


L’INTOLERANCE RELIGIEUSE, LE DROIT AU DEVELOPPEMENT AU CENTRE DES TRAVAUX DE LA COMMISSION

20001025

Trois rapports ont été présentés ce matin devant la Troisième Commission, dans le cadre de l'examen des questions relatives aux droits de l'homme.

M. Abdelfattah Amor, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme a présenté son rapport sur l’intolérance religieuse, concluant qu'il y a, parmi ses priorités, le besoin urgent d'une stratégie de prévention de ces phénomènes. Le Rapporteur spécial a notamment tiré les conclusions sur la situation en Turquie et au Bangladesh, à la suite des visites qu'il a effectuées dans ces pays. Ouvrant le dialogue qui a suivi, le Représentant de la Turquie a fait part d’”incohérences” qu'il a décelées dans le rapport de M. Amor, notamment au sujet du principe de laïcité. Il a insisté sur le fait que la République de Turquie aspire à construire un Etat inspiré des principes d’Ataturk. En outre, la Turquie n’a pas besoin du Traité de Lausanne pour sauvegarder les droits de ses populations, leur traitement n’a jamais dépendu de l’état des relations de la Turquie avec un Etat voisin. De son côté, le Représentant du Bangladesh a affirmé que dans son pays les droits et les libertés de tous les citoyens sont protégés sans discrimination en veillant à ce que l'harmonie intercommunautaire ne soit troublée par personne.

Répondant à divers commentaires, le Rapporteur spécial, a souligné que les incidents religieux sur lesquels il travaille concernent tous les groupes persécutés.

L'Expert indépendant sur le droit au développement, M. Arjun Sengupta, présentant à son tour son rapport, a affirmé que la coopération internationale est indispensable. De leur côté, les pays en développement doivent assumer des obligations en ce qui concerne la mise en oeuvre des droits de l'homme. Il a ajouté qu’aucun Etat ne dispose de toutes les options et ne peut se suffire à lui-même en matière de développement. M. Sengupta a expliqué que pour assurer la réalisation du droit au développement, il faut tenir compte des particularités de chaque pays. L’Expert a ensuite défini le concept de "pactes pour le développement", une approche globale comprenant les pays en développement, les institutions financières internationales et les donateurs, et qui stipule que chaque pays doit pouvoir assurer la croissance dans l’équité et faire de cette politique une priorité absolue.

M. Leonardo Franco, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Soudan, a lui aussi présenté son rapport dont l'examen sera poursuivi cet après-midi. Le représentant du Soudan a fait une déclaration.

En début de séance, les Etats-Unis, au nom des coauteurs ont présenté un projet de résolution sur la lutte contre l'exploitation des technologies de l'information à des fins criminelles.

Les représentants des pays suivants ont participé aux dialogues qui ont suivi les présentations des rapports: Arménie, Bangladesh, Chine, Cuba, Egypte, France au nom de l'Union européenne, Iran, Iraq, Jamahiriya arabe libyenne, Koweït, Nigéria, Pakistan, Tunisie et Viet Nam.

La Troisième Commission poursuivra ses travaux cet après-midi à partir de 15 heures.

PREVENTION DU CRIME ET JUSTICE PENALE

Présentation d’un projet de résolution

Par un projet de résolution intitulé «Lutte contre l’exploitation des technologies de l’information à des fins criminelles» (A/C.3/55/L.8/Rev.1) présenté par les Etats-Unis, au nom des coauteurs, l’Assemblée générale, considérant que les Etats et le secteur privé doivent coopérer pour lutter contre cette exploitation, prendrait note de la validité, entre autres mesures, des mesures ci-après pour lutter contre cette exploitation: les Etats devraient faire en sorte que leurs lois et leur pratique ne permettent pas que ceux qui exploitent les technologies de l’information à des fins criminelles puissent compter sur l’impunité; la coopération des services de répression au niveau international devrait être coordonnée entre tous les Etats concernés et le personnel chargé de la répression devrait être formé et équipé, ces systèmes juridiques devraient protéger contre toute altération non autorisée la confidentialité et l’intégrité des données et des réseaux informatiques ainsi que la possibilité d’y accéder et réprimer toute infraction grave; le public devrait être sensibilisé à la nécessité de prévenir et de combattre cette exploitation; la lutte contre l’exploitation des technologies de l’information à des fins criminelles appelle des solutions qui tiennent compte à la fois de la nécessité de protéger les libertés individuelles et la vie privée et de préserver la capacité des pouvoirs publics de lutter contre cette exploitation à des fins criminelles.

SITUATION RELATIVE AUX DROITS DE L’HOMME ET RAPPORTS DES RAPPORTEURS ET REPRESENTANTS SPECIAUX

Rapport intérimaire sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance religieuse Rapport (A/55/280 et Add 1, Add 2))

Le Rapporteur spécial, M. Abdelfattah Amor, a été chargé par la Commission des droits de l'homme d'examiner les incidents et les mesures gouvernementales dans toutes les parties du monde, incompatibles avec les dispositions de la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, et de recommander les mesures à prendre pour remédier aux situations ainsi créées.

Le Rapporteur spécial estime qu'à nouveau, le constat de la situation de la tolérance et de la non-discrimination fondées sur la religion ou la conviction dans le monde est alarmant. L'évolution du monde vers une plus grande ouverture s'accompagne parallèlement par le maintien ou le développement de l'extrémisme ainsi que de politiques ou de pratiques affectant la société et ses différentes composantes dont les minorités et la femme.

Il établit dans ce rapport le bilan des 39 communications qu'il a transmises à 25 Etats: Afghanistan (2), Arabie saoudite, Azerbaïdjan, Bulgarie, Chine (3), Égypte (3), Fédération de Russie, Géorgie (2), Inde (2), Indonésie (4), Iran (République islamique d'), Israël, Jordanie (2), Kazakhstan, Koweït, Liban, Myanmar, Nigéria (2), Ouganda, Pakistan, Philippines, Sri Lanka, Turkménistan (2), Turquie (2) et Yémen. Le rapport porte également sur les réponses des Etats aux communications, d'une part, celles transmises dans le cadre du précédent rapport,

soumis à la Commission des droits de l'homme à sa cinquante-sixième session (9 Etats: Azerbaïdjan, Brunéi Darussalam, Chine, Fédération de Russie, Inde, Indonésie, Iran (République islamique d'), Ukraine et Viet Nam); et, d'autre part, celles adressées dans le cadre des allégations du présent rapport (10 Etats: Arabie saoudite, Azerbaïdjan, Égypte, Fédération de Russie, Géorgie, Inde, Iran (République islamique d'), Koweït, Sri Lanka et Turquie).

L'étude des aspects juridiques et factuels des discriminations religieuses aggravées par les discriminations raciales a conduit le Rapporteur spécial à noter, entre autres conclusions, qu'aucun des instruments internationaux étudiés ne prévoit de dispositions particulières sous la forme d'un régime juridique propre ou d'un traitement spécial aux discriminations aggravées, en particulier lorsqu'elles touchent les minorités. Toutefois, l'examen des diverses dispositions amène à constater l'existence d'un corps de règles suffisamment anciennes et d'un fond de principes communs à toutes les nations et à toutes les composantes étatiques de la société internationale favorables à l'idée d'une prise en compte conceptuelle d'un droit à la non-discrimination aggravée. En outre, l'étude factuelle montre que la rencontre des discriminations raciales et religieuses constitue un phénomène courant et particulièrement grave aux conséquences souvent très dramatiques. Les instruments étudiés ne semblent pas au fait de la réalité. En tout cas, ils ne semblent pas tirer toutes les conséquences de la prise en compte, en leur sein, de l'interconnexion entre le racial et le religieux.

Il a dès lors recommandé un renforcement de la protection contre les discriminations aggravées, ainsi que l'amélioration de la protection juridique et spécialement pénale, notamment par la création d'une autorité indépendante d'égalité des chances et de contrôle de la discrimination raciale et religieuse.

Le Rapporteur spécial évoque également la Conférence internationale consultative sur l'éducation scolaire en relation avec la liberté de religion et de conviction, la tolérance et la non-discrimination qui sera organisée, dans le cadre du mandat sur l'intolérance religieuse, à Madrid, du 23 au 25 novembre 2001, avec la coopération du Gouvernement espagnol. Le but de la Conférence sera d'élaborer une stratégie internationale scolaire axée sur le droit à la liberté de religion et de conviction parmi les élèves de l'enseignement primaire ou élémentaire, et secondaire. Elle est appelée à examiner un projet de document définissant un ensemble de recommandations devant éclairer l'établissement des programmes et manuels scolaires en ce qui concerne l'éducation à la tolérance et la non-discrimination en matière de religion et de conviction.

Concernant l'extrémisme religieux, le Rapporteur spécial réitère ses recommandations, d'une part, de définition et d'adoption par la communauté internationale d'un minimum de règles et de principes communs de conduite et de comportement à l'égard de ce phénomène.

Sur le phénomène global de l'intolérance et de la non-discrimination fondées sur la religion ou la conviction, il souhaite mettre l'accent sur l'urgence de la prévention.

L’additif 1 porte sur la situation en Turquie. Il a été établi après la visite effectuée dans ce pays du 30 novembre au 9 décembre 1999 par M. Amor, à sa demande et sur invitation du Gouvernement turc.

Dans ses conclusions et recommandations, le Rapporteur spécial note avec satisfaction que la législation et spécialement la législation constitutionnelle garantit, de manière absolue, la liberté de religion et de conviction, et protège ses manifestations (à savoir en particulier la liberté de culte) tout en prévoyant certaines limitations (art. 14). Il relève cependant que certaines de ces limitations constitutionnelles comportent des expressions vagues susceptibles de permettre des interprétations très larges et donc potentiellement des pouvoirs d'intervention étendues de l'Etat et conséquemment des restrictions exorbitantes à la liberté de religion et de conviction. M. Amor recommande la formulation d'une terminologie précise, et des interprétations y compris des dispositions constitutionnelles, conformes aux normes internationales des droits de l'homme, à la jurisprudence et aux commentaires généraux du Comité des droits de l'homme des Nations Unies.

Selon le Rapporteur spécial, en dépit de l'affirmation du caractère laïque de l'État, l'approche particulière de l'islam en Turquie, apporte, d'une certaine manière, un statut sinon quasi officiel, du moins une place suffisamment affirmée à l'islam hanéfite. La laïcité, fondement de l'État turc, apparaît également en retrait par rapport à la question de la mention possible de la religion sur la carte d'identité ainsi que des cours de religion et d'éthique obligatoires. A ce sujet, le Rapporteur spécial recommande de se conformer à la jurisprudence européenne et attend les résultats des préparations annoncées par le Ministère des affaires étrangères en vue de la suppression de cette mention.

Le Rapporteur spécial note que la Constitution turque érige également le nationalisme d'Ataturk, en tant que fondement de l'Etat, et dans les faits, comme une idéologie officielle, voire même une nouvelle religion protégée en tant que vérité absolue. On constate des violations à l'encontre des communautés musulmanes et non musulmanes minoritaires, principalement en raison d'une interprétation et d'une application étroites du principe de nationalisme, à savoir, sous forme de turquisation, qui n'est pas susceptible de tolérer, en toutes circonstances, le droit à la tolérance et à la non-discrimination. Le Rapporteur spécial recommande que soit clairement établi par les autorités le principe selon lequel le nationalisme ne saurait être instrumentalisé à l'encontre des communautés religieuses minoritaires.

Concernant la majorité, tout en comprenant les préoccupations légitimes des autorités face à l'extrémisme religieux qui ne doit pas être toléré parce qu'intolérable en ce qu'il ne laisse pas de place aux droits de l'homme et étouffe toute diversité et tout pluralisme, le Rapporteur spécial estime que le rôle actif exercé par l'Etat en matière de religion constitue une ingérence excessive non seulement dans les manifestations de la croyance mais également contre la liberté de religion et de conviction même.

En général, et donc également pour l'ensemble des communautés religieuses en Turquie, le Rapporteur spécial recommande notamment de veiller à la non- instrumentalisation politique de l'islam afin que celui-ci ne soit pas l'objet de surenchère susceptible de favoriser l'extrémisme religieux; et qu’une vaste campagne d'éducation et de sensibilisation de la société et de ses différentes composantes aux valeurs et principes de tolérance et de non-discrimination à l'égard des communautés religieuses minoritaires, ainsi que contre tout fanatisme religieux tant à travers les médias, les institutions scolaires (programmes et manuels scolaires) et les débats politiques.

Ce rapport contient, en annexe, le texte adopté à l’issue de la Réunion des religions à l'ère de la croyance et de la tolérance (Tarsus, 10 et 11 mai 2000).

L’additif 2 porte sur la situation au Bangladesh. Il a été établi après la visite effectuée par M. Amor dans ce pays du 15 au 24 mai 2000, à sa demande et sur invitation du Gouvernement du Bangladesh.

Dans ses conclusions et recommandations, le Rapporteur spécial estime que les dispositions constitutionnelles garantissent la liberté de religion et de conviction et leurs manifestations, que la Constitution garantit le principe de non-discrimination notamment eu égard à la religion et au sexe et que l’Etat est, en général, respectueux de la liberté de religion ou de conviction et de leurs manifestations conformément aux normes internationales des droits de l’homme en ce domaine. L’Etat, en général, n’interfère pas dans les affaires religieuses stricto sensu des communautés religieuses et aucune communauté religieuse ne fait l’objet d’une interdiction de la part des autorités.

Cependant, le Rapporteur regrette la persistance d’un certain nombre de formes d’intolérance religieuse. Ainsi, il apparaît que la situation des communautés religieuses et ethniques n’est pas sans problèmes, certains des plus graves et, conscient du contexte économique et social du Bangladesh propre à tout pays en développement, le Rapporteur a conclu que le facteur déterminant et commun aux problèmes mentionnés est l’exploitation de la religion par la politique. Le rapport souligne que le retour du Jamat-e-Islami, parti religieux très souvent qualifié d’extrémiste, ainsi que sa réintégration et sa légalisation ont consacré la politisation du religieux, ceci au détriment de l’Etat, de la société et donc des communautés religieuses et ethniques. Il s’inquiète par exemple de ce que le parti à présent au pouvoir, pourtant attaché à la laïcité, ait utilisé, lors de la dernière campagne électorale, les symboles religieux tels que le Coran et le voile.

Il souligne également que l’Etat apparaît plus sensible aux intérêts des musulmans, ce qui se traduit pour les minorités et groupes ethniques non musulmans notamment par des obstacles pour l’accès à la fonction publique et surtout à des postes de responsabilité, par un effort financier moins soutenu pour les institutions religieuses de ces communautés et pour l’enseignement de leur religion au sein des établissements publics. L’Etat est, d’une certaine façon, neutralisé ou du moins affaibli dans sa lutte contre l’extrémisme religieux, ceci au détriment à la fois des musulmans, des minorités, et de la femme.

L’Etat semble également bloqué dans toutes initiatives dites impopulaires mais nécessaires au regard des droits de l’homme telles la remise en cause de la Vested Property Act, l’adoption de législations en faveur de la femme notamment la réforme des lois de statut personnel et l’abolition de la polygamie ainsi que des mesures d’application – y compris par le biais de sanctions – des législations sur l’enregistrement des mariages et divorces et sur l’âge minimum du mariage. En conclusion, le Rapporteur spécial recommande à l’Etat de mettre en œuvre une politique de prévention et en particulier de poursuivre ses efforts dans le domaine de l’éducation et de l’étendre à l’élaboration d’une véritable culture des droits de l’homme. Le Rapporteur spécial recommande également à l’Etat d’être plus sensible aux revendications légitimes des minorités et des communautés ethniques.

Présentation

M. ABDELFATTAH AMOR, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur l’élimination de toutes les formes d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, a rappelé que tous les Etats, sans exception, connaissent des cas et ou des situations de discrimination et d’intolérance dans le domaine de la religion ou de la conviction. M. Amor a signalé un extrémisme en constante croissance, de nature complexe (religieuse, politique, ethnique) aux objectifs divers (strictement politique et/ou religieux) mais dont les victimes principales sont toujours les mêmes, à savoir la société ainsi que les groupes vulnérables que constituent les femmes et les minorités. Il a également regretté le maintien, en général, de politiques, de législations et de pratiques affectant la liberté de religion et de conviction. M. Amor a mentionné la persistance, en particulier, de discriminations et d’actes d’intolérance imputés à la religion et affectant la femme, la poursuite de politiques et de législations à l’encontre des minorités ainsi que des problèmes d’intolérance relevant de la société. Enfin, le Rapporteur spécial a déclaré que, s’agissant de la question de la diffamation des religions, il y a lieu de dire que si la lutte contre les stéréotypes négatifs affectant les religions demeure nécessaire, force est également de souligner qu’il est primordial que cette lutte contre la diffamation et le blasphème ne soit pas détourné à des fins de censure du droit à la critique et au débat relativement à la religion ou de propagation de l’obscurantisme.

Parmi ses priorités, M. Amor a tenu à rappeler le besoin urgent d’une stratégie de prévention de l’intolérance et de la discrimination. Outre l’éducation, il a estimé essentiel le rôle du dialogue inter-religieux dans la prévention des conflits et des violations dans le domaine de la religion et de la conviction. La lutte contre le fléau de l’intolérance et de la discrimination dont l’extrémisme constitue une des manifestations les plus visibles suppose donc une réaction de la communauté internationale mais aussi une véritable politique de prévention, a-t-il conclu.

Dialogue

Le représentant de l’Arménie a particulièrement regretté que le Gouvernement turc considère l’Eglise apostolique arménienne comme une institution turque et intervienne dans l’élection du patriarche, privant par ailleurs le patriarcat de ses prérogatives.

Le représentant de la Turquie a fait part d’”incohérences” décelées dans le rapport de M. Abdelfattah sur sa visite en Turquie, notamment au sujet du principe de laïcité. Dans le rapport, la laïcité semble être dirigée contre la tolérance religieuse, a-t-il noté, alors que la nature même de l’Etat a pour but de protéger toutes les confessions. Il a insisté sur le fait que la République de Turquie aspire à construire un Etat inspiré des principes d’Ataturk. En outre, la Turquie n’a pas besoin du Traité de Lausanne pour sauvegarder les droits de ses populations, leur traitement n’a jamais été dépendu de l’état des relations de la Turquie avec un Etat voisin. A cet égard, il a souligné que le Patriarcat est considéré comme une institution turque qui est à ce titre sauvegardée par la Turquie.

Répondant à ces commentaires, M. ABDELFATTAH AMOR a fait valoir les analyses qui ont été faites, y compris en Turquie, sur la laïcité et la mise en œuvre de la pensée de Kamal Atatruk, grand réformateur dont la pensée a dépassé les frontières de la Turquie. M. Amor a également souligné qu’il a toujours respecté l’ensemble de ses interlocuteurs mais n’a pas l’intention de faire la moindre concession en ce qui concerne son mandat.

Le représentant du Bangladesh a regretté de n’avoir pas reçu le rapport de M. Amor dans sa version anglaise, ce qui en a ralenti l’étude. Il a souligné l’harmonie sociale et religieuse sur laquelle s’appuie son gouvernement. Les droits et les libertés de tous les citoyens sont protégés sans discrimination en veillant à ce que l’harmonie intercommunautaire ne soit troublée par personne, a- t-il insisté. En ce qui concerne la situation religieuse des communautés ethniques des Chittagong Hill Tracts, le représentant a déclaré que cette question n’était pas liée à la religion et ne relève donc peut-être pas du mandat du Rapporteur spécial. Cependant, si c’est le cas, le Bangladesh accordera la plus grande attention aux observations du Rapporteur spécial. Il a ajouté que l’accord de paix des Chittagong Hill Tracts a permis de mettre un terme aux troubles dans la région et que le Gouvernement est fermement décidé à le mettre en œuvre. Il s’est dit fier de l’harmonie inter-religieuse et intercommunautaire qui existe au Bangladesh, pays majoritairement musulman mais ouvert aux autres religions à tous les niveaux de l’Etat.

M. Amor a répondu à ce représentant que son rapport a été transmis à l’édition dans sa version originale française dès le mois de juillet, ainsi qu’à la Mission du Bangladesh à Genève. Il est inadmissible que nos travaux soient handicapés par des questions matérielles ou des problèmes de traduction, a-t-il reconnu. Le Rapporteur spécial a estimé que le problème de Chittagong était un problème ethnique mais dont la dimension et les manifestations religieuses sont aussi incontestables et incontestées par de nombreux interlocuteurs. M. Amor a été d’avis que l’Accord de paix a créé une situation nouvelle susceptible d’amener la paix, le jour où il sera appliqué pleinement. Il a noté la présence, au Bangladesh, de groupes qui tentent de fonctionnaliser l’islam, d’utiliser Dieu dans leurs luttes partisanes entre hommes.

En réponse à une question posée par le représentant de la France au nom de l’Union Européenne, M. Amor a déclaré que, presque partout, la condition de la femme appelle à de plus nombreuses initiatives et améliorations. Très souvent, la religion est mobilisée pour justifier certaines traditions qui se maintiennent au dépend des droits de la femme. Le Rapporteur spécial a noté l’existence de “discriminations simples” ainsi que de “discriminations aggravées”. Ces discriminations aggravées ne sont pas une accumulation mais la rencontre de plusieurs discriminations, telles que l’analphabétisme et certaines perceptions religieuses et sociales qui créent une discrimination aggravée, d’une nature différente. En ce qui concerne la discrimination religieuse, elle est partout, à des degrés différents. Si elle a peut-être toujours existé, on s’en aperçoit un peu plus aujourd’hui et cette situation de persécutions devient intolérable.

Au cours du dialogue, la représentante de la Jamahiriya arabe libyenne, à l’instar du représentant des Emirats arabes unis, a estimé que le rapport établi par M. Amor ne mentionne pas suffisamment le rôle joué par les médias occidentaux dans la description négative des musulmans. Elle a déclaré que toutes les religions appellent à l’égalité et à la justice entre les hommes et que si des individus interprètent leur message autrement, cela n’implique pas que la religion

concernée doive être rejetée. La représentante a rappelé que l’Organisation de la Conférence islamique a soumis à la Commission des droits de l’homme un projet sur la diffamation des religions, en particulier celle de l’islam et a demandé au Rapporteur spécial d’accorder son attention à cette question.

Répondant à ces commentaires, M. Amor a rappelé que les questions relatives au traitement que réserve une certaine presse à l’Islam figurent largement dans ses différents rapports précédents. Le Rapporteur spécial a reconnu que certains médias offrent une représentation de l’Islam non seulement négative mais très souvent franchement agressive, par laquelle, d’un trait de plume, l’islam est réduit à l’obscurantisme et les musulmans à des fanatiques. Toutefois, a-t-il ajouté, ce n’est pas toute la presse qui traite ainsi l’Islam mais “une certaine presse populaire”. M. Amor a jugé regrettable que cela aboutisse à créer une représentation négative de l’autre. Il a estimé qu’une telle attitude revient à se nier soi-même car «l’autre participe de nous ». M. Amor a également précisé que ses précédents rapports, en insistant sur la situation des groupes minoritaires et notamment des musulmans, ont alimenté le débat qui a abouti à la première résolution de la Commission des droits de l’homme sur la diffamation des religions. Le Rapporteur spécial a cependant mis en garde contre l’utilisation de la lutte contre la diffamation comme un prétexte pour limiter les libertés et réfuter les droits élémentaires de chaque être humain à la liberté d’analyse, de recherche, d’opinion et d’expression sur toutes les religions, y compris l’Islam.

Pour sa part, le représentant de l’Iraq a regretté que le Rapporteur spécial n’ait pas mentionné la violation flagrante de la mosquée d’Al-Charif par un dirigeant juif. Cette sélectivité et cette application du principe de deux poids deux mesures sape la crédibilité du Rapporteur spécial, a-t-il regretté.

“Il n’est pas dans mes habitudes de favoriser une quelconque polémique” a répondu le Rapporteur spécial. Il a ajouté que les incidents religieux sur lesquels il travaille concernent tous les groupes persécutés, toutes les minorités persécutées en violation du droit international. S’agissant des derniers évènements qui y ont eu lieu, on ne peut pas demander à ce qu’une réaction soit immédiatement présentée alors qu’aucune allégation n’a encore été transmise au Rapporteur spécial. En outre, la Commission des droits de l’homme n’a pas encore fait part de ses observations objectives sur la question, a souligné M. Amor. Répondant une intervention du représentant de la Tunisie, il a souligné que les lieux de culte ne doivent pas laisser place à l’action politique, et que la liberté de culte doit être absolue. En réponse au représentant de l’Egypte, le Rapporteur spécial est revenu sur le rôle primordial de l’éducation. L’intolérance est en train de se développer et, en tant que Rapporteur spécial, je suis appelé à intervenir après coup, a-t-il ainsi expliqué. Cependant, il a ajouté que le rôle de «pompier» est absolument nécessaire mais aussi absolument insuffisant. M. Amor a préconisé s’attaquer aux racines du mal par des mesures d’éducation dès les niveaux primaire et secondaire. Examinez ce qui est enseigné dans la plupart des pays aux enfants de 6 à 12 ans, et vous constaterez que dans la plupart des manuels, autrui reste celui qui doit être ramené à la vérité, à ma vérité, a-t-il conclu.

Les représentants du Koweït, de la Chine et du Nigéria ont également apporté des précisions sur les faits concernant leurs pays et relatés dans le rapport de M. Amor.

Rapport de l’Expert indépendant sur le droit au développement Rapport (A/55/306)

Le rapport vise notamment à décrire l’état d’avancement de la mise en œuvre du droit au développement et à énoncer des principes directeurs pour la réalisation progressive de ce droit, selon les principes proposés dans le rapport précédent (1999), en vue de la réalisation du droit à l’alimentation, du droit à l’éducation primaire et du droit aux soins de santé primaires. Dans ses conclusions, l’expert, M. Arjun Sengupta, affirme que le droit au développement est, en somme, le droit à un processus particulier de développement qui favorise la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels, des droits civils et politiques et de toutes les libertés fondamentales en élargissant les capacités et les choix offerts à l’individu. La réalisation de ces droits doit être fondée sur un programme de mesures coordonnées sous forme d’un plan de développement qui tende à la croissance du PIB et des autres ressources, ainsi qu’à une amélioration durable des indicateurs sociaux relatifs aux différents droits. Tous les scénarios individuels et interdépendants doivent être conçus et exécutés selon l’approche axée sur les droits, qui se fonde sur la responsabilisation et la participation à la prise et à l’exécution des décisions, dans la transparence et la responsabilité, ainsi que sur l’équité et la non-discrimination dans la jouissance des retombées. Un tel plan n’aurait strictement rien à voir avec les anciennes formes de planification centralisée et serait entièrement basé sur une prise de décisions décentralisée, prévoyant la participation et la responsabilisation des bénéficiaires. Ce plan doit être formulé au moyen d’un processus de consultations avec la société civile et les bénéficiaires, d’une façon non discriminatoire et transparente.

Dans la phase initiale, un tel plan de développement peut se concentrer sur un programme bien conçu et bien ciblé d’élimination de la pauvreté dans ses aspects généraux. Pour faciliter la réalisation progressive du processus, l’expert indépendant a proposé de s’attaquer tout d’abord à la réalisation de trois droits: le droit à l’alimentation, le droit aux soins de santé primaires et le droit à l’éducation primaire. L’expert indépendant propose de mettre en œuvre ce programme au moyen d’un pacte pour le développement conclu entre les pays intéressés et les représentants de la Communauté internationale, les principaux donateurs et les institutions financières internationales. Le pays intéressé devra appliquer le pacte dans la perspective des droits. Les représentants de la communauté internationale, qui pourront souhaiter créer un groupe de soutien, accepteront l’obligation réciproque de fournir tout l’appui nécessaire à la mise en œuvre du programme, qui consistera notamment à en partager le coût si le pays en développement concerné honore ses obligations.

Il est impératif que toute conditionnalité ou obligation incombant aux pays en développement soit considérée par eux comme répondant à leur propre intérêt et soit contrôlée essentiellement par eux.

Le Groupe de travail sur le droit au développement a fait notamment les recommandations suivantes à l’intention des pays en développement qui adoptent un programme axé sur les droits: les Etats devraient être encouragés à étudier la possibilité (si leur système juridique le leur permet) les réformes législatives et constitutionnelles nécessaires pour assurer que le droit des traités l’emporte sur leur droit interne et que les dispositions conventionnelles soient directement applicables dans leur cadre juridique interne; ils devraient prendre des mesures

pour veiller à ce que les groupes les plus pauvres et les plus vulnérables, y compris les agriculteurs sans terre, les populations autochtones et les chômeurs, aient accès à des moyens de production tels que la terre et le crédit, ou aient la possibilité d’exercer un travail indépendant; dans les zones où des conflits de tous types se sont produits ou se produisent, ils devraient veiller à ce que la population locale puisse conserver ses droits à la propriété ainsi que tous les autres droits légalement acquis. Les gouvernements doivent introduire toutes les modifications juridiques nécessaires pour veiller à assurer l’égalité des sexes dans l’emploi, l’éducation, les soins de santé et les autres activités.

Dans un pacte pour le développement, les pays en développement devront assumer des obligations en ce qui concerne la mise en œuvre et la protection des droits de l’homme. L’obligation de la communauté internationale devrait aussi être énoncée dans le cadre du pacte pour le développement. Si un pays en développement honore ses obligations, les pays donateurs et les institutions internationales doivent faire en sorte que toutes les politiques discriminatoires et tous les obstacles entravant l’accès au commerce et aux ressources financières soient éliminés et que le coût supplémentaire de la réalisation de ces droits soit partagé comme il convient. La part exacte de chacun peut être décidée au cas par cas ou conformément à un accord international, qui peut par exemple consister à partager également le coût supplémentaire entre les représentants de la communauté internationale et le pays concerné. Selon l’expert, ce qu’il faut, c’est que tous les pays qui ont reconnu que le droit au développement est un droit de l’homme fassent preuve de volonté politique et se montrent déterminés à mettre en œuvre le droit au développement à échéance fixe, en se donnant l’obligation de prendre des mesures au plan national et de coopérer au plan international.

Présentation

L’Expert indépendant, M. Arjun Sengupta, a déclaré que le droit au développement est reconnu comme un droit de l’homme. Il a ajouté qu’il existe aujourd’hui un consensus absolu à cet égard et que les différentes résolutions de l’ONU reconnaissent que le droit au développement a un caractère prioritaire dans toute politique gouvernementale. Toutes les nations doivent coopérer à ces efforts, a-t-il indiqué. M. Sengupta a rappelé que le droit au développement va au-delà des droits individuels. Il repose également sur une nouvelle conception du développement fondée sur l’équité et la justice, deux facteurs fondamentaux qui sont au cœur des droits de l’homme, aussi bien dans les pays développés que dans la relation de ceux-ci avec l’économie mondiale.

L’Expert indépendant a affirmé que la coopération internationale devient indispensable pour ce qui est du respect des droits de l’homme, dont la responsabilité incombe en premier chef aux Etats. Aucun Etat ne dispose de toutes les options et ne peut se suffire à lui-même en matière de développement. Il s’agit, a-t-il dit, de s’occuper entre autres des pays les plus pauvres, des pays endettés, de l’accès au marché, des échanges technologies, de la réforme du système financier international, dans une démarche qui comprend tous les éléments et tous les acteurs de la coopération.

M. Sengupta a expliqué que pour assurer la réalisation du droit au développement, il faut tenir compte des particularités de chaque pays. L’Expert a ensuite défini le concept de pactes pour le développement, une approche globale comprenant les pays en développement, les institutions financières internationales et les donateurs, et qui stipule que chaque pays doit pouvoir assurer la croissance dans l’équité et faire de cette politique une priorité absolue. Il a expliqué que les “pactes de développement” seraient spécifiques à chaque pays, qu’ils seraient mis en route par étapes, à la lueur des priorités nationales, et avec l’assistance de la communauté internationale. Dans cette démarche, il a proposé de commencer à lutter contre la pauvreté, le pire ennemi du droit au développement. M. Sengupta a précisé qu’il y a deux manières de définir la pauvreté: la pauvreté en termes de revenu et la pauvreté en termes de privation des capacités fondamentales. Se refusant à relancer le débat sur la nature des droits de l’homme, M. Sengupta a affirmé que le nouvel ordre économique international se fonde dorénavant sur les droits de l’homme. Il faut donc assurer l’égalité aussi bien à l’intérieur des pays qu’entre les nations, a-t-il estimé.

Dialogue

Répondant à une question du représentant du Pakistan sur le droit au développement, l’Expert indépendant s’est dit d’accord avec ce dernier sur la nécessité d’une coopération internationale fondée sur la solidarité. Il a cependant estimé que le fait de relancer la problématique nord-sud n’a plus de validité, comme ce fut le cas dans les années 70.

Répondant au représentant de Cuba, qui avait demandé à l’Expert indépendant de définir les voies concrètes pouvant mener au “pacte de développement”, d’expliquer l’incidence de l’aide internationale sur le droit au développement et de déterminer les mesures qui transformeraient en obligation les engagements des pays riches vis-à-vis des pays moins nantis, M. Sengupta a tout d’abord souligné la prévalence d’un nouvel ordre économique international. Il a ajouté que toute mesure visant à assurer le droit au développement vise également à réduire l’écart entre les riches et les pauvres. Pour parvenir concrètement au “pacte de développement”, à cette solidarité, l’Expert a expliqué qu’il faut que les Etats assument leurs obligations en ce qui concerne la mise en œuvre et la protection des droits de l’homme. Il s’agit, a-t-il ajouté, du processus même du développement, dans un premier temps. En second lieu, quand on examine le droit au développement dans le contexte international, il faut souligner l’importance de la coopération internationale. A cet égard, M. Sengupta a ajouté qu’il est essentiel que les Etats s’acquittent de leurs tâches, ce qu’ils ne peuvent d’ailleurs pas faire isolément.

Tout doit être examiné en vue de réduire les disparités entre les pays développés et les pays en développement. Le troisième aspect de cette question concerne chaque pays, ses particularités et problèmes propres. L’Expert a indiqué que chaque Etat doit être traité par un pacte spécifique de développement, et il a indiqué, à l’adresse du représentant de la France, qui au nom de l’Union européenne, avait évoqué cet aspect de la question, que toutes les organisations internationales, y compris la Banque mondiale, doivent être impliquées.

Répondant au représentant de l’Iraq, qui avait demandé à l’Expert pourquoi il n’avait pas inclus dans son rapport les sanctions dans la liste des obstacles majeurs à la réalisation du droit au développement, M. Sengupta a affirmé que l’embargo, effectivement, a des incidences sur le développement, mais que le concept de “pacte de développement” qu’il propose vise précisément à résoudre ce type de problème dans le cadre d’un nouvel ordre économique.

Au représentant du Viet Nam qui avait demandé que M. Sengupta revienne sur la relation entre les mesures unilatérales prises sur le plan national telle que l’établissement de commissions nationales des droits de l’homme et le droit au développement, l’Expert indépendant a répondu qu’il faut voir cette question dans un cadre d’obligations réciproques. Au lieu d’être accusés régulièrement de violer tel ou tel droit, les pays en développement prendraient eux-mêmes l’initiative de mettre sur pied des mécanismes nationaux neutres qui s’acquitteraient de cette tâche à l’échelle nationale. C’est dans cette perspective qu’il a évoqué la nécessité pour les Etats d’établir des commissions nationales des droits de l’homme qui ne doivent pas être perçues. M. Sengupta a souligné qu’il est temps d'oublier la rhétorique de l'affrontement, ajoutant qu’il est possible pour la communauté internationale de définir une nouvelle voie.

Répondant à une question du représentant de l’Iran, M. Sengupta a affirmé que la formulation d’un nouveau cadre de coopération internationale est nécessaire et qu’il doit comprendre deux aspects fondamentaux: assurer le développement sur la base de l’équité et réduire les inégalités tout en respectant les obligations souscrites.

Documentation

La commission est aussi saisie dans le cadre du droit au développement des deux rapports suivants:

Rapport du Secrétaire général sur le droit au développement Rapport (A/55/283)

L’Assemblée générale, à sa cinquante quatrième session, a prié le Secrétaire général de lui soumettre cette année un rapport complet sur le droit au développement, y compris les obstacles identifiés qui entravent l’exercice de ce droit. Le Haut Commissaire aux droits de l’homme a envoyé en mai une note verbale aux Etats et aux organisations internationales compétentes demandant les informations nécessaires. Au 24 juillet 2000, des réponses avaient été reçues des pays suivants: Cuba, Iran, Liban, Portugal ainsi que du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Ces réponses sont présentées dans le rapport.

Rapport de la Haut Commissaire aux droits de l’homme sur le droit au développement Rapport (A/55/302)

Le Haut Commissariat favorise l’application du droit au développement par un vaste éventail d’activités. En plus d’encourager activement le développement de la perspective des droits de l’homme en s’appuyant sur les travaux du Groupe des Nations Unies pour le développement, le Haut Commissariat apporte également un soutien à la Commission des droits de l’homme dans le cadre de ses mandats concernant la dette extérieure, les programmes d’ajustement structurel et l’éducation qu’il considère comme indispensables à la réalisation du droit au développement.

A la vingt-quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale à Genève sur le développement social, le Haut Commissariat a notamment souligné qu’il importait d’accepter explicitement le droit au développement. Le Haut Commissariat a fourni un rapport technique et fonctionnel à l’expert indépendant sur le droit au développement et continue d’apporter, sur demande, une aide au niveau administratif et dans le domaine de la recherche. Entre autres activités, le Haut Commissariat a également apporté un soutien à la Présidence du Groupe de travail à composition non limitée sur le droit au développement. En décembre 1999, le Haut Commissariat a pris part à un séminaire régional africain sur le droit au développement organisé par le gouvernement camerounais à Yaoundé. Par ailleurs, il a lui-même organisé à Sanaa, de concert avec le Gouvernement yéménite, un atelier intersessions sur les droits économiques, sociaux et culturels et le droit au développement dans la région de l’Asie et du Pacifique.

Le Haut Commissariat a continué de fournir une coopération technique aux Etats Membres cherchant à renforcer leurs capacités en matière des droits de l’homme dans le cadre des stratégies de développement nationales, ainsi que divers services des organes conventionnels. Le Haut Commissariat a défini des éléments pour une approche du développement fondée sur les droits de l’homme. Le rapport rappelle que dans sa résolution 54/175, l’Assemblée générale a souligné qu’il importait, pour promouvoir une croissance soutenue et permettre à tous les peuples de profiter également du développement, d’améliorer la gouvernance.

L’Assemblée générale a aussi réaffirmé que la démocratie, le développement et le respect de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales, notamment le droit au développement, étaient interdépendants et se renforçaient mutuellement et a affirmé dans ce contexte que la pauvreté généralisée faisait obstacle à l’exercice intégral et effectif de tous les droits de l’homme. Il est enfin souligné l’importance de la coordination des activités menées par les organismes compétents des Nations Unies dans le cadre de leurs mandats respectifs en application des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale et de la Commission des droits de l’homme.

Rapport sur la situation des droits de l'homme au Soudan Rapport établi par le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme Rapport (A/55/374)

Dans ce rapport en date du 11 septembre 2000, le Rapporteur spécial, M. Leonardo Franco se félicite de l'excellente coopération dont il a bénéficié de la part du Gouvernement soudanais tout au long de la visite.

Dans ses conclusions et recommandations M. Franco regrette que les hostilités se soient nettement intensifiées au cours de ces derniers mois, durant lesquels les deux parties ont commis un nombre sans précédent de violations du cessez-le-feu, au point que les engagements unilatéraux d'observer un cessez-le- feu n'ont pas été renouvelés une fois arrivés à expiration le 15 juillet 2000. Le Rapporteur spécial estime à cet égard que, tandis que le Gouvernement et l'Armée populaire de libération du Soudan (ALPS) se rejettent la faute, c'est la population civile, en particulier les femmes et les enfants, qui subit les conséquences de cette longue guerre qui entre à présent dans sa dix-huitième année. La récente intensification des hostilités a coûté très cher en vies humaines et causé des souffrances considérables, accroissant encore le nombre

de cas de déplacement forcé, compromettant gravement l'acheminement de l'aide humanitaire et hypothéquant sérieusement les perspectives de paix. Il regrette en outre que le gouvernement ait poursuivi sa politique systématique de bombardement de populations et d'installations civiles, causant notamment la mort de 14 enfants à Kaouda. Toutefois, le Rapporteur spécial se félicite de ce que, dans sa réponse à la note du secrétariat (E/CN.4/2000/36), le Gouvernement soudanais, soucieux de respecter les normes du droit international humanitaire concernant la protection des populations civiles, ait indiqué que la consigne permanente donnée à l'aviation militaire était de renoncer à tout bombardement lorsqu'il apparaissait clairement que les zones visées étaient des installations civiles ou abritaient des populations civiles. Mais M. Franco estime cependant que cette explication ne cadre pas avec le nombre et la fréquence des attaques aériennes contre des cibles civiles et humanitaires. Il semble au contraire qu'il s'agisse d'une politique systématique, et le Rapporteur spécial en conclut que le gouvernement commet de graves atteintes au droit international humanitaire. En même temps, le Rapporteur spécial tient à souligner que le Mouvement populaire de libération du Soudan/l'Armée populaire de libération du Soudan (MPLS/APLS) est responsable d'actions militaires menées en violation du cessez-le-feu, telles que la prise de Gogrial et l'intensification des activités militaires, principalement à Bahr el Ghazal.

Vivement préoccupé par le fait que les deux parties persistent à manquer à leurs engagements et à faire fi des principes relatifs aux droits de l'homme et au droit humanitaire, le Rapporteur spécial est fermement convaincu de la nécessité de promouvoir la mise en place de nouveaux mécanismes de suivi dans le cadre du processus de rétablissement de la paix. À cet égard, il souscrit pleinement aux recommandations formulées dans la déclaration, datée du 19 juillet 2000, des coprésidents du Forum des partenaires de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), invitant instamment le Gouvernement soudanais et le MPLS/APLS à reconduire leur cessez-le-feu à compter du 15 juillet, appelant une nouvelle fois à un cessez-le-feu général soumis à un contrôle effectif et exhortant les parties et le mécanisme de médiation à oeuvrer à cette fin en vue de parvenir à une solution négociée du conflit.

Le Rapporteur spécial attire particulièrement l’attention sur le sort des personnes déplacées à l'intérieur du pays, dont le nombre a encore augmenté par suite de la récente intensification du conflit, notamment à Bahr el Ghazal, dans le Haut Nil, à Kassala et dans l'Equatoria Est. Il déplore le fait que, malgré l'existence de conditions politiques plus favorables, des cas d'exécution arbitraire, de torture, de détention arbitraire, d'atteinte à la liberté de la presse et d'autres violations des droits fondamentaux de l'individu continuent d'être portés à son attention. Il est donc très préoccupé de constater qu'aucune mesure officielle n'a été prise pour faire la lumière sur ces abus et les sanctionner.

Le Rapporteur spécial invite le gouvernement à envisager d'élever l'âge minimum de responsabilité pénale. Pour ce qui est de l'évolution récente des dispositions législatives, le Rapporteur spécial, en dépit des éclaircissements apportés par le gouvernement, demeure préoccupé par la nouvelle loi sur les forces de sécurité nationale, étant donné que c'est souvent durant les premiers temps de la détention que les personnes sont victimes d'abus.

En outre, le Rapporteur spécial suit avec un intérêt particulier l'évolution politique qui témoigne d'un dynamisme nouveau dans les relations entre le gouvernement et l'opposition politique, en particulier dans le nord du Soudan. Il est fermement convaincu que, pour prendre une portée réelle, cette évolution doit être perçue non pas de manière isolée mais compte tenu de l'étroite interaction entre la paix, la démocratie et les droits de l'homme. Il craint de ce fait que les prochaines élections, à moins qu'elles ne découlent d'un processus solide de négociations globales menées à l'échelle de l'ensemble du système dans le respect véritable des droits de toutes les parties et forces politiques concernées, ne soient qu'un exercice de pure forme.

Présentation

M. LEONARDO FRANCO, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur la situation du Soudan, a annoncé que sa prochaine visite au Soudan se déroulerait en janvier 2001. Le Rapporteur spécial s’est concentré sur l’impact des conflits armés sur la situation des droits de l’homme. La guerre civile, qui entre dans sa 18ème année est un lourd fardeau pour la population civile, en particulier les femmes et les enfants, qui ont souffert de pratiques inacceptables de la part des deux parties au conflit. Malheureusement, on n’observe aucune perspective de paix à court terme. Il est regrettable que la dernière série de négociations n’ait pas permis aux parties de se mettre d’accord sur des questions aussi fondamentales que l’Etat et la religion, a-t-il déclaré. Le Rapporteur spécial a espéré que son rapport aurait un impact sur le processus de paix, avec le soutien continu de la communauté internationale.

Déclaration

M. ELFATIH ERWA (Soudan) a réaffirmé la volonté de son Gouvernement de coopérer pleinement avec les mécanismes relatifs aux droits de l’homme afin de promouvoir les droits dans son pays. Il a signalé à cet égard qu’un expert international a été nommé pour conseiller le Gouvernement soudanais en matière du renforcement de la capacité nationale en matière de promotion des droits de l’homme. Le représentant a attiré l’attention sur le fait que plus de sept mois se sont écoulés depuis la visite de M. Franco et qu’une évolution rapide a eu lieu sur le plan social et politique, rendant obsolètes les observations contenues dans le rapport. Il a critiqué la présence, dans le rapport sur la situation au Soudan, d’informations émanant notamment de “rapports” dont on ne connaît pas la source. Cela amène à conclure qu’elles proviennent de groupes d’individus entrés de manière illicite sur le territoire soudanais pour y mener des activités avec des groupes rebelles, a-t-il estimé.

Le gouvernement est satisfait de constater que le Rapporteur spécial se réjouit de la création du Comité pour l’élimination des rapts de femmes et d’enfants (CERFE). Il se réjouit de la condamnation par le Rapporteur spécial des violations de la part de l’Armée de libération du Soudan. Le représentant a également souligné que l’état d’urgence sera suspendu lorsque les élections auront lieu le mois prochain et qu’aucune mesure d’urgence n’a été prise depuis sa promulgation, il y a dix mois. Il a souligné que les rebelles continuent d’utiliser des installations civiles à des fins militaires. Il a affirmé que son gouvernement ne prend pas les civils pour cible, ajoutant que cependant, même avec des instruments extrêmement sophistiqués il peut se produire des erreurs.

Il a insisté sur la volonté du Gouvernement d’éviter que ce type d’erreurs se reproduisent.

En outre, le représentant a déclaré que le Soudan ne détient pas un seul détenu politique ou prisonnier politique, et qu’aucun parti politique n’y est interdit. En ce qui concerne le traitement des civils dans les zones de prospection pétrolière, le représentant a expliqué que toute tentative mal intentionnée visant à lier l’industrie pétrolière du Soudan à l’effort de guerre relève de la propagande. Toutes les recettes générées par le pétrole sont allouées au développement, a-t-il déclaré.

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